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Charles Bukowski – le génie de la foule


Il y a assez de traîtrise, de haine, de violence,
d’absurdité dans l’être humain moyen
Pour approvisionner à tout moment n’importe quelle armée

Et les plus doués pour le meurtre sont ceux qui prêchent contre
Et les plus doués pour la haine sont ceux qui prêchent l’amour
Et les plus doués pour la guerre – finalement – sont ceux qui prêchent la paix

Ceux Qui Prêchent Dieu ont besoin de Dieu
Ceux Qui Prêchent La Paix n’ont pas la paix.
Ceux qui Prêchent l’amour n’ont pas l’amour.

Attention aux prêcheurs
attention a ceux qui savent.
Attention a ceux qui lisent toujours des livres.

Attention a ceux qui soit détestent la pauvreté soit sont fiers d’elle
Attention a ceux qui sont prompts a glorifier
Car Ils ont besoin d’Être Glorifiés en retour

Attention a ceux qui sont prompts a censurer:
Ils ont peur de ce qu’Ils ne connaissent pas

Attention a ceux qui recherchent la foule:
Ils ne sont rien seuls

Méfiez-vous de l’homme moyen, de la femme moyenne
méfiez-vous de leur amour
Leur amour est moyen,
recherche la médiocrité

Mais il y a du génie dans leur haine
Il y a assez de génie dans leur haine pour vous tuer,
pour tuer n’importe qui

Ne voulant pas de la solitude
Ne comprenant pas la solitude

Ils essaient de détruire
Tout ce qui diffère d’eux

Etant incapables de créer de l’art
Ils ne comprennent pas l’art

Ils ne voient dans leur échec en tant que créateurs
Qu’un échec du monde

Etant incapables d’aimer pleinement
Ils croient votre amour incomplet

Du coup, ils vous détestent
Et leur haine est parfaite

Comme un diamant qui brille
Comme un couteau
Comme une montagne
Comme un tigre
Comme la ciguë

Leur plus grand art.


Sculpture – collage – dentelles – ( RC )


Nous voilà transportés à la plage
dans une écume beige
toute en dentelles.
Il y a cette demoiselle
sur fond de galaxies
parmi les tourbillons de neige,
avec ce ciel à la Pollock
qui fait un peu toc !:

c’est donc le grand départ
de l’histoire de l’art
qui s’en va visiter d’autres continents;
( ayant acquitté les frais de son voyage )
avant de se trouver prisonnière
dans les filaments gluants
de ton collage:


on la voit comme étrangère
à sa future mutation :

est-elle candidate à l’immigration
après avoir survécu pendant un millénaire

elle qui a été retrouvée sous la mer –
pour être exposée dans un musée
sans même l’avoir demandé ?
C’est que l’aventure esthétique continue
dans un monde qu’elle n’a pas connu
et ne connaîtra jamais
( mais ça… c’est ton secret ) !


collage Cathy Garcia Canalès


Une expérience de physique – ( RC )


peinture: James  Ensor: autoportrait aux  masques

Si je me rappelle mes cours de physique,
ce seraient de ces forces opposées,
qui s’affrontent comme des pensées contraires.

L’expérience renouvelée du couple de torsion
engendre le mouvement inverse
dès lors que les contraintes se relâchent.

Si l’art est sujet à ces contraintes,
que deviendrait-il si celles-ci disparaissent ?
Les paysages tourmentés reviendraient-ils au calme,

Van Gogh ou Ensor, échangerait-ils leur style
pour des autoportraits
qui pactisent avec ceux de Rembrandt ?

Leur visage, dans la réalité qu’ils traversent
est-il parcouru par le temps
qui leur impose leur marque ,

comme la tension d’une corde
trop serrée laissant son empreinte
en creux, dans la peau ?

