Différents de ceux-là qui dans le Purgatoire s’étant reconnus s’écartèrent et s’en allèrent tête basse nous nous sommes étreints dans la bruine de l’Etang qui nous inonde jusqu’aux os du charme bruissant
Car nous venons d’une brume de froid sans pareil notre commun lignage de peine et d’ahan ces aïeux de lande et de mer de mouette et de corbeau qui trimèrent toussèrent et nulle grâce n’a ruisselé
par les hasards du mauvais temps par toutes les marées par l’errance des Guerres d’Ecosse à Romagne en poussière lumineuse ils ont déjà tressé notre destin
et de leur lointain ils nous regardent complices curieux si nous saurons nous aimer sur les abîmes salés et de leur dieu d’embruns sur la chevelure décoiffée
« J’ai pardonné des erreurs presque impardonnables, j’ai essayé de remplacer des personnes irremplaçables et oublié des personnes inoubliables. J’ai agi par impulsion, j’ai été déçu par des gens que j’en croyais incapables, mais j’ai déçu des gens aussi. J’ai tenu quelqu’un dans mes bras pour le protéger. Je me suis fait des amis éternels. J’ai ri quand il ne le fallait pas. J’ai aimé et je l’ai été en retour, mais j’ai aussi été repoussé. J’ai été aimé et je n’ai pas su aimer. J’ai crié et sauté de tant de joies, j’ai vécu d’amour et fait des promesses éternelles, mais je me suis brisé le coeur, tant de fois! J’ai pleuré en écoutant de la musique ou en regardant des photos. J’ai téléphoné juste pour entendre une voix, je suis déjà tombé amoureux d’un sourire. J’ai déjà cru mourir par tant de nostalgie. J’ai eu peur de perdre quelqu’un de très spécial (que j’ai fini par perdre)……… Mais j’ai survécu! Et je vis encore! Et la vie, je ne m’en lasse pas ………… Et toi non plus tu ne devrais pas t’en lasser. Vis!!! Ce qui est vraiment bon, c’est de se battre avec persuasion, embrasser la vie et vivre avec passion, perdre avec classe et vaincre en osant…..parce que le monde appartient à celui qui ose! La vie est beaucoup trop belle pour être insignifiante! »
J’ai déchiré des pans entiers du ciel trop bleu, trop confiant, trop indécis. J’ai gardé quelques livres, un vieux rêve, deux poignées de sable, une ou deux pommes vertes, de l’eau entre les doigts, de la musique sur un fil d’horizon ou de violon.
On n’entend plus mes pleurs d’animal ni mes pas qui raclent le sol. De loin, on me fait quelques signes.
Dessous, la rivière grande, la rivière gronde. Des veines d’eau gonflées charrient les passés. Dessus, le plafond trimballe ses nuées bâtardes. Des jours et des nuits se disputent l’espace.
Il y a sans doute un accord possible. Autour, des choses à prendre ou à laisser. Et le souffle porté, supporté, emporté.
Loin de la mesure des hommes. J’ai vacillé et tenu bon.
Je me suis bricolé des ailes pour faire danser mes espadrilles. J’ai tenté d’aimer et la lumière qui va avec.
sculpture: couple enlacé, art Khmer, metropolitan mus of Art, NYC
sculpture: Art indou – Orissa
Comment tu es long
Et comme je suis loin
Assise entre deux mers
Ici où les fleuves
Poussent comme des pissenlits
Et les draps bien tirés
Font des vagues sous nos dos
Comme je suis longue
Allongée sous ta main
Pas de timbres, pas de plumes
Mais des ondes en cascades
Et un tam tam
Ridicule
Qui tient le temps
Et nous force à aimer.
1 – Adolescents, nombreux sont ceux qui éprouvent le besoin d’écrire des poèmes. Par la suite, la vie se charge de vous émonder, de vous faire renoncer à cette activité ni raisonnable ni rentable. Le poète est celui qui n’a pas renoncé à ses erreurs de jeunesse. Mais pour cela, il faut lire, travailler, se corriger sans cesse. Car la poésie est aussi un art. Etudiez les poètes qui vous ont précédés. Une fois que vous avez trouvé la poésie, continuez à la chercher. Apprenez les règles. Ne les respectez pas.
