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Nicolas Granier – Brèves de poésie ( sur textes de RC )


Nicolas Granier, dans ses émissions régulières « brèves de poésie », vient de faire lecture de trois de mes écrits qui ne sont pas encore publiés ici… c’est l’occasion d’écouter une belle interprétation orale , puisque la plupart des textes sont conçus de façon à porter la musique des mots, comme s’il s’agissait d’une partition….

( qu’il en soit remercié )

Voir le lien Youtube me concernant

comme celui sur les textes de Susanne

« ainsi se jouent les jours » peinture acrylique R Chabrière

Nicolas Granier – Brèves de poésie (Susanne Derève) –



 

Elegie

Paroles

Appelle-moi encore

Ame qui vive


Elégie – (Susanne Derève)


Piet Mondrian – pommier en fleurs –
Arbre
dressé vers le ciel 
élégie de bourgeons tremblants 
dans la lumière du soir
 
Chez nous tout arrive tard
la promesse de vie est si longue à venir
qu'on la croirait perdue 
à la dérive
 
dans les glacis de l'hiver
comme ces longs nuages à la remorque  
des oiseaux de passage
 
Soubresauts
L'hiver chez nous est si long à mourir
grêle pluie vent
pâles brouillards de givre et de lune froissée
 
Mais un arbre dressé vers le ciel 
élégie de bourgeons tremblants 
d'un vert si tendre
un arbre
annonce le printemps
 

poème lu par Nicolas Granier -7/06/2022

Paroles – (Susanne Derève)


Giuseppe Penone – main de bronze agrippant un arbre ( il poursuivra sa croissance sauf en ce point)
Une romance aux doigts de fée 
Paroles   
celles que tu me soufflais ce matin 
au réveil

sitôt enfouies  pour aller les semer
à midi  dans un jardin de roses 
en sommeil

Soleil
Peut-être faut-il  l’hiver 
pour éprouver ce qu’est un arbre

sa grande ossature  endormie 
ses plaies  ses lézardes
ses  mains pâles

et la tienne  au poinçon 
gravant le bois tendre
du tronc





poème lu par Nicolas Granier – 7/06/2022

Âme qui vive – (Susanne Derève) –


Photo RC ( causse de Sauveterre )
Âme qui vive ? 
Non, le bruit du vent.
En sentinelle,la lisière des enclos,les fûts dressés 
des sapinières
et de courtes brassées d’épines : chardons, carlines, genévriers,
le lit du vent. 

Celui du causse court en longues foulées sonores 
semblables à la rumeur d’une mer ancestrale
essaime un pépiement d’oiseau,                                                                                                            
nasillard, monocorde, 
émonde l’Aubrac de ses brumes.

Choisis une pierre de calcaire, blanche et dorée,
grave-la de ton nom,  
je te couronnerai roi d’une solitude où seule vit, 
souffle et trépigne la grande harpe du vent. 
Épouse-la , ou fais-toi homme du silence 
pour la combattre 

tant elle nous tient dans sa main, étrangers,
incongrus, couvrant le chétif grelot de nos voix 
nous forçant à remettre à plus tard de dire 
l’étoupe blonde des prairies harassées, 
l’argile lourde des chemins,l’arpent noir 
des forêts,

et seule âme qui vive,
le babil insensé de l’invisible oiseau,
son chant nuptial dans la longue liturgie 
du vent. 


poème lu par Nicolas Granier – 7/06/2022

Appelle-moi encore – (Susanne Derève) –


Théodore Brenson, 1893-1959, Chevaux sauvages
Contre un tas de bois mort, 
brise indolente, abri silencieux, voix. 
Voix qui m’appelle a fait fuir le lézard
et la mésange.
N’épelle pas mon nom usé.

La terre porte un mirage d’eaux neuves, 
de printemps.
Des chevaux captifs renversent le fil acéré 
des enclos.
Les drailles à l’horizon cheminent vers le ciel, 
et franchi le ciel vers l’échine argentée du vent, 
le pelage ras des Causses hérissé de lavandes,
l’étrangeté des pierres dressées.

Déjà, le soir s’enferre au creux des combes,
l’ombre violette des futaies se déploie 
et s’allonge, 
tout ce que le jour portait de douceur et de fièvre 
bascule puis se fige
dans le premier battement d’aile de la nuit.

Appelle-moi encore, et je te rejoindrai.


poème lu par Nicolas Granier 7/06/2022