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Le cheminement du poème – (Susanne Derève)


 

 

ombres toscanes 07 2007

   Photographie :  Philippe Pache

 

 

 

On ne maîtrise pas plus le mot que le soleil

 

Sans doute peut-on imprimer au vers

un long balancement

comme on doserait l’avancée de l’ombre sur la toile

en la dissimulant d’un linge  ou d’un feuillage

– un arbre clair  celant l’ombre –

 

La naissance du mot  échappe :

comme  le suivant échappera  et l’image

qu’il fera naître dans l’image,    

celle où chemine obscurément

le poème

 

Ce  n’est pas lui  que j’invente

mais lui qui me révèle dans le temps

que j’écris,

sonnant la litanie des heures,

épousant la marche  des nuits

 

lui qui mûrit puis  se détache

–  comme on dirait d’un fruit  –

un jour parmi  les autres 

où il  pose   sa marque   

                       …   et  me trahit

 

 

 

 

 


Rabindranath Tagore – au coeur de la création


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Tu es venu un moment auprès de moi, et tu m’as ému par le grand mystère de la femme,
qui palpite au coeur de la création.
C’est elle toujours qui retourne à Dieu le flot de sa douceur;
elle est la beauté toujours fraîche, la jeunesse dans la nature;
elle danse dans les huiles de l’eau, elle chante dans la lumière du matin;
en vagues bondissantes elle apaise la soif de la terre; en elle éclate l’Éternel,
jaillissant en une joie qui ne peut se contraindre plus longtemps et s’épand
dans la douleur de l’amour.

LVI.

 

(  extrait de la  « Corbeille  de fruits » )

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Henri Rode – Le monstre


Afficher l'image d'origineLE MONSTRE (fragment)

 

 

« Je vois le monstre de préférence (et c’est toujours ici de préférence qu’il s’agit) dans l’objet, le légume, le résidu dont on a su d’abord tirer usage, le fruit pressuré et la montre écrasée, pour les rejeter ensuite dans un coin où l’objet, le fruit, la montre, etc., poursuivent leur existence inutilisable.

Prenons ce tas de pelures d’oignons roux laissé au milieu du fenil apparemment oublié de Dieu et des hommes, une humble toison à peine dorée d’un rayon et qui ne donne au préalable aucune impression de protes­tation ni même d’existence, qu’un distrait pourrait fouler aux pieds, une araignée traverser sans risque, un balai balayer sans remords. Je songe : trop facile de te passer de toi pour expliquer. Et c’est pourquoi je repasse. Je ne veux pas donner dans le panneau.

C’est au contraire avec un grand souci de sympathie que je me penche sur le tas de pelures. Je les fouille, les sens, des monceaux de vers doivent les travailler mais ici mon observation est courte. Je pourrais expliquer la larve plus l’éclosion sans aboutir à aucune satisfaction personnelle. Chercher une ressemblance n’est jamais le fait du hasard mais d’un besoin intérieur, d’un rassurement dirai-je.

Pour me rassurer quant à la destination de ces pelures prêtes à se dissoudre en poussière, il me faut une expérience neuve et définir pourquoi, pourquoi ? Chaque fois que je passais près du tas et quel que fût mon état d’absence une tristesse incompréhensible me prenait, pour­quoi tout déchet, tout objet délaissé dans un coin ne me semblait jamais tout à fait fini ni inutile, et pourquoi en fin de compte mon utilité au jour ne me paraissait ni plus certaine ni plus étonnante que celle du moindre objet, pour peu que je descende aux sources de la création. »

Henri RODE in « Cahiers du Sud » n° 293 (1949)


La chaise rouge – ( RC )


 

Red, Yellow, Red 1969.jpg

peinture: Mark ROTHKO :  1957

 

 

Dans l’image a surgi

Le grain, la palpitation

L’émotion rougie

Presque la déflagration

 

D’ une barre courbe

Un signe du sombre

De puissance encombre

C’est ce rouge fourbe

 

Il n’est ni sang ni cerise

Se détache lumière

En donnant à sa guise

Forme à la matière

 

Un éclair de couleur

Traverse ma page

Un éclair de douleur

De la photo, l’otage.

