Garous Abdolmalekian – Jeu
Tu changes de jeu
Et tu te suspends à la corde
qui te servait de balançoire il y a des années
Nous sommes
La répétition de nos propres bribes
Comme toi, mon fils, sur la balançoire
Comme moi
Qui te balance
Pour oublier la corde.
Deux volumes et deux bouteilles ( presque un Morandi )- ( RC )
photographe non identifié
C’est comme un aria,
un brin suspendu ,
avant l’extrémité du parcours de l’archet…. ,
La lumière chatoie,
comme vibre encore la corde :
l’eau reste attentive dans la carafe,
L’épaisseur du verre soupire,
hésite à donner de l’ombre sur le mur,
– ou alors si légère –
une pâte qui entoure le creux,
immobilisée, – fusion de la silice –
participe au léger grain du fond :
ainsi le ferait le bourdon,
soutenant l’envol des voix…
posées comme les deux objets
aux rayures noires, régulières ,
– légèrement ironiques – .
De taille semblable,
ils sont insolemment lisses,
ronds, mais sans rouler,
contrepoint musical
On pourrait imaginer les voir
quitter le sol,
se mettre en mouvement
perturber le liquide ,
sautiller en désordre
dans cet accord trop parfait
auquel seuls croient
les gris cristallins
de la photographie .
–
RC avr 2017
Alessandra Frison – La pluie vide chaque soupçon de vie
*
La pluie vide chaque soupçon de vie
des draps tirés jusqu’à la limite
elle ne te fait pas voir
la charge des heures le matin
tôt tous sont réveillés
déjà à leur corde
et tu devrais t’efforcer jusqu’à ce point
jusqu’à assécher le sommeil
alangui et réfractaire terme de
qui existe l’indispensable
à temps tout juste pour s’évacuer de chez soi
c’est ce que je me dis,
après une journée qui mesure
les centimes de chaque dignité,
après la vague déchargée
mécanique déçue des feux rouges à la gare
parmi le moyen âge des rues, je suis
la plus incertaine fenêtre du monde.
***
Alessandra Frison
est une (très) jeune poétesse milanaise – née à Zevio -,
Elle a publié dans l’Almanacco dello Specchio (Mondadori) 2008; elle présente régulièrement son travail grâce aux pages http://alessandrafrison-blog.myblog.it/ , où l’on pourra trouver d’autres poèmes.
Inediti:
La pioggia svuota ogni sospetto di vita
dalle lenzuola tirate fino al limite
non ti fa vedere
il carico delle ore la mattina
presto tutti sono svegli
già alla loro corda
e ti dovresti impegnare fino a quel punto
fino ad asciugare il sonno
molle e refrattario termine di
chi esiste l’indispensabile
in tempo appena per sfollarsi di casa
così mi dico
dopo una giornata che squadra
i centesimi di ogni dignità,
dopo l’onda scarica
meccanica disillusa dei semafori alla stazione
tra il medioevo delle strade, sono
la più incerta finestra del mondo.
Claudia Serea – J’écris pour des fantômes
- peinture: Natalia Goncharova piliers de sel
peinture: Natalia Gonchavora: piliers de sel
–
I write for ghosts
I write for you, old women
who sit at the gates, spin yarn
and knit socks for the dead.
My every gesture is mirrored
by a thousand hands.
I carry these faces inside me,
on my back,
on my feet.
The ghosts don’t let me sleep.
They gather on windowsills and roofs,
in the moon’s breath,
and chat
with chattering teeth.
I write for my father
who still hangs on in Skype,
to reach him,
fill the gap with words.
Hang on, Daddy, hang on.
Here’s a rope ladder.
Here are the words, Daddy.
Here’s the blood,
the new heart,
the straw.
—
— ( ma traduction )
————–
J’écris pour des fantômes
J’écris pour vous, les femmes âgées
qui sont assises aux seuils de portes,
à faire tourner le fil
et tricoter des chaussettes pour les morts.
–
Chaque geste est reflété
par mille mains.
Je porte ces visages à l’intérieur de moi,
sur mon dos,
sur mes pieds.
Les fantômes ne me laissaient pas dormir.
Ils se rassemblent sur les appuis de fenêtre et les toits,
dans le souffle de la lune,
et discutent
en claquant des dents.
–
J’écris pour mon père
qui est encore pendu à Skype,
pour l’atteindre,
combler l’écart avec les mots.
–
Accroche-toi, papa, accroche-toi
Voici une échelle de corde.
Voici les mots, papa.
Voici le sang,
le nouveau cœur,
la paille.
—
la version roumaine:
Scriu pentru stafii
Scriu pentru voi, femei batrane
ce stati la porti, toarceti
si impletiti ciorapi pentru morti.
Fiecare gest mi-e oglindit
de o mie de maini.
Port aceste fete in mine,
pe picioare,
in spate.
Stafiile nu ma lasa sa dorm.
Se strang pe pervazuri si acoperisuri,
in rasuflarea lunii,
si palavragesc
clantanind din dinti.
