Hauts plateaux, où la joie demeure – ( RC )

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Te souviens tu des hauts plateaux,
où le vent ne trouve aucun obstacle
pour balayer le ciel ?
Il peut se poser sur le lit de basalte
du pays d’Aubrac sans faire de bruit.
Peu d’arbres, et des herbes,
comme une mer moutonnante
sous le ruban d’azur.
De temps en temps, un ruisseau
cherche à s’évader
mais ses méandres
se perdent dans les joncs,
et les lacs sombres
où le bleu sans reflet
s’ égare dans l’ absence .
C’est ici que passent les heures,
dans le paysage
parsemé de maisons basses :
burons arc-boutés sous les nuages,
— que ta joie demeure !
RC – janv 23 – par rapport à un écrit de Jacques Viallebesset
Âme qui vive – (Susanne Derève) –

Âme qui vive ? Non, le bruit du vent. En sentinelle,la lisière des enclos,les fûts dressés des sapinières et de courtes brassées d’épines : chardons, carlines, genévriers, le lit du vent. Celui du causse court en longues foulées sonores semblables à la rumeur d’une mer ancestrale essaime un pépiement d’oiseau, nasillard, monocorde, émonde l’Aubrac de ses brumes. Choisis une pierre de calcaire, blanche et dorée, grave-la de ton nom, je te couronnerai roi d’une solitude où seule vit, souffle et trépigne la grande harpe du vent. Épouse-la , ou fais-toi homme du silence pour la combattre tant elle nous tient dans sa main, étrangers, incongrus, couvrant le chétif grelot de nos voix nous forçant à remettre à plus tard de dire l’étoupe blonde des prairies harassées, l’argile lourde des chemins,l’arpent noir des forêts, et seule âme qui vive, le babil insensé de l’invisible oiseau, son chant nuptial dans la longue liturgie du vent.
Marina Tsvetaïeva – Mon siècle

Je donne ma démission.
Je ne conviens pas et j’en suis fîère !
Même seule parmi tous les vivants,
Je dirai non ! Non au siècle.
Mais je ne suis pas seule, derrière moi
Ils sont des milliers, des myriades
D’âmes, comme moi, solitaires.
Pas de souci pour le poète,
Le siècle
Va-t-en, bruit !
Ouste, va au diable, – tonnerre !
De ce siècle, moi, je n’ai cure, ,
Ni d’un temps qui n’est pas le mien !
Sans souci pour les ancêtres,
Le siècle !
Ouste, allez, descendants – des troupeaux.
Siècle honni, mon malheur, mon poison
Siècle – diable, siècle ennemi, mon enfer.
1934
texte extrait de « écrits de Vanves »
Jean-Michel Maulpoix – le bleu ne fait pas de bruit

Le bleu ne fait pas de bruit.
C’est une couleur timide, sans arrière-pensée, présage, ni projet, qui ne se jette pas
brusquement sur le regard comme le jaune ou le rouge, mais qui l’attire à soi,
l’apprivoise peu à peu, le laisse venir sans le presser, de sorte qu’en elle il s’enfonce et
se noie sans se rendre compte de rien.
Le bleu est une couleur propice à la disparition.
Une couleur où mourir, une couleur qui délivre, la couleur même de l’âme après qu’elle
s’est déshabillée du corps, après qu’a giclé tout le sang et que se sont vidées les
viscères, les poches de toutes sortes, déménageant une fois pour toutes le mobilier de
ses pensées.
Indéfiniment, le bleu s’évade.
Ce n’est pas, à vrai dire, une couleur. Plutôt une tonalité, un climat, une résonance
spéciale de l’air. Un empilement de clarté, une teinte qui naît du vide ajouté au vide, aussi
changeante et transparente dans la tête de l’homme que dans les cieux.
L’air que nous respirons, l’apparence de vide sur laquelle remuent nos figures, l’espace
que nous traversons n’est rien d’autre que ce bleu terrestre, invisible tant il est proche et
fait corps avec nous, habillant nos gestes et nos voix. Présent jusque dans la chambre,
tous volets tirés et toutes lampes éteintes, insensible vêtement de notre vie.