 

Aux accents de lave

Des blancs et bleutés

Opposés, ameutés

Les autres sont esclaves

 

 

dec 2011  RC

 

photo: Chris Jones

Résultat de recherche d'images pour "national geographic red chair"

Et avec les « commentaires »…

  1. le rouge est la couleur de l’ensanglantement…
     » debout il y a trop de bruit
    à l’usine des dentelles…

    Alors je m’asseois »

    Là, sur la chaise rouge…

    Des bises Ren

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    12/19/2011 à 12 h 55 min Modifier

    • On peut avoir cette interprétation, moi, je la vois distincte ds autres couleurs, justement parce qu’elle est chaude

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  2. oui, et le sang, c’est chaud…et c’est la vie…j’ai toujours été impressionnée de celui qui coule en chacun de nous, mais dans le bon sens, je dirai…je n’aime pas le voir couler, parcequ’en génèral c’est  » mauvais  » signe, mais j’aime imaginer chaque humain comme un arbre empli de cet ensanglantement qui pulse et pulse encore..c’est ça qui m’est passée dans la tête avec la chaise rouge…et m’asseoir sur une chaise rouge, ça équivaudrait à m’ésseoir dans la vie…
    Sourires…
    En réponse à ce que tu viens de poster, un sourire avec de la lumière à l’intérieur..oh; oui, je vois ça parfois autour de moi, c’est absolument cadeau des sourires pareils…

    12/19/2011 à 14 h 42 min Modifier

  3. En fait j’ai écrit ça l’autre jour en pensant à une photographie que j’ai faite ( une diapo) sur laquelle j’aimerais bien remettre la « main ».. j’avais mesuré l’intensité de la couleur avec une cellule faite pour çà, et effectivement le rouge était « criant » de vérité…

    quant au sourire de E De Andrade, l’allusion sexuelle est criante aussi, j’avais même dans un de mes textes écrit quelque chose d’approchant avec un sourire « vertical »… il faudrait que je le retouve…. j’ai déjà idée où il peut être…

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    12/19/2011 à 15 h 09 min Modifier

  4. 2 choses:

    « Le rouge est la lumière dans le temps. »

    Rupprecht GEIGER

    et http://corpsetame.over-blog.com/article-1112-ceux-qui-restent-43321780.html

    pour un travail d’ Elke KRYSTUFEK

     


Lutte contre le chaos ( RC )


photo- peinture:  Wilhelm  Sasnal,  _1972- _ - 2002 Shoah - Forest _P

peinture:                          Wilhelm Sasnal, _1972- _ – 2002 Shoah – Forest _P

Par le plus grand des hasards, tu es là,
A lire cet aujourd’hui,
Et si ta vision illumine l’instant,
Cet instant fragile,

De deux étincelles,
Ayant pu n’être ( naître ) ailleurs…
Deux espèces d’espaces
Ils se croisent,

Avant que l’ombre,
Ne boive la mienne,
Ou rejoigne les millénaires d’ombres,
Des couches de fatigue,
L’enchevêtrement, en tout sens, des pensées,
En épaisses strates,

L’humus
Peut-être , dont s’extirpe la plante,
Si les conditions le permettent,
Et que se multiplient branches et feuilles,
Comme les phrases portent leurs mots,
Buvant à leur tour la lumière,
Si la création lutte contre le chaos.

