Ivresse – (Susanne Derève) –

Vivrons nous du souffle léger de Décembre - pierre tendre et tuiles rondes - et des rameaux du grand hiver rouges dans le bleu du ciel, de la promesse des bourgeons sur le bois nu, du dernier sursaut de l’automne, - ivresse, de vin rosé , de vin jeune et de pourpre, de chais silencieux - de l’or paresseux du jour, un boisseau d’ocres et de velours, de verts enluminés de pluie, de l’éclat chancelant du vitrail et de l’offrande de la nuit miroitant de l’averse, une ville à nos pieds, brouillée d’ombre et de vent, de nos mains jointes et refermées innocemment sur la fortune et le hasard, comme on braconne des rêves épars sur les terres blondes de l’été avant que ne l’emprisonnent les neiges blanches de Janvier
Georges Neveux – dont je n’entends jamais le bruit
peinture: W Kandinsky: tableau au bord blanc 1913
DONT JE N’ENTENDS JAMAIS LE BRUIT
La plus lointaine, la plus proche,
La plus vive, la mieux cachée,
Comme l’anguille sous la roche,
Comme l’oiseau dans la nichée,
La plus proche, la plus lointaine,
Et qui donne soif aux voleurs
Comme le bruit d’une fontaine
Aux mille battements de cœur,
Vous que j’approche à pas d’oiseau,
A pas tremblants de braconnier,
Mais qui passez comme un peu d’eau
Entre les pailles du panier,
0 ma truite, ma paille folle,
Fumée où mille guêpes fuient,
Vous ressemblez à mes paroles
Dont je n’entends jamais le bruit.
Georges NEVEUX « Proverbiales » (Les Cahiers du Sud)