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Chair de bitume – ( RC )


La pâte ,
chair de bitume,
lave solidifiée,
la route
sous le feu de l’été
liquéfiée.
Toi tu étales,
moi je racle,
mais rien ne s’en va
sinon quelques graviers
rebelles.
Pieds englués.

La pâte toujours,
chair de peinture,
poussée par la brosse,
sera peut-être un jour
lumière,
un visage, un regard.

Elle maintient le nôtre
prisonnier,
avec des caprices de geste,
figés.
Quelques poils de pinceau
collés, rebelles.
Ils pourraient être nôtres
ces poils, sitôt enlisés
dans le silence.

Monochrome.
Noir de bitume.
Racles plus fort !
et tu me trouveras.

RC


Strass – (Susanne Derève) –


Pierre Soulages – Etude 04 B

.

Ce ne sont que petits éclats

de verre de strass  de mica *

que recouvrent les pas

que ternissent les ombres

qu’engloutissent les nuits

.

Est-ce un rayon de lune

un diamant désuni  ?

Un soulier sonore  

claque sur le bitume  …

.

Qu’a t il trahi  de rêves

celui qui foule aux pieds

et passe sans les voir 

ces étoiles pâlies,

ces perles égarées,

.

petits éclats de verre

de strass ou de mica *

qu’enserre  le granit

et qu’étreignent  les pas

.

* emprunt à  Jean Claude Pirotte


Je marche dans l’inconnu – ( RC )


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peinture:  Ellsworth Kelly

 

Là où le monde secret des inanimés perd de son mystère ,
en léchant ses plaies de lumière ,
on se tire difficilement du sommeil ,
dans le parcours des heures qu’interromp le réveil .

On a encore dans la tête , mille rêves .
Ils éclatent, comme une bulle crève ,
quand le jour s’élance
l’aube effaçant le silence
du coeur même de la nuit .
On doit reconquérir son esprit ,
ranger l’armoire à nuages ,
se préparer au voyage ,

  •    Aujourd’hui nous attend ;
    il faut plonger dedans ,
    endosser son costume ,
    poser ses pieds sur le bitume .
    Il n’est pas certain qu’il s’ajuste exactement  :
    ce matin ,         je ressens un flottement
    entre hier et aujourd’hui :
    >   pas sûr que ma vie
    me suive à la trace :

à mesure, elle s’efface
sans plus me correspondre :
les minutes et les secondes ,
les années anciennes
ne sont plus les miennes :
le temps est discontinu :
>                   je marche dans l’inconnu.


RC – juill 2017


Gabriela Mistral – L’attente inutile


315471826_15fe2492c5 Bronze Sculpture of a Girl Holding a Sundial in the Rose Garden of the Brooklyn Botanic Garden_ Nov. 2006_M.jpg

sculpture en bronze représentant une fille tenant un cadran solaire, au jardin botanique de Brooklyn

 

J’avais oublié qu’était devenu
rendre ton pied léger,
et comme aux jours heureux
Je suis sortie à ta rencontre sur le sentier.

J’ai passé vallée, plaine, fleuve,
et mon chant se fit triste.
Le soir renversa son vase
de lumière, et tu n’es pas venu   !

Le soleil s’effilocha,
coquelicot mort consumé;
des franges de brume tremblèrent
sur la campagne.          J’étais seule!

Au vent automnal craqua
d’un arbre le bras blanchi.
J’eus peur et je t’appelai ;
Bien aimé, presse le pas!”

J’ai peur et j’ai amour,
presse le pas, bien-aimé!
Mais la nuit s’épaississait
et croissait ma folie.
La espéra inûtil.

J’avais oublié qu’on t’avait
rendu sourd à mes cris;
j’avais oublié ton silence,
ta blancheur violacée;

ta main inerte, malhabile
désormais pour chercher ma main,
tes yeux dilatés
sur la question suprême!

La nuit agrandit sa flaque
de bitume; augure maléfique,
le hibou,      de l’horrible soie de son aile,
griffa le sentier.

Je ne t’appellerai plus
car tu ne parcours plus ton étape;
mon pied nu poursuit sa route,
le tien est au repos.