Scriu pentru tatal meu
ce inca asteapta pe Skype,
sa ajung la el, sa umplu
golul cu cuvinte.
Stai asa, tata, asteapta-ma,
uite scara de franghie.
Uite cuvintele, tata.
Uite sangele
si-o inima noua,
si-un pai
de care sa te agati.
—_____________________________________
Claudia Serea est une poétesse roumaine, qui a immigré aux USA en 1995 U.S. elle est l’auteur de l’éternité de l’orthographe (Finishing Line Press, 2007)
Suspendu à ton regard ( RC )

photo: Lewis Wickes Hine (1931)
–
Suspendu dans le vide,
Quelque part sur les hauteurs,
J’entends crier la voix du vent,
Sous le regard étonné des nuages
— Ne reconnaissent pas mes mots
Au delà des précipices…
Ravins obscurs d’où monte une brume
Qui déjà m’enveloppe .
Ce n’est pas une corde
Qui serait le fil me reliant à la vie
Entre deux rochers
Mais juste ton cou que j’entoure,
Suspendu à ton regard,
Au-delà du vertige.
–
RC – 18 avril 2013
–

photo Lewis Wickes Hine – Icare
François Corvol – Setis
Setis
Je me souviens d’elle allumant la nuit rouge-bleue
en tirant sur la corde
la plante des pieds sur les tuiles froides
assise sur la cheminée de grès
des chats transalpins nombreux sur ses jambes s’emmêlaient
les crayons de ne plus savoir s’ils voulaient une caresse ou le lait
du nuage de son essor ou de son corps
ou de ses cheveux parsemés de photophores je lui dit
ceci -Chaque nuit des fantômes
mille fois plus vivants retombent
de tes arceaux, je veux moi aussi
ma part de bonheur sur la Terre mon rêve mon rêve-
mais elle ne compris pas elle ne compris rien
de mon langage et d’un coup sec
tira sur la corde afin que la nuit tombe
coule
le lait.
–
on peut retrouver les écrits de François Corvol dans décadences.net
–
–
Mario Benedetti – Depuis la nuit le matin la nuit
[Chap. 8 : 6]
Depuis la nuit le matin la nuit,
pantalons verts, pantalons bleus,
le noir, le bleu clair, le cuivré, tout.
Parce que n’est plus un mot.
Les mers, les routes sont des maisons
et les maisons, des routes et des mers.
La pierre s’enfonce sans la corde autour du cou.
Affleurent en cercles les mots sur ses lèvres.
Mais peu importe, peu importe.
Quelques voyelles, le long du visage blanc
et noir, de cheveux, sa lumière.
Effondrée sur un côté. Recroquevillée.
Derrière toi, et devant, au delà, il n’y a rien.
,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,de: Pitture nere su carta, Milan, Mondadori, 2009
L’île aux images – dénouer
dénouer
mains qui s’épuisent à nouer encore et toujours,
attention maladive portée aux noeuds, l’accident, traumatisme, nouer, nouer, nouer, encore et encore, nouer, se protéger, se cacher derrière la forêt de cordes bien circonscrite, taire le reste, tout le reste, incapacité de parler de soi, ne parler de rien d’autres que du travail et des banalités,
vérifier les noeuds, y penser tout le temps, concentration, pas le droit à l’erreur, la vie court-circuitée par les noeuds, rêver d’être sauvé par un noeud, peur lancinante du silence des cordes qui se nouent, la culpabilité grignote jour après jour, ce qui est autour de, ne jamais être soulagé des noeuds solides et de leurs sempiternels vérifications,
mais oublier que les attaches rouillent et qu’elles lâcheront un jour, bien avant qu’on ait pu dénouer les fils de ses obsessions
Colonnes de mémoire ( RC)
–
Bien au delà de la corde
Ce morceau d’arc de terre
Qui tend la distance
Et nos différences,
J’ai perçu l’inversion du monde
Comme si la tête en bas
Mes pieds étaient collés
Sur le socle du ciel.
Et j’avais à mon appui
D’immémoriales légendes
Des arbres sacrés
Dont les racines buvaient
Le ciel, et supportaient
Le monde de leurs pattes épaisses
Que le poids des siècles
Avaient plissé de mémoire
Enfouissant en profondeur
Au cœur de la sève fibreuse
Le passé douloureux d’une
Afrique à l’avenir incertain.
–
R Ch 09-01-2012
–
sur les créations artistiques – en tout cas mon rapport avec l’art africain, consulter également voir aussi http://ecritscris.wordpress.com/2012/01/09/lart-africain-au-burkina-faso/
http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/r-lart-africain-01-lhumanite-commence-par-le-nombril/
http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/r-et-lart-africain-02-eklablog/
http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/r-et-lart-africain-03-la-terre-cuite-du-ghana/
http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/r-et-lart-africain-04-le-cavalier-et-la-figure-assisedogon/
http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/r-et-lart-africain-05/
http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/71/
http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/r-et-lart-africain-07-croquis-musee-des-arts-premiers/