Kenneth White – la porte de l’Ouest

L’échappée, ah – cette lueur bleu sombre
le long du fleuve puis
l’éclair d’ambre doré puis encore
la lueur bleu sombre tout le long du fleuve
( vieux rafiot noir là-bàs traînant
près d’un gros paquebot blanc )
et les nuages filant bas
au-dessus des vagues grises aux crêtes
écumantes ( ah cette courbe qui se brise ) et en haut
le vol noir des goélands
Puis les collines, fougères rousses entre-
mêlées et les ronces et les roses sauvages et
le houx rouge-sacré dans la neige
et les arbres dégoulinant de pluie –
marchant sur les chemins de glace bleue les
ruisseaux impétueux l’air mordant
et cette lumière d’une clarté folle
cette lumière abrupte angélique démentielle
qui fait surgir le monde dans sa nudité
réel toujours changeant clair-obscur perpétuel.
Marcher vers le blanc – ( RC )

Avant le blanc,
je ne savais rien du passage
qui se fraie dans le cœur
invisible du temps :
l’émergence de la couleur
ne s’apprend que
lorsqu’on en a oublié
le langage et la signification
des phrases apprises par cœur,
mais qui nous masquent
les bords du silence.
Ainsi rien ne nous indique
le chemin, car nous suivons
celui qu’on nous a appris,
à la place de l’inventer
avec patience
en sortant des voies
où les formes
luttent contre les ombres.
Mais la couleur ne se saisit pas.
Elle traverse juste le regard :
on ne la décrit pas,
car elle ne se livre
qu’avec discrétion,
et avec des variations infinies,
sans contours précis.
On sait juste que la lumière
lui donne naissance,
et que chacun la perçoit
en ajoutant la nuance
de sa vision .
Jusqu’à ce que les teintes
prennent leur indépendance,
se superposent
entament une danse
qui n’a d’autre fin
que l’assouvissement.
C’est alors
qu’on peut marcher vers le blanc.
Jean-Claude Goiri – la forme qu’il faut

Prends la forme qu’il faut pour aller partout, juste partout, à chaque
endroit qui grince, qui frotte comme il ne faut pas, juste dans la non
zone, dans le palais du naître, juste où ta langue va claquer pour dire le
mot juste, juste où il ne faut pas mettre un pied devant l’autre, où les
vers ne sont libres que de se taire, à l’endroit exact d’où le giclé se
reforme, d’où le fusé repart pour de nouvelles aventures, juste là où ça
craque quand ta chaise s’alourdit, prends juste la forme qu’il faut pour
aller partout, juste cet endroit où les couleurs remplacent toute autre
forme de vie, cette vie dont tu rassembles les éclats, juste un moment
pour voir ce que ça donne dans le blanc, et pour voir aussi comment
ça marche le blanc, et pour ça tu prends juste la forme et le temps qu’il
faut pour aller nulle part, et ton œil qui cherche à poser son regard, ce
regard qui devient multiple, comme ces herbes folles qui poussent
parmi celles qui ne le sont pas, prends juste le temps d’aller beaucoup
partout
Jean-Claude Goiri est actif au sein de FPM ( le festival permanent des mots ).: éditions Tarmac
Ce texte est issu d’un pdf disponible sur le site « les cosaques des frontières »
Sois partout où je ne suis pas – ( RC )

Sois partout,
où je ne suis pas :
j’aime l’embrasement
des anges dans le bleu,
quand la nuit s’éteint
et que le jour pointe…
Comme si, derrière tes yeux,
je devinais ces matins,
où la pluie tombe, continue.
Ce sont des fléchettes
qui se plantent dans le sol,
et hachent ce qu’il reste de blanc.
La neige se dissout
en pâte molle.
L’épaisseur blanche se rétrécit,
telle une peau de chagrin
et on voit à travers les herbes
qui réapparaissent, têtues .
Derrière tes yeux,
les saisons s’apprivoisent.
- J’ai beau essayer,
je ne verrai jamais
ce que tu vois, ni le jour,
ni la nuit qui se morcelle…
Un magicien ne pourrait
échanger nos regards,
et dans l’aube aucune empreinte
de morsure ne demeure:
l’air ne garde pas trace
de ce que tu as vu.
René Depestre – Est-ce vrai ?

