voir l'art autrement – en relation avec les textes

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Un être de mer – ( RC )


photo RC – Finistère -janvier 2021

Ce n’est pas une frontière,
ni une ligne, ni une surface,
une zone interdite,
c’est un océan, une mer,
qui vient et se retire
mais jamais trop loin.


C’est comme un être qui respire,
aux baisers salins.
Un être qui t’invite
quand la marée se lasse
dans de petite flaques
autour du sable mouillé,
se dissimule derrière les rochers,
les épaves rouillées
dans l’attente du ressac.


Il n’a pas d’étendue définie,
pas de limite ,
se rétrécit au découvert de plage,
puis revient comme un cheval sauvage,
lui que l’on croyait assoupi,
étincelant au soleil de midi,
jouant de sa robe ouverte
sur la gamme bleue des gris.


Ceux qui empiètent sur son territoire
le font en pure perte :
c’est ce pays sans mémoire
qu’on ne peut pas cerner,
trop indocile
pour qu’on puisse le dompter.


Il peut dévorer les îles
les engloutir sous la brume;
à coups d’écume.
Il reprend ce qu’on lui a volé,
des châteaux éphémères
aux navires téméraires
des temps écoulés….
……tel est le pays de mer.


Glissements du cœur en marche – ( RC )


photo et montage RC

Attention , surtout , aux glissements
du cœur en marche:
il pourrait se détacher
dans la vitrine transparente
de mon corps translucide,
et offrir ses pulsations
au tout venant.
Je suis le carrosse fixe
placé juste devant,
emporté par la course circulaire
du manège enchanté.
Je reste à distance égale
de ton petit cheval,
alors que tout se brouile
autour de moi:
la place où les arbres
défilent autour de nous,
les visages flous,
les réverbères aux éclats dorés.
C’est un cinéma permanent
que rien ne semble arrêter,
les murs se courbent,
– mais bien loin
de l’étoile que je suis,
celle de ton regard
quand tu te tournes vers moi,
effrayée encore
par le mouvement des astres,
et le sang bleu
de mon corps transparent…


Charles Dobzynski – Un cheval juif –


René Chabrière – Le cheval jaune (dessin aquarellé) –
Un cheval juif 
ça n’existe pas 
pourtant j’en ai vu un.

Tête noire et crinière blanche 
qui ne s’était pas enfui 
d’une écurie de Chagall.

Cheval aveugle qui pleurait
paupières lourdes
de toutes les larmes du monde.

Hirsute échappé soudain du visible 
peut-être de la Bible 
ou d’une énigme du Zohar.

Il avait fléchi son allure
oublié son galop
et ne portait pour cavalier 
qu’un maigre halo de lune.

Il ressemblait au portrait 
d’un aïeul désolé 
incarcéré dans les fissures

de son image.

Tressaillement des naseaux 
et sous sa robe tremblante 
une douleur insatiable.

La douleur qui est l’azote 
des âmes tombées 
d’un trou de l’ozone.

Le cheval ne se cabrait pas 
face au destin déserté 
il flairait les lointains.

Il humait dans l’herbe rêveuse 
une rosée millénaire 
l’histoire volée en éclats.

Le cheval traverse la nuit 
sans la voir et puis il entre 
dans le jour à son insu

comme on entre dans un miroir.


Je l’enfourchais parfois 
sa tendresse me soulevait 
je le tenais par le mors.

Il me tenait par la mort. 


Je est un Juif, roman

nrf Poésie/ Gallimard


André Fromont – le silence n’existe pas


document extrait d’un des nombreux albums « d’images » de André Fromont  » vous me suivez »


Basho -La pièce perdue


euro, 5 cents, pièce de monnaie en cuivre, de tomber, de crise, de l'eau

La pièce perdue dans la rivière se trouve dans la rivière
Le soleil et la lune sont des voyageurs dans l’éternité.
Même les années sont errantes.
Pour ceux dont la vie est sur les eaux
ou qui conduisent un cheval au fil des ans
chaque jour est un voyage
et le voyage lui-même est la maison .


– Basho

( tentative  de traduction RC à partir  de l’anglais )

 

The Coin Lost In The River Is Found In The River

The sun and moon are travelers in eternity.
Even the years are wanderers.
For those whose life is on the waters or leading a horse through the years
each day is a journey and the journey itself is home

– 


James Sacré -Toit dans l’ombre (ou lampe) et le temps


 

Kandinsky The blue rider, 1903, Ernst Bührle Collection, Zür

Kandinsky – The blue rider

 

 

 

Un grand cheval emporte un pays , le village

( C’est au printemps , un arbre a grimpé son branchage

Au ciel )  ;  espace  : ah , oui les merveilleux nuages  !

