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Mokhtar El Amraoui – miroirs


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sculpture Gloria Freedman

Miroirs
A ces songes de la mer dont les vagues colportent la rumeur

Ô miroirs !
Engloutissez, donc, ma mémoire,
Dans vos veines de tain et de lumière.
Là-bas,
Dans le jardin des échos,
Arrosé des plaintes des vagues,
Je dévalerai la plaine de l’oubli
Où j’ai laissé fleurir un coquelicot,
Pour ma muse
Qu’un peintre agonisant a étranglée.
D’elle, me parvient
Le parfum ensanglanté
De toiles inachevées.
C’est dans le lait de ses rêves
Qu’ont fleuri le cube et la sphère.
Ô interstices du monde !
Laissez-moi donc percer
Ses inaudibles secrets !

©Mokhtar El Amraoui


Mokhtar El Amraoui – Miroirs


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A ces songes de la mer dont les vagues colportent la rumeur

Ô miroirs !
Engloutissez, donc, ma mémoire,
Dans vos veines de tain et de lumière.
Là-bas,
Dans le jardin des échos,
Arrosé des plaintes des vagues,
Je dévalerai la plaine de l’oubli
Où j’ai laissé fleurir un coquelicot,
Pour ma muse
Qu’un peintre agonisant a étranglée.
D’elle, me parvient
Le parfum ensanglanté
De toiles inachevées.
C’est dans le lait de ses rêves
Qu’ont fleuri le cube et la sphère.
Ô interstices du monde !
Laissez-moi donc percer
Ses inaudibles secrets !

©Mokhtar El Amraoui


Isabelle Pinçon – Celui qui était dans le lit


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Un cube descend sur le lit,
le lit n’est pas un lit,
ce qu’elle a fait avant,
une multitude de lettres,
des papiers sur lesquels elle s’endort,
des lignes de fuite,
des formes géométriques,
une peinture abstraite,
des costumes, quelque chose qui occupe le regard –
tu regardes, tu regardes celui qui était dans le lit -.

Elle regarde fixement au-dessus de la porte,
elle prend une tapette sur l’étagère,
elle lève le bras, elle reste immobile quelques secondes,
le regard toujours fixé,
elle frappe d’un coup,
elle frappe fort,
la chute verticale de la mouche,
elle a envie de se donner quelques tapes sur les fesses,
elle le fait, elle s’amuse.

Isabelle Pinçon    Celui qui était dans le lit


Mokhtar El Amraoui – Miroirs


Harrison3.jpg

 

photo: Robert ParkeHarrison

 
A ces songes de la mer dont les vagues colportent la rumeur

Ô miroirs !
Engloutissez, donc, ma mémoire,
Dans vos veines de tain et de lumière.
Là-bas,
Dans le jardin des échos,
Arrosé des plaintes des vagues,
Je dévalerai la plaine de l’oubli
Où j’ai laissé fleurir un coquelicot,
Pour ma muse
Qu’un peintre agonisant a étranglée.
D’elle, me parvient
Le parfum ensanglanté
De toiles inachevées.
C’est dans le lait de ses rêves
Qu’ont fleuri le cube et la sphère.
Ô interstices du monde !
Laissez-moi donc percer
Ses inaudibles secrets !

©Mokhtar El Amraoui


La tombe de l’écrivain – ( RC )


Heiner Mueller Grave Berlin 3 2013 am-grab-von-heiner-mueller-a313f54e-7c62-4d32-beb5-b15dd0557757
provenance photo: philippocock.net

 

Il y aura un cube de grès rose,
dressé               en lisière des bois,
une borne, à priori des plus banales,
( qui n’est pas kilométrique  ).

En effet        on s’y repose,
aussi bien      on s’y assoit,
quoi de plus normal,
après la gymnastique.

Certains y laissent
quelques souvenirs,
de petits cailloux,
une canette de bière.

Les amoureux s’y pressent,
en mains et en soupirs .
C’est le lieu du rendez-vous,
plus que de la prière.

La mousse s’y incruste,
le lierre prolifère,
Pourtant ce volume  ne porte
pas de  date , mais des noms gravés.

Ce n’est         pas un buste,
Mais        une simple pierre,
posée de la sorte,
juste au bout de l’allée.

Entourée d’herbe verte,
et de pins qui penchent,
elle marquerait le dernier lit,
du célèbre écrivain :

une tombe offerte
comme           une page blanche
qui attendrait encore des écrits,
confiés              à d’autres mains .

Echappée de l’enclos
étroit du cimetière
on viendrait comme dans la supplique
de Brassens, y faire d’affectueuses révérences

Entre le ciel et l’eau
A moitié enfouie dans la terre
discrète                     et monolithique ,
prolongeant dans le temps, son acte de silence .

RC – fev 2016


Blockhaus en front de plage ( RC )


hotel Adghir          Alger-        Bordj El Kiffan,

Blockhaus en front de plage

Immeuble de béton sur sept étages

Posé comme un cube prétentieux

Frontière de quartiers miséreux…

 

L’ailleurs reste surtout un peut-être

La mer ne se voit, qu’avec un reflet de fenêtre

d’en face,   ….  carré dans la façade grise

Du grand hôtel, où le temps s’éternise

 

Je peux toujours compter les plaques de marbre

Ou chercher au loin les arbres

Une prison dorée reste une prison,

Et la vue ne s’échappe pas  sur l’horizon

 

RC   – 23 décembre 2012    –   Alger


Erwin Mortier,- Temps de Pose 01


Il y a aussi les livres   que je suis en train de lire…

et j’aime ( dans la surprise, et au fur à mesure que j’avance dans la lecture, distiller  de petitsextraits)…

—–

 

 

 

 

TEMPS DE POSE

Contre toute raison, j’étais persuadé qu’il devait exister quelque part un monde d’images que personne n’avait jamais fixées sur la pellicule, sauf peut-être la lumière du soleil qui emportait un fragment de tout ce qu’elle balayait et l’assemblait, Dieu sait où, avec toutes ces figures sans relief qu’elle décollait patiemment des cadres, des albums ou des ténèbres de la vieille valise dans laquelle je conservais mes photos les plus précieuses.
J’attendis qu’il fasse presque nuit avant de prendre la valise sous le lit, d’ouvrir le couvercle et d’ajouter la lettre de ma mère au-dessus des autres.
L’éclat cuivré du soleil couchant derrière les arbres évoquait ce soir-là un immense réservoir de barrage, un au-delà de surfaces qui s’étaient reflétées par le passé, un autre monde d’un miroitement fragile, et inaccessible.
Je vois la même lumière, il y a longtemps. Dans une pièce où j’entends des pas, une porte s’ouvre en tremblant sur ses gonds et quelqu’un crie mon nom.
Je veux me lever, je n’y arrive pas. Je sens la fureur bouillonner en moi, le picotement salé des larmes dans mes yeux.
Je vois que je porte des petites chaussures bleues à lacets de cuir. Je les entends encore racler le carrelage, quand avec une rage impuissante, je shoote dans mes petites autos, mes cubes et mes crayons.

Je vois mon père me tendre les mains. J’ai gardé quelque chose de son large sourire qui donne parfois une dureté inattendue à mon visage malgré les doux traits hérités de ma mère.

Je m’accroche à ses doigts pour l’ escalader, j’ ai du mal à trouver mon équilibre et sens un frémissement dans mes mollets.

Dans une arrière-cuisine, j’entends toquer sur le couvercle d’une casserole les gouttes d’un robinet
qui fuit, et le vide de toute une maison résonner dans l’écho.

Mon père me prend dans ses bras, il fait siffler le vent dans mes boucles blondes et me lance de plus en plus haut. Ma poitrine se contracte. Je m’entends hurler, plus de peur que de rire, au moment où je quitte ses mains et ne sens plus que de l’air autour de moi.

Qu’aura-t-il crié ? « Hop là, Joris, on vole. »

Impossible à lire sur ses lèvres.

Je ne sais pas qui a pris cette photo, qui m’a définitivement laissé suspendu dans le vide au-dessus de ses doigts, comme un angelot craintif.

montage mix photo- perso

, de Erwin Mortier,   est publié aux éditions fayard  (2002)