Jean-Michel Maulpoix. extrait du livre » Une histoire de bleu »
La journée du peintre – ( RC )
peinture: P Cézanne — parc du château noir 1904
Je ne sais
quand les journées s’allongent :
je suis pieds et poings liés
à la chanson du pinceau,
et j’en oublie les heures,
jusqu’à ce que je plonge
dans l’oubli des choses,
ainsi mon ombre me devance
sur la toile ébauchée.
Et chante aussi la rivière
sous le pont de pierres…
J’ai confondu ce que j’ai peint
avec une journée d’été.
Je dépose la lumière par petites touches ,
qui se rassemblent contre l’obscurité.
Je marche dans une clairière
que j’ai inventée ,
je m’y égare un peu .
La futaie change soudain d’aspect
sous l’éclairage électrique .
Elle n’a plus cet attrait magique
des rideaux de feuilles .
Je continuerai demain
marchant dans sentes et chemins :
il y a des couleurs qui s’attardent
à la façon de feuilles d’automne
Elles sont aussi sur mes mains tachées ;
je vais aller me nettoyer
puisqu’une journée à peindre
vient de s’éteindre
sans bruit ,
remplacée progressivement par la nuit .
–
RC – juin 2019
Une esquisse sur une feuille vierge – ( RC )
peinture: Edvard Munch » nuit blanche »
–
Bien qu’il n’y ait plus un bruit,
tout autour des murs,
ce n’est pas pour autant une nature morte,
mais seulement une ouate
à peine différente de celle du ciel,
et d’où part le silence.
Il s’est posé, tout en blanc
de partout.
Les arbres sont dans l’attente ;
ils cherchent leur équilibre,
sous une masse inhabituelle, et résistent
de leur hampe sombre.
Car seuls, ils se détachent
de l’austère étendue,
où toutes les différences
ont été gommées,
enfouies sur une couche épaisse ,
tendant vers l’égalité.
Leurs silhouettes sont géométrie
et s’ornent d’ombres violettes,
comme dans les tableaux de Munch :
une peinture pour de vrai,
débordant sur les chemins,
presque effacés, aussi .
L’atmosphère est fraîche,
comme en attente.
Des hommes , au loin, progressent :
de signes noirs qui se détachent,
comme leurs paroles,
sur un fond mat .
On est dans un instant précaire,
que l’on sait fragile .
L’arrivée des chasse-neige
va rayer l’immobile,
comme si on lançait les premiers traits
– une esquisse – sur une feuille vierge .
–
RC – oct 2017
Jacques Ancet – dire la beauté
*
sculpture H Matisse
Mais dire la beauté ,c’est dire un mot
qu’on écoute pour voir ce qui brûle
les yeux ou simplement les caresse
entre la transparence du ciel
et le regard s’étend le mystère
de l’apparence on cherche à franchir
cet infranchissable en remuant
les doigts et les lèvres il en résulte
ni chant ni mot un petit bruit.
Georges Neveux – dont je n’entends jamais le bruit
peinture: W Kandinsky: tableau au bord blanc 1913
DONT JE N’ENTENDS JAMAIS LE BRUIT
La plus lointaine, la plus proche,
La plus vive, la mieux cachée,
Comme l’anguille sous la roche,
Comme l’oiseau dans la nichée,
La plus proche, la plus lointaine,
Et qui donne soif aux voleurs
Comme le bruit d’une fontaine
Aux mille battements de cœur,
Vous que j’approche à pas d’oiseau,
A pas tremblants de braconnier,
Mais qui passez comme un peu d’eau
Entre les pailles du panier,
0 ma truite, ma paille folle,
Fumée où mille guêpes fuient,
Vous ressemblez à mes paroles
Dont je n’entends jamais le bruit.
Georges NEVEUX « Proverbiales » (Les Cahiers du Sud)
Au 27 lumineux – ( RC )
Iris, photo personnelle, printemps 2011
Au matin, venu d’une nuit à gestes longs
J’ai émergé de tes bras au sourire blond.