Relâchons la tension, annulons ces forces …
le visage représenté deviendrait-il aussi lisse qu’un masque neutre,
n’ayant rien à confier à notre propre regard ?

msk mexiq -- photo-bruno-grandjean

masque  traditionnel mexicain: photo Bruno  Grandjean


Yves Bonnefoy (La chambre, le jardin I)


Chuta Kimura, Midi Provence, 1975

 

 

Cette chambre, fermée

Depuis avant le temps. Les meubles, le sommeil

Se parlent à voix basse. La lumière

Tend sa main à travers les vitres. D’un bleu éteint

Le vase qui s’éveille sur la table.

 

Peintre, tu es le seul, ayant souvenir,

A pouvoir aujourd’hui entrer ici.

Tu sais qui a lissé, dans l’éternel,

Le désordre des draps, les recouvrant

D’étoffes dont se fanent les images.

 

Entre,

Te souffle le silence que tu es,

Entre avec ce rouge vineux, cet ocre jaune,

Ce bleu d’autres années,

Fais qu’ils prennent la main de la lumière,

Qu’ils la guident ! Ils lui montrent les quelques fleurs

Dans l’or des feuilles sèches.

A son doigt, comme sa mémoire, cet anneau.

 

Tu vas rester ici, jusqu’à ce soir. C’est plus,

Peindre, que rendre vie, c’est donner  être,

Même si impalpable, presque invisible

Cette main qui dans l’ombre prend la tienne.

 

 

Ensemble encore (Poèmes pour Truphémus)  

MERCVRE DE FRANCE

Jean Cuttat – amour de l’art


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image John Nolan – hommage à Matisse et Lichtenstein

 

 

Amour de l’art

Je n’aime pas les épinards.
J’aime les nectars, les pinards,
mais j’adore ton épine, Art,
ton fard, ton nard, ton coup de barre.

Jean CUTTAT « A quatre épingles »


Le bestiaire – ( RC )


P1310617.jpg

Tu ne les as jamais vus
mais tu t’en fais une idée
à ce qu’on t’a colporté :
        Ils ont tendance, à leur insu
à se cristalliser
pour prendre consistance,
se construire une existence,
et se matérialiser.

Ce sont des récits épiques
avec des animaux hors norme
aux curieuses formes :
          des bêtes fantastiques…
que l’on dessine
et dont aucun dictionnaire
ne comporte d’exemplaire ,
               car tu l’imagines

aussi bien que je te vois :
un griffon sanguinaire ,
un aigle t’emportant dans ses serres,
des reptiles à trente doigts …
             Ils sèment l’inquiétude
dans les récits bibliques ,
( sans précision anatomique
ni grande exactitude ) .

Autun Cathedral Choir Capital - The First Temptation of Christ 12265096776.jpg

 

 

Cela remonte au plus profond des âges :
ce dragon a une mauvaise haleine   :
          compter neuf têtes à l’hydre de Lerne :
les légendes demeurent et voyagent .
Et si on parle d’animal,
on voit dans les fresques comme à travers le temps :
               ainsi ces figures d’éléphants
de l’armée d’Hannibal .

Ils nous semblent bien bizarres,
eux qu’on trouve sculptés dans les chapiteaux ,
par rapport à ceux qu’on voit en photo :
                l’imaginaire nourrissant l’art.
La comparaison n’est pas de mise :
Si on les reconnait pourtant
c’est bien que des éléments
rappelent leur présence grise…

Ce n’est pas un corps de libellule ,
et de grands yeux étonnés
côtoient une trompe ressemblant davantage à un nez
avec des oreilles minuscules .
               Les hommes les représentant
ne l’ont fait           que par ouï-dire
un vague récit pour les décrire ;
un souvenir persistant

de légendes terribles :
de ces récits rapportés,
                il a suffi de les interpréter
et de les rendre plus visibles
( et donc plus concrets
dans leur apparence ):
de quoi nourrir les croyances,
les faisant passer pour des faits .

