Te souviens tu des hauts plateaux, où le vent ne trouve aucun obstacle pour balayer le ciel ? Il peut se poser sur le lit de basalte du pays d’Aubrac sans faire de bruit.
Peu d’arbres, et des herbes, comme une mer moutonnante sous le ruban d’azur. De temps en temps, un ruisseau cherche à s’évader mais ses méandres se perdent dans les joncs, et les lacs sombres où le bleu sans reflet s’ égare dans l’ absence .
C’est ici que passent les heures, dans le paysage parsemé de maisons basses : burons arc-boutés sous les nuages, — que ta joie demeure !
RC – janv 23 – par rapport à un écrit de Jacques Viallebesset
Le poids de ma tête est trop lourd pour que je reste debout, à la surface du monde. Je le creuse avec les dents, la face contre terre, et il m’arrive de trouver, quand je dévisse un membre, mon double, sculpté dans le bois, par ces racines revêches, qui ont fini par absorber mon sang.
C’est ainsi que ma vue s’est brouillée, sans doute à cause de la poussière, qui, elle aussi encombre mon esprit. Je ne pense qu’aux temps, où, trop léger sans doute, je planais à quelques mètres au-dessus du sol. Composé de plusieurs parties prévues pour s’emboîter, il a fallu les rassembler.
J’étais à la recherche de la pièce manquante, qu’on déniche par inadvertance : un visage à modeler, qui, maintenant que j’y pense, offre une certaine ressemblance à celui qui me fait face et me regarde, dans le dédale des racines .
Le poids de ma tête est trop lourd : je ne peux que supposer que trop d’années l’ont plombée : le jour se confond avec la nuit, et je ne peux saisir aucune de ces lueurs, enfouies dans la terre.
Je ne peux que les imaginer… car, si j’y voyais encore, je verrais croître les arbres se nourrissant de morceaux d’étoiles. La mienne doit être quelque part, car un jour je l’ai perdue…
Femme de vent à l’âme secrète, l’orage est ta chevelure, je verrai presque ta tête dans l’œil de l’ouragan pendant un court instant de répit.
Bascule dans la saumure l’errance de mon pays tropical. Je t’entendrai hurler dans la nuit, et pour me retenir de ta furie, quand se déchaînent les éclairs,
mon corps se crispe sur les rochers coupants mes pieds lestés de plomb : Les vagues projetées s’en sont prises aux navires dans l’étau de tempête.
Autant de dents qui les déchiquettent dans la tourmente : spirale géante d’une gueule béante
où l’horizon s’est dissout le ciel éclaté comme pulvérisé de fragments de verre, sifflements stridents de ta colère
qu’avons nous fait pour la provoquer, et qui invoquer dorénavant pour t’apaiser, … femme de vent ?
C’est peut-être une fin d’été. devant la mer Quatre femmes sont les actrices d’une peinture de Whistler: presque une esquisse peinte à grands traits rapides. Sous un ciel paisible et lisse, une brise s’élève à peine : c’est une symphonie de bleus et de verts devant une eau claire et limpide, où rien ne bouge…
Le personnage de gauche marche lentement. On le dirait sorti d’une fresque romaine ses voiles jouent avec le vent. A côté de cette femme se tiennent deux dames habillées de bleu et vert, également avec quelques notes de rouge. L’une d’elles tient un éventail. Le peintre n’a précisé aucun détail… Elles entourent le personnage principal à la position centrale, le regard perdu dans le lointain assise, avec un geste de la main.
On ignore ce qui les réunit ici, s’il y a une maîtresse et des servantes ; elles se fondent dans le calme et l’harmonie. On s’attendrait à une fête galante, sans fioriture inutile au retour d’Ulysse dans sa patrie, un vaisseau que l’on devinerait entre deux îles: —- on ne saura rien de la suite du tableau, le regard se perd au-delà de ses limites…
retable Chartreuse de la Sainte-Trinité de Champmol ( Dijon )
Je t’ai vue à travers la musique .