Est-ce vrai que la force de mes bras et la machine à laver ton linge sont des chevaux du même attelage sont des esclaves de la même chaîne ? Est-ce vrai que tu préfères le phare blanc de ton auto au feu noir de mon visage, la patte blanche de ton chien au joyeux bonjour de mes mains ? Est-ce vrai que tu ne sais pas de film plus doux et reposant que le spectacle de mon coeur montant sur le bûcher raciste ? Est-ce vrai que tu gardes à portée de la main une corde qui porte mon nom une balle qui sait par coeur la carte obscure de mon corps un tribunal toujours prêt à me couvrir de ténèbres un linceul coupé sur la mesure de mon âme ? Ô blanc serpent du racisme crieur de mon sang versé comme j’eusse aimé que tout ce poison naquît de la nuit des mauvaises langues comme j’eusse aimé crieur de mes jours voir quelque lueur rétablir le cours humain de la beauté dans ton coeur ! Mais le sang versé des nègres du haut de ses saisons en fleurs me crie de prendre garde à toi tu es sur mon chemin me crie le sang musicien tu es une tête de mort une mauvaise tête de la pire des morts une tête à claques au service de la mort.
René Depestre
Minerai noir
Anthologie personnelle
Poésie Points
Luce Turnier : peintre Haïti -1924-1995
Emily Dickinson – Poème 739
//

C’est une Joie d’avoir mérité la Souffrance –
Et de mériter qu’elle s’Arrête –
Une Joie d’avoir péri à chaque pas –
Pour Embrasser le Paradis –
Pardon – de contempler ton visage –
Avec ces Yeux passés de mode –
Il se pourrait – que pour cela – ils surpassent des neufs –
Achetés pourtant au Paradis –
Car ils t’ont contemplé avant –
Et tu les as contemplés –
Prouvez-Moi – Mes Témoins Noisette
Que les traits sont bien les mêmes –
Si fugace, quand tu étais là –
Si infini – une fois parti –
Apparition Orientale –
Renvoyée à la Juridiction matinale –
La Haute taille je m’en souviens –
Egale à celle des Collines –
La Profondeur fut gravée dans mon Âme –
Comme les Inondations – marquent le Blanc des Roues –
Tu vas me Hanter – jusqu’à ce que le Temps lâche
Sa dernière Décade,
Et cette Hantise en fait – va durer
Au moins – l’Eternité –
Du lait sur la table – ( RC )

C’est un rectangle blanc,
qui demeure immobile,
répandu sur la table,
exactement comme neige ;
ainsi j’invente un paysage
où nulle trace ne s’imprime
à la surface du lait.
Le monde se console
de la laideur,
et mon dessin
restera inachevé.
Pour desserrer l’étreinte du gel – ( RC )

Le soleil est allé voir ailleurs,
et passe davantage de temps
de l’autre côté de l’hémisphère.
Aujourd’hui sont arrivés les jours de glace,
suspendus aux branches
comme des minutes allongées
à leurs bras griffant l’air.
Les corbeaux en profitent
pour déplacer une part de ciel
en confisquant du blanc.
La lumière a changé de camp.
Elle vient du sol, maintenant.
Sont apparues les fleurs de neige
encore légères, filles de l’hiver.
On y voit presque en pleine nuit.
La pleine lune est réapparue
rebondissant entre les nuages .
Le froid , malgré tout, n’a pas insisté.
Il faut l’encourager à desserrer son étreinte,
à entr’ouvrir ses doigts de gel.
Au matin revenu , une lumière plus légère
annonce le redoux .
Nous ne reverrons pas les oiseaux noirs
quand elle reprendra son envol.
Blancs muets – (Susanne Derève)