Toutes les variations étant permises ,
il n’est pas étonnant que l’imaginaire
abonde dans le bestiaire ,
et qu’on l’utilise
souvent dans la religion :
               la bête,          opposée à l’humain
( et à plus forte raison aux saints )
est objet de suspiscions

et de hantise
pour l’inconscient collectif ,
             voila donc le motif
qui les place en dehors de l’église
souvent agressifs
et symboles de terreur ,
beaucoup plus rares à l’intérieur.
Des moutons, et autres inoffensifs

accompagnent les humains .
Ce sont des animaux domestiques
beaucoup plus pacifiques
qui occupent le terrain
            Pas de vautours
ni oiseaux de proie
autour de la croix
ce serait plutôt basse-cour.

On voit bien , avec les rois mages
             l’âne et le boeuf,
avec un petit Jésus ( tout neuf ),
réunis pour une belle image
             comme une photo de groupe
par contre pas de loup , ni de renard :
ce n’est pas pas hasard
qu’ils ne sont pas dans la troupe !

Il fallait bien faire une sélection :
on ne pouvait pas rassembler tout le monde
à des kilomètres à la ronde :
            ne sont venus à la réunion
que les animaux familiers
qui accompagnent
les paysans de nos campagnes
( pas les fourmiliers

ni les dromadaires
pourtant sympathiques ):
          les exotiques
du bout de la terre
pouvant rester chez eux ,
car ceux des tropiques
ne correspondent pas à la symbolique
décidée par les dieux

et puis de toute façon
on a beau faire des prouesses,
on ne peut y mettre toutes les espèces :
        —- il y en a à foison  !
– on a choisi les plus communs
>          les résultats de cette élection
mènent bien à une discrimination:
on en prend       quelques uns

que chacun peut identifier :
               entre les allégoriques
            les fantastiques,
        les carnassiers
    et herbivores,
il y a abondance
et même concurrence :
          une vision multicolore

A l’instar des papillons ,
on pourrait en dresser un catalogue ;
           ce ne sont pas nos homologues
– il y en a des millions –
les bêtes des antipodes
ou des profondeurs
ont aussi leurs admirateurs
( comme les scarabées et gastéropodes ) .

RC – juin 2017

 

Elephant and Castle (Fresco in San Baudelio, Spain) - Art mozarabe — Wikipédia

 

 

 

 

 


Gratter ce que cela dissimule – ( RC )


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peinture  Simon Hantaï – 1959

 

Imagine ta vie
comme une oeuvre d’art ...
Elle serait plutôt bizarre :
–         L’enquête a établi
Qu’en tant qu’artiste
c’était une activité louche
( de brouiller les pistes
en rajoutant des couches…)

On n’y voit que du feu   :
C’est un drôle de calcul ;
On trouvera bien ( en grattant un peu ),
ce que cela dissimule… :
Les gens sont pleins de malice
et plutôt que dans l’écriture,
ils arrivent à trouver des interstices
même dans la peinture…

Si on prend bien soin,
de regarder les coups de pinceaux,
on trouvera bien ce qu’il faut
( même une aiguille dans une botte de foin ) :
Il suffit de patience
pour lire ton destin ,
savoir à quoi tu penses …
…. Tu veux qu’j’te fasse un dessin ?

Avec les meilleures intentions,
sans que ça soit ma tasse de thé,
je sais tenir un crayon,
même si c’est ta spécialité.
Il se pourrait        que j’efface
la toile pour retrouver le blanc
– il n’y a pas de place
pour les faux semblants –

Maintenant:     ce tableau est lisse,
on a raclé les épaisseurs,
selon les instructions de la police,
pour que de la couleur
plus rien n’émerge :
plus de message caché
On peut dire que la surface vierge
est devenue sans danger.

Imagine ta vie
ainsi épurée !
les marques de sympathie
d’oeuvres censurées :
Plus aucun problème
avec les choses prohibées ! .

Ce que les gens aiment
c’est être rassurés.


