Marcel Migozzi – jardin ouvrier
30 juillet –

Je vois ton jardin ouvrier, tes outils
(ai-je hérité de leur patience ou de leur tranchant ?)
Dans cette lumière délabrée des soirs non loin
du port de guerre, sur 20 m2.
La gravité de ton visage me troublait
Quand tu ouvrais pour les tomates devant moi
Des rayons à fumer d’origine terrestre,
Ou me soulevais dans tes mains d’altiplanos
Pour m’éloigner du puits sans margelle, autrefois.
Souvent je passe entre ces tours de 20 étages
Où grimpent les souvenirs de tes tomates.
Tu as disparu ailleurs, au-delà des mottes.
Le puits s’est tu dans le béton. Souvent je passe
Comme à la recherche de ces graviers humides
Piétines par un père autour d’un arrosoir
Et qui vaudraient une fortune, maintenant
- à mon père –
extrait de « les heures jardinières »
Houle à l’intérieur du béton – ( RC )

Tu sauras te confier
aux racines de l’ombre,
sentiras les vibrations venir,
traverser le mur.
Si tu plaques ton oreille à sa surface,
le tympan percevra le frottement
d’autres oreilles, de l’autre côté.
Viendront les sons, amplifiés par les gestes,
peut-être quelques mots
difficiles à comprendre,
comme une offrande qui suivrait
le parcours sinueux des tuyauteries,
paroles anonymes traversant
les viscères de l’immeuble.
Et dans les intervalles,
presque un silence.
Tu mettrais tes doigts en cornet
pour en entendre davantage,
mais ce serait juste l’illusion de la mer,
évocation lointaine du large
qui te rattrape.
Murmure d’une houle
qui déferle
à l’intérieur même du béton.
A ceux qui s’enivrent des vapeurs d’essence – ( RC )

photo perso – Singapour nocturne
A ceux qui s’enivrent des vapeurs d’essence,
je dédie un murmure
qui s’élève au-dessus des buildings.
Dans les replis de la ville, on ne compte plus les étages,
et ceux qui montent vers les sommets
se désaltèrent d’illusions.
Ils pensent ainsi dominer une partie de la planète,
jouissent d’un capharnaüm de luxe, ponctué de dentelles de néons,
du trafic des automobiles sur les bretelles d’autoroute,
de leur grondement continu ,
qui passerait pour la pulsation du monde.
Sans doute aimeront ils voir s’allumer une à une, les lumières des façades,
plain-chant d’un anonymat qui se voudrait feu d’artifice.
Mais c’est parce que la nuit favorise les contrastes,
le jour enlève les fards, révèle la laideur du béton,
les puits d’ombre entre les bâtiments où végètent d’insalubres masures.
Dans les grandes métropoles, on perd toute mesure :
l’empilement vertical s’étire avec prétention ;
vertige de puissance des multinationales jusqu’à l’outrance
des écrans géants et lettres lumineuses .
( on nous ferait croire qu’on se nourrit de parfums et de billets de banque ).
La voiture y est maître, rutilants cafards errant dans les avenues.
Le piéton paraît incongru dans un monde qui n’est pensé que pour elle,
à moins de sortir du centre, et de retrouver peut-être
une vie à dimension plus humaine,
moins saturée d’imagerie consumériste tapageuse…
A ceux qui s’enivrent des vapeurs d’essence,
je dédie ce murmure…
Pentti Holappa – parfum de fumée

montage perso –
Parole de ruine
Je veux venir près de toi.
Je ne trouve vrais ni la pierre, ni le monde ni les distances.
Le coup d’aile d’un oiseau dans le ciel de grand gel dure
aussi longtemps que la ville aux murs coulés de béton
Il m’a fallu me briser avant de perdre mes illusions.
Aujourd’hui,
je suis certain que tes cellules m’entendent
quand je parle la langue aux mille sens des ruines
en moi-même,
mais rien que pour toi en vérité.
