Béatrice Douvre – Gravitation
croix de chemin en Gévaudan ( Besseyre )
Sous le grand âge du printemps
L’eau sourd en gouttes de regret
Des bouquets sonores exultent
Poudroyant
Mais la demeure saigne
Et sa fissure
Nous avions construit ici notre logis
Sur un escarpement de pierres heureuses
La campagne est mouillée de sevrage
La voix nuptiale empruntée aux pierres
Heure boisée qu’excède l’amour
Tu innocentes ta trouvaille d’enfant
Tu gis sur le chemin trempé
Et de pluie tu défailles
Maintenant brillent d’obscures larmes
Tu acceptes la peur immaculée de vivre
L’aube étincelle dans l’herbe des vigueurs
Souffle mûr mêlé du sang des hommes
Tu marchais réinventant le pas du sol comme une soif
Dans le vent neuf Je te regarde tu courais
Geste habité du vœu de naître
Auprès des croix
Qui font parfois les pierres profondes
Moment cendré de l’étendue
Chancelant
Et notre pauvreté nous vient d’un même exil
Dans le temps
Grandir a dissipé le seul voyage
Entre l’arbre et le seuil
Entre nos mains
Désormais c’est l’herbe qui nous dure
Sa cécité très douce à nos pas retranchés
Quelques indices de notre cécité – ( RC )
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C’est être debout sur le sol,
Regarder l’herbe ployer sous le vent,
Ecouter le bruit froissé
Des feuilles du marronnier,
Fatiguées de l’été,
Et dont la rouille
Sous les pas, roule….
Ainsi, le cours des choses,
Lié aux saisons …
Mais s’arrêtent-elles,
Là où se porte le regard ?
Le chant de la sève est silencieux,
Qu’elle se recroqueville dans le froid,
Ou au printemps, éclate de joie…
Sous le sol tout existe autrement.
Les rongeurs creusent leur univers,
Les graines attendent le bon moment
Pour bondir à l’air libre,
Et des racines traîtresses
Etendent leur complot de trame,
Comme si elles avaient le pouvoir
D’étendre leurs yeux ,
Au plus obscur de l’espace,
Perçant la densité de terre,
Jusque sous nos pieds,
– Et nous n’en savons rien – ,
Comme si une vie souterraine,
Se poursuivait à l’abri de l’air,
Une lutte infinitésimale,
Conjugaison de bactéries,
Radicelles, et alchimie de bois :
Quelques indices de notre cécité.
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RC août 2015
Adriana Mayrink – Le cri est tenu d’être muet
Photo : James Balog-
Et les mots remâchés et ingérés.. Et avec cette liberté
pleine d’expression, les mouvements d’une pensée,
qui vont et viennent, volcaniques.
D’être , de penser et d’exister, …
( traduit du brésilien – RC)
Du hasard est né cécité – ( RC )
photo Polly Chandler : lay your head where my heart used to be
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Et si je prends à rebours d’autorité
A jeter les dés autrement ( sans y être invité)
Et décideront d’un autre parcours – de notre vie
C’est l’avenir qui balbutie – et qui change d’avis
Le hasard prodigue en surprises, peut avoir des revers
Et le soleil peut faire place à la journée ( à l’envers)
Plus grise et sombre qu’on l’eut souhaitée
Et nous voilà face aux décisions divines (entêtées)
La grande question, est que nous ne dominons rien
En visibilité courte de ce que nous promet le destin.
Si un ange passe, est-ce que son doigt se pointe sur nous,
Ou nous laisse dans l’ombre – au fond du trou ?
Comment savoir alors, sinon jouer les probabilités
A décider du destin, le hasard ( seul habilité),
Qui en fait tout à son aise – peut-être des miracles
Ou bien la catastrophe. ( faudrait consulter l’oracle….)
Face aux éléments… incendies, tornades, en démence
A utiliser le hasard – je me fais agent d’assurance
Si toujours, en jetant au sol les cauris
Ce sont les éléments qui me sourient
Ou bien, à subir le hasard, – et ses caprices
Passer à côté du vrai, tomber dans le factice
Etre accusé à tort, subir les supplices
Autres agréments et injustices
On peut subir le mauvais sort
Et ne jamais s’en sortir, malgré ses efforts
Tirer la courte paille, le mauvais numéro
Qui jamais ne fera de nous, des héros.
Ainsi les conscrits par le passé, pas de chance
Sont envoyés – par hasard – défendre la France
Enfin, plutôt les seigneurs et puissants
Imposant de la sorte un « don du sang »
Il se peut ainsi que le hasard m’aille
Ou bien goûter le revers de la médaille,
En étant cloué au poteau
Pour avoir perdu au loto…
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RC 15 juin 2012
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