Tu dansais comme dans toi-même
au son de ces voix,
habillées de pourpre,
et qui s’élevaient
jusqu’aux voûtes,
donnant un peu de chaleur
aux âmes qui ont froid,
dans le parcours des leçons de Ténèbres,
où l’on mouche les chandelles
une à une, jusqu’à ce que
l’obscurité pèse
son poids de silence .
Je t’ai vue à travers la musique ,
tu étais loin, mais proche pourtant ,
tu avais tracé mon nom sur le carreau de la vitre,
et nous écoutions la même cantate,
comme si je te tenais la main
et, les yeux fermés,
les harmonies se croisant ,
offraient au jour naissant ,
la lumière vibrant ,
avec l’avènement d’un monde,
celui que l’on ne peut décrire
ni en images ni à l’aide de mots .
René C – septembre 2018
variation sur " que le monde soit ( SD )
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Que le monde soit…
comme je le veux
comme je l’ai pris enfanté au matin
les yeux ouverts
La lumière s’y déployait si blanche
avant que la couleur l’inonde,
ainsi l’orgue conduit la voix -
la liturgie du jour à venir était blonde
et me parlait de toi.
J’ai effacé un peu de buée à la fenêtre
et sur le carreau froid tracé ton nom
dessiné un peut-être
Le jour venait de naitre
limpide et pur, oratorio vibrant
une césure avant que le ciel ne bascule
vers son avènement
dans une orgie d’ors et de cuivres
Je ne sais s’il était d’une étoffe
dont on peut se vêtir
comme l’aube de lin des retables
ou la pourpre ardente des rois
s’il fallait le poursuivre dans sa marche solaire
au-delà du beffroi qui claironnait les heures
et l’aurais-je cherché dans le sel ou le sable
comme le vent façonne la dune instable
quand il glissait vers toi en éclaireur
Le monde s’offrait à moi
par un matin de fin d’été
et je m’en suis saisie les yeux fermés.
SD
Ce n’est pas une frontière, ni une ligne, ni une surface, une zone interdite, c’est un océan, une mer, qui vient et se retire mais jamais trop loin.
C’est comme un être qui respire, aux baisers salins. Un être qui t’invite quand la marée se lasse dans de petite flaques autour du sable mouillé, se dissimule derrière les rochers, les épaves rouillées dans l’attente du ressac.
Il n’a pas d’étendue définie, pas de limite , se rétrécit au découvert de plage, puis revient comme un cheval sauvage, lui que l’on croyait assoupi, étincelant au soleil de midi, jouant de sa robe ouverte sur la gamme bleue des gris.
Ceux qui empiètent sur son territoire le font en pure perte : c’est ce pays sans mémoire qu’on ne peut pas cerner, trop indocile pour qu’on puisse le dompter.
Il peut dévorer les îles les engloutir sous la brume; à coups d’écume. Il reprend ce qu’on lui a volé, des châteaux éphémères aux navires téméraires des temps écoulés…. ……tel est le pays de mer.
Tu sauras te confier aux racines de l’ombre, sentiras les vibrations venir, traverser le mur. Si tu plaques ton oreille à sa surface, le tympan percevra le frottement d’autres oreilles, de l’autre côté.
Viendront les sons, amplifiés par les gestes, peut-être quelques mots difficiles à comprendre, comme une offrande qui suivrait le parcours sinueux des tuyauteries, paroles anonymes traversant les viscères de l’immeuble.
Et dans les intervalles, presque un silence. Tu mettrais tes doigts en cornet pour en entendre davantage, mais ce serait juste l’illusion de la mer, évocation lointaine du large qui te rattrape.
