Carnets de dessins de Provence – ( RC )

A chausser les sandales de l’enfance,
te rappelles-tu des champs de Provence ?
Tu n’avais pas à ouvrir ton herbier,
le vent poussait ses vagues dans le blé,
comme dans la farandole
de la voix du mistral
soufflant par rafales
sur le plateau de Valensole.
Tu l’as parcouru à pied,
en sortant ton carnet à dessins.
De jeunes lavandes
déroulaient leurs points
avec de curieuses perspectives,
où le feuillage argenté
des oliviers, voisine celui, plus léger
de la promesse des amandes.
Contre les montagnes lointaines,
je me souviens de la teinte rousse
tirant sur le brun de Sienne,
opposée aux vertes pousses
des rangées de vignes
étagées sur les pentes ,
offertes à la cuisson du soleil.
Tu en parcours les lignes,
un soleil de miel
sous tes sandales de silence.
Les ceps crient
dans l’impatience
d’une lumière de braise
aux senteurs de la garrigue.
Bousculés dans les croquis
d’encre et de fusain,
sont-ils l’essence
de la morsure du midi
que rien n’apaise ,
calmés seulement
par la douceur de lait des figues…?
Mémoire de l’Art Africain – (RC )
Il y a, massives, les présences de bois, revêches et enfermées dans leur masse
Sévères les porteurs d’esprits, qui daignent à peine refléter les lumières.
La géométrie entaillée, de fentes pour les yeux, les masques qui ont dansé, encore habillés de fibres.
Que l’on imagine sur des corps noirs, et au soleil implacable de l’Afrique.
A l’abri de l’enceinte sacrée, Il y a tout hérissés de clous, les fétiches ,
qui voisinent les boîtes à onguents, et les calebasses ventrues,
chez celui qui va se guider de l’âme des ancêtres et jeter les cauris.
C’est un parcours, à gagner la faveur des éléments,
à espérer que la maladie soit tenue à l’écart, que le bonheur se construise, et que la pluie viennent caresser les récoltes…
Dans la lumière tamisée des grandes salles, l’éclairage étudié vient caresser les formes et les matières
nous raconter une autre façon de voir le monde, et de dessiner le destin.
Et si je pouvais, en capter une partie du mystère, debout deux jours durant, à faire voyager mon crayon
et donner un peu à voir de moi-même… je le ferais.
RC 17 juillet 2012
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statue ancestrale Teke (Congo)
-Figure masculine dont le corps est englobé dans une masse presque semi-sphérique composée d’argile mélée à des matériaux organiques. Le visage est couvert sur les tempes et sur les joues de fines scarifications verticales. Dans la masse en terre rougeâtre – qui est un « médicament » (bilongo)- sont enfoncés des clous et lames de métal, des plumes et d’autres éléments . Cette pratique magique était opérée par le nganga,féticheur, médecin, devin et spécialiste du rituel dans les sociétés bantoues d’Afrique Centrale.
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Ecriture paysagère, plume voyageuse ( RC )

photo: Yann Arthus Bertrand – îles d’Aran – Inishmore
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J’ai écrit sur les causses et les montagnes
L’aube sur les étangs gelés, en rase campagne
Les déplacements minuscules, qui font sans doute
La différence, aux zébrures de parcours d’autoroute…
J’ai aimé la nef affleurant des îles d’Aran
Les nuages empilés, de ces îles sous le vent
Les champs qui ondulent, et contournent les collines,
Les pins sylvestres attentifs, au bord des dolines,
En attendant que l’orage cesse, sous un abri de roc,
Ma tête convoquait les ogives d’une cantate baroque
Les toits dansants d’un village provençal,
Un marché, fruits et légumes, jonglant de couleurs sur les étals.
Avec mes croquis des maisons d’Amsterdam,
Sous un ciel si bas, que les nuées condamnent,
Je me suis donné l’espace d’un défi,
Sans transcrire en photos, architectures, et géographies…
La plaine est immobile, et la plume voyageuse,
Et caresse aussi bien les bords de la Meuse,
Que le bourdonnement têtu des abeilles
Dans les calanques, près de Marseille.
RC – 29 juin 2012