2 – Le plus important est de se former une conscience et une sensibilité d’être humain vivant pleinement son temps. Il ne s’agit pas d’être dans l’air du temps ; il s’agit d’être à la pointe de son temps. Emporter dans ses bagages ce qu’il faudrait garder du passé pour voyager dans le futur. Car la poésie n’est pas qu’un art. Ou c’est un art d’habiter le monde. La poésie n’est pas faite que de mots. Elle est une forme de conscience hypersensible. (Ou de sensibilité hyper‑consciente).
3 – Le rôle des poètes a toujours été de connaître le nom des plantes, des pierres, des oiseaux.
Enumérer le monde pour l’apprivoiser. La ville moderne et nos inventions font aussi partie du monde. Il nous faut les acclimater. Imaginer le monde. Manœuvrer dans la fiction à haut régime. Le domaine du poème, c’est le réel et c’est aussi l’impossible, le merveilleux. Il n’y a pas de poésie sans utopie. Le vrai domaine du poème, c’est le rêve éveillé. Entraînez-vous à marcher avec les pieds sur la Terre et ne dédaignez pas, de temps en temps, d’effectuer des sauts périlleux dans l’espace.
4 – Quand on est jeune et qu’on a la vie devant soi, on aime souvent les poèmes sombres et désespérés, le spleen, le noir et le gothique… Plus tard, on apprend à apprécier chaque instant de la vie. Il y a des poètes tristes et des poètes gais, des nostalgiques et des poètes qui espèrent. Parfois, ce sont les mêmes. Tous ont droit de cité dans la cité si, à l’égal du boulanger, ils font un pain bon, odorant, croquant, tendre et réjouissant ; s’ils apportent un peu de vérité, de force, de joie.
5 – Comme la vie est courte, il faut essayer de la vivre pleinement. Ne pas pactiser avec la mort. Dans une société où la plupart des gens perdent leur vie à essayer de la gagner, le poète s’arrête pour regarder, comprendre, sentir. Intéressez-vous aux autres, prenez le temps de les aimer. Le continent le plus étrange et le plus neuf à explorer pour le poème, c’est notre vie commune. Je est aussi tous les autres. Nous ne sommes pas si différents que ça les uns des autres. C’est ce qui fonde la possibilité du poème. Et du partage. Le poème élargit l’enveloppe de l’individu à l’humanité.
6 – Le poème est l’étincelle qui peut jaillir du frottement de deux regards. Sentir que nous existons vraiment parce que nous avons besoin des autres et que nous comptons pour eux. Essayer chaque jour de faire quelque chose qui soit utile et beau. Etre heureux est un travail. Le vrai bonheur est productif. Communicatif. Le poème est un cadeau que l’on se fait et que l’on fait aux autres.
7 – Les poètes ne sont pas les inventeurs de la langue. La langue vient du peuple. C’est en lui qu’elle vit et bouge. Même s’il est souvent dépossédé de ses propres mots… Le poète est l’Indien qui applique son oreille sur la poitrine du peuple pour entendre venir de loin le galop assourdi des mots… Et tente de leur restituer le sens de la chevauchée. Faites l’amour avec les mots. Faites qu’ils fassent l’amour entre eux. Parler est utile. Même pour aimer.
8 – Pas de poème sans jeu avec les mots. Mais la poésie n’est pas qu’un jeu. La vraie matière première de la poésie, ce ne sont pas les mots, ce sont les émotions, les sens, les sentiments. Il n’est pas non plus interdit de penser.
9 – Ne vous payez pas de mots. Ne faites pas trop confiance aux mots. Entendez leur musique ; sachez y céder… et ne pas y céder. Evitez les phrases creuses, les images et les idées qui sonnent creux. Restez concrets. Pensez en images. N’ayez pas peur de la folie. Dans la folie, restez lucide. Préférez le mot juste. Ajustez les mots. Il y a une vérité du poème. Cherchez la vérité ; dites-la.
10 – Il y a encore des révolutions à imaginer. Faites à votre idée…
À vous de jouer…
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Francis Combes, président du jury du prix de poésie des lycéens et des étudiants « Poésie en liberté ».2008
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