Mais rien , que le vent , rien , le bleu du paysage .

Où bondir  ?  je ramasse un trèfle ,  des fourrages  ;

Ras de terre écorché , escargots , tussilages ,

Un cheval maigre y traîne un précaire attelage .

Où le printemps , les foins  ?  Où paraît quel visage  ?

Un arbre fait quel signe où rougit le village  ?

Je le regarde au loin , printemps fleuri , feuillages ,

Taupinière et chardons le soleil , cheval sage …

Et rien , que le vent rien , l’érosion d’un village .

 

 

 

 

 

Toit dans l’ombre (ou lampe) et le temps p 34

(à des poèmes d’Yves Bonnefoy)

ANCRITS  – Imprimeur Thierry Bouchard (Losne)

1982


Louis Aragon – Les roses de Noël


Chanac    résine de cimetiere    -12- .JPG

photo perso – Chanac

 

 

LES ROSES DE NOËL (extrait)

Quand nous étions le verre qu’on renverse
Dans l’averse un cerisier défleuri
Le pain rompu la terre sous la herse
Ou les noyés qui traversent Paris

Quand nous étions l’herbe ]aune qu’on foule
Le blé qu’on pille et le volet qui bat
Le chant tari le sanglot dans la foule
Quand nous étions le cheval qui tomba

Quand nous étions des étrangers en France
Des mendiants sur nos propres chemins
Quand nous tendions aux spectres d’espérance
La nudité honteuse de nos mains

Alors alors ceux-là qui se levèrent
Fût-ce un instant fût-ce aussitôt frappés
En plein hiver furent nos primevères
Et leur regard eut l’éclair d’une épée

Noël Noël ces aurores furtives
Vous ont rendu hommes de peu de foi
Le grand amour qui vaut qu’on meure et vive
À l’avenir qui rénove autrefois

Oserez-vous ce que leur Décembre ose
Mes beaux printemps d’au-delà du danger
Rappelez-vous ce lourd parfum des roses
Quand luit l’étoile au-dessus des bergers

Louis ARAGON          « La Diane française »(éd. Seghers)


Yahia Lababidi – A quoi rêvent les animaux ?


peinture:     Franz Marc  -  renards  1913-14

peinture: Franz Marc –  agneau 1913-14

A quoi  rêvent les animaux   ?

Est-ce qu’ils rêvent de vies passées et de rêves non vécus
indiciblement humains ou incroyablement bestiaux ?

Ont-ils du mal à attraper dans leur sommeil
ce qui est trop glissant pour les doigts de la journée ?

Est-ce que leurs subtiles allusions nocturnes peuvent éclairer leurs heures sans rêves ?

Sont-ils hantés par les spectres de regret
visitent-ils leurs morts dans une somnolente gratitude ?

Ou sont-ils revisités par leurs crimes
transcrits en hiéroglyphes alléchants ?

Ont-ils retracé les grandes lignes de leurs blessures
ou le rêve d’une mutation, à la place ?

Ont-ils tiré sur des noeuds obstinés
de désirs inassimilables et de disputes contrariées ?

Y at-il de l’émoi, des bouleversements, ou de la rébellion
qu’ils éprouvent contre leur personne ou leur destin ?

Sont-ils libérés de forces et faiblesses particulières
au cheval, au cerf, à l’oiseau, à la chèvre, au serpent, à l’agneau ou au lion ?

Sont-ils jamais ni animaux, ni humains
mais créature et être ?

Ont-ils des moments sacrés de compréhension de leur entité dans leur essence même ?

Est-ce se rendent compte,d’une existence plus complète
soulagée du fardeau de la veille ?

Est-ce qu’ils soupçonnent, avec les poètes, que tout ce que nous voyons ou en a la ressemblance n’est qu’un rêve dans un rêve ?

Ou est-ce simplement une petite mort
un petit goût de néant,  qui se rassemble dans leur bouche ?

————-

peinture: Franz Marc  -  singe  1912

peinture: Franz Marc – singe        1912

What do animals dream?

Do they dream of past lives and unlived dreams

unspeakably human or unimaginably bestial?

Do they struggle to catch in their slumber

what is too slippery for the fingers of day?

Are there subtle nocturnal intimations

to illuminate their undreaming hours?