–
Parfum de fumée (1987)
Natasha Kanapé Fontaine – Réserve II
peinture: T C Cannon
Ecoutez le monde
s’effondrer
ponts de béton
routes d’asphalte
Aho pour la joie
Aho pour l’amour
Surgit la femme
poings serrés
vers la lumière
Voici que migrent
les peuples sans terres
nous récrirons la guerre
fable unique
Qui peut gagner sur le mensonge
construire un empire de vainqueurs
et le croire sans limites
Ce qui empoisonne
ne méritera pas de vivre
ce qui blesse ne méritera pas le clan
cinq cents ans plus tard
sept générations après
Tous ces châssis pour barrer les routes
tous ces murs érigés entre les nations
tous ces bateaux d’esclaves
ces bourreaux n’auront eu raison de rien
Si j’étais ce pigeon qui vomit
sur les hommes de bronze
fausses idoles carnassiers ivres
se tâtant le pectoral gauche
avec la main droite
lavée par les colombes
Qui d’autre est capable
de provoquer l’amnésie
octroyer la carence
à ceux qu’il gouverne
Qui d’autre sait appeler union
ce qui est discorde
pour s’arracher le premier
pour s’arracher le meilleur
des confins de toutes les colonies
qui d’autre sait appeler croissance
ce qui est régression
construction
ce qui est destruction
les peuplades pillées à bon escient
au nom du roi et de la reine
au nom du peuple qui meurt de faim
à Paris
à Londres
à Rome
à New York
à Dubaï
à Los Angeles
à Dakar
au nom du peuple
qui se bâtit par douzaine
à Fort-de-France
à Port-au-Prince
à La Havane
à Caracas
à Santiago
à Buenos Aires
Aho pour la joie
Aho pour l’amour
Qui d’autre sait nommer le mensonge
pour le voiler
La ville persiste en moi
assise sur l’avenue des Charognards
je guette l’allégresse
la haine qui me pousse à hurler
Je guette le nom des ruelles
de la grande mer
qui laisse passer les pauvres
à l’abri des vautours
La guerre est en moi comme partout.
–
Pour écouter les poèmes de NKF sur lyrikline rendez-vous ici…
Juste une hypothèse sur l’existence des choses – ( RC )
peinture: H Matisse
J’ai crû que c’était le matin.
J’ai regardé ma montre.
Il est plus de 9 heures .
La météo n’en a rien dit
( on ne l’aurait pas crue ).
Ou bien ce serait un saut dans le temps .
La nuit s’en engouffrée dans le jour
a profité d’une brèche :
J’ai ouvert la fenêtre.
L’éclipse du temps s’est étendue
pendant la nuit,
et se prolonge
jusqu’à l’immobilité des choses.
Je distingue à peine les murs d’en face.
Le béton, les cheminées, d’autres fenêtres.
Elles portent un voile de deuil.
Aucune lumière.
Les lotissements sont bien là, obscurs.
Les immeubles ne présentent que des surfaces,
plantés au sol comme des esquisses de décor.
A peine plus noirs que le fond d’encre.
Les rues où rien ne circule.
Tout a été happé par le silence.
A la façon d’un Malevitch
qui aurait peint du noir sur du noir.
C’est bien le matin,
d’après l’heure ,
mais peut-on l’appeler encore comme ça ?
Le jour s’est perdu quelque part,
happé par l’infini,
– que sais-je ?
A moins que j’aie seulement rêvé:
un rêve de lumière, caressant les choses,
la pensée d’un astre,
( juste une hypothèse sur
l’existence des choses ),
que rien ne viendrait confirmer .
–
RC – mai 2018
Formant une colonne chantante – ( RC )
photo perso – Burkina Faso
Il fallait que je marche
sur les sentiers secs
parsemés de pierres
et d’herbes sèches,
longtemps ,
depuis le village
– je n’en ai plus la notion –
pour arriver jusqu’au puits.
Il y avait un cercle de béton:
une rondelle comme une estrade,
où des femmes en pagnes
s’activaient à la pompe,
en exprimant la soif du monde :
il y a au village
toujours des bouches
qui demandent à boire…
Sous le soleil de l’Afrique.
l’ombre des manguiers ne suffit pas
à en tempérer l’ardeur….
Elles avaient la peau luisante
d’éclats d’eau et de sueur,
et riaient de me voir attendre,
empoussiéré,
une bouteille en plastique vide, à la main .
Elles s’apprêtaient,
quelquefois avec un enfant accroché au dos,
à prendre à leur tour
les sentiers secs
parsemés de pierre,
un gros bidon jaune,
en équilibre sur la tête
formant une colonne chantante .