Le Secret – Auguste Rodin (1910)
Blancs muets
L’espace de silence du ciel
du lever du jour jusqu’à sa longue descente
vers la nuit
le langage retenu
les non-dits
l’e dérobé de l’indicible
(la page blanche du souvenir)
****
Blanc virginal
Petites mains pressées
l’aiguille s’affaire sur les voiles gansés
tulles crêpes aubes
ourle faufile
ardente
sous la lampe
****
Blanc repentir
Cette autre main tachée de plâtre
épurant patiemment la matière
y traçant les lignes de vie
gommant le trait
pour en tirer obstinément
une poussière aveugle inanimée
****
Et d’elle au souvenir bien moins
qu’un voile de mariée,
l’épaisseur d’une plume au vent,
la transparence végétale
d’une fleur de printemps
l’aile ténue d’un soupir
Walter Helmut FRITZ – Donne aux choses la parole
- Robert Ryman – Capitol
Donne aux choses la parole
A l’eau qui chevauche,
aux rocs avec leurs rêves,
au chemin qui est le but,
à la neige qui cache
lentement le paysage
et le rend visible autrement,
à la lumière qui attend
les yeux —
donne-leur la parole.
Gib den Dingen das Wort
Dem reitenden Wasser,
Felsen mit ihren Tràumen
dem Weg, der das Ziel ist,
Schnee, der die Landschaft
langsam verbirgt
und anders sichtbar macht
dem Licht, das wartet
auf Augen —
gibt ihnen das Wort.
Cortège de Masques
traduit de l’allemand par Adrien Finck, Maryse Staiber, Claude Vigée
D’une voix à l’autre
CHEYNE
A cet instant précis – ( RC )
Un peu de blanc, et du noir dedans,
et des lignes qui s’étirent :
des images , un instant
figées, et c’est une cascade
qui ne tombe plus,
saisie dans son élan par le gel .
Le regard saisit les formes,
où la lumière s’est posée :
il cherche dans les ombres ,
un peu de vie cachée ,
et déjà, arriver à deviner
la couleur des choses .
A cet instant précis.
–
RC – nov 2017
Bassam Hajjar – des maisons ( fin )
aquarelle : Paul Klee – vue de Saint-Germain
T’éloignes-tu à présent ?
Et ceux qui sont debout là-bas recouvrent-ils de blanc ton absence ?
La poussière trouve-t-elle son chemin vers toi ?
Le soleil de l’hiver abîme-t-il tes vêtements ?
Pleures-tu ?
Alors ne laisse pas les pleurs changer quoi que ce soit en toi
ni le rouge dans tes yeux
ni la barbe qui pousse.
Ainsi tu t’orienteras dans le sommeil,
si tu le peux,
car les maisons que nous quittons
délaissent leurs murs
leurs seuils, leurs entrées surpeuplées de vide,
et les maisons nous quittent,
et nous revenons habiter leur absence.
(Lyon, octobre-novembre 1985)
Le texte se soustrait au regard – ( RC )
–
J’ai eu un peu de mal à lire :
Les caractères sont trop petits,
mais en plissant les yeux,
j’arrive à distinguer les mots ;
avant qu’ils ne retournent dans le blanc.
Peut-être que ces écrits
se dissolvent d’eux-même,
et n’ont pas de rapport
avec ma vision
Reste à savoir pourquoi.
Le message se soustrait au regard,
rentre dans le blanc du papier,
d’abord pâlissant,
puis carrément blanc :
> il se dissimule ,
jouant les extrèmes
comme pouvait le faire
Malevitch avec son fameux
» carré » ( qui n’en est pas tout à fait un )
posé en oblique ,
mais qui, avec les années,
reste apparent.
Le texte est sans doute toujours là,
en encre blanche,
celle qu’on dit sympathique.
Il suffirait
d’un procédé simple,
pour le faire réapparaître :
la chaleur d’une flamme,
comme dans chaque page
( que l’on croit vierge d’intentions ) .
–
RC – juin 2015
Charles Coutarel -Chat de nuit, charly gris
photo perso – Youpi en action
chat de nuit
charly-gris
comment J’écris
comment je souris
à cette image
passage
qui se reflète
en glaces
multi-faces
où je rigole
en multi-plans
noir et blanc
je m’envole
sur une aile
cœur-couleur
tête de piaf
ébouriffée
inspiration
profonde
mon chant
s’empli
charly-blanc
chat troublant
Jusqu’au silence blanc – ( RC )

