Une infime parcelle- comme une découpe du ciel – ( RC )
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A l’extrème limite de la conscience,
une bouche balbutie,
sur une surface horizontale..
une couche de glace,
dont on ne sait encore l’épaisseur,
mais bousculée par les courants de l’intime,
d’une profondeur insondable.
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J’imagine le violoncelle de Yoyo-Ma,
Jouant Bach, sur une pellicule de glace,
la pique s’enfonçant peu à peu,
à chaque coup d’archet,
pour retrouver,
une fois la suite achevée,
l’essence même de la musique.
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Et , de même la page d’écriture,
Qui se révèle :
une façon de communiquer son sang
à l’encre :
une mémoire magnétique,
venant de régions inconnues
avant que celle-ci ne fige .
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Bien sûr, on peut rester
la plume en suspens,
au point de laisser les oiseaux
dessiner, écrire à notre place,
le geste immobilisé,
pour des récits qui resteront
à jamais non écrits …
–
Faut-il se révéler à soi-même,
Et remonter du lac,
sous nos pieds,
un seau d’eau glacée
dans laquelle nous mirer ?
Reflétant aussi les oiseaux ,
et l’encre transparente du silence …
–
De toute façon,
ce qui est puisé,
n’est qu’une infime parcelle,
comme le serait la découpe du ciel,
visible dans le seau,
mais il contient une voix,
avant d’être naufragée, gelée …
–
la nôtre .
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RC- sept 2015
( variation sur un texte de Michèle Dujardin, tiré de « Abadôn » elle-même évoquant Henri Thomas avec cet extrait : « Je n’ai le goût de rien exprimer, si ce n’est ce noyau d’obscurité tenace qui est mon être même, ma substance morale et poétique. »
Henri Thomas )
Fête au goût de sang et de poussière – ( RC )

peinture: Francis Bacon: triptyque » miroir de la tauromachie «
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Passés les habits de lumière,
Les virevoltes et les faux semblants,
La cape rouge , et sa découpe,
Contre le sol d’ocre.
Les fanfares criardes,
Les éclairs du soleil ardent,
Sur la muleta,
La valse des banderilles…
La fête est finie,
Elle a le goût du sang,
Et de poussière …
Le taureau gît
Affaissé dans une flaque rouge,
Les spectateurs ont déserté l’arène .
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RC – mars 2015
A l’affut du tain ( RC )
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Un pinceau lumière,
Ainsi renvoyé,
Zig-Zague au verre biseauté,
Une surface dressée,
Un obstacle , dit la profondeur,
Et pointe l’illusion,
.. ce que je ne connaîtrais pas,
Sans artifice,
Mon visage…
Une surface dressée,
Mais cachant peut-être
Un regard derrière,
Qui n’est pas le mien,
A l’affut du tain
Derrière mon reflet,
Le pinceau d’un décor
Se construit, à l’arrière
– Du présent.
Une surface dressée,
– peut-on lui faire confiance ?-
( Déjà portant nom de « trompe l’oeil »).
Par fausse profondeur,
En masquant l’avant,
Pour dire tout autre chose.
A rassembler ses esprits
En plusieurs pièces
Echappées du lisse,
Miroir aux alouettes,
Dans une découpe de ciel
Les oiseaux s’y trompent.
Et du bec,
Se cognent,dans l’image
Des nuages
L’appel de l’espace,
Part dans tous les sens,
Si la glace se morcelle,
L’illusion se dissipe,
Avec le verre partant
Dans tous ses éclats.
Parlent dans les débris,
Plusieurs langages,
Ne se comprenant plus.
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RC – 24 septembre 2013
-sur ce thème du miroir brisé
on peut aussi voir une autre option, celle de Jeno Eugene Detvay