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Julian Tuwim – Le bossu


peinture – détail de « ties » (Wayne Thiebaud )

Belles cravates,

Jolis tissus,

Mais inutiles, puisque je suis bossu !

Celle-ci, rayée d’argent,

M’irait très bien…

A quoi bon ; n’importe comment

On n’en verrait rien.

Qu’elle soit en’arc-en-ciel,

En soie de Lyon, en laine d’Ecosse,

Vous ne direz pas : — Vise la cravate !

Vous direz tous : — Vise la bosse !

Il me faut une écharpe longue,

La plus belle des écharpes !

Je la nouerai si bien,

Personne ne me reconnaîtra,

Tous, vous direz :

— Quelle bosse…

Mais — pourquoi s’est-il pendu à sa cravate ?

1922


Sabine Péglion – tu ne répares pas – 01


 

 

 

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Tu ne répares pas          à peine peux-tu             au fil des

mots     broder quelque étincelle        sur la trame des jours

Que saisir   de l’instant           pour abolir la blessure

de ses lèvres             Son sourire déchiré  si prés

de la rupture                    Tu ne répares pas

Ton regard cherche          au–delà        à transpercer le

mur       s’accrocher au sien            pour trouver   un chemin

Tisse       tisse        sans illusions         les mots sur la page

Parler       chanter          assembler        peu importe

Tu inscris        fil à fil              la douleur qui se brise

Sur la trame       tendue de couleurs       tu reprises

au mieux              Tu sais bien que rien

n’occultera la trace          L’aiguille  se faufile

insère un arc en ciel

Pour quelle alliance         En quelle espérance

Tu ne répares pas              Les mailles du filet

que peuvent–elles retenir             avec ce trou béant

Habiles les mains    circulent           tentent de resserrer

le maillage           Pour quelle      miraculeuse  pêche

Partir   alors            ne plus revenir             traverser

l’horizon           N’est-ce pas disparaître             Sous la

vague         la barque            s’enroule           le filet dérive

dans le bleu du sillage               Tu ne répares pas

Tu ne répares pas      le linge    lacéré

Éphémère végétation        Tu navigues      au-dessus

des cordes balancées      bien au-delà      des haies

Laisse       sans regrets      la violence du vent

à travers     les   déchirures        vibrer         s’engouffrer

disperser les nuages          Tu ne répares pas

Tout n’est que cicatrice         sur la peau de la

terre         Tu sais que pour      semer      il te faudra

trouver la faille obscure           déposer       les graines

recueillies en ces mots          avec tant de patience

Accepter    d’arracher        au passage      quelques ronces

Voir      enfin       s’épanouir      ces bouquets espérés

Avoines folles   de lumière    dentelées       accrochées   à la pierre

Se courbant       s’inclinant         se relevant         sans cesse

Multipliant           au vent        les rares étincelles

Tu ne répares pas        Tu façonnes        Tu transformes

Tu recueilles     Tige à tige       Fil à fil          Maille à maille

Ces mots éparpillés           Quelque ariette oubliée

Cavatine légère        accrochant         dans ses yeux

un sourire         un plaisir        le désir d’exister

 

***

 


Philippe Delaveau – la pluie ( II )


Pflanze, Regen, Natur, Grün, Saison, Blatt, Frisch

 

Maintenant dans les flaques se dilue

le dur monde ancien comme aux poils des pinceaux

la peinture collée qui se détache sous l’essence.

Debout, enfin lavé de mes refus, je m’apprête à la tâche.

Debout sur la terre lavée, Seigneur, je veux chanter

Ta gloire dans la force du vent, composer

nos hymnes parmi les pluies et la mesure, maître enfin

de mon chant dans l’assemblée des arbres et des hommes,

la fraîcheur nouvelle et l’odeur neuve du jardin,

sous l’arc dans le ciel neuf comme un luth de couleurs.


