Martine Cros – La tentation du vent
Je vais ce crépuscule tenté par un bain de mer qui vient s’abreuver aux calanques tyriennes, aux rosées des paysages ; je lape l’or aux hanches des falaises qui sombrent dans l’eau mate ; l’évocation de cette union ancestrale gorge mon courage de royaumes d’amour que la nuit entretient
je plonge
Prendre soir
et j’emporte sous ma cape ces senteurs sensuelles de bois que l’on râpe, ces muscs noirs que le zénith éclot à même le rocher ; j’ai pris soin de les cueillir à chacune de mes essoufflées ; puis je range les activités humaines qui peuplent ces vallées virginales que l’enfer souille de ses simonies avant de retrouver
l’onirique ouvrage
nouer la nuit
Je sombre
….
- —–la suite est visible chez les « cosaques des frontières »
La Provence se penche pour un baiser profond (RC )
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Il est des calanques, comme une personne que vous aimez,
En la conduisant vers la mer, juste pour y tomber dans son lit,
En allant vers le mirage sauvage de l’eau,
La Provence se penche pour un baiser profond,
Sertie de roches blanches, coupantes
– Comme menaçant la terre, en la poussant
Dans les flots sertis de diamants mobiles,
Avec ses pins qui résistent, avec leurs manches vertes,
Leurs racines puisant le ciel d’un soleil,
Et la pente fourbue des rochers
– S’éparpille en îles,
Battues par le vent sauvage de l’azur.
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RC – 12 avril 2013
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Marseille, crépuscule ( RC )

photo: Fréderic Barrial
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L’or n’est plus dans les banques,
Il s’étale sur les façades .
Le vent souffle par saccades ;
Il dévale de l’Ouest vers les calanques.
Dans la journée, les rocs jouent du blanc,
Mais se fatiguent de la pose
En tournant sur le rose
Au cours d’un parcours lent.
La mer est un miroir,
Les maisons se ceignent
Des paillettes du soir,
Avant que la cité ne s’éteigne .
C’est un moment éphémère,
Qui colore les quartiers et les farde
De brillance et de mystère
Jusqu’à Notre Dame de la Garde…
Les îles aux bords froncés,
sont une dentelle de vermeil,
Des rochers, comme des coques enfoncées,
Prêtes pour un nouveau sommeil.
Avec l’attente des pins et des cigales ,
Lorsque s’en va le soleil …
——— La main de la nuit s’étale,
Sur la ville de Marseille.
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RC – 8 novembre 2012
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Bête de Gévaudan ( RC )
Dans ces lieux, que je vous décris
Il y a toujours de ces champignons
Que l’on prend pour des lumignons
Des brumes, de l’encre et des cris..
Il n’y a plus grand monde, avant l’hiver
Quelques boeufs, pas de tracteurs
Mais seulement quelques cultivateurs
Et les environs sont déserts
Dans les labours, ils jettent le blé au vent
Comme elle est bête , du Gévaudan…
dans la forêt sombre, luisent des dents
C’était il y a longtemps, c’était avant…
Il y a des chemins qui vont au hasard
Et des bandits de grand chemin
Qui hantent les routes du destin
Lorsque le jour se fait hagard
Si le sombre se pose là, menaçant
Tous les jours ne sont pas dimanche,
Envers l’inconnu un désir de revanche
Mêle de l’inconnu des désirs de feu et sang
Car on raconte beaucoup de choses
Difficiles à vérifier
Et dont il faut quand même, se méfier
Qui font beaucoup de littérature, – et de prose.
On ne sait plus, avant que pierres se fendent
Ce qui est du vrai ou du fantastique,
Le fil du temps, délite l’historique
Et les traces se diluent en légendes…
A trier du grain de l’ivraie,
Les contes, enjolivés par l’âge
Ne sont plus, au reportage
Qu’évènements, où chercher le vrai
Est comme chercher , quelques indices
Ou l’aiguille dans la botte de foin
De ces échos lointains
Qui ont intéressé la police…
Mais provoquent l’imaginaire
D’un esprit élastique
A voir des bêtes fantastiques
Un peu partout sur terre…
Si une bête s’est échappée
C’est toute un affaire
— On parle d’une panthère
Et toutes les calanques sont bloquées…
Il faut verser de l’encre en litres
Le lecteur des gazettes est poussé à l’achat…
Finalement …… ce n’était qu’un gros chat
Dont on fit les gros titres…
Les nouvelles d’ailleurs ne sont jamais pareilles
La Sardine – ( cétait un record )
Avait bouché le vieux port…
C’est vrai qu’on était à Marseille…
On dit bien avec » l’acssent », » Bonne Mère »
– Tu vois pas qu’ils exagèrent…. ?
Mais dans le sombre Gévaudan
… on en fait tout autant….
Et si la « Bête » — ce phénomène
– Dont on fit affaire d’état
N’était qu’une suite d’assassinats
Qui aurait sa forme humaine…. ?
Dont on fit une « Une »
— faute de trouver un coupable
Ce fut la « bête » », le responsable
… les loups hurlant à la lune….
RC – 20 octobre 2012
( voir -entre autres la description détaillée qu’on en a fait, ici… )
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Ecriture paysagère, plume voyageuse ( RC )

photo: Yann Arthus Bertrand – îles d’Aran – Inishmore
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J’ai écrit sur les causses et les montagnes
L’aube sur les étangs gelés, en rase campagne
Les déplacements minuscules, qui font sans doute
La différence, aux zébrures de parcours d’autoroute…
J’ai aimé la nef affleurant des îles d’Aran
Les nuages empilés, de ces îles sous le vent
Les champs qui ondulent, et contournent les collines,
Les pins sylvestres attentifs, au bord des dolines,
En attendant que l’orage cesse, sous un abri de roc,
Ma tête convoquait les ogives d’une cantate baroque
Les toits dansants d’un village provençal,
Un marché, fruits et légumes, jonglant de couleurs sur les étals.
Avec mes croquis des maisons d’Amsterdam,
Sous un ciel si bas, que les nuées condamnent,
Je me suis donné l’espace d’un défi,
Sans transcrire en photos, architectures, et géographies…
La plaine est immobile, et la plume voyageuse,
Et caresse aussi bien les bords de la Meuse,
Que le bourdonnement têtu des abeilles
Dans les calanques, près de Marseille.
RC – 29 juin 2012