–
RC – nov 2017
Jean-Pierre Paulhac – Une voix
Une voix
Comme un sourire
Une voix
Comme un soleil
D’océan indien
Une voix
Comme un horizon bleuté
Vers lequel voguent mes mots
Aspirés d’espoir
J’entends
Des rires de palmiers qui se tordent de musique
Des pas de danse qu’invente une plage espiègle
Des chants qui montent sur des braseros ivres
Des crustacés qui crépitent leur saveur pimentée
Ici
C’est le silence gris des bétons déprimés
C’est la glace qui saisit tous les masques
C’est un jadis souriant embrumé d’ombre
C’est l’ennui qui ne sait que recommencer
J’entends
Des guitares rastas aux cris de parfum hâlé
Des bras nus de désir qui dégrafent la lune
Des hanches insatiables que dessoudent la salsa
Des nuits secrètes aux folles sueurs de soufre
Ici
C’est le mutisme morne des grimaces polies
C’est la morgue soyeuse des cravates policées
C’est la cadrature étroite des cercles vicieux
Qui soumet à ses ordres la horde quadrillée
J’entends
Mes souvenirs marins d’aurores océanes
Mes remords nomades de dunes vives
Ma mémoire exilée qui déborde en vain
De tant d’hivers que la chaleur a bafoués
Ici
Le temps se tait s’étire et se désespère
Le temps n’est plus une chimère bleue
Le temps se meurt de mourir de rien
Et chaque ride compte un bonheur perdu
J’entends
Un rêve qui papillonne son corail osé
Un rêve qui murmure un refrain salé
Un rêve qui soupire son souffle de sable
Sur l’éternel instant d’un été sans fin
Une voix
Comme un sourire
Une voix
Comme un soleil
D’océan indien
Une voix
Comme un horizon bleuté
Vers lequel voguent mes mots
Aspirés d’espoir
Une ville dont je connais les artères – ( RC )
C’est une ville dont je connais les artères,
je les ai parcourues, en tout sens,
il y a longtemps,
et je trouvais mes repères ,
devenus familiers,
à la façon d’un jeu de pistes.
Je suis retourné,
dans ma ville natale,
les places ont bien le même nom,
mais les immeubles n’ont plus le même aspect,
leur aspect est devenu froid,
débordant de béton et de verre.
Les rues ont le même tracé,
mais je ne les reconnais plus .
Elles ont perdu leur familiarité,
leur intimité.
Elles sont des lieux de passage,
et pourraient être ailleurs.
L’ailleurs s’est importé,
décalqué, en quelque sorte
sur les quartiers, que je traversais à pied.
La ville que je connaissais
s’est dissoute peu à peu, comme un souvenir
auquel je n’accède plus.
Elle n’a de nom que géographique .
La ville de mon enfance
avait son charme désuet,
ses rues encombrées,
mais je pouvais lui parler.
Mais si je le fais aujourd’hui, personne ne répond.
–
RC – janv 2017
Les inscriptions cohabitent avec les mousses – ( RC )
On a bien construit
de hautes pyramides,
de puissants ziggourats,
des buildings prétentieux,
pour que la pierre et le béton
se dressent
pour défier l’espace
et le temps.
On a peint sur les murs,
des fresques colorées ,
les églises furent habitées
de fantômes sculptés ,
la messe a été dite,
et les paroles se sont perdues
à mesure que les voûtes
buvaient les fumées des cierges.
La tour de Babel s’est écroulée,
le phare d’Alexandrie est sous les eaux,
les fresques sont illisibles,
les statues décapitées,
les épitaphes nous parlent
d’une langue
qui s’est égarée
comme des vaisseaux dans la brume.
Il y a eu des archipels
bâtis sur le sable,
des temples enfouis
sous les vagues denses, de la forêt
et des murs dont les inscriptions
cohabitent avec les mousses,
dialoguant quelque temps encore
avec la neige et le vent .
–
RC – août 2016
photo : détail de la tombe d’Elizabeth Hayden
Andrzej Zaniewski – Mémoires d’un rat
extrait de son ouvrage : mémoires d’un rat
Devant la porte ouverte d’une boulangerie, des gens debout gesticulent, pointent le doigt, sifflent, émettent des bredouillements informes.
La petite rate est énervée, désorientée, aveuglée.
Elle pourrait très facilement se glisser sous la porte qui ferme la cour du côté de la rue.
Mais c’est de là que vient l’horrible vacarme des voitures, des pas, des conversations.
Aussi recule-t-elle avant même d’avoir atteint la fente entre le panneau de fer de la porte et le béton.