Murmure d’une houle qui déferle à l’intérieur même du béton.
photo et traitement perso – Dunes Ste Marguerite – 29
Trois épaisseurs de ciel un petit coucher de soleil, et voila que mon ombre s’allonge sur un paysage de dunes avec les herbes échevelées, qui ne m’ont pas reconnu. > Elles s’organisent à mon insu
– fantasque labyrinthe – pour me barrer le chemin . … Un crépuscule à dentelle dorée leur permet de changer de teinte, l’obscurité se prolonge je ne retrouve plus mes empreintes…
Un nuage en a profité pour lâcher une petite ondée qui se transforme en pluie. Mais – j’entrevois la sortie entre deux rochers:
la prochaine fois je me contenterai du poids de mes pensées, je resterai au chaud, sans courir le risque d’une bronchite. Ou bien j’irai photographier , au mieux des champs d’artichauds ! ( mais je ne crois pas qu’il y en ait qui poussent au milieu des dunes Sainte Marguerite…)
Nous nous sommes penchés sur les années passées en nous prenant par la main : jardin statuaire
où l’éternel demain est le destin des anges. Il est encore nimbé de mystères mais n’est pas celui de l’oubli.
C’est que nous sommes toujours assis à la même place, les yeux vides malgré les années qui passent : nous servons de logis aux mésanges.
D’autres oiseaux de passage, malgré les cloches qui sonnent firent leur nid entre nos bras de pierre. Bien sûr nous avons pris quelques rides,
notre âge n’intéresse personne ( nous avons dépassé le millénaire …. sans plus de précision), qu’on se le dise !.
Le sculpteur nous a placé tout en haut de l’église, là où chants et prières montent le plus haut, mais nous faisons toujours attention
aux chants des oiseaux, eux qui se sont abrités dans l’anse de nos bras ouverts pendant des générations.
Nous sommes loin du sol mais encore attachés à la terre, contemplons toujours le vol de nos locataires s’élançant de leur nichée.
Nous avons appris à nous taire pour ne pas les effrayer. Si nous étions juste dessinés, nous aurions pu parler en phylactère pour exprimer nos pensées…
Mais qui aurait pu les écrire ? … ( et les oiseaux d’en rire car de leur vie éphèmère, rien ne s’incruste dans la pierre ) .
— RC dec 22
( le « jardin statuaire » est une expression du poète Jacques Abeille )
Qui est parti ce matin, en oubliant son gant ? Ce n’est pas un bon plan par ces temps frileux de début d’hiver. Une toute petite main que j’ai trouvée par terre : j’aurais pu espérer mieux en m’en donnant la peine ( en tout cas trouver la paire ), même si la dimension n’est pas mienne : il serait bien difficile que mes doigts y trouvent place et s’y faufilent, même si je change de cuirasse et de taille pour devenir reptile, recouvert un temps d’une peau d’écailles ( histoire d’habiter le gant ).
Sur la forteresse noire que garde la montagne amère se succèdent les guetteurs qui ne regardent pas les oiseaux, se moquant des frontières, libres comme l’air.
Les murs sans joie sont si hauts qu’ils découpent le ciel, comme avec un couteau. Mais l’air se referme aussitôt,
compact dans sa jupe claire -.
Le temps a plus de chance, il ne se laisse pas arrêter, il ne franchit pas de portes comme l’eau de la rivière.
Elle , qui reflète aussi bien le soleil que les étoiles mortes, dans le flux continu des heures.
Les guetteurs l’ont perdu de vue au creux des bras touffus de la forêt de la plaine.
La matin contourne avec elle les rochers, et ne s’arrête qu’arrivé au bord de la mer pour reprendre haleine.
Les murs sans joie ne renferment que de la haine et une puissance illusoire qui s’éteint quand le jour décroît, absorbée par la nuit,
La pâte , chair de bitume, lave solidifiée, la route sous le feu de l’été liquéfiée. Toi tu étales, moi je racle, mais rien ne s’en va sinon quelques graviers rebelles. Pieds englués.
La pâte toujours, chair de peinture, poussée par la brosse, sera peut-être un jour lumière, un visage, un regard.
Elle maintient le nôtre prisonnier, avec des caprices de geste, figés. Quelques poils de pinceau collés, rebelles. Ils pourraient être nôtres ces poils, sitôt enlisés dans le silence.
Monochrome. Noir de bitume. Racles plus fort ! et tu me trouveras.
Férus d’anatomie, complétez votre tableau, en disposant comme ici des éléments fleuris tout à votre avantage : on découpera le cerveau pour faire plus joli, quelques glandes accessoires à l’aspect mat.