RC – juin 2016

 

( dans les tableaux  « neutralisés »,  je pense  à ce dessin de W De Kooning ,  confié à ,Robert Rauschenberg afin qu’il l’efface )


Joconde – ( RC )


099-1930  la joconde aux cle¦üs mona lisa with the keys .jpg

peinture: Fernand  Léger         Mona-Lisa  aux  clefs  – 1930

 

 

La Joconde est sortie des nuages.
Elle a l’air bien songeuse ,
et s’est détachée , ténébreuse,
en partie, de l’image.

On connait mieux la peinture de Léonard
que celle de Léger
( elle a depuis, perdu ses clefs ) :
celles qui ouvrent la porte de l’art.

Oublié le sfumato,
et voici la danse des lignes,
des cercles et des signes,
qui parcourent le tableau.

Elle est           comme une image pieuse,
— vous voyez bien,         comme celles
qu’on trouve dans les pages du missel
( une icône, et des plus fameuses ).

Malgré son caractère profane,
et son décor imaginaire,
elle est célèbre sur la terre entière .
Ce modèle est juste une femme :

Il en est ainsi,
mais, toujours elle attire
Les foules avec son sourire :
Ce sacré Vinci

En peignant cette demoiselle
Ne pensait pas en faire une star
de l’histoire de l’art ;
–       mais,                retour dans le réel:

Même sortie de la toile,
c’était peut-être une sainte
telle qu’elle était peinte,
ayant égaré son auréole,  ( ou son étoile ).

En attendant de la retrouver
– elle n’en a pas fait le deuil –
elle vous adresse un clin d’oeil
ce qui était plutôt osé, en ces temps reculés.

On dit bien que tout se retrouve
et rien ne se perd, mais jamais elle ne désespère
bien que prisonnière  ,
au Musée du Louvre.

Si Duchamp la renomme,
et lui met des moustaches,
que personne ne se fâche,
ce pourrait être un homme !

En dehors de son cadre lourd, on pourra la voir
en illustration banale
imprimée en cartes-postales
sur les présentoirs.

Quelle est donc l’énigme de cette peinture ?
Et avec elle, la clef du mystère,
Où se trouve la serrure ?
… en conjectures on se perd.

Ayez pourtant en tête cet évènement fortuit,
qui posa plein de questions:
Une machine à coudre, sur la table d’opérations,
et Mona cachée sous le parapluie ..

RC – juin 2016102-1932  la composition au parapluie the composition with the umbrella .jpg

penture: Fernand Léger  –  composition au parapluie      1932


Alberto Giacometti – nous n’avons pas le choix


theparisreview: Self-portrait by Alberto Giacometti. James Lord writes in his introduction, “He works in a state of intimate excitement with his materials, his long strong functional hands never still, never quite clean of contact with his work … The figures and objects are seen by the artist not as pretexts but as ends in themselves and are to be seen similarly by us.”

 

Self-portrait by Alberto Giacometti.

« Nous nous intéressons à certaines choses, et à celles-là plutôt qu’à d’autres parce que notre constitution nous y oblige, parce qu’il nous serait bien impossible de penser, d’agir autrement. Comme nous n’avons pas le choix de la longueur de nos jambes, de nos maladies, nous ne l’avons pas de notre manière de penser, de notre manière de nous exprimer, et cette manie de s’exprimer est bien du même ordre, rigoureusement du même ordre, que le jeu des mouches autour du globe d’une lampe éteinte au matin. »

— Alberto Giacometti, Écrits, Éditions Hermann, 2007


Denis Scheubel – ce que tu as, ils en font du courant électrique


extrait de  « about Rock, Sex ans the  cities »

Confie-leur ta colère, ce que tu as

Ils en font du courant électrique

En remplissant la salle jusqu’au toit

Et le matin fera de leur art une relique.


