voir l'art autrement – en relation avec les textes

Benjamin Fondane – Villes


peinture: Wayne Thiebaud            Sunset Street        1985 ( MoMa)

 

Villes

 

Le silence coula sur mes mains

c’était un orage de sable

la ville était pleine de sable

où donc étaient-ils les humains

j’avais beau courir dans le vide

suivi lentement de mes pas, le vide était plus plein

qu’une poitrine gonflée qui fait sauter les pressions,

le vide était si plein, j’avais si peur qu’il n’éclatât

que soudain j’ai pensé qu’il me fallait crier

ressusciter la vie

souhaiter le sifflet des bateaux, des sirènes d’usine

la rumeur des meetings, des fleuves de glace qui cassent

sous la poussée du printemps, les vitrines brisées des grèves générales, le bruit

strident des rémouleurs aiguisant les ciseaux, les couteaux, la criée des poissons dans les halles, les plaintes des marchands d’habits,

des rempailleurs de chaises, des pianos mécaniques et des musiques perforées.

Je vous appelais du fond terreux de mon angoisse

sonorités des étameurs, des camelots, ô chansons nasillardes

des marchandes de quatre-saisons qui font au printemps maladif

l’opération césarienne  -Et peu à peu je vis céder mon insomnie

mes oreilles bourdonnaient, une sorte d’âcre paix, une paix nauséeuse,

pénétra dans mon sang avec une vieille odeur de draps

et mon sommeil ouvert comme une bouche d’égout

buvait les cantiques pieux des machines à coudre,

le ronflement régulier des tuyaux de vidanges, le souffle léger de la vie qui monte et qui grince, ô poulie !

Le bruit de plus en plus fatigué de la vie.

 

 

je m'exprime:haut et foooort

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