André Velter – Présage
Présage.
Il n’y a plus de seuil
Plus de maison
Plus de camp
Plus de feu
L’aube de ta main gauche
Etreint le soir de ta main droite
Le jour se fait poussière
Souveraine est la nuit
Entre ton âme que je ne crois pas en peine
Et ton corps d’altitude
Pas d’accablement
Pas de déchirure
Tu ouvres la voie des devins
La transparente
Peut-être à coups d’ongles contre le temps
Présage
Qui tient du miracle
C’est à l’Orient l’étoile nouvelle
Où ta vie magicienne
Annonce le caprice et l’oracle
D’une insurrection sans exemple
D’une résurrection sans nom.
« Ton corps d’altitude »
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André Velter – Marche d’approche

Isenfluh
Marche d’approche.
Bien sur j’irai seul
Affamé volontaire
J’irai pour te plaire
Serré dans ton linceul
Le sommet t’appartient
Au-dessus des alpages
J’atteindrai le nuage
Qui ne recouvre rien
Il n’y aura plus d’ombre sur la terre
le soleil sera peut-être entre mes mains
Ravivé
Avec moins de violence
Souverain
Sans impatience
Par l’altitude reconquis
par la solitude rappelé au désir
Comme le silence à perte de vue dans le bleu dans le blanc..
je lutte à armes inégales
Si peu familier des harnais et des clous
Des bivouacs en pleine paroi
Des réflexes d’insomniaque contre froid
la nuit l’horizon reste en coulisse
le ciel n’est pas le manteau espéré
Je joue à contre-emploi
Une pièce qui s’écrit avec les pieds
Mais sans renoncer à porter les mystères
Sans abandonner le souffle à la pesanteur
Sans craindre de déboucher hors d’atteinte
Un pas plus haut
Un pas toujours plus haut
Dans cette approche impossible
Qui passe de l’effroi à l’extase
Comme d’un réel à l’autre
D’un univers à l’autre
Et pour le même amour..
André Velter. « Une autre altitude »
extrait.. » l’ascension du Mont A n a l o g u e »
André Velter – La poésie ne peut être coupée ni du sacré
Elle n’est pas un réservoir de mots d’ordre.
Elle a du souffle et pas de frontières.
Sa langue lui appartient, mais elle appartient à la rumeur des langues.
Opaque à tout populisme, elle n’a pas à craindre d’être populaire.
Si elle est vécue, elle change la vie.
Chercheurs d’or à la sauvette – ( RC )
En parcourant les chemins,
C’était dans un autre monde
Celui des hommes intègres
Ceux d’ici peut-être
Mais il y a ceux d’ailleurs
Qui viennent creuser – pour l’or
Dont il y a quelque part
Au milieu de la roche brune
Quelques grammes, quelques paillettes
Qui peut-être, sueur, labeur
Transport, lenteur, avidité
Permettront à quelques uns de vivre
De vivre mieux, c’est dire
Difficile, mais l’espoir
Justement, fait vivre
Même s’ il faut n’en pas vivre, mais gratter
Au sein même d’obscurs tunnels instables
Quelques roches, et remonter d’escalade
> Même si certains en restent ensevelis
Ils ont cru pouvoir vivre
En prenant aux entrailles de la terre
Un peu de précieux qui pourrait
De quelques carats orner une main
D’une bague aux souvenirs de peine
Qui se souviendra de la poussière brune
Des transports éreintants
Afin de convertir le risque encouru
En quelques kilos de riz
—
je viens de trouver aussi un poème de André Velter,
qui nous dit une impression parallèle
( je ne cite que la fin du poème)
Mais perdre perdre surtout
La moindre révérence
Le plus frêle désir
De collier de gourmette
De broche de clip de boucle
De tocante et d’alliance,
Laisser l’or aux gogos
Laisser l’or au décor
Aux fesses des angelots
Au dôme des Invalides
Aux dos des doryphores,
Laisser l’or aux émois
Des honnêtes esclaves
Qui se carrent les carats
D’une aura toute en frime,
Laisser l’or à l’ordure
Motus et monétaire
Qui fait de l’or avec
De la sueur de sang –
extrait de « La vie en dansant » Gallimard
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