Bercé de l’empreinte de ta souche
Venue verser la tendresse de ta louche.
Nous avons joint nos doigts d’écriture
Pour faire des duos fabuleux en lecture
De gestes enveloppants, nuées d’étincelles
Parsemés d’épices, de crème renversée, et de sel.
La nuit aurait pu t’absorber et diluer
Ton image, la chaleur de ton corps se muer
En mirage, cendre d’imaginaire agacé
Fugace, illusion sitôt vue, sitôt effacée…
Mais le matin descendit du ciel, comme nacelle
Ton esprit me guide en pensée et au réel,
Toi, statue sortie des fées électriques
Vœu de Pygmalion fleuri d’authentique.
Mais le temps (au delà de la nuit)
Peut-il – dans tout ce bruit
permanent , faire que se change
En ombre, l’empreinte de l’ange ?
–
RC – 2011, repris en mai 2014
-
A Pygmalionne, je fus ta sculpture
Détaché d »anonymat, d’une belle aventure
Je prends sens entre tes mains créatrices
De la terre, de la glaise que tes mains pétrissent
Contre dits, contre toi, bruits de couloir
Moulé de tes mains chaudes en laminoir
Fresque volume en liesse à tes vents
D’autan en emportent tes gestes savants
Que je prends vie, soudain, sous tes augures
Et perds , en passant, mon armure.
Vois comme le soir s’éteint – ( RC )
–
Regarde, la lumière orange,
Se coucher sur le lac,
Que les rides d’une brise, dérangent,
Ou cette feuille tombée sur la flaque…
–
Regarde comme les pierres s’envolent,
Détachées du filet
Elles ne sont plus attachées au sol,
Que par leur reflet.
–
Regarde, comme il rebondit,
Le petit soleil tenace
Bientôt englouti
Dans les eaux lasses
–
Regarde, comme les nuages filent,
Et moussent une écume d’or,
Au dessus des îles,
En géantes fleurs.
–
Vois comme le soir s’éteint,
Il se dissout sans bruit,
Pour préparer demain.
De l’autre côté , c’est bientôt la nuit.
–
RC – 26 septembre 2013
–
Claude Esteban – Récit
–
Récit
Voilà que je reprends tout
par le début comme
s’il me fallait une fois de plus
traverser le silence
et c’est d’abord beaucoup
de bruit dans la tête
sans doute les restes d’un vieux rêve
que je ne parviens pas
à séparer de moi et c’est encore
la menace d’un cri toujours
plus loin sur la route et les pierres
(…)
–
La mort à distance, chez © Gallimard 2007,
–
Porfirio Mamani-Macedo – eaux promises VI
Dis-moi si quelque chose te rappelle hier. Un fleuve ? Une montagne derrière une ombre ? Peut-être quelqu’un que tu as aimé en silence ? Qui ? Peut-être un inconnu qui s’est égaré en pleurant au coin d’une rue bleue ? Dis-moi si mes paroles d’hier te rappellent quelque chose, aujourd’hui étant déjà du temps passé ! La parole naissante est sans importance quand tu passeras. Elle continue de chercher dans l’herbe l’arbre promis ! Les nuits succéderont aux jours, comme à tes pas en succéderont à d’autres, encore inconnus. Maintenant je ne suis personne dans le bruit immense de ton regard distrait, mais je vis dans chaque instant qui passe.
Traduit de l’espagnol (Pérou) par Max Alhau
– See more at: http://www.recoursaupoeme.fr/porfirio-mamani-macedo/eaux-promises-vi#sthash.W0wzJmGZ.dpuf
–
Le bruit dans mes tempes ( RC )

peinture: Odilon Redon. Le coquillage
–
Le bruit et le sang
Pénètrent dans mes tempes,
Et l’âme éclatée,
Tourbillonne sur elle-même,
Prisonnière de mon Je,
Tête et corps assemblés,
En bonne logique,
Et pourtant séparés.
Ce n’est pas par la distance,
Mais la terre qui parle
A travers nous,
De l’antre et de l’arche.
