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Socrate – ( RC )


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peinture: J L David: la mort de Socrate

 
En suspens sa phrase commencée
il peut reprendre son haleine
au bord de la falaise, avancé
il n’est pas au bout de sa peine :

personne ne voit que s’interrompt la ligne :
le discours peut reprendre
les dieux lui font signe
le temps peut se suspendre

nul n’attend son départ
quand il porte à ses lèvres le verre :
il peut savourer le nectar,
et bientôt voir à travers :

Baisse le niveau du breuvage
comme la mer se vide
découvrant la plage
une étendue livide

Passant du verre au bronze ancien
pas de vin écarlate
ni le sirop du pharmacien,
mais le poison offert à Socrate

Tu peux le voir, inclinant son calice,
les compagnons détournant la tête,
et lui, boit – comme avec délice
( on l’imaginerait bientôt « pompette »)

tout cela sans qu’il confesse
l’idée même d’une vie interrompue
dans la curieuse ivresse
donnée par la cigüe

comme quoi on ne sait pas où mène
une simple boisson :
l’accompagnant comme pour la Cène
( ce dernier repas manquait de cuisson )

C’est à mesure que tu bois,
que tu t’éloignes des bords,
>       c’est ainsi que l’on se noie,
et qu’on trinque avec la mort.

RC – oct 2016


Catherine Pozzi – Vale


Christophe Possum  rêve de ver.jpg

peinture  aborigène: Clifford Possum  1997

La grande amour que vous m’aviez donnée
Le vent des jours a rompu ses rayons —
Où fut la flamme, où fut la destinée
Où nous étions, où par la main serrée
Nous nous tenions

Notre soleil, dont l’ardeur fut pensée
L’orbe pour nous de l’être sans second
Le second ciel d’une âme divisée
Le double exil où le double se fond

Son lieu pour vous apparaît cendre et crainte,
Vos yeux vers lui ne l’ont pas reconnu
L’astre enchanté qui portait hors d’atteinte
L’extrême instant de notre seule étreinte
Vers l’inconnu.

Mais le futur dont vous attendez vivre
Est moins présent que le bien disparu.
Toute vendange à la fin qu’il vous livre
Vous la boirez sans pouvoir être qu’ivre
Du vin perdu.

J’ai retrouvé le céleste et sauvage
Le paradis où l’angoisse est désir.
Le haut passé qui grandi d’âge en âge
Il est mon corps et sera mon partage
Après mourir.

Quand dans un corps ma délice oubliée
Où fut ton nom, prendra forme de cœur
Je revivrai notre grande journée,
Et cette amour que je t’avais donnée
Pour la douleur.


Vale

Del gran amor que tú me habías dado
El viento de los días los rayos destrozó —
Donde estuvo la llama, donde estuvo el destino
Donde estuvimos, donde, las manos enlazadas,
Juntos estábamos

Sol que fue nuestro, de ardiente pensamiento
Para nosotros orbe del ser sin semejante
Segundo cielo de un alma dividida
Exilio doble donde el doble se funde

Ceniza y miedo para ti representa
Su lugar, tus ojos no lo han reconocido
Astro encantado que con él se llevaba
De nuestro solo abrazo el alto instante
Hacia lo ignoto.

Pero el futuro del que vivir esperas
Menos presente está que el bien ausente
Toda vendimia que él al final te entregue
La beberás mientras te embriaga el
Vino perdido..

Volví a encontrar lo celeste y salvaje
El paraíso en que angustia es deseo
Alto pasado que con el tiempo crece
Es hoy mi cuerpo, mi posesión será
Tras el morir.

Cuando en un cuerpo mi delicia olvidada
En que estuvo tu nombre se vuelva corazón
Reviviré los días que fueron nuestro día
Y aquel amor que yo te había dado
Para el dolor.

Versión de Carlos Cámara y Miguel Ángel Frontán


tes mots à survivre (RC)


dessin: planche  de botanique  ancienne

dessin: planche de botanique ancienne

 

 

Peut-être que tu ne survivras pas à tes mots
Si ceux ci portent une charge toxique
Et qu’ils procurent à leur auteur mille maux
En se reproduisant de famille, prolifiques

Mais on peut imaginer que l’inverse le soit
Et qu’en vin des marges, ils remplissent
Les recueils, et d’indépendance, soient
Au point qu’ils te survivent avec délices

Ces signes qui nous inventent
Vont aussi nous guider
A traverser la mort lente
Mourir pour des idées

C’est bien Georges qui le chante
Et toujours, on le fredonne
Brassens nous enchante plus que hante
Et ses paroles résonnent

A la série des pages ouvertes
On peut voir le temps qui tasse
Du jardin, à la grande fenêtre
Les écrits ne s’envolent ni s’effacent

La parole se donne, orale
Les poètes anciens ,heureux élus
Hugo, Rabelais, de Nerval
La parole écrite est encore lue.

L’étonnant cristal d’immatériel
De la parole qui touche l’âme
Traverse encore tous les ciels
Et nous joue encore ses gammes

Shakespeare, Othello et Ophélie
Au théâtre des hommes, éternel
Et la voix cassée de Billie
Si vivante, belle, très actuelle…

Se nourrissent de mots précieux
Distribués à travers l’espace
Comètes et météores audacieux
Mais nous en avons toujours la trace

 

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Réponse  à JJ Dorio  pour  son  « vin des marges »