Epinglées avec habileté dans votre collage, pouvant s’exposer sur un fond noir : couleurs délicates avec dominante nacrée : d’autres paraîtront bien plus belles que les morceaux encore tout chauds et les autres organes dont on ne détectera pas la panne.
Ces éléments non identifiés – sont maintenant à l’état de choses découpées par le scalpel… Certains gardent leur aspect rose entrant dans une composition des plus élaborée résultat de la dissection, à conserver dans le formol et une bonne dose d’alcool
( ingrédients de base, comme il est d’usage, dans le cabinet de curiosités)…
Vieilles âmes habillées de bois, parcourir cette forêt morte, cette terre inondée, branches tombées, entremêlées corps agonisants dans la litière épaisse des mousses, linceul de feuilles pourrissantes… troués par le temps debout encore , cependant.
Les oiseaux ont déserté les cieux pour des pays plus accueillants. Restent les rudiments de ces arbres, fantômes, fuseaux d’écailles témoins immobiles d’antan, d’où a reflué la sève, aubier poisseux de sédiments,
petit à petit asphyxiés, imperceptiblement transmutés en pierre, désastre de colonnes éparses, marbre gris évoquant celles de temples écroulés, aux rites enfouis profondément dans une gangue épaisse gardienne de leur mémoire pétrifiée .
Dans les courbes de la nuit se cachent les pensées les plus secrètes, là où je ne peux avoir accès, car les lendemains ne connaissent pas de parole : celles ci ne sont pas nées et le discours reste bouche bée, n’émettant que des sons muets. Si j’écris le chant, chacun y lit sa propre histoire, les raisons de croire, et les chemins où ils s’égarent, alors que déjà les lumières s’éteignent sur les jours passés, brûlées par le sel, ensevelies sous les marches d’un temps, où l’on n’espère plus de printemps . Ne cherche pas à m’appeler, je suis déjà ailleurs.
Reconnaîtrais-tu ce jardin, maintenant abandonné, laissé à lui-même alors que débordent les branches du saule, que tu as connu jeune encore, devant la maison?
Les heures de l’hiver viendront tuer les fleurs, arracher les feuilles du chêne encore debout, mais tu reconnaîtras le jardin de mon poème, auquel subsistent quelques vers…
Tout commence en ouvrant les dossiers. Je cherche de la musique, pour compléter la playlist. Je trouve des trucs pour la soirée. Faut c’qui faut…
Cocktails en tout genre, boules de lumière fauteuils profonds, rideaux de velours ambiance soft, affiches de cinéma, cadres à l’ancienne sans photos d’ancêtres…
ça commence bien, ça déménage et monte en puissance… batterie, solos de guitare, le chat rayé qui détale, une bouteille renversée,
un verre cassé, la tache sur le tapis qui s’élargit. C’est juste avant le slow, vite, des papiers journaux !
Je tombe sur ta voix, je ne l’avais pas reconnue. La voilà qui se dresse appelle le silence, et tout est avalé, le moindre son,
le cramoisi du velours, les cocktails évaporés, le chat collé au plafond, l’électricité coupée, les cadres rétrécis…
mais seulement la voix verticale au milieu du salon qui provient d’on se sait où. Tout le monde est saisi n’esquisse plus un geste,
tout devient gris rentre dans le passé, immobilisé dans le papier glacé à même la photographie, juste avant l’oubli…
De louables intentions sont à l’origine de ce jugement qui ressemble beaucoup à une exhortation. Vous allez voir, c’est pour votre bien, juste un petit moment désagréable à traverser, et puis vous connaîtrez la même satisfaction que moi. C’est là peut-être que la volupté promise n’est pas suffisamment incitative. Dans le meilleur des cas, vous éprouverez le même plaisir que moi. Votre courage à affronter les flots sera par contre déprécié, puisque je vous en aurai annoncé l’issue favorable.