L’oeil du silence
Et pourtant le bruit
Des désirs qui se heurtent
Aux mémoires sensibles.
L’océan des plaines douces
Aux tensions secrètes,
Le ventre coquille,
Qui boit mes émotions.
Et comme les silex
Qui se heurtent
Les bouquets d’étincelles,
-nous engendrons nos ciels –
Dans un voyage
Aux lointains d’écume
Où il n’est pas besoin de paroles,
Pour s’entendre en échos….
–
RC – 4 mars 2013
Oslo Deauville Ailleurs mathématiques – 2 voix
–
Oslo Deauville Ailleurs mathématiques – 2 voix
Cette bouche (close):
un son (antérieur) peut-être.
Sur cette pente,
sur ces mains,
un corps dans un temps qui se meurt.
Il coule dans l’interstice de nos visions,
exulte de lenteur.
(Problème)
Sachant que nous sommes ici,
(si)tue moi dans cet espace aux prismes (in)définis,
à la croisée des champs audibles.
(Démonstration) le v(i)oleur ne veut plus de moi.
Un corps (en dé)coule, une inclinaison.
Il (dé)laisse ma personne vidée de tout bruit,
sur cette pente, ailleurs.
(Réponse)
Je suis ailleurs
–
publié par le collectif dixit:
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Marina Tsvetaïeva – les poèmes non écrits
Rimes de murs ( RC )
Il y a sur les murs , tant de portraits,
Tout en sourires, sûrs d’eux, rieurs
Ils nous promettent, les jours les meilleurs
Notre choix sera le bon, et au plus-que-parfait
A voir, ce que prédisent les partis, en futur
De l’aujourd’hui , demain sera toujours mieux,
La politique parle au peuple, en ces lieux
…. ainsi les murs … murmurent
Souhaitez vous une vie moins étroite ?
Mettez le cap à droite
Construire le pays, en dessiner l’ébauche ?
Tournez donc à gauche …
Puis les années passent, on retrouve de vieilles affiches
Dont il reste des lambeaux, délavés par la pluie
Les discours se sont tus, emportés par le bruit
Après les élections, … restent les champs en friche
RC – 4 octobre 2012
–
Antonio Santori – Ensuite il y avait les soirées, presque
Antonio Santori – [Poi c’erano le sere, quasi]
[Ensuite il y avait les soirées, presque]
Ensuite il y avait les soirées, presque silencieuses,
du lit tu entendais les bruits des autres,
d’ouvrières en sueur, d’employés enfants perdus
dans leurs collections.
Tu comptais les brebis égarées,
tu les organisais, elles prenaient toujours
d’assaut le berger idiot auquel tu t’identifiais.
Dans les rues les roues des bicyclettes,
il était étrange de les entendre sur les plaques d’égout,
les sons sortis de leur trou, là dehors
les sons paraissaient éternels.
Comme des garçons nus sur des prés
remplis de cigarettes.
Tu te croyais dans les lits des autres,
dans leurs draps, tu convoquais les jambes croisées,
les dos, tu enlevais ton fard.
Il était étrange d’entendre les enfants
dans leur sommeil, ils paraissaient morts,
tu exerçais ton ouïe sur les arbres improvisés,
perdus dans le vide. On entendait les corps bruire,
endormis. On entendait les rêves. —
Poi c’erano le sere, quasi silenziose, dal letto sentivi i rumori degli altri, di operaie accaldate, di impiegati bambini persi nelle loro collezioni.
Contavi le pecore smarrite, le organizzavi, assaltavano sempre il pastore idiota con cui ti identificavi. Nelle strade le ruote di biciclette, era strano sentirle sui tombini,
i suoni stanati, i suoni là fuori sembravano eterni.
Come i ragazzi nudi sui prati pieni di sigarette.
Ti sentivi nei letti degli altri, nelle loro lenzuola, convocavi le gambe intrecciate, le schiene, ti toglievi gli ombretti.
Era strano sentire i bambini nel sonno, sembravano morti, allenavi il tuo udito sugli alberi improvvisati, persi nei loro vuoti.
