Francesca-Yvonne Caroutch – espace du désir
peinture: Patrice Giorda
Espace idéal
espace du désir qui
au-delà de l’assouvissement
demeure pur désir
c’est-à-dire volonté des étoiles
Jubilation de la graine sur le point de germer
Ascèse des voyages dans l’énergie à l’état brut
L’esprit et le cœur pris dans les glaces
enfin tressaillent de concert
Voici alors le prince
ni ours ni dieu
qui saura éveiller la belle au plomb dormant
Car notre mercure est terre humide et torride
le verger notre corps
et notre corps un cosmos .
Cheminement contradictoire – ( RC )
C’est devenu une habitude :
Je supporte mon corps
Apparemment sans effort .
Ses poumons s’ouvrent à l’air extérieur,
Le cœur est toujours en lieu sûr,
Et se manifeste par une pulsation,
d’ une évidence, portant à l’oublier.
Le chemin est tout tracé pour le sang :
Il suit son cycle, sans qu’on ait à ouvrir la mécanique,
Ni qu’on la remonte avec un ressort .
Les muscles sont en place,
se contactent quand on le leur demande,
Mais il y a toujours un fossé,
où le corps, dans sa familiarité ;
voisine l’esprit,
sans intention de lui nuire :
Un décalage au monde,
comme si la langue que je pratique,
n’était pas celle des autres .
Un cercle invisible difficile à franchir,
occupé par les gestes quotidiens,
âme prisonnière de son destin,
côtoyant les démons intérieurs
qu’elle souhaite pourtant combattre.
Et où en trouver l’énergie,
si tous se nourrissent du même sang,
de l’air que je respire et des mêmes pensées ?
De leur bavardage continuel,
ils conduisent mes pas :
d’une démarche qui se veut assurée,
dans des intentions contradictoires .
Je connais leur dialecte,
mais je n’ai pas, pour les comprendre,
la version complète,
chacun empiétant sur l’autre
en une oscillation perpétuelle .
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RC – sept 2015
Devenus transparents – ( RC )
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C’est un oubli de soi-même.
Tu traverses les jours et les nuits.
Les yeux clos.
Tu parcours les mondes.
Ceux-ci restent noirs.
Leur énergie te propulse,
A travers le miroir, ton propre miroir…
Tu te vois sans limites,
Ressens le souffle du vent,
Que tu ne peux saisir.
Tu ne peux écrire dessus, …non plus
Fondu dans l’ombre,
Rien ne te distingue,
D’un arrière plan .
– existerait-il d’ailleurs ?,
si tu rouvrais les yeux ? –
…. Point de suspension
Dans l’univers,
Et pourtant absorbant,
Dans le livre aux pages ouvertes,
Ce qui fait la chair du monde.
Elle te consume petit à petit,
Te nourrit, mais te déchire à la fois.
Tu mourras, …. nous mourrons,
Traversés par la vie,
Comme par autant d’étoiles,
Réellement fondus au coeur de l’ombre,
Ames poreuses à l’odeur des choses.
Devenus transparents .
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RC – août 2014
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Inspiration : Joseph Brodsky et Alda Merini
Patrick Laupin – l’homme imprononçable – extr 01
photographe non identifié
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Je voudrais que s’entende comment la violence historique rentre dans les corps, crée en chacun une parole non parlée, un soliloque muet.
D’ordinaire la poésie arrive à ça par des abréviations fabuleuses et des synthèses de foudre donnant à lire toute la structure du langage en abîme.
J’entends une poésie qui ne trahisse pas la réalité. J’imagine un théâtre, simple odyssée sous les arbres, solitaire, tacite ou social, où l’auditeur soit dans la position d’entendre ce qu’il écoute comme s’il ne l’avait jamais encore entendu prononcer, bien que vivant de tout temps de ce débordement concentré de sa propre énergie singulière.
Où soient des adresses, des voix, un lieu de la parole en soi pour qu’elle puisse exister. Sans quoi, le tragique de la folie le prouve, l’homme est un être donné pour le néant et la disparition. Que la voix retraduise ça, le lieu, le geste, le fuyant.
Que s’entendent ces voix, vulnérables de songe, sentences retorses qui évident le mensonge, une beauté statuaire dans le calme plat de l’invective.
Je voudrais que s’entende une langue qui par la répartie instantanée retourne le sens à son vide, à la cruauté rapace d’envol qui dort dans la guerre intestine des corps, à la douceur élue de la beauté.
Ennuis, soleils, traites impayées, corps courbaturé et l’oppression, le souffle de la révