UN MOÏSE barbu qui naissait des nuages tandis qu’au ras du sol j’écoutais étendu, m’a demandé mon nom ma naissance et mon âge. Ses blancs cheveux flottaient, sur la nuit répandus. Or, comme épouvanté, je songeais à répondre, voici que le Moïse, environné de sombres lances, et transpercé par des flèches sans nombre, mourut, devint cheval, puis chien, puis chevelure, puis rideau s’entr’ouvrant sur l’abîme qui rit… Brillant rieur du ciel, ta lance est douce et dure. Ris de nous ! Tu nous vois, paysans amaigris, labourer, pour semer, quand notre mort est mûre, je ne sais dans quels champs, nos nerfs et nos esprits. L’homme naît sous un astre et ne meurt nulle part ; il naît ici, nommé, citoyen, riche ou non : il meurt sans attributs, sans patrie et sans nom, et, pieux, le tombeau simule un faux départ. ô vous qui rechargez sur ma tête vos foudres, blancs vaisseaux emportés vers quels deux vers quels ports vous, Moïses barbus, corps de brume et de poudre qui mourez l’un dans l’autre ainsi que des accords, destins légers qu’un souffle a pu coudre et découdre, nuages, saviez-vous le secret de ma mort ?
Des pierres arrondissaient les angles.
Le soleil s’en allait.
Deux poutres reliées par une traverse.
Un chien hagard plonge dans les broussailles.
On n’arrache pas un sourire à l’écorce.
Lendemain
Dans la continuité de la masse, en guise de visage.
Le feu âpre transit le cône de marbre.
Tard, dans l’été, la figure roule dans ta paume.
Son oubli fut le dernier souvenir qu’elle te laissa.
Surlendemain
Notre sœur à tête d’animal, notre peur encore muette et ses fleurs de terre
ses onguents de serpents, la saveur de sa lumière et de sa fatigue.
Ses mains ne remuaient pas encore.
Toujours plus tard
L’atrocité rêve à son écuelle en bois.
Du sommet de la montagne dévalent des étoiles épineuses.
Ton œil est de glace. Tu crains l’aiguille de métal qui te sert à coudre le ciel.
Laisse battre les volets.