Si sentivano i corpi stormire, addormentati.
Si sentivano i sogni. –
Ombres- contre vent – Neige sur les pierres
–
Neige sur les pierres
Il suffit de mots noirs lourds glacés
de pierres écroulées sur une espérance
dans un son étouffé
la neige parfois vient éclairer le vert
effacer l’erreur
pourtant on grelotte
trébuche sur ses certitudes
on s’approche d’une fenêtre
imitant le rouge-gorge
ce solitaire affamé
surtout qu’aucun bruit vienne fendre
l’abri du silence
–
Rainer Maria-Rilke – Pour écrire un seul vers
Pour écrire un seul vers, il faut avoir vu beaucoup de villes, d’hommes, et de choses, il faut connaitre les animaux, il faut sentir comment volent les oiseaux, et savoir quels mouvements font les petites fleurs en s’ouvrant le matin.
Il faut pouvoir penser à des chemins dans des régions inconnues, à des rencontres inattendues, à des départs que l’on voyait longtemps approcher, à des jours d’enfance, dont le mystère ne s’est pas encore éclairci, à ses parents qu’il fallait qu’on froissât lorsqu’ils nous apportaient une joie , et qu’on ne la comprenait pas ,et c’était une joie faite pour un autre, à des maladies d’enfance qui commençaient si singulièrement par tant de profondes et graves transformations, à des jours passés dans les chambres calmes et contenues, à des matins au bord de la mer, à la mer elle-même, à des mers, à des nuits de voyages qui frémissaient très haut, et volaient avec toutes des étoiles.
Et il ne suffit même pas de savoir penser à tout cela.
Il faut avoir des souvenirs de beaucoup de nuits d’amour, dont aucune ne ressemblait à l’autre, de cris de femmes hurlant en mal d’enfant, et de légères, de blanches, de dormantes accouchées qui se refermaient.
Il faut encore avoir été auprès de mourants, être resté assis auprès de morts dans la chambre, avec la fenêtre ouverte, et des bruits qui venaient par à-coups.
Il ne suffit même pas d’avoir des souvenirs, il faut savoir les oublier quand ils sont nombreux. Il faut avoir la grande patience d’attendre qu’ils reviennent, car les souvenir eux-mêmes ne sont pas encore ceux-là.
Ce n’est que, lorsqu’ils deviennent en nous sang, regard, geste, lorsqu’ils n’ont plus de nom et ne se distinguent plus de nous, ce n’est qu’alors qu’il peut arriver, qu’en une heure très rare du milieu d’eux, se lève le premier mot d’un vers. »
extrait de « Cahiers de Malte Laurids Brigge « , de Rainer Maria Rilke,
Je viens de voir qu’un de mes « bloggers favoris », (Beauty will save the world), a choisi précisément le même extrait...
–
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James Sacré – Une petite fille silencieuse
Parler de mourir et d’aimer pour un dernier mouvement d’écriture:
Marie Bauthias – L’aveu clandestin
—
L’aveu clandestin)
Refait ce bruit
ce bruit de mer
d’espace en attente.
La mer n’est plus qu’un bruit
épelé dans le soir
un rêve de jeune buisson.
Le ciel rendait ses copies …
Il n’y a rien à craindre…
Des dames en parenthèses
expliquaient au hasard
le passage des pluies.
Les cadences du ciel
nous ont déjà griffés.
