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On ne verra pas le troupeau de brebis brouter tes cheveux – ( RC )


Vois-tu, si je me lève
je n’ai pas souvenir des mêmes rêves…
J’étais allongé sur le sol
et nulle part il n’y avait de route,
Au-dessus , le ciel m’entourait de sa voûte .
Le vent pousse des nuages
et les accompagne longtemps dans leur voyage.
L’un d’eux s’est distingué
en prenant l’allure d’un cavalier,
mais aucun (que je ne sache)
ne ressemblait à une vache…
Quelques champs pelés
réclamaient leur dû
car il n’avait pas plu
de presque tout l’été.

Quelques arbres échevelés
gardiens de la draille,
et au loin les sonnailles
de bêtes égarées…
Ce n’est pas encore aujourd’hui
qu’on verra la lune
entourée de brumes
ni le troupeau de brebis
brouter tes cheveux
même si la terre
partage beaucoup de mystères
avec les cieux…

voir aussi le post de Jean Tardieu : nuages


Erri de Luca – la brebis brune


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photo denvedarvro  ( écomusée  du musée de Rennes )

 

 

La brebis brune

Est la première agressée par l’éclair et le loup,
le tour de mauvaise chance qui gâte la couleur uniforme
du blanc troupeau.
Le jour la chasse, la nuit l’accueille
dans le noir térébenthine qui dissout couleurs et contours
et fait qu’elle ressemble aux autres.
La nuit est plus juste que le jour.
Face au danger le cri le plus limpide est le sien,
sur la glace de l’aube c’est elle qui marque la trace.
Où passent les confins, elle seule longe la haie de mures
Qui fait frontière à la vie frénétique, féroce, qui ne donne répit.

La pecora bruna

È la prima aggredita dal lampo e dal lupo,
lo scherzo di mala fortuna che guasta il colore uniforme
del bianco di gregge.
Il giorno la scaccia, la notte l’accoglie
nel buio d’acqua ragia che scioglie colore e contorno
e fa che assomigli alle altre.
La notte è più giusta del giorno.
In faccia al pericolo il grido più limpido è il suo,
sul ghiaccio dell’ alba la traccia è battuta da lei.
Dove corre il confine, lei sola rasenta la siepe di more,
e chi si è smarrito si tiene al di qua della pecora bruna,
che fa da frontiera alla vita veloce, feroce, che tregua non dà.

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traduction par Antonio Silvestrone : voir son site 


Vagues de laine – ( RC )


suite broutante - photo perso : le Beyrac  Lozère 10/2015

suite broutante – photo perso : le Beyrac Lozère 10/2015

 

 

 

 

C’est un troupeau dans un enclos en pente ;
Il se gorge de l’herbe grasse,
– un corps solidaire à têtes multiples –
dont la masse dissimule
ce qui reste  de sol.

A les voir moutonner, se presser en vagues
de laine      à palper du  regard,
à défaut des doigts,
dans la tiédeur confuse
ondulée par le soleil .

Lui,  rebondirait sur ces îles.
Elles se séparent et gravissent ensemble la pente ;
elles se suivent,    et dessinent  en beige clair
le tracé du chemin ,       laissant sur place
les têtes de rochers, nues .

Brebis et bêlements se déplaçant aussi.
( J’aurais voulu plonger dans leur manteau blanc,
les boucles autour des doigts,
connaître de mes paumes
le museau fébrile de l’agneau ).

Mais du troupeau, maintenant hors de vue,
stationné, peureux,  sur une autre pente.
Il n’est resté, quelques instants plus tard,
qu’un enclos désert,
derrière les mailles de son grillage  .

RC – nov 2015


Antonio Santori – Ensuite il y avait les soirées, presque


Antonio Santori – [Poi c’erano le sere, quasi]

[Ensuite il y avait les soirées, presque]

Ensuite il y avait les soirées, presque silencieuses,

du lit tu entendais les bruits des autres,

d’ouvrières en sueur, d’employés enfants perdus

dans leurs collections.

Tu comptais les brebis égarées,

tu les organisais, elles prenaient toujours

d’assaut le berger idiot auquel tu t’identifiais.

Dans les rues les roues des bicyclettes,

il était étrange de les entendre sur les plaques d’égout,

les sons sortis de leur trou, là dehors

les sons paraissaient éternels.

Comme des garçons nus sur des prés

remplis de cigarettes.

Tu te croyais dans les lits des autres,

dans leurs draps, tu convoquais les jambes croisées,

les dos, tu enlevais ton fard.

Il était étrange d’entendre les enfants

dans leur sommeil, ils paraissaient morts,

tu exerçais ton ouïe sur les arbres improvisés,

perdus dans le vide. On entendait les corps bruire,

endormis. On entendait les rêves. —

Poi c’erano le sere, quasi silenziose, dal letto sentivi i rumori degli altri, di operaie accaldate, di impiegati bambini persi nelle loro collezioni.

Contavi le pecore smarrite, le organizzavi, assaltavano sempre il pastore idiota con cui ti identificavi. Nelle strade le ruote di biciclette, era strano sentirle sui tombini,

i suoni stanati, i suoni là fuori sembravano eterni.

Come i ragazzi nudi sui prati pieni di sigarette.

Ti sentivi nei letti degli altri, nelle loro lenzuola, convocavi le gambe intrecciate, le schiene, ti toglievi gli ombretti.

Era strano sentire i bambini nel sonno, sembravano morti, allenavi il tuo udito sugli alberi improvvisati, persi nei loro vuoti.

Si sentivano i corpi stormire, addormentati.

Si sentivano i sogni. –