– RC  –  9 août  2013


Claude Debussy – Voir le jour se lever


dessin perso: Musée d'Art de Bâle  - Suisse

dessin perso ——-d’après une oeuvre de Meister von Stierentz   : Musée d’Art de Bâle – Suisse    mars 2013

Une citation paradoxale, pour quelqu’un d’aussi fin musicalement  que  Claude Debussy:

« Voir le jour  se lever est plus utile que d’entendre la Symphonie pastorale. « 

Mais ( outre la notion  d »utilité », qui pourrait se discuter, et savoir  qu’est-ce  que l’auteur entendait par là ) …  le fait de ressentir des émotions  dans le monde « en direct », sans être lié au monde de la création,  et notamment  du domaine  auquel on appartient…

– peut-être aussi parce que l’oeuvre citée fait partie d’une culture « classique », donc, du passé…

jour


Colonnes de mémoire ( RC)


photo perso:          racines de baobab à Boungou         (B Faso)           dec 2011

 

 

Bien au delà de la corde

Ce morceau d’arc de terre

Qui tend la distance

Et nos différences,

 

J’ai perçu l’inversion du monde

Comme si la tête en bas

Mes pieds étaient collés

Sur le socle du ciel.

 

Et j’avais à mon appui

D’immémoriales légendes

Des arbres sacrés

 

Dont les racines buvaient

Le ciel, et supportaient

Le monde de leurs pattes épaisses

 

Que le poids des siècles

Avaient plissé de mémoire

Enfouissant en profondeur

 

Au cœur de la sève fibreuse

Le passé douloureux d’une

Afrique à l’avenir incertain.

R Ch 09-01-2012

sur les créations  artistiques   –  en tout cas  mon rapport  avec l’art africain, consulter  également  voir aussi http://ecritscris.wordpress.com/2012/01/09/lart-africain-au-burkina-faso/

http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/r-lart-africain-01-lhumanite-commence-par-le-nombril/
http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/r-et-lart-africain-02-eklablog/
http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/r-et-lart-africain-03-la-terre-cuite-du-ghana/
http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/r-et-lart-africain-04-le-cavalier-et-la-figure-assisedogon/
http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/r-et-lart-africain-05/
http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/71/
http://ecritscris.wordpress.com/2011/11/05/r-et-lart-africain-07-croquis-musee-des-arts-premiers/

photo perso-  vieille herbe, jeune humain.   –        Boungou


Ernest Bloch -Le regard de nos masques


samedi 26 novembre 2011, Monique  éditait  ce bel article  que je reprends  à mon compte,   et associé  au  « Perfect day  »  de Lou Reed   (  désolé, Monique, tes images  de bois ne  « passent pas », avec Overblog…  je vais  donc  tricher un peu… )

   » Les Noirs ont gardé jusqu’à aujourd’hui des dieux de vie sculptés en respectant le bois, ils firent ainsi passer la sève dans des manches d’outils, des armes, les poutres des maisons, les trônes, les idoles. Leur volonté de magie, leur désir de se métamorphoser, de pénétrer dans les sphères supérieures de la création produisent avant tout le masque qui élève surnaturellement au rang d’animal ancêtre de la tribu, de totem et de tabou organiquement abstraits ; notre visage futur s’y annonce, mais le Christ n’éclaire pas encore ; il n’y a que le rougeoyant démon de la vie, mais celui-ci règne de manière inconditionnelle dans ses naissances oniriques, dans ces sombres systèmes plastiques de la fécondité et de la puissance  » . Ernst Bloch

Il m’est essentiel que le regard de l’autre tente de pénétrer jusqu’à mon âme.

et que je lui rende ce regard!

Tout existe le temps d’un regard. Regard sur une fleur éphèmère,regard sur le fond d’un tiroir,  oublié – retrouvé.

 

Regard pour une pierre d’un cimetière oublié, regard sur un silex soulevé d’une terre anté préhistorique.

Regard sur un enfant , force de vie. Regard  toujours plus loin. Le regard abolit la distance.

Il plonge dans l’essence des choses ..antédiluvien.

peinture; aquarelle perso, sur un masque féminin, ethnie Dan ( Côte d’Ivoire)