Marie Bauthias
(Verrières, éditions Commune Mesure)
–
Planter ses yeux dans l’au-delà (RC)
—
J’ai planté mes yeux
Dans un bout de ciel
Je ne sais s’il était bleu
Ou couleur de miel
J’ai vu au-delà, un rayon d’ange
Qui passait par là, une de ses ailes
Qui avait de l’or, et de belles franges
C’était peut-être une demoiselle
Sortie des nuages, sur son matelas
L’ange me souriait, sans vanité
Me faisant un signe, de l’au delà
La tête en bas, ignorant la gravité
Et la physique de Newton…
Oui, celui des pommes…
Un ange vêtu de neige
Echappé de son manège
Donnant la lumière
Sans saveurs d’hier
Ecartant des orages, le bruit
Et du sombre, la nuit
Dessinant un tracé d’avenir
Sur une terre naissante
Grande-offerte à son sourire
Que peut-être j’invente
Car, en regardant mieux
En dessus d’horizons
Je n’ai vu de radieux
Qu’un sourire en frissons
Mais je l’ai gardé, comme une buée
Sens dessus-dessous, la tête à l’envers
En voulant aussi, le distribuer
La terre en a soif …
—
RC 24-03-12
—
I pitched my eyes
In a piece of sky
I do not know , if it was blue
Or honey-colored
I saw , beyond , a ray of angel
Passing by, one of its wings
Dressed in gold, with beautiful fringe
Perhaps was it , an angel-girl ?
Out of the clouds, on a mattress
The angel smiled at me, without vanity
Making me a sign to me , from the heaven
Head down, ignoring gravity
And Newtonian physics …
Yes, the one of the apples …
An angel dressed with snow
Escaped from his carousel
Giving light
Without flavors of yesterday
Dismissing storms, noise
And from the dark, the night
Drawing a path for the future
On a emerging land
Great offered to her smile
Maybe …. I invent ….
Because, looking better
Above, In horizons
I have just seen , bright
A smile , in chills
But I kept it , as a mist
Turned upside down, head upside
Wanting to deliver it
So thirsty is the world .
–
–
Edouard Glissant – L’arbre mort et vivant

photo : Karine Granger, voir son site
L’arbre mort et vivant
–
Toute une nuit au bord de l’horizon
Il te cherchait, n’osant clamer par-dessus l’or
Si tu criais parmi les oiseaux morts
Si tu donnais la voix pour les peuples
Ou si muette tu venais dans l’épaisseur des vitres.
Il se tenait près de la nuit parmi les arbres
Il se levait dans son aurore et mort
Il chérissait tant d’ombre il déhalait ce bruit
Et te seyait, toi pure aux mains de qui poussaient
Les laves de minuit en l’arbre contemplées.
Il se tenait devant la nuit
Entretenu d’un vent de glace
Et se levaient les aigles sans cité
Mendiants dévolus qui lavaient l’horizon.
Edouard Glissant
Pendant que je m’enlise ( RC)
Pendant que je m’enlise, les autres s’éloignent doucement.
Si discret est le bruit de leurs pas qu’on les oublie autant qu’ils m’oublient au sable, aux vents.
Mes cris n’atteignent jamais ceux qu’ils voudraient joindre. et se croient plus errants et se figurent sans un geste.
Je serai bientôt aboli, inconnu, immobile, dans ma solitude humide et, bientôt enseveli, très doucement… les algues déposées effaceront le soupçon de ma présence..
Présence éphémère, et bientôt le sable lisse…
et plus de bruit.
—
— variation « aimable »,
à partir de la « durée » ( un des poèmes de « la citerne » de Louis Scutenaire ) – auteur surréaliste belge
Bernard Vargaftig – Les bruits sont lents
Les bruits sont lents ils font un paysage
D’oubli et d’eau de pentes qu’on remonte
Petites peurs frottées les unes aux autres
C’était rêver le ciel dans les bassines
Entre les noix et le bois sec le chanvre
Quelles durées fuient toujours dans la mienne
Semblants de mots d’habitudes qui cèdent
Quand on dirait qu’une à une les choses
S’étendent et se recouvrent indifférentes
Ombre enlisée enfance complaisante
Et que déjà l’herbe pousse à travers
Description d’une élégie
Editions Seghers Poésie 75, 1975
Pygmalionne à l’ancre de tes jets
Aux quatre vents des détroits de l’ouest
J’ai pris ton bras et retourné nos vestes
Il s’agissait avant tout que je peste
Contre les dits de couloirs de nos gestes
Tu m’as tournée contre toi d’un ton leste
Ne t’arrête pas de dessiner ta fresque
Car dans les vents il y a à Lambesc
Autant de joie que de vie ou de liesse.
Carnet privé