Are they haunted by specters of regret

do they visit their dead in drowsy gratitude?

Or are they revisited by their crimes

transcribed in tantalizing hieroglyphs?

Do they retrace the outline of their wounds

or dream of transformation, instead?

Do they tug at obstinate knots

of inassimilable longings and thwarted strivings?

Are there agitations, upheavals, or mutinies

against their perceived selves or fate?

Are they free of strengths and weaknesses peculiar

to horse, deer, bird, goat, snake, lamb or lion?

Are they ever neither animal nor human

but creature and Being?

Do they have holy moments of understanding

in the very essence of their entity?

Do they experience their existence more fully

relieved of the burden of wakefulness?

Do they suspect, with poets, that all we see or seem

is but a dream within a dream?

Or is it merely a small dying

a little taste of nothingness that gathers in their mouths?

peinture: Franz Marc:  le  rêve  1912

peinture: Franz Marc:            le rêve         1912

Yahia Lababidi is the author of a collection of aphorisms, Signposts to Elsewhere (Jane Street Press) selected for ‘Books of the Year, 2008′ by The Independent (UK) and the critically-acclaimed essay collection, Trial by Ink: From Nietzsche to Belly Dancing. His latest work is the new poetry collection, Fever Dreams.

texte traduit par mes soins…

on peut trouver  bien d’autres  textes intéressants  en langue anglaise, et parfois la langue  d’origine,  sur le site the thepoetry


Prisonnier de la petite condition ( RC )


 

 

 

peinture perso.  Détail

peinture perso   1998. Détail

Prisonnier  de la petite condition,
De ma fatigue, l’essence de la vie
Je rayonne moins  qu’un cheval au galop,
Et moins encore qu’un train,
Un assemblage de mécaniques,
qui ne pose aucune question,
Ainsi se délimite
Le contour des choses,
Le rayon d’action,
Ce qui est à portée  de mains,
Ou de geste.

Je me rappelle, comment la base des arbustes
Est taillée régulièrement
Dès lors que les chèvres  s’en chargent
Pas plus loin que ce que permet
L’extension maximale  de leur corps,
Et de même
Ayant rassemblé mes esprits
Mes idées  éparpillées,
Utilisant le jour,
Comme le permettent mes forces,
Je  délimite un espace

En empiétant sur la nuit,
Qui fuit de temps à autres,
Mais si peu,
La cellule mobile
Que je tapisse
De couleurs
Et de songes
Matériellement , peu définie,
Mais qui reste
Comme un costume
A ma mesure.

RC-  23 mars 2013

 


Franck Venaille – Quelqu’un habite en nous


projet de pub

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quelqu’un se tient de nuit
lourdement obscur
debout
contre un portail
en fait on ne distingue que ses chaussures noires, leurs lacets élégants
quelqu’un
ça ! il ne laisse rien voir de lui, il
observe les passants, les habitués de la brasserie, il
se tient comme un cavalier de l’Apocalypse dont le cheval se serait noyé Il et Il
ô monde malade, mon devoir est de rendre compte de l’état de tes nerfs
de ta pensée et de certains de tes actes
cet autre moi-même, debout, adossé à la porte, s’y emploie
mais qui est-il vraiment ? double – jumeau ? faussaire en identité scabreuse ?
on ne voit que ses chaussures, leurs larges lacets élégants, cela suffit
cela suffit pour l’instant
quelqu’un habite en nous : amoureux de la vie, stratège de la mort
qui chaque nuit
dirige la Baraque des rêves ouverte toute l’année
ô monde si peu scrupuleux, si versatile, si mal ouvert aux autres
accepte aussi mon étrange présence
pour en finir jamais

Franck Venaille, Ça, Mercure de France, 2009

 

-grimalkin-
Admin famille
France

Date du message : octobre 23, 2011  02:35

Éffacer ce message

je transfere ce post de « poésie d’aujourd’hui » qui fermera u n jour, pour qu’il soit conservé
et lu ! c’est un grand poète.
**************************

Je suis un homme floué.
La mort, la maladie, ont sonné à ma porte.
Je sens leur impatience et, très souvent, je la comprends.
Je leur demande encore un petit, un peu, un petit peu de temps si précieux. Non pas pour
faire
l’âne devant les doctes assemblées.
Mais afin de mieux comprendre ce qui m’échappe encore:
Le sens de la vie, la place exacte que prend le sexe dans cette aventure minimaliste.
Je ne suis pas membre d’une confrérie d’orgueilleux.
Mais je sais ce que sont exactement les livres que j’écris.
Malgré tout, je suis cet homme que la vie a floué.

