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Dominique Le Buhan – l’histoire continue des saisons


peinture Arkhip Kuindzhi

Le gris du jour, de la nuit le clair-obscur
s’unissent en l’histoire continue des saisons :
au revers de l’action, c’est être patience
que d’éprouver des heures durant leur cours :
c’est attendre de l’objet l’ombre au soleil,
savoir qu’à ce moment la chair aura l’éclat —
c’est espérer de la flamme la crue des couleurs
liées à des textures perçues sans les toucher.

Ce feu sécrète en nous le ductile espace
par les jeux du bois sec et de la cendre —
et déjà la rose d’hiver donne le blanc,
blanc repris par fleurs qui percent la neige,
puis la tulipe à son tour est la fraîcheur,
la rose avive la brique et le bleu de l’ardoise,
enfin la pivoine de son rouge touche le vert —
et le bruit de nos mots est un murmure sonore.

extrait des « heures inégales » ed Fata Morgana


Je suis parti pour un voyage ( RC )


photo perso: plaine de Montbel - Lozère  -2005

photo perso:                plaine de Montbel – Lozère    -2005

Je pars un peu, laisser derrière moi hautes collines et ravins d’ombre,

A compter la distance, je suis les flèches blanches,

Elles scandent les espaces, les forêts sombres…

Laissent place aux prairies, aux cultures, et enfin aux villes,

Le long de la route qui penche,

Virevolte, agile ,

S’élance et voltige,

Viaducs et ponts d’audace,

Défiant le vertige,

S’appuient sur monts et terrasses,

Avant de connaître la plaine,

Voisine d’une rivière serpente,

Sous le soleil, sereine…

on en oublie le souvenir des pentes.

Le miroir d’eau accompagne,

Sur les kilomètres parcourus,

La route de campagne,

La traversée des villages, bientôt disparus,

Ils changent peu à peu de style,

La pierre cédant à la brique,

L’ardoise à la tuile,

Répondant, en toute logique

Aux régions qui se succèdent,

Au fil des heures interprétées

Que la lumière encore possède,

D’entre les nuages… c’est l’été.

J’approche de chez toi,

Les maisons aux façades vives,

Le chant de ses toits,

La tour de l’église et ses ogives,

Je laisse sur la droite,

Le vieux village,

Et ses voies étroites,

Magasins et étalages…

Quelques rues encore,

La barre des bureaux

Après le drugstore,

Et puis le château d’eau…

Coupant le moteur,

J’ouvrirai enfin,

Le havre de fraîcheur,

L’abri de ton jardin,

Il y a toujours,

La porte bleue ouverte,

Sur la salle de séjour,

Le bassin aux lentilles vertes,

Et les chaises anciennes,

Laissées au vent,

–      Attendant que tu reviennes,

Je m’assois lentement

A côté des plantes

Les pieds dans les lentilles,

Et pousses verdoyantes,

Je ne vois plus mes chevilles

Mais le reflet du saule

Et puis ton visage,

Qui me frôle l’épaule,

Les seins sous le corsage,

Les mots s’enroulent dans les violettes, *

Ta peau a la couleur de blondes prunes

Prêtes à d’autres cueillettes,

Je vais te retrouver sous la lune,

Je suis parti pour un voyage – dans tes bras.

RC 19 août 2013

la belle expression « Les mots s’enroulent dans les violettes » est de Nath

 


Thomas Duranteau – Le vent pilleur de tombes


photographe  non identifié--  Boston Technical High School

photographe non identifié–       Boston          Technical High School

Le vent pilleur de tombes
a retourné les murs
sac vidé au sol
laissant des mots de brique
à demi envolés
et de la lumière
excisée par le semblant
d’une promesse

*
Quand rien ne parle
quand rien ne bouge
quand le silence même
thésaurise mes pas

Thomas Duranteau


Leon Felipe – Le mot


photo auteur non identifié: provenance carte postale

photo auteur non identifié: provenance carte postale

 

 

LE MOT

Mais que disent-ils du mot, ces poètes, là ?
Toujours dans des discussions de modiste :
sans ceinture, peut-être… ou serré, plutôt…
pourquoi pas la tunique… ou bien la casaque…
ça suffit ! Le mot est un pavé, une brique. Vous m’entendez ?…
Vous m’avez entendu, Monseigneur ?
Une brique. Une brique pour élever la Tour… il faut que la Tour soit haute… haute… haute…
jusqu’à ne plus pouvoir être plus haute.
Jusqu’à ce qu’elle arrive à la dernière corniche
de la dernière fenêtre
du dernier soleil
et qu’elle ne puisse pas être plus haute.
Jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’une seule brique, un seul mot… l’ultime brique… le  mot ultime
qu’on lance alors sur Dieu à toute volée
avec la force du blasphème ou de la supplique…
et qu’on lui défonce le front… pour voir si, dans son crâne,
se trouve la Lumière… ou se trouve le Néant.

 


Walk on the wild side ( RC)


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Marchant sur la suite des pavés,   en jour de glace

Sous le dôme clair, balayé par le vent

Le sac de légumes à la main,         regard devant

Pour ne pas glisser,      – pieds bien en place –

Aux échos des marchands,      parlant de l’hiver

Celui,                        de la semaine commerciale

Hauts-parleurs,  accrochés aux façades glaciales

La voix de Lou Reed,   le long des murs de pierre

Walk on the wild side…  c’est un conseil avisé

Le côté sauvage,        est toujours  ailleurs

Pourtant difficile à dessiner  comme meilleur

L’appel des filles  en couleurs,      bien tamisé

Comme les lumières  –              du dehors de l’ailleurs

Sugar- Candy sur ses grandes jambes ,   la séductrice

M’appelle  de mon ptit nom,                  voix tentatrice

C’est le décor ouaté                   dla boîte du ferrailleur

Se voyant Miss James Dean, pour une journée

Soudain en quête de nourriture  spirituelle

Porte des boîtes de Coca  ( avec une ficelle )

Pour en donner à chacun, … c’est donc  sa tournée…

Candy ,- sucre glace –  débarqua  un jour de son île

Quitta soudainement          les rêves  de Brooklyn

N’essayant plus d’se prendre            pour Marylin

En image un peu passée,              des murs de ville

La banlieue crade ,           les trains en retard

Affiches lacérées         sur les murs de briques

Lambeaux d’une histoire    un peu pathétique

La place  du marché,      déserte et sans pétards…

L’hiver a eu raison , des lumières de Noël

La fête s’est éteinte dans le blizzard

A  aller s’abriter         dans les halls  de gare

Et cacher sous un carton les étincelles

Les  sans-abri                               au visage livide

Ont dans la tête Sugar-Candy,      en bas résille

Et les hauts-parleurs de la place,   qui grésillent

“Walk on the wild side”,         ( mister  Lou Reed )

Comme dit Lou:  » le ptit Joe ne fait pas  d’cadeaux »

Dans la grande salle                  – aux dalles sales

Pas de bal ici, pour la vie,                         glaciale

Remisant en poussière,          les  rêves  d’ados.

Juste  quelques  seringues            qui traînent

A  oublier,               le temps  d’un voyage

Le côté sauvage,      cet autre paysage

Où la musique  de ce temps          t’emmène.

 

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RC –  4 février 2012

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Ce texte  mêle des impressions personnelles,  avec la traduction de la chanson de Lou Reed, à ma façon…