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Frédéric Clément – Deux et déjà …


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dessin – aquarelle  persos   2011

 

Dans la pénombre où l’on devineDe lents mouvements de poitrine

Aux souffles courts à peine audibles

On sent une peur indicible

 

La peur de n’être plus jamais les mêmes

La peur d’aimer sans être aimé

La peur impossible à nier…

La peur… Impossible à nier

 

Est-ce que c’est ainsi la première fois

Les perles d’eau, la peur du froid

La première peau contre sa peau

L’étrange effroi mêlé de chaud ?

 

Deux et déjà si peu de mots

Deux, et déjà seuls à nouveau        

 

Il est encore hésitant

Elle, immobile, elle attend

On dirait que le temps se froisse

Que leur corps est pris dans la glace

 

Leur corps qui n’est plus tout à fait le même

Leur corps orphelin désormais

De tous les rêves qu’ils ont faits

Leur corps et l’impasse où il est…

Leur corps… Et l’impasse où il est

 

Est-ce que c’est ainsi la première fois

Les perles d’eau, la peur du froid

La première peau contre sa peau

L’étrange effroi mêlé de chaud ?

 

Deux et déjà si peu de mots

Deux, et déjà seuls à nouveau .

 

le texte de cet auteur ( parmi d’autres) , est visible sur ce site


S.M.Roche – Nocturne


372023

 

 

Des ailes bruissent au fond d’un seau,
des formes surgissent de la terre,
d’autres sont accroupies.

La rumeur de leurs mains nappe la ville.
Un dernier fruit tombe du ciel
sur la tôle du poulailler
et les coqs sont réveillés.

Personne ne pense aux étoiles,
il a fait trop chaud tout le jour.

Le dormeur amène la voile,
le songe s’engrave sur le lit,
le poème s’est perdu.

Il reste le bois fendu
d’une nuit sans sommeil.

 

– A lire, avec beaucoup d’autres  sur  le site « chemin tournant »


Aveuglé par les étés – ( RC )


éruption solaire – photo Nasa

 

Le soleil est si grand,
Qu’il tendra ses bras,
Et si à midi je meurs,
Ce sera bien au chaud,
Je lui rendrai ma vie,
J’oublierai la misère,
Ses jardins desséchés,
Et les côtés sombres,
Qui tentent d’échapper,
A la coulée de lumière,
Mais le soleil est    si grand,
Que ,    de la terre rebelle,
Il ne fera s’il le veut,
–   Qu’une bouchée,   mais
Je ne serai plus là,
Pour le voir,
>     Aveuglé par les étés.

 

RC

(texte inspiré par un poème  de Béa Tristan  « le soleil » )

 


Cesare Pavese – Simplicité


photo personnelle retravaillée - 2009


simplicité

 

«l’homme seul – qui a été en prison – se retrouve en prison
toutes les fois qu’il mord dans un quignon de pain.
En prison il rêvait de lièvres qui détalent
sur le sol hivernal. Dans la brume d’hiver
l’homme vit entre des murs de rues, en buvant
de l’eau froide et en mordant dans un quignon de pain.

On croit qu’après la vie va renaître,
le souffle s’apaiser, et l’hiver revenir
avec l’odeur du vin dans le troquet bien chaud,
le bon feu, l’écurie, les dîners. On y croit,
tant que l’on est en taule, on y croit. Puis on sort un beau soir
et les lièvres, c’est les autres qui les ont attrapés
et qui, en rigolant, les mangent bien au chaud.
On doit les regarder à travers les carreaux.

L’homme seul ose entrer pour boire un petit verre
quand vraiment il grelotte, et il contemple son vin :
son opaque couleur et sa lourde saveur.
Il mord dans son quignon, qui avait un goût de lièvre
en prison ; maintenant, il n’a plus goût de pain
ni de rien. Et le vin lui aussi n’a que le goût de brume.

L’homme seul pense aux champs, heureux
de les savoir labourés. Dans la salle déserte
il essaye de chanter à voix basse. Il revoit
le long du talus, la touffe de ronciers dénudés
qui était verte au mois d’août. Puis il siffle sa chienne.
Et le lièvre apparaît et ils cessent d’avoir froid. »

Cesare Pavese, “Simplicité”, in Paternité, Travailler fatigue, Gallimard, Collection Poésie, page 158.

art: - installation Barry LeVa --Wagner Variation 2

« L’uomo solo – che è stato in prigione – ritorna in prigione
ogni volta che morde in un pezzo di pane.
In prigione sognava le lepri che fuggono
sul terriccio invernale. Nella nebbia d’inverno
l’uomo vive tra muri di strade, bevendo
acqua fredda e mordendo in un pezzo di pane.

Uno crede che dopo rinasca la vita,
che il respiro si calmi, che ritorni l’inverno
con l’odore del vino nelle calda osteria,
e il buon fuoco, la stalla, e le cene. Uno crede,
fin che è dentro uno crede. Si esce fuori una sera,
e le lepri le han prese e le mangiano al caldo
gli altri, allegri. Bisogna guardali dai vetri.

L’uomo solo osa entrare per bere un bicchiere
quando proprio si gela, e contempla il suo vino :
il colore fumoso, il sapore pesante.
Morde il pezzo di pane, che sapeva di lepre
in prigione, ma adesso non sa più di pane
né di nulla. E anche il vino non sa che di nebbia.

L’uomo solo ripensa a quei campi, contento
di saperli già arati. Nella sal deserta
sottovoce si prova a cantare. Rivede
lungo l’argine il ciuffo di rovi spogliati
che in agosto fu verde. Dà un fiscio alla cagna.
E compare la lepre e non hanno più freddo. »