C’est en vain que j ’accours au rendez-vous
par les chemins déserts.
Ton fantôme ne prendra plus corps
entre mes bras ouverts!

 

 


Une sculpture fragile ,une chemise de nuit, et un nuage de dentelles – ( RC )


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peinture:  Anselm Kiefer

 

Sur le socle, une sculpture fragile ,
une chemise de nuit, et un nuage de dentelles.
Elle protège ton corps, hautement inflammable .
Ceci a à voir avec la magie :
tu repousses la pénombre,
celle des fumées, qui ont fini – autodafés –
par fermer le monde d’un couvercle.

Le bitume se fendille, la terre ouvre des crevasses.
Elle a soif.
Les gens ont des robes de béton,
et des voiles noirs
qui pèsent autant que s’effacent les couleurs.
Ils essaient de sauver quelques objets,
ce qu’ils ont pu emporter
sur une charette.

Ils m’ont pris pour l’un des leurs,
car j’avais sous le bras
ton portrait inventé,
dans une chemise de nuit,
et un nuage de dentelles.

RC – mai 2017


Sur la face à Gainsbarre – ( RC )


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photo         A Garcia        2016   Paris

 

 

J’ai marché sur un visage,
C’était une trace laissée sur le sol,
une trace de passage
( pas de celle que l’on décolle ) .

On voit trop de choses sur les murs,
tant et tant ,       que l’on s’en fiche…
il y aura toujours d’autres affiches,
ou des graffitis de peinture…

Mais là,         c’était sur le trottoir:
foncé ,        comme qui s’enrhume,
…       Aplatie sur le bitume,
la face à Gainsbarre…

– RC –

 


Colette Fournier – transfuge


photo: Ann Arden McDonald

photo:       Ann Arden McDonald

Publié le 16/10/2012 par

Entre dérobade et vertiges

La cambrure de ton âme ressemble

A s’y méprendre à ces nefs d’église

Que la foi a désertées…

Paysage rongé de ronciers et aride

Où nulle eau ne serpente

Où nulle joie ne se créée…

J’en connais de ces vaisseaux amers

Qu’une houle bascule

En roulis de bitume

Et qui ne veulent plus même

Etre sauvés !

Et frotter leurs cœurs vides

A l’aumône du temps

Battant à pleine pompe

L’heure de tous les vents !

Crois bien que ma lanterne

Se brise plus qu’à son tour

Sur des récifs étranges

Aux étranges contours

Mais je les veux mouvants

Malléables et tordus

A l’aune de mes désirs

Trempés d’encre et perdus

S’ils ne s’écrivent pas…..

Je suis une maison

Balayée de printemps

Et qui se refuse à mourir

Tant qu’il restera

Quelque chose à faire frémir

A la pointe de mon regard

Transfuge

De toutes les mémoires…

photo: Josef Koudelka
photo:            Josef Koudelka

  ( visible  donc  sur son site  colettefournier.com )


Claude Minière – je reprends la main


………..je reprends la main

à la bonne vitesse

dans la courbe penché

sur la ligne du cercle

blanc sur noir

l’inconnu comme conscience

                      comme rail matériel et abstrait

 

comme écoutant le sol trembler

                       je reprends la main

 

à la limite de l’adhérence

                        le pneu soudain quittant la chair du bitume

                                                           perdant le contact, le fil

 

Je reprends la main

      je me reprends par la main sur le tapis vert

                                                            de la vérité chorale des pâquerettes

                                                                    du sang des coquelicots


N’ayant pas égaré ma plume – (RC)


 

 

peinture-dessin: reproduction aquarellée de mail-art- production personnelle

 

N’ayant pas égaré ma plume, au clair de la brume,

Dans mes forêts , mon marécage, toi ton bocage

Je n’ai pas oublié que le pouvoir des mots

Aidait chacun à sortir de sa cage,

Du désert, ou de l’urbain étalage de bitume

Les mots sont l’aide d’un bruit silencieux,

Ceux ci nous disent l’exister, et l’approche des lieux

La vie, comme souffle , paroles et partage

Au delà des contraintes et orages.