Colette Fournier – Apprends-moi à danser


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Photo :  Emmanuelle  Gabory

 

 

Apprends-moi à danser
Je veux retrouver le soleil
Flirter sur un rayon de miel
Brûler la pointe de mon cœur
Sur des épines d’arc-en ciel
J’ai besoin du velours de la voix
Feutrant ses frissons de soie
J’ai besoin de la couleur du vin
Fleuve de rubis où tout chavire
J’ai besoin du nectar des abeilles
Des parfums du paradis
Des ailes de tous les anges
J’ai besoin de devenir archange
De me transmuter, de m’alchimiser
J’ai eu si mal dans mon corps
Irradié et somesthesique
Que ce soir je veux danser
Libre, nue, échevelée
Ivre comme une bacchante
Et quelque part folle à délier
Avant que ne descende sur moi
La lente douceur du soir…


L’improbable côtoie le réel – ( RC )


montage perso  2011

–                montage perso                    2011

Si la nature                       à l’automne,

Pousse    un dernier chant de couleurs,

Une mosaïque           d’ors et de bruns,

Qu’elle brasse        à longueur de vents,

En couronnant la terre de ses saveurs ,

Elle conduit     peut-être –            

 La plume du poète,    

Quand il assemble, 

Ligne après ligne,

La musique de ses mots,

Arcqueboutés,    comme arc-en-ciels,

A travers une nuit  qu’il invente,                    

Des rêves qu’il traverse,

Tissant                 aux fils de l’écrit,

Des images,                  qui se disent,

Et s’entrelacent     comme brindilles,

Et          qu’on entend avec les yeux,

L’improbable             cotoyant le réel,

La joie,

Le saignement du cœur,

Traçant    son chemin,

Toujours                   plus loin,

Oscillant entre les saisons

Des           paroles non dites,

Mais    comprises par chacun .

RC   décembre  2013


Passage de l’ange ( RC )


peinture P Gauguin, – détail –  » D’où venons-nous, que sommes nous, où allons nous ? »

peinture  –  partie centrale         » D’où venons-nous,que sommes nous, où allons nous  ?  »   1897

 

 

Comme on dit,       sur terre,

–      Au creux d’un silence,

passe l’ange     ( un mystère),

Lui,      sans bruit,   danse..

 

On ne le voit pas,

Seuls ses cheveux ( d’ange ),

        S’agitent ici-bas,

Si ma tête penche,

 

Je sens, assis sur le vent,

Ses ailes qui me dépassent,

Et l’ange, ( ou ce revenant ),

–        Grand bien me fasse –

 

Semblait chercher son chemin,

>         Ce qui me fait marrer…

Que ces êtres de lieux lointains,

Puissent ainsi s’égarer —–

 

Si loin des dieux et déesses,

Au terme d’un long voyage,

Seul     ( panne de GPS ) ,

descendu de son nuage.

 

C’est            parce que c’était dimanche,

Et, que, poursuivant      un diable fourchu,

Au long cours d’une   météo peu étanche,

Vit aussi cette sorcière aux doigts crochus,

 

Perforant d’un coup de roulette russe,

A cheval        sur son vieux balai,

Un vieux             cumulo-nimbus

Ce      qui ne fut pas sans effets…

 

Perdant               l’appui de l’arc-en-ciel,

…           pour le pique-nique ( c’était fichu),

Notre ange en oublie de fixer ses ailes,

Et se trouve à errer parmi nous, ainsi déchu…

 

Ou, peut-être objet d’un malaise,

>            C’est une supposition,

Une possibilité,   une hypothèse…

Mais ,          qui pose question…

 

Ou alors,           c’est mon ange gardien,

<                Qui veut mieux me connaître,

Me parler, dialogue ouvert, établir des liens,

Lui, qui m’a vu naître…

 

Ou encore, ange égaré, peut-être

Cherches tu      la bonne adresse,

La bonne porte, la bonne fenêtre,

D’une âme               en détresse ?

 

>              Quelqu’un d’un peu fou,

lui demandant « D’où venons-nous ?

                              – Qui sommes-nous ?

                               –   Où allons-nous ? »

 

Mais   –   que prend-t-il donc aux humains,

De poser   des questions embarrassantes,

S’il ne leur suffit pas de lire les lignes de la main ?

Et ,               sans réponse satisfaisante…

 

Peut-être             la raison de sa présence,

Ici,              dans les odeurs de poisson frit,

Dans ce bas monde, le don de sa confiance,

Apparaît , aussi, sous un ciel chargé ,et gris…

 

Déposant sur la terre,

Un parfum subtil               qui l’entoure

D’une traînée d’étoiles,        de lumières

Et de l’ombre,         redit un peu le jour.

 

 

RC – 24 juin  2013

peinture: Paul Gauguin: lutte de Jacob avec l’ange 1888