Roger Cibien – Où êtes-vous, bergers
J’aimais, j’aimais beaucoup rencontrer sur ma route
Les vénérables pâtres, lents à se confier,
Parlant à petits mots, avec des gestes de sorciers,
Dans l’immense silence, ils me disaient… Ecoute !
Et alors subjugué, effrayé par mes doutes
J’écoutais, le vent, la terre, les sentiers
Parler, jaser, siffler.
Le grand monde alors m’épiait
Mais le pâtre était là, expliquant ma déroute.
Mais les bergers sont morts …
C’est un fil électrique
Qui garde le troupeau.
Finies les images d’Attique,
Rompu le trait d’union de Dieu et des Bergers.
Les secrets de la terre, les mystères du ciel
S’arrêtent à un fil invisible et cruel !
Où êtes-vous Pasteurs ? Où êtes-vous Bergers ?
Roger CIBIEN ( extrait d’une anthologie de la poésie lozérienne )
Robert Piccamiglio – Midlands – 06 – Plus tard ( 02 )
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L’argile du cœur broyé par l’indifférence. La peur. La haine.
Aux pieds des frénésies du pouvoir toujours en marche.
Ce pouvoir je l’ai senti
sur les scènes du monde entier.
Je n’étais alors ni le troupeau
ni l’infime sillon. ni le berger anonyme.
J’étais comme cette terre riche de feu. Fusion éternelle. Longue course vers l’infini.
J’étais le ciel heurtant les saisons. L’amant.
La maîtresse habillée de gestes vifs. Insoumise.
J’étais ce fils
que je n’ai pas connu.
Ce Cavalier maintenant égaré.
J’étais cette tille que je n’ai pas eu. Cette Reine oubliée. Cette Fée d’éternité.
Le pouvoir je l’ai senti comme la rivière charriant le sang.
Puis le fleuve emportant les cadavres d’où venait le sang.
Je restais immobile.
Triomphant.
A l’image de ces volatiles
qui Jamais ne se posent.
Qu’importe la saison. .
L’odeur de l’herbe ou de la pluie.
Jamais ils ne suspendent leur vol.
Même les blés accueillant. Ou l’arbre tendant ses bras aux douceurs zénithales ne leur font refermer leurs ailes.
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Midlands est publié aux éditions Jacques Bremond, qui utilisent très souvent du papier recyclé « artisanal »….
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Sous les yeux fertiles du temps ( RC )
A tous les rivages et au murmure des vagues
Les paroles croisées, le bonheur d’une inspiration
Ainsi, le ressac régulier, et l’écume
Qui prend et donne, reprend encore
L’appel des sirènes s’est perdu dans la brume
———Personne n’en propose de traduction.
Le pays s’est usé de son voisinage,
Pour tatouer la mer de rochers,
C’est une lente métamorphose,
Qui transporte les éléments
Sous les yeux fertiles du temps
Au-delà du plein chant du soleil
Les falaises parait-il reculent
Et cèdent au liquide des arpents de prés,
Les remparts de la ville s’approchent du bord
Et seront un jour emportés,
Comme le sont les siècles
Aux haleines des brises et tempêtes.
Faute d’apprivoiser le temps
Il faut faire avec son souffle
Et le berger pousse ses troupeaux sur la plaine
Puis les plateaux, qui offrent
A toutes les transhumances, leurs drailles séculaires
D’un parcours recommencé, au cycle des saisons.
RC – 14 octobre 2012
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