Dans la cour, il y a des poubelles.
Elle essaie de se cacher derrière l’une d’entre elles.
Un homme en blouse blanche s’approche et donne un coup de pied dans le container en tôle.
Effrayée, la petite rate sort de sa cachette et détale vers la pompe, au milieu de la cour.
L’orifice d’écoulement se trouve dans un petit creux, mais il est fermé par une épaisse plaque grillagée.
La rate, apercevant de loin cette surface brune, a dû croire qu’elle pourrait se glisser à l’intérieur.
Elle se presse contre la plaque dure, elle mord, elle griffe,
elle enfonce son museau dans les trous.
En vain. Le passage est bouché, l’accès impossible.
A travers les trous, elle distingue l’obscurité humide de l’égout, un monde familier, connu, rassurant.
Un homme approche, débraillé, la blouse flottant au vent, bruissante.
De son bonnet dépassent de longs cheveux blonds.
Il ricane, piaille, halète, émet des sifflements et des gloussements.
Il approche encore. La petite femelle se blesse les gencives contre le métal,
elle saute, elle se tapit, elle tremble de peur.
L’homme est tout près, il tient dans la main une bouilloire fumante.
Il la soulève, très haut, le soleil se reflète dans l’aluminium comme dans un miroir.
Les sons deviennent de plus en plus forts.
Un torrent d’eau bouillante se déverse sur le dos de la petite femelle.
Elle essaie de fuir. En vain.
La voilà qui tombe, culbute, s’enroule sur elle-même, se tord.
L’eau ruisselle sur son ventre.
Un cri perçant, qui vrille les oreilles.
Un flot d’eau lui pénètre dans les narines.
Le cri faiblit, s’éteint.
L’homme pousse la rate avec son pied, se penche, vérifie.
Il la saisit par le bout de la queue, entre deux doigts, et l’emporte vers la poubelle.
Il soulève le couvercle et la jette dedans.
Je me retourne, je rampe sur le sol froid, je fuis.
Vers le nid, le trou, les ténèbres.
Un volcan au Havre – ( RC )
–
L’esplanade aurait pu continuer,
Indéfiniment.
Il suffisait d’aligner les plaques de béton.
Tant que l’espace le permet ,
Entre les barres d’immeubles ,
Sans accroc.
Propice aux courses folles,
Où viennent voleter
des sacs en plastique .
Il y a encore les traces de peinture renversée,
Puis les arcs sombres
laissés par les pneus des voitures.
C’est un espace sec, infertile,
De plaques préfabriquées,
Où la ville a chassé ses arbres.
On s’étonne de voir une frêle silhouette le traverser.
Incongrue.
Comme un scarabée sur une plaque de cuisson.
Et encore davantage
lorsque le gris uniforme,
Est stoppé net,
Par les pentes blanches, abruptes,
D’un Fuji-Yama,
Surgi, là où on l’attendait pas.
Une envolée de l’esprit,
Prenant ses racines au sein même du banal,
Décisive.
–
RC – dec 2014
Pentti Holappa – Parole de ruine
–
Parole de ruine
–
Je veux venir près de toi.
Je ne trouve vrais
ni la pierre, ni le monde ni les distances.
Le coup d’aile d’un oiseau dans le ciel de grand gel dure
aussi longtemps que la ville aux murs coulés de béton
Il m’a fallu me briser avant de perdre mes illusions
Aujourd’hui,
je suis certain que tes cellules m’entendent quand je parle
la langue aux mille sens des ruines
en moi-même, mais rien que pour toi en vérité.
–
Pentti Holappa
Est-ce que le nom suffit à ton existence ? – ( RC )

gravure: Zoran Music: paysage de Dalmatie Tate Gallery
–
Si à chaque chose on peut donner un nom,
Dessiner un destin,
La distinguer des autres,
Lui prêter une couleur,
Pour les hommes,
Il y a toujours ceux qui renient
Les autres,
Pour leur présence même,
Il ne suffit pas d’une carte d’identité,
Pour les faire exister,
Au-delà d’un morceau de papier,
Ou d’un tiroir à fichiers,
Classés non seulement par ordre alphabétique,
Mais aussi selon leur origine,
Quel que soit le désert,
Ou la ville, dont tu viens.
Quand, encore , on ne juge pas utile,
De dresser une barrière de béton,
Autour de ta non-existence,
Ou de te coudre une étoile jaune .