Patti Smith – sur la mort de Robert


C’est le tout premier texte de son ouvrage   » just Kids »...  elle  évoque  le  décès  de Robert Mapplethorpe…  « Foreword » ( préambule).

photo:            Robert Mapplethorpe         – Javier – 1985

J’étais endormie quand il est mort. J’ avais appelé l’hôpital pour lui dire encore bonne nuit, mais il avait disparu  sous des couches de  morphine.

Je tenais le récepteur et j’ai écouté sa respiration laborieuse à travers le téléphone, sachant que je pourrais ne jamais l’entendre à nouveau.
Plus tard, j’ai  rangé
tranquillement mes affaires, mon cahier et stylo. L’encrier de cobalt qui avait été le sien. Ma coupe de Perse, mon coeur pourpre, un plateau de dents de lait.

J’ai monté lentement les escaliers, comptant les marches : quatorze , l’une après l’autre.

Je tirai la couverture sur le bébé dans son berceau, embrassai mon fils endormi, puis me suis allongée à côté de mon mari et ai dit mes prières.

Il est encore en vie, je me souviens avoir chuchoté. Ensuite je me suis endormie.

Je me suis réveillée tôt, et alors que je descendais l’escalier, je savais qu’il était mort. Tout était calme, il y avait encore le son de la télévision qui avait été laissé dans la nuit. C’était sur une chaîne d’arts . Il y avait un opéra .

J’étais attirée par l’écran quand Tosca a déclaré, avec puissance et tristesse, sa passion pour le peintre Cavaradossi. C’était une matinée froide de Mars et j’ai mis un pull.


Je levai les stores et la lumière est entré dans le studio. Je lissai le lourd tissu de lin drapant ma chaise et ai choisi un livre de peintures de Odilon Redon, l’ouvrant sur l’image de la tête d’une femme flottant dans une petite mer. Les yeux clos. Un univers pas encore marqué ,contenu sous les paupières pâles.

Le téléphone a sonné et je me suis levée pour répondre.


C’ était le plus jeune frère de Robert, Edward. Il m’a dit qu’il avait donné un dernier baiser à Robert de ma part, comme il l’avait promis. Je restai immobile, frigorifiée; puis, lentement, comme dans un rêve, je suis retournée à ma chaise. A ce moment, Tosca a entamé le grand aria «Vissi d’arte. » J’ai vécu pour l’amour, j’ai vécu pour l’art. Je fermai les yeux et croisai mes mains.

La Providence avait choisi comment je pourrais lui dire adieu.

PS

(traduction RC )

peinture : Les yeux clos, Odilon Redon, 1890

peinture : Les yeux clos, Odilon Redon, 1890

I WAS ASLEEP WHEN HE DIED. I had called  the  hospital to say one more good night, but he had gone under, beneath layers of morphine. I held the receiver and listened to his labored breathing through the phone, knowing I would never hear him again.
Later I quietly straightened my things, my notebook and fountain pen. The cobalt inkwell that had been his. My Persian cup, my purple heart, a tray of baby teeth. I slowly ascended the stairs, counting them, fourteen of them, one after another. I drew the blanket over the baby in her crib, kissed my son as he slept, then lay down beside my husband and said my prayers. He is still alive, I remember whispering. Then I slept.
I awoke early, and as I descended the stairs I knew that he was dead. All was still save the sound of the television that had been left on in the night. An arts channel was on. An opera was playing. I was drawn to the screen as Tosca declared, with power and sorrow, her passion for the painter Cavaradossi. It was a cold March morning and I put on my sweater.
I raised the blinds and brightness entered the study. I smoothed the heavy linen draping my chair and chose a book of paintings by Odilon Redon, opening it to the image of the head of a woman floating in a small sea. Les yeux clos. A universe not yet scored contained beneath the pale lids. The phone rang and I rose to answer.
It was Robert’s youngest brother, Edward. He told me that he had given Robert one last kiss for me, as he had promised. I stood motionless, frozen; then slowly, as in a dream, returned to my chair. At that moment, Tosca began the great aria “Vissi d’arte.” I have lived for love, I have lived for Art. I closed my eyes and folded my hands. Providence determined how I would say goodbye.