Paris, mon beau Paris, il faudra bien qu’un jour l’homme en noir descende en gare du
Nord,
s’arrête Au rendez-vous des Belges, mette une croix face à mon nom sur son carnet
douteux.

Paris, mon beau Paris, vous serez mon témoin.
Je vous ai aimé et si j’ai passé tant de nuits dans tant de capitales, c’était !
Les mots se doivent d’être justes.
C’était !
Pour le goût des rencontres peut-être.
Un détaIl baroque sur la Place d’Armes.
La découverte d’un pont suspendu.

Paris, mon beau Paris, je m’adresse à vous dans l’urgence.
Voyez, je suis fatigué.
A la violence de la maladie s’ajoute désormais celle de la médecine.
Faites, s’il vous plaît, en une nuit, exploser tous les Services de Neurologie de vos
hôpitaux.
J’y gagnerai du répit, faites-le, c’est en votre pouvoir!

Je suis cet homme qui se sent floué et tape du poing sur les portes à s’en briser les
phalanges.

Franck Venaille

***
Douleur que j’ai aimée, dis-je…

Douleur que j’ai aimée, dis-je, « aimée » est-ce le mot
Qu’alors j’employai devant tous ces visages de mauvais
Lieux ? Douleur ! Cette manière de nous mouvoir au
Milieu de la foule dolorante. Lui ! Que fait-il, voûté ? Il
Essaie, oui peut-être essaie-t-il de faire entrer toute cette
Souffrance dans ces sacs de deuil noir, des mouvements
Du glas, de larmes. Reviennent à lui ces mots : « douleur
Aimée » & se souvient de chacun des termes de cette
Lettre qu’au grand jamais il n’écrira : « D’amour ah ! je
Me suis pour vous, blessé ». Pourquoi & quand ? Désormais
Quelle armée lui tient compagnie ? Quel officier la veille ?
Douleur aimée, pourquoi geindre ? Vous vous éveillez
Près d’eux, ces hommes sortant du bal, dites ! en sang.

Franck Venaille

***
Epsilon
Date du message : mars 18, 2009 09:11

Je décidai de devenir cheval flamand, de hennir, de penser et d’écrire dans cette langue ».
Franck Venaille (né à Paris en 1936) est un poète et écrivain français. Sa poésie se
caractérise
par sa puissance expressive, cherchant à faire ressortir la part animale de l’homme, ses
pulsions
et ses angoisses.

Né dans une famille catholique, dans le XIème arrondissement de Paris, Franck Venaille
sera
durablement marqué par son service militaire durant lequel il participe à la guerre
d’Algérie.
Cette épreuve ressurgit de loin en loin dans sa poésie, jusque dans ses recueils les
plus
tardifs. Elle forme la matière explicite de La Guerre d’Algérie (1978) et d’Algeria (2004).

Dans son enfance, il effectue un séjour de trois mois en Belgique, à l’origine d’une
attirance
profonde pour le pays flamand. Ce dernier constitue l’arrière–fond récurrent de sa poésie,
en
particulier de son œuvre majeure, La Descente de l’Escaut (1995).

Franck Venaille est proche des peintres Peter Klasen et Jacques Monory, qui ont exercé
une
influence notable sur son œuvre. Il collabore à la revue Action poétique (années 1960) et
à
Orange Export Ltd (années 1980). Il a également créé les revues Chorus (1968) et
Monsieur Bloom
(1978). (Wikipedia)
***

Epsilon
Date du message : mars 18, 2009 09:47

J’ai souffrance beaucoup,de cœur surtout

J’ai, très fort en moi, angoisse d’être vivant : j’ai !
Chaque naissance m’est blessure et la mienne gît
Quelque part dans une ville qui m’apparaît plus morte
Encore que ce rat dans l’égout – lui, au moins, n’atten-
Dant rien, n’espérant rien – (mais en est-on sûr ?) de
La vie. J’en ai grand angoisse ! J’ai angoisse de cela.
Il reste l’écriture, avec ses soldats, ses hommes par Mil-
Liers : nos libérateurs. Ressentent-ils eux-mêmes cet-
Te sensation ? Être des mots, blessés, qu’angoisse ronge !

