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Trop lourd, pour que je reste debout, à la surface du monde – ( RC )


gravure sur bois Lynd Ward

Le poids de ma tête est trop lourd
pour que je reste debout,
à la surface du monde.
Je le creuse avec les dents,
la face contre terre,
et il m’arrive de trouver,
quand je dévisse un membre,
mon double, sculpté dans le bois,
par ces racines revêches,
qui ont fini par absorber mon sang.


C’est ainsi que ma vue s’est brouillée,
sans doute à cause de la poussière,
qui, elle aussi encombre mon esprit.
Je ne pense qu’aux temps,
où, trop léger sans doute,
je planais à quelques mètres
au-dessus du sol.
Composé de plusieurs parties
prévues pour s’emboîter,
il a fallu les rassembler.


J’étais à la recherche de la pièce manquante,
qu’on déniche par inadvertance :
un visage à modeler,
qui, maintenant que j’y pense,
offre une certaine ressemblance
à celui qui me fait face et me regarde,
dans le dédale des racines .


Le poids de ma tête est trop lourd  :
je ne peux que supposer
que trop d’années l’ont plombée :
le jour se confond avec la nuit,
et je ne peux saisir aucune de ces lueurs,
enfouies dans la terre.


Je ne peux que les imaginer…
car, si j’y voyais encore,
je verrais croître les arbres
se nourrissant de morceaux d’étoiles.
La mienne doit être quelque part,
car un jour je l’ai perdue…


L’oeil éteint du gardien invisible – ( RC )


photo Alecio de Andrade

Je suis entré dans le palais désert,
les portes se sont ouvertes
sans que je les pousse,
un gardien invisible portait un masque :

un visiophone ouvert
sur l’indifférence…

J’étais seul dans un univers sans issue,
entouré de somptueux tableaux,
protégés par d’épais panneaux de verre.

Un sol de marbre lisse
renvoyait leur reflet.

Des sculptures aux gestes figés
tentaient de prendre leur envol,
mais le poids exagéré de la pierre
les maintenait au sol :
aucune n’avait de couleur.

Elles avaient dû la perdre
dans leur effort
pour s’échapper ainsi de l’espace clos,
où seule une lumière grisâtre
parvenait du plafond.

Mes pas , tournant sur eux-mêmes,
ont résonné
dans le dédale des salles,

Je me suis aperçu
qu’elles s’ouvraient sur celles
que j’avais déjà parcourues.

Je n’ai croisé aucun visiteur,
à qui j’aurais pu demander
la sortie.

J’ai fini par confondre
tous les tableaux,
toutes les couleurs,

sous l’oeil éteint
du gardien invisible :
pressentant que jamais,
je ne sortirais du palais…


G M C – Anvers by night


-Antwerpen

du blog de gmc

ANVERS BY NIGHT

 

Chacun son odyssée

De dédale en bohème

Un surf sur les yeux

Distraction de passant

 

Nul besoin d’une trace

Sur l’épaule veillent

Les corbeaux impassibles

Et la noirceur de leur chant

 

Tout paysage est intime

Quel qu’en soit le commentateur

Tout ruisselle sur la scène

Comme une rivière de diamants