Entre pluie et olives ( RC )


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Oui, j’étais  ce jour là dans les rencontres de circonstances,
J’aurais mieux fait d’errer au rayon parfums du supermarché,
ou de feuilleter  les magazines  chez le papetier, en face de la gare,

mais me voila coincé entre une pluie insistante et fine,
et les olives de l’apéro du vernissage du samedi soir.
Il ne fallait pas rater ça – parait-il -, enfin, c’est  ce que pense tout le monde,
qui se congratule, et se presse autour du buffet,

De toute façon on ne peut , faute d’espace,
admirer les « pièces »,            car on dit pièces maintenant,
pour des assemblages, dont on ne peut  définir
leur statut, leur présence ici;

si ce sont des sculptures, ou bricolages habiles,
qui s’étendent volontiers  sur le sol et le mur en même temps.
Mais ce n’est pas le plus important.

L’important est d’être  –   « là où ça se passe »  – , et d’évoquer l’art
…  ( Ah, l’Art !!!),       ne pas oublier la majuscule…

il est partout nous dit-on,
tellement qu’il arrive à être minuscule.

Mais il doit être là ce soir,            particulièrement,
dans un ambiance de champagne,     et de robes de soirée,
En plus des flashes du photographe,          qui rapportera dans la presse,
que l’expo a remporté un vif succès.

Ca fera déjà plus de lignes, …..    que sur M, qui ne vendait plus rien ces dernières années,
–                                 et qui s’est suicidé il y a deux semaines.
Faut dire aussi,     qu’il ne fréquentait pas les vernissages…

Tiens  voila qu’une demoiselle bien mise,                           et en colliers,

Elle me présente de merveilleux petits canapés  au saumon…

–       »   Merci bien  vous êtes très aimable  !  » –

J’en prends deux,         et puis me rapproche discrètement de la sortie.

___

Il a cessé de pleuvoir.

RC

 


Cristina Castello – Orage ( extrait )


peinture: Annonciation -  renaissance italienne,  artiste non identifié

peinture: Annonciation – renaissance italienne,         artiste non identifié

(…)
Une page se tourne pour se démultiplier
Taillée avec mon corps mon sang mon âme
Je pars avec les rosiers donquichottesques
en quête d’une innocence rédemptrice.
L’art chante dans la jungle de mes veines
Et m’emporte au son de la dernière marée
Peut-être n’est-il que l’orage
pour détacher l’arc-en-ciel de l’ombre.
Légèreté nue lumière onction de la vie
Je pars chercher d’autres mots
(…)
.
 
CRISTINA CASTELLO

Visite nocturne au musée ( RC )


  –

visite nocturne au musée (RC)

C’était le reflet furtif, des rais rapides sur le sol
Des points de lumière mouvants, les lucioles épaisses
Qui virevoltaient et s’écrasaient sur les pieds, des visages
Blancs
Blancs d’une vie arrêtée dans la pierre
Noirs d’une vie coulée dans le bronze
Cet enchantement nous décrivait cette balade nocturne,
le blanc, le noir alternativement
et quelquefois un trait de couleur – c’était un doré juxtaposé à un bleu profond
la grâce d’une main retournée, d’un voile soulevé, et d’un visage poupin

Puis les contre-jours mobiles poursuivaient leur quête,
Vaguement inquiets qu’aux gestes suspendus, la vie ne revienne
Derrière leur passage.
Qu’au labyrinthe posé ne se cache le faune.
Et rassurés de la présence lointaine d’autres lucioles
Dans l’enfilée des salles, et du parquet à chevrons qui grince,
et du marbre claquant sous les escarpins.

Sans s’attarder , du neutre cartel explicatif, à une signature pâteuse,
La Diane baroque, suivait notre passage, d’un regard pas tout à fait gris
Peut-être.