photo: studio16mmjackinthebooks
–
Les pages jaunies des hiers,
Ont gardé la mémoire,
Intacte.
Les rives ont beau être lointaines,
Elles s’inscrivent,
Sans frontière
Au pays où le présent
ne faisait aucun doute.
Peut-on dire qu’il dérive ?
Qu’il sombrera dans l’oubli,
ou la brume,
qui, avec le lointain,
recouvre toute chose ?
Ce sont plutôt les hiers,
qui s’étiolent en notre mémoire,
comme les rides,
creusant un peu plus nos corps,
Jusqu’au silence blanc.
–
RC- dec 2014
d’après un texte d’Isabelle Debiève » Présent désarticulé «
Peindre l’intérieur de sa tête en blanc, ou noir ( selon ) – (RC )
–
Il y a des secrets enfouis sous la glace,
Elle conserve au frais les souvenirs des étés,
Au plus profond des crevasses .
Elles se sont refermées sur ce qui a été.
Un fleuve de blancheur à la coulée lente,
Qui dévale les années,
Accroché aux pentes,
Des plus hautes vallées .
–
Les secrets ont leur gardien,
Il en reste toujours une trace.
On a beau les taire, un jour, cela ne sert à rien…
Il y a toujours quelque chose qui dépasse .
C’est comme si tu repeignais de blanc,
L’intérieur de ta tête, pour effacer,
Toute trace du passé,
Gravé en lettres de sang .
–
Choisis plutôt le noir
Personne n’y verra goutte …
Une bonne solution , sans doute,
Pour perdre la mémoire ,
Te refaire une santé ,
> Effacer les preuves…
— Mais crois tu qu’avec une peau neuve,
Tu peux prétendre à la virginité ?
–
RC – déc 2014
Ziney – destruction
Dans les textes de Ziney, visibles ici,
j’ai sélectionné
« destruction », pour en proposer une traduction perso…
–
destruction
le plus pur albâtre, un bâton de cire
assis dans une flaque d’une piquante
odeur nauséabonde qui retournerait votre estomac
ou vous faire remplir les fenêtres peintes de plomb
et les fissures du mur sec
qui se consume de plus en plus bas
et l’espace saigne de façon de plus en plus brillante
jusqu’à ce que les murs soient déchirés par un blanc angélique
et la charpente résonne comme un coup de feu
et le chant funèbre commence
et la chanson de lamentations de l’orgue
détruit le lieu où tout réside .
–
Destruction
the purest alabaster stick of wax
sitting in a puddle of pungency
a sickening smell that would turn your stomach
or get you high
fills the lead painted windows and cracking dry wall
as it burns lower and lower
and the room bleeds brighter and brighter
till the walls are ripped by angelic white
and the timbers sound like a gunshot
and the funeral dirge begins
and the wailing organ song destroys the place
where everything resides
Blanc sur blanc – ( RC )
photographe non identifié
–
La lune fait sa propre peinture,
Quand tu es réveillée,
au parcours de ton corps.
C’est l’esprit de la nuit,
Qui te repeint en blanc,
Blanc sur blanc,
Et seule l’ombre sur les draps,
Dessine ta présence
Lorsque tu sors des rêves.
Le souffle de la mémoire,
Prend une craie blanche,
Pour s’inviter,
–
Dessiner sur ta bouche ,
Des souvenirs blafards,
Infiltrés d’entre nuages
–
Faux témoins,
Du parcours des heures,
Traversant la nuit…
–
RC – août 2014
Bernard Noël – Grand arbre blanc
Grand arbre blanc
à l’Orient vieilli
la ruche est morte
le ciel n’est plus que cire sèche
sous la paille noircie
l’or s’est couvert de mousse
les dieux mourants
ont mangé leur regard
puis la clef
il a fait froid
il a fait froid
et sur le temps droit comme un j
un œil rond a gelé
grand arbre
nous n’avons plus de branches
ni de Levant ni de Couchant
le sommeil s’est tué à l’Ouest
avec l’idée de jour grand arbre
nous voici verticaux sous l’étoile
et la beauté nous a blanchis
mais si creuse est la nuit
que l’on voudrait grandir
grandir
jusqu’à remplir ce regard
sans paupière grand arbre
l’espace est rond
et nous sommes
Nord-Sud
l’éventail replié des saisons
le cri sans bouche
la pile de vertèbres grand arbre
le temps n’a plus de feuilles
la mort a mis un baiser blanc
sur chaque souvenir
mais notre chair
est aussi pierre qui pousse
et sève de la roue
grand arbre
l’ombre a séché au pied du sel
l’écorce n’a plus d’âge
et notre cour est nu
grand arbre
l’œil est sur notre front
nous avons mangé la mousse
et jeté l’or pourtant
le chant des signes
ranime au fond de l’air
d’atroces armes blanches qui tue
qui parle le sang
le sang n’est que sens de l’absence
et il fait froid grand arbre
il fait froid
et c’est la vanité du vent
morte l’abeille
sa pensée nous fait ruche
les mots
les mots déjà
butinent dans la gorge
grand arbre
blanc debout
nos feuilles sont dedans
