point final à la fête – ( RC )

Les brigands tentaient de renverser la table,
les couteaux plantés
dans le lit de justice,
après avoir brisé quelques vitrines.
La statue vacillant sur son piédestal,
mais à boire trop de bières,
leurs mains se sont figées
dans un festin de pierres,
juste au moment du dessert,
quand les heures s’émiettent ;
les couteaux s’émoussent aussi.
Sur la table, l’ombre du commandeur
se saisit d’une partie de la nuit,
en mettant un point final à la fête.
Salvatore Quasimodo – Chevaux de la lune et des volcans

peinture: Giorgio de Chirico 1928
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CHEVAUX DE LA LUNE ET DES VOLCANS
à ma fille
Îles que j’ai habitées
vertes sur des mers immobiles.
D’algues sèches et de fossiles marins
les plages où galopent fous d’amour
les chevaux de la lune et des volcans.
Au moment des secousses,
les feuilles, les grues assaillent l’air :
dans la lumière des alluvions
brillent des ciels chargés ouverts aux astres ;
les colombes s’envolent
des épaules nues des enfants.
Ici finit la terre :
avec de la sueur et du sang
je me construis une prison.
Pour toi je devrais me jeter
aux pieds des puissants,
adoucir mon cœur de brigand.
Mais traqué par les hommes
je suis encore en plein dans l’éclair,
enfant aux mains ouvertes,
aux rives des arbres et des fleuves :
ici l’anatomie féconde de l’oranger grec
pour les noces des dieux.
—
CAVALLI DI LUNA E DI VULCANI
al la figlia
Isole che ho abitato
verdi su mari immobili.
D’alghe arse, di fossili marini
le spiagge ove corrono in amore
cavalli di luna e di vulcani.
Nel tempo delle frane,
le foglie, le gru assalgono l’aria :
in lume d’alluvione splendono
cieli densi aperti agli stellati ;
le colombe volano
dalle spalle nude dei fanciulli.
Qui finita è la terra :
con fatica e con sangue
mi faccio una prigione.
Per te dovrò gettarmi
ai piedi dei potenti,
addolcire il mio cuore di predone.
Ma cacciato dagli uomini,
nel fulmine di luce ancora giaccio
infante a mani aperte,
a rive d’alberi e fiumi:
ivi la latomia d’arancio greco
feconda per gli imenei dei numi.
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