***

Quelqu’un habite en nous

quelqu’un se tient de nuit
lourdement obscur
debout
contre un portail
en fait on ne distingue que ses chaussures noires, leurs lacets élégants
quelqu’un
ça ! il ne laisse rien voir de lui, il
observe les passants, les habitués de la brasserie, il
se tient comme un cavalier de l’Apocalypse dont le cheval se serait noyé Il et Il
ô monde malade, mon devoir est de rendre compte de l’état de tes nerfs
de ta pensée et de certains de tes actes
cet autre moi-même, debout, adossé à la porte, s’y emploie
mais qui est-il vraiment ? double – jumeau ? faussaire en identité scabreuse ?
on ne voit que ses chaussures, leurs larges lacets élégants, cela suffit
cela suffit pour l’instant
quelqu’un habite en nous : amoureux de la vie, stratège de la mort
qui chaque nuit
dirige la Baraque des rêves ouverte toute l’année
ô monde si peu scrupuleux, si versatile, si mal ouvert aux autres
accepte aussi mon étrange présence
pour en finir jamais

Franck Venaille, Ça, Mercure de France, 2009


Aimé Césaire – Prophétie


peinture – Hope Scott

 

 

là où l’aventure garde les yeux clairs

là où les femmes rayonnent de langage

là où la mort est belle dans la main comme un oiseau saison de lait

là ou le souterrain cueille de sa propre génuflexion un luxe de prunelles plus violent que des chenilles

là où la merveille agile fait flèche et feu de tout bois

 

là où la nuit vigoureuse saigne une merveille de purs végétaux

 

là où les abeilles des étoiles piquent le ciel d’une ruche plus ardente que la nuit

là où le bruit de mes talons remplit l’espace et lève à rebours la face du temps

là où l’arc-en-ciel de ma parole est chargé d’unir demain à l’espoir et l’infant à la reine,

 

d’avoir injurié mes maîtres mordu les soldats du sultan

d’avoir gémi dans le désert

d’avoir crié vers mes gardiens

d’avoir supplié les chacals et les hyènes pasteurs de caravanes

 

je regarde

la fumée se précipite en cheval sauvage sur le devant de la scène ourle un instant la lave de sa fragile queue de paon puis se déchirant la chemise s’ouvre d’un coup la poitrine et je la regarde en îles britanniques en îlots en rochers déchiquetés se fondre peu à peu dans la mer lucide de l’air

où baignent prophétiques

 

ma gueule

ma révolte

mon nom.

 

 

Les armes miraculeuses. – Gallimard, 1979.

 

 

 


La soirée western – ( RC )


 

Derrière l’écran,           ce sont des âmes  agitées
Qui combattent, pour l’honneur,    âme habitée

C’est une histoire  de voleurs, de western
d’enlèvement,        de drapeaux  en berne

Une course à travers l’étendue         poussiéreuse
De grandes étendues,      j’aperçois les Rocheuses

Il y a des squaws,             les cailloux qui dévalent
Et qui giclent,                   sous les sabots du cheval

Le héros toujours solitaire, un peu justicier
Au regard farouche,              n’est pas policier

Combat les méchants qui sont tout autour
Et je m’accroche,        au fauteuil d’ velours

Y a l’ptit gars du coin, Qui f’rait une bévue
S’il racontait qu’ il a tout vu.

Y a l’ivrogne au bar,                            oui, c’est çui qui louche
Et l’gardien du square,     qu’est sourd comme une souche

Pendant que tout ce monde s’agite
On atteint, au drame,          la limite

Pour le dénouement heureux
( il s’en fallait de peu )…

Les bandits  s’enfuient,  c’est la débandade
On entend encore,    toute cette cavalcade

Avec le mot “fin”            la musique magique
Qu’accompagne, si bien, le beau générique

Le nom des acteurs,   qui s’inscrit en blanc
Monte lentement,             du fond de l’écran

Et aux spectateurs,   fini,   le rêve
La lumière revient, et chacun se lève

Une  fois encore,                            t’en prends plein les yeux
Mais il faut quitter la salle,                  et ses fauteuils bleus

Gardant bouts d’aventure,                  qu’on emporte en soi
Souvenirs émus,                                          c’est un peu de joie

Pour dire à d’autres,    – hier au cinéma,
J’ai vu le film, …                                           ” Sûr que t’ aimeras “

Inspiré  d’une  autre lecture,  et aussi  ( je me régale),  de la chanson  d’Arthur H  ” est-ce que  tu aimes  ?” (  avec M, justement…)


Haïku d’Issa – Cheval


photo personnelle octobre 2011 Jument de Bramonas

Brume du soir
Le cheval se souvient
De l’ornière du pont

(Issa)