et la mort nous lèche
est la seule bouche du savoir
*
.Bernard Noël
–
JC Bourdais – L’arbre à bière Bernard Noël – grand arbre blanc
–
« Autrefois dans ce pays
On ne pouvait pas dire
pour désigner la fin d’un arbre qu’il était mort.
Seuls l’homme et l’animal pouvaient mourir.
On raconte que pour éloigner l’étranger du village,
On lui disait :
« Tu n’as pas ton arbre ici »
——————-
JC Bourdais , L’arbre à bière,Rhizome,2002, Nouméa
–
auquel j’ajoute » grand arbre blanc » de Bernard Noël
Grand arbre blanc
à l’Orient vieilli
la ruche est morte
le ciel n’est plus que cire sèche
sous la paille noircie
l’or s’est couvert de mousse
les dieux mourants
ont mangé leur regard
puis la clef
il a fait froid
il a fait froid
et sur le temps droit comme un j
un œil rond a gelé
grand arbre
nous n’avons plus de branches
ni de Levant ni de Couchant
le sommeil s’est tué à l’Ouest
avec l’idée de jour grand arbre
nous voici verticaux sous l’étoile
et la beauté nous a blanchis
mais si creuse est la nuit
que l’on voudrait grandir
grandir
jusqu’à remplir ce regard
sans paupière grand arbre
l’espace est rond
et nous sommes
Nord-Sud
l’éventail replié des saisons
le cri sans bouche
la pile de vertèbres grand arbre
le temps n’a plus de feuilles
la mort a mis un baiser blanc
sur chaque souvenir
mais notre chair
est aussi pierre qui pousse
et sève de la roue
grand arbre
l’ombre a séché au pied du sel
l’écorce n’a plus d’âge
et notre cour est nu
grand arbre
l’œil est sur notre front
nous avons mangé la mousse
et jeté l’or pourtant
le chant des signes
ranime au fond de l’air
d’atroces armes blanches qui tue
qui parle le sang
le sang n’est que sens de l’absence
et il fait froid grand arbre
il fait froid
et c’est la vanité du vent
morte l’abeille
sa pensée nous fait ruche
les mots
les mots déjà
butinent dans la gorge
grand arbre
blanc debout
nos feuilles sont dedans
et la mort nous lèche
est la seule bouche du savoir
*
.Bernard Noël..
–
camisole ( RC )
–
Ouvre donc ces portes , que le vent s’engouffre
Qu’un peu d’air glisse sur ces carreaux lisses !!
Que je sente un peu du dehors les bruits qui frappent !!
Un peu au mur de la vie, celle qui est à l’écart…
Ouvrez donc un peu, que mon regard franchisse
La salle, et les couloirs, et les carreaux blancs encore,
Il y a trop de monde dans ma tête qui se heurtent à ces murs blancs.
A ce monde préservé, sans aménité.
C’est d’un neutre, cette absence, en blanc,
Cette perte de fantaisie, de vie, de chaleur
C’est peut-être tout ce blanc, pour mieux repérer mes cris, la solitude qui se blesse aux arrondis de chromes.
Qui se répercute aux fenêtres hautes, garnies de grillage fin,
pour l’oiseau en cage.
C’est aussi pour me maintenir là,
Sur place, immobile, maintenue par des épingles sur un socle, comme les papillons.
Les échos des voix des infirmiers me rendent plus atone que leurs piqûres, et les grands couloirs.
Récurés journellement à renfort de désinfectant.
Drôle de vie que celle, empêtrée dans du blanc, du blues blanc plein les dents,
Et ma tête qui cogne, si loin de cet endroit, où seules les hirondelles me font signe,
Rayant la fenêtre haute, à coup de liberté.
Isolée dans ma camisole.
RC – 4 juillet 2012
–
–
Jean-Yves Fick – I.34
I.34
d’aller dans les blancs
les routes se perdent
les fleuves s’ensablent
les rives s’effacent
d’aller dans les terres
d’une main on pose
une seule pierre
on garde son grain
c’est peut-être voix
au creux du toucher
une empreinte vive
et la stèle nue
où prendre repère
pour le seul voyage.
publié dansIcaria
Louis Remacle – Bonheur

peinture: la maison rose.. peinture de 1907 - .Camoin -Manguin, Cézanne ? ( à vous de décider) - - par la même occasion,- vous pourrez, comme moi répondre au quizz artistique du site http://www.quizz.biz/quizz-243336.html
–
beaucoup d’auteurs méconnus,
La maison rose, étant, d’autre part le titre d’un roman superbement écrit , de Pierre Bergounioux (une des grandes plumes d’aujourd’hui)…
Jean-Claude Pirotte – blues 01 ( l’homme est blanc comme linge)
Extrait du gros « pavé » le recueil du « Promenoir Magique »
( paru à la Table Ronde)
l’homme est blanc
comme un linge
il se déplace en crabe
il a peur de son ombre
il a honte du diable
qui se démène en lui
et ronge ses méninges
l’homme est soumis
au prince du jour et des ténèbres
l’homme est un assassin
l’homme est un spadassin
qui ne dort pas la nuit
et que son âme ennuie
J Cl Pirotte s’est vu décerné de « prix Apollinaire de la Poésie »
—