Amnésie volontaire ( RC )
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Si tu perds la mémoire,
Et que ton passé soit un trou noir,
Il y a des médicaments,
> Pour réparer l’accident ;
Et de plus, en couleurs …
Tout le contenu du bonheur,
Est en gélules,
Et petites pilules,
On en a tout un stock
( C’est ce qu’a dit le doc )
Qui permettent de mieux aimer,
Quand on se sent paumé…
C’est par là, c’est par ici…
( Oh la jolie pharmacie ! ),
C’est quand même une belle chose,
De voir la vie en rose ,
De franchir le mur du son,
Comme les avions le font !
De sauter par-dessus les toits,
En croyant toujours en soi.
De garder son équilibre,
En croyant être libre …
…Bien sûr, toute chose a son prix,
Et aussi le paradis,
Qu’il soit artificiel,
Et multiplie les ciels,
Pour perdre de vue,
Le lointain des avenues.
Juste un peu de monnaie,
Pour ce petit sachet,
Ne pas dépasser les doses,
Sauf si tu te sens morose,
Cà, on ne sait jamais,
Mon petit poulet,
Le numéro d’équilibriste,
Je l’ajoute à la liste
Le grand saut dans l’espace,
Impair et puis passent ,
Des bonbons comme s’il en pleuvait,
Et du chocolat au lait,
C’est comme dans Candy Crush
Si tu as dans ta poche ,
Tout ce qu’il faut pour oublier,
L’esprit et les mains liées,
C’est quand même bien pratique …
Ne cède pas à la panique
Pour retrouver ta mémoire,
> Et celle du désespoir.
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RC – avril 2014
Amin Khan – J’oublie les visages

peinture: Jean Fautrier: tête d’otage
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J’oublie les visages
je ne me souviens pas des noms
j’endure
des odeurs et des gestes
des parfums
l’émail de certaines morsures
la vision de certains sangs
des courbes des accidents
des silences profonds
de longues heures et des jours
certains mots les mêmes
des lèvres
de roses luisants
dans la même lumière
du même regard
plein de douceur et d’amertume
AMIN KHAN ( poète algérien )
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L’île aux images – dénouer
dénouer
mains qui s’épuisent à nouer encore et toujours,
attention maladive portée aux noeuds, l’accident, traumatisme, nouer, nouer, nouer, encore et encore, nouer, se protéger, se cacher derrière la forêt de cordes bien circonscrite, taire le reste, tout le reste, incapacité de parler de soi, ne parler de rien d’autres que du travail et des banalités,
vérifier les noeuds, y penser tout le temps, concentration, pas le droit à l’erreur, la vie court-circuitée par les noeuds, rêver d’être sauvé par un noeud, peur lancinante du silence des cordes qui se nouent, la culpabilité grignote jour après jour, ce qui est autour de, ne jamais être soulagé des noeuds solides et de leurs sempiternels vérifications,
mais oublier que les attaches rouillent et qu’elles lâcheront un jour, bien avant qu’on ait pu dénouer les fils de ses obsessions