L’aube était loin, l’art était une surprise, une marche d’obstacles
Une source close d’étoiles, en élans contenus.
Du solennel en douceur de marbre, j’aurais pu souligner la courbe d’une jambe,
La douceur d’une joue, la rudesse d’une glaise de métal.

Pourtant, de notre passage, il fallait laisser au jour, aux gardiens somnolents,
La pâte fougueuse des Delacroix éteints,
la généalogie des portraits flamands qui chuchotent
En silence, le temps des étoffes précieuses et batailles lointaines.
Aux amateurs indiscrets, les heures sanglantes de Judith à Holopherne
Et la lumière tranchante du Caravage, revenue à la nuit

 

 

 

Que je complète  avec ma variation,  sur

« le musée des moulages »…

 

Au musée des moulages,

les idées n’ont pas d’age,

s’il faut que le regard voyage,

et que la main partage,

les creux et puis les lisses,

les seins et les cuisses,

que plus rien de farde,

au pays du marbre,

des statues de plâtre,

sensations folâtrent…

 

6- 03-2012

art:                                                     Maes :   portrait de femme                 Gand


Inconstance, jongleuse de lune (RC)


peinture:            Abraham Janssens:
Allégorie de l’inconstance vers 1617. —         Madeleine renonçant aux richesses de ce monde,         Palais des Beaux-Arts de Lille

 

L’art, dans l’imaginaire,  nous transporte  toujours
Et même  crée devant nos yeux l’image de la pensée
C’est un paradis, un enfer, ou , des âmes , la pesée
Les dieux en combat, les allégories  et amours

Au pays de muses, j’aime  voyager, en bonne fortune
Dans les  peintures,                   d’espaces  translucides
A sortir de son mouchoir,              lapin, ou bien lune
Jouer avec les symboles, homard et autres  arachnides

D’un espace noir, et                       peut-être sans atmosphère
Mais agité de courants, fréquenté par les bêtes  de la nuit
Et mouvements, tordant les voilages, ,       qui prolifèrent
Tandis qu’en bas, sous l’oeil des déesses, les hommes  s’enfuient.

C’est le caprice de ces dames, la fantaisie  des dieux
Qui fait le pluie  et le beau temps,                              et notre destin
Notre sort , notre vie se joue, pour ici,            en d’autres lieux
La conduite de ces affaires, n’est pas pour nous, à portée de main.

RC  12 mai 2012

 

 

 


Dylan Thomas – mon art morose.


montage perso à partir de photo de Max Ernst

Dans mon métier, mon art morose

exercé dans la nuit silencieuse
quand la lune seule fait rage

quand les amants sont étendus
avec toutes leurs douleurs dans les bras,

je travaille, à la lumière du chant,
non par ambition ou pour mon pain,

ni pour le semblant, ni par commerce
de charmes sur des scènes d’ivoire
mais pour le salaire ordinaire

du profond secret de leurs coeurs.

 
Ni pour le prétentieux,

ignorant la lune qui fait rage,

j’écris sur ces pages mouillées d’embrun,

ni pour les morts trop hauts avec leurs rossignols

et leurs psaumes mais pour les amants,

leurs bras enlaçant les chagrins du Temps,

qui n’accordent ni attention, ni salaire

ni éloge à mon métier, mon art morose.

***

Dylan Thomas (1914-1953) – Traduction d’Alain Suied

 

In My Craft or Sullen Art

By Dylan Thomas

In my craft or sullen art
Exercised in the still night
When only the moon rages
And the lovers lie abed
With all their griefs in their arms,
I labour by singing light
Not for ambition or bread
Or the strut and trade of charms
On the ivory stages
But for the common wages
Of their most secret heart.
Not for the proud man apart
From the raging moon I write
On these spindrift pages
Nor for the towering dead
With their nightingales and psalms
But for the lovers, their arms
Round the griefs of the ages,
Who pay no praise or wages
Nor heed my craft or art.

Dylan Thomas, “In My Craft or Sullen Art”