–
RC – février 2014
–
NB la gravure qui accompagne ce texte n’est pas directement évocatrice, comme certaines de ses oeuvres, relatant la déportation et la Shoah, lui-même ayant été interné au camp de Dachau
–
L’échappatoire – ( RC )
–
Comment peser de son regard,
Au long des trottoirs d’une ville,
Que je ne reconnais pas.
Les vieux faubourgs nivelés,
Les rues formatées,
Le béton s’est démultiplié.
Des immeubles anonymes,
Se succédant sans trève,
Et des voitures blanches,
Comme une succession d’ossements,
Déposés là, blanchis au soleil blafard
Sur le bord de rues grises
Au ciel rayé de fils tendus,
De panneaux de signalisation,
Et de publicités clignotantes.
Parfois l’espace incongru,
D’un nouveau chantier,
Et le ballet de grues jaunes
Il y aurait aux palissades,
Des fentes de lumière entre les planches,
Des affiches à moitié décollées,
Et sur le mur d’en face
Un tag jouant avec les mots,
Accrochant la pensée
….Une échappatoire
Vers un ailleurs possible
Ouvrant des perspectives
Autres que celles des avenues,
Rectilignes et sans âme,
Où même les arbres ne semblent pas à leur place.
Je remplacerai ton désespoir,
Par un sourire dessiné sur le ciment,
Ou par un dessin d’enfant.
–
RC- février 2014
–
Derrière les masques riants d’aujourd’hui ( RC )

peinture: Henri Rousseau ( le douanier): la guerre
Lorsque l’effervescence s’empare des esprits,
Que la lumière bondit d’arbre en arbre,
Si, encore, la vie crie à perdre haleine,
Comment oublier, il y a quelques jours encore,
Les fureurs, et les bruits destructeurs,
Les tronçons d’arbre et les murs,
Marqués par la guerre et les incendies ?
Chacun peut chercher en soi sa voix,
Et aussi essayer de saisir un univers
Qui échappe à sa propre logique,
Mais l’élan qui revient, le retour du printemps,
Canalisé de murs de béton,et de ruisseaux d’acier,
Porte encore en lui, une noirceur d’à-venir
Derrière les masques riants d’aujourd’hui.
–
RC – 12 juin 2013
–
– en relation avec le texte de Claudio Pozzani; » Cherche en toi la voix que tu n’entends pas »
–
Coquilles vides, Serra Estrela ( RC )
–
Serra Estrela, tout en sépia
Colorée d’un vent de sable
Des cubes de béton, placés là, incongrus,
Relais entre précipices,
Ouverts à tous les vents,
Et à ceux qui emportèrent,
le fil ténu, et les cabines du téléphérique,
Quelque part dans l’oubli.
Reste une coquille vide
Et qui sert d’abri, à l’occasion,
Aux troupeaux de passage,
Comme toute la surface jonchée
Des crottes des moutons,
Poursuivant consciencieusement,
Leurs destins brouteurs,
Quelque soit l’endroit,
Même dans l’ambiance grise
où, tapis dans l’ombre, des câbles remisés,
Et de gigantesques mécanismes
Rouillaient d’inutile,————–pendant que la vallée
S’éteignait dans le soir.
—
RC 23 mai 2013
–
Inspiré de deux lignes d’un poème de Marie-Ange Sebasti;
Les troupeaux ont noirci les dalles du temple
et piétiné ses murs …
–
Feuilleter le recueil des causses ( RC )
–
Texte en rapport avec « A la mer retirée »
Causse Méjean – reliefs et neige – ( toutes photos présentes ici : perso – me contacter pour une réutilisation éventuelle )
–
Des bouffées de lumière,
décrivent ,mieux que je ne ferais,
le recueil des causses.
Encore striés sous les neiges,
piquetés d’impatientes pousses, et de bruns.
A chaque détour, le savoir lire ,
du vent de l’ivresse,
épouse les accidents des collines,
chapeautées de bois sombres.
Le dialogue menu des eaux, serpentant dociles,
puis, rassemblées, mugissantes,
De chants clairs cascadeurs,
et résurgences vertes.
Le pied des pentes abruptes,
surplombées de témoins sévères, verticaux
Une route mince, s’essaie à contourner
ces vases de pierre,
Pour plonger dans une vallée étroite,
encore habitée par l’obscur,
Dispensée des lignes orgueilleuses,
des ponts de béton.
