voir l'art autrement – en relation avec les textes

Articles tagués “bottes

Philippe Delaveau – marcher


Marcher parfois longtemps dans la prairie du vent.

Ses bottes malmènent les fleurs,

l’herbe aux rêves de voyage.

Puis le petit village près d’un bois.

L’harmonica d’une eau rapide qui se cache

pour voir le ciel et l’ombre, et les cailloux

entraînés de ferveur, sur leurs genoux qui brûlent.

Entendre alors la persuasion très tendre

et douce d’un oiseau qui solfie les mesures

d’une clairière. Deux fois peut-être. Puis se tait. Se dissout

dans la perfection pure et simple du silence.


Rose Ausländer – Moi une petite fleur –


Photomontage RC
Moi une petite fleur


Pourtant les roses 
hautes comme l’été 
les papillons 
les ailes des mouettes 
au-dessus de la rivière

Non
Je n’oublie pas 
les années marquées au fer
je n'oublie pas 
que des bottes 
ont piétiné l’arc-en-ciel 
qu’elles s’apprêtaient 
à nous transformer en 
roses de feu papillons de feu ailes de feu

pourtant hauts comme l’été 
le parfum
les ailes doubles au-dessus de la rivière 
l’or sur ma peau

et les roses mortes 
après la nuit

Ich eine kleine Blume


Dennoch Rosen 
sommerhoch 
Schmetterlinge 
Möwenschwingen 
überm Fluβ

Nein
ich vergesse nicht 
die eingebrannten Jahre 
ich vergesse nicht 
daβ Stiefel
den Regenbogen zertraten
daβ sie sich rüsteten
uns zu verwandeln in
Feuerrosen Feuerfalter Feuerschwingen

dennoch sommerhoch 
der Duft
die Doppelflügel überm Fluβ 
das Gold auf meiner Haut

und die toten Rosen 
nach der Nacht


       **
                   

ich spiele noch – je joue encore

traduction alba chouillou

LE BOUSQUET-LABARTHE éditions


Marie-Ange Sébasti – Redresser les Méandres — suivi de ma « réponse »


photo: Anne Heine

Souvent, je tentais de redresser les méandres, d’élargir les défilés, de faire de ce passage une belle ligne droite entre des vignes bleues.

Mais ne fallait-il pas d’abord s’entendre avec la falaise, abandonner un instant  la  vallée pour s’engouffrer dans l’étroite cheminée, escalader tous les vertiges jusqu’aux confins des gris établir bientôt un nouveau cadastre, mesurer de très haut des parcelles discrètes, de longues propriétés littorales, les audacieux aplats des champs les écarts qui n’échappent jamais au feu ?

Sans mentir, je pouvais encore évaluer le périmètre du patchwork des rêves, déceler leurs accolades et leurs brouilles,

me détourner longtemps aussi de ce territoire morcelé en remplaçant tous les murs mitoyens par des lignes de fuites.

Pourtant, malgré la faille, le bleu toujours,s’instaurait, me rattrapait.

Marie-Ange Sébasti

—-

Elevé dans  les airs, la prose du territoire distribue des lignes,des passages,
là où les failles  sur place, imposent des détours.
Escalader tous les vertiges, peut-être ,mais au grand effort de laisser derrière soi la pesanteur, celle des roches  et de son propre corps.
J’ai aimé la cartographie, comme un dessin aimable, qui s’étale, fantaisie de patchwork des bois gris, et parcelles  arables. La limite imposée par la falaise, permet de distribuer quelques accès rares, lorsqu’un affaissement  rend le chemin possible.
Oui, bien sûr, réconcilier les deux bords des espaces, en tirant droit, le fil de la rivière, et gommer les méandres.

( Si la terre était à modeler.)

Mais elle est matière, mais elle colle aux bottes, mais elle transpire les mousses, et se charge de buis et de chênes centenaires….
Mais elle est corps,lourde,brune, grise, fauve,  justement comme un animal endormi, étalé  là, entre les rocs…
Elle domine,…ravagée  d’érosion, ou portée en tectoniques,  striée  de ruisseaux, cherchant la pente la plus rapide…
Inerte, même bousculée de puissants tracteurs , mais vivante, à l’assaut du printemps.

Les hauts plateaux  sont  reliés, aux vallées par leurs différences, justement,– leurs accolades et leurs  brouilles, –, pourtant elles se réconcilient avec leurs passages,
…de toute façon, il faut vivre avec ce qui est…  les murailles à contourner  , en lieu et place de lignes  de fuite sans consistance, les parcelles  exigües, suivant si possible le parcours du soleil…
qui ne doivent rien aux lignes tracées  sur le papier,mais à l’effort des hommes , pour se marier au mieux aux pentes,  et extraire  de quoi y survivre.

En lien avec  « feuilleter le recueil des causses »

la Sure — falaises Nord du Vercors (Vercors Nord, Engins, Isère –                 photographe non précisé site http://www.sentier-nature.com/

et (rappel) cet excellent  écrit de Pierre Bergounioux, qui affirme que  « le monde  existe »…


Préférer les sandales aux bottes de cahoutchouc ( RC )


Afficher l'image d'origine

-fresque  de la Villa Farnèse  – Raphaël

 

Au confort exotique,
le corps  s’étale
dans la vie locale
aux aléas climatiques…

Convoquée ,      manucure
Ne craint pas scandale
Et dessine , démarche bancale
Les pieds,       ailés      de Mercure

Trouver meilleure chausse
A son pied   servile ….
Il est toujours plus facile
De célébrer des noces

En sortant de son chapeau
Un soulier de cristal
       Plutôt que sandale
Aux temps hivernaux.

Au sortir de l’aéroport
Si tu as le pied fin,
C’est soulier de satin,
Garanti grand confort

Aux pays  du soleil
Sans être momie,      aux bandelettes
Es tu bien dans tes baskets
Les ampoules vissées aux orteils ?

Trouver chaussure à son pied,
Le grand amour  rêvé…
Cueilli au pied levé,
Des temps expatriés.

Des bottes  de sept lieues
Permettent, avec quelque  chance
De franchir grandes distances
Pour agiter,   mouchoirs des adieux.

La soif d’idéaux
Fait de toi            la reine
– Un jour couverte  d’étrennes
Portée au plus haut…

C’est oublier, que la terre  est dure,
Même de l’autre côté           – obtuse
Et que les semelles   s’usent
Avec la distance, et le pas sûr…

Il n’y a pour rêver, pas d’age…
Aux vols d’altitude
La chute peut être rude
En quittant les nuages.

Laissant de l’amour,    le mystère
J’en connais,    qui préfèrent des souliers
–        De milieux hospitaliers
Accrochés à  la terre.

Se bouchant les oreilles, Ulysse
Pour éviter ,      des sirènes, les voix
Fit ainsi son choix
–         Et sur lui, elles  glissent.

Quittant le paradisiaque,
Le voila, laissant le boubou
Pour des bottes  de cahoutchouc
Bientôt en vue d’ Ithaque …

Pénélope,….        pour l’accueillir,  est venue,
        Portant ses escarpins
        Au creux de ses mains,
Et elle,                       elle est pieds nus…

RC    – 14  janvier 2013