Ça ne sera plus une aventure: juste la confirmation du bien-fondé de ma pensée. La proximité affective joue plutôt à rebrousse-poil, dans ce cas-là. Le mimétisme promis n’a rien d’un nirvana, surtout s’il est précédé d’un didactisme enthousiaste dans la forme, mais un brin condescendant dans le fond. On a presque chaud d’y être allé, maintenant. Pour la même raison trop claironnée, les autres ont le plus en plus froid, et n’iront pas.
Quand on est dedans, elle est bonne !
De louables intentions sont à l’origine de ce jugement qui ressemble beaucoup à une exhortation. Vous allez voir, c’est pour votre bien, juste un petit moment désagréable à traverser, et puis vous connaîtrez la même satisfaction que moi. C’est là peut-être que la volupté promise n’est pas suffisamment incitative. Dans le meilleur des cas, vous éprouverez le même plaisir que moi. Votre courage à affronter les flots sera par contre déprécié, puisque je vous en aurai annoncé l’issue favorable.
Ça ne sera plus une aventure: juste la confirmation du bien-fondé de ma pensée. La proximité affective joue plutôt à rebrousse-poil, dans ce cas-là. Le mimétisme promis n’a rien d’un nirvana, surtout s’il est précédé d’un didactisme enthousiaste dans la forme, mais un brin condescendant dans le fond. On a presque chaud d’y être allé, maintenant. Pour la même raison trop claironnée, les autres ont le plus en plus froid, et n’iront pas.
Tout ce que j’ai connu s’est dilué tout au long des années: ma maison n’est plus ; – j’ai pourtant le double des clés, mais qui ne servent plus à rentrer : de tout le trousseau, j’en ai fait un collier aux formes tourmentées qui pèse sur mon cou comme une boîte de clous , mais je les garde quand même : les jeter me ferait de la peine : on ne sait jamais, si d’aventure elles ouvrent d’autres serrures, et si quelque part pourtant, le bonheur m’attend…
Vois-tu, si je me lève je n’ai pas souvenir des mêmes rêves… J’étais allongé sur le sol et nulle part il n’y avait de route, Au-dessus , le ciel m’entourait de sa voûte . Le vent pousse des nuages et les accompagne longtemps dans leur voyage. L’un d’eux s’est distingué en prenant l’allure d’un cavalier, mais aucun (que je ne sache) ne ressemblait à une vache… Quelques champs pelés réclamaient leur dû car il n’avait pas plu de presque tout l’été.
Quelques arbres échevelés gardiens de la draille, et au loin les sonnailles de bêtes égarées… Ce n’est pas encore aujourd’hui qu’on verra la lune entourée de brumes ni le troupeau de brebis brouter tes cheveux même si la terre partage beaucoup de mystères avec les cieux…
Sur un toit de la vieille ville, Le linge est éclairé par les derniers rayons du jour : Un drap blanc d’une ennemie, Une serviette d’un autre Afin d’essuyer la sueur de son front. Et dans le ciel de la vieille ville Un cerf‑volant. Au bout du fil Un enfant. Que je n’ai pas vu. À cause de la muraille.
Nous avons hissé des drapeaux nombreux. Ils ont hissé des drapeaux nombreux. Pour que nous pensions qu’ils étaient heureux. Pour qu’ils pensent que nous étions heureux.
le matin presque toujours il pleut sur les rues une bruine légère
la heya est une écurie d’où surgissent les cris les râles les souffles lorsque les lutteurs s’entraînent
dans l’odeur d’huile sucrée ils perfectionnent la maîtrise de soi la persévérance l’effort
les géants se rincent la bouche recrachent l’eau éparpillent le sel adaptent le tablier cérémoniel nouent la ceinture de soie la corde rugueuse vérifient le chignon de la coiffure subtile montée haut en forme de feuille de gingko
l’un viendra de l’ouest et l’autre de l’est ils pénètrent à sept secondes d’intervalle dans le cercle d’argile et de sable noir
lui frappe le sol de ses poings serrés au signal de l’attaque donné par l’éventail les corps énormes sont fulgurants
à l’intérieur de l’œil du serpent la partie ultime est la collision où parfois les membres se cassent