Et le silence matinal, n’est habité
que de spirales lentes
Des vautours, glissant sous des écharpes
blanches, effilochées ,portées par la brise.
Peu importe la route
Ses dévers et sa course,
Soumise au caprice de la rivière,
Ou lancée sur les plateaux.
La constance du roc
Ou le moelleux des terres.
Le paysage reste une porte
Feuilletant le passé calcaire
D’un océan, son souvenir
Enfui
–
RC – 19 mai 2013
–
Causse Méjean – restes de neige
Causse Méjean – restes de neige
Causse Méjean – restes de neige
Causse de Sauveterre, vers Montmirat
Vallée du Tarn au dessus de St Chély
Arbre illuminé entre rocs St Chély-du-Tarn
« couple »: rochers ruiniformes vallée du Tarn
Sainte Enimie, Vallée du Tarn, résurgence de la Burle
Sainte Enimie, Vallée du Tarn
![]() |
Causse de Sauveterre, environs de Champerboux |
![]() |
Causse de Sauveterre, environs de Champerboux
Article visible aussi sur mon site de photos des causses .
–
Le regard dans ton miroir ( RC )

sculpture-trace : Giuseppe Penone – Soffio I, 1978. Amsterdam 2004
–
Voilà sortie de la terre, ma silhouette ,
ou bien moulée dans un coffrage de béton,
C’est dire que le monde m’enveloppe
Et ainsi , suis l’île
Offerte à l’éternel chronophage…
–
Ile flottante, épave et barquette,
Amusette aux voisinages du plancton
Sous-marin, périscope
A mes risques et périls
Emerge le bout de mon visage….
–
Et s’il se trouve ainsi , que je passe
…. Hasard des trajectoires
– s’est égarée une flèche –
Au coeur des « je t’aime »
… Cible atteinte pour Cupidon?
–
Si j’apparais dans la nasse
Mon regard dans ton miroir,
C’est aller à la pêche,
– Et peut-être un poème ?
Dont nous ferons chanson…
–
RC mars 2013
–

peinture: Lorenzo Lotto – 1480-1550 – Venus et Cupidon – Met mus of Art N YC
Comme dans un tableau d’Edward Hopper ( RC )
–
Des chaises en plastique blanches, aux pieds chromés,
Banquettes rouges plaquées le long du mur,
Lumières froides suspendues
Et un personnage à table, lisant le journal
Caché en partie par un pilier de béton
Enveloppé malgré lui, du décor anonyme
Au bar de l’aéroport, … – comme dans un tableau
D’Edward Hopper
RC – 22 décembre 2012
–
Blockhaus en front de plage ( RC )

hotel Adghir Alger- Bordj El Kiffan,
–
Blockhaus en front de plage
Immeuble de béton sur sept étages
Posé comme un cube prétentieux
Frontière de quartiers miséreux…
L’ailleurs reste surtout un peut-être
La mer ne se voit, qu’avec un reflet de fenêtre
d’en face, …. carré dans la façade grise
Du grand hôtel, où le temps s’éternise
Je peux toujours compter les plaques de marbre
Ou chercher au loin les arbres
Une prison dorée reste une prison,
Et la vue ne s’échappe pas sur l’horizon
–
RC – 23 décembre 2012 – Alger
–
Laissés pour compte ( RC )

peinture: R Magritte – pluie de personnages ( le généreux donateur)
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Il pleut des personnages, en habit de ville
Raides comme des soldats de plomb
En contre-jour de lampes d’un destin immobile
Ne traçant que vers le plus long
Les hommes s’étalent dans l’alcool
Et ne cessent de revenir en arrière
A même la dure surface de béton, du sol
Tatouages bleutés de leur mémoire de chair.
L’humanité a la gueule de bois,
La parole creuse, mais prolifique
… elle nous revient de guingois,
Au lent bal des années pathétiques.
Il pleut des personnages, clones de camarades
Egalité, éternité, fraternité
Et fête en marmelade
C’est ce qui fait la liberté
De tous les laissés pour compte
Ceux aux habits raidis
Au rendez-vous de la honte
De leur vie, le taudis
Au bal de la soupe populaire
Qui n’ a , au goût de paradis
Que l’amer de l’en- terre
Cercle de misère, et des maudits.
RC 10 juin 2012
–