Jean Blot – Les cosmopolites
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A force de courir le monde…
la vie devient étrange et plus docile à l’espace qu’au temps…
C’était Paris, Londres, New York, ou Genève, mais était-ce avant ou bien après ?
En chaque ville, quand on la retrouve, la durée se ressoude, son tissu se refait, comme si l’absence avait été une blessure et le retour une guérison.
Qui vit en un lieu suit le temps dans sa marche et épouse son mouvement.
Mais le vagabond reprend à chaque étape le jour qu’il avait laissé là, qui s’était endormi et qu’il réveille en revenant. Ou bien, au contraire, un fil relié sans cause des lieux éloignés et telle conversation commencée à New York se poursuit à Genève, rebondit à Londres, et se conclut à Paris.
Cet ami rencontré sur la 5è avenue, on le retrouve sur le pont du Mont-Blanc, on le quitte dans un café de Montparnasse.
Ou encore on oublie le lieu, le temps: l’amitié seule demeure.
Il semble parfois qu’il n’est ni passé, ni avenir; ni lieux distincts, mais un seul présent aux facettes nombreuses qui résistent au classement et n’obéissent
qu’aux lois secrètes du sentiment.
Voyages départs et retours font que la vie prend de l’épaisseur, mais qu’elle ne coule pas comme elle devrait.
Quand on revient, on dirait que le temps se fait réversible: tout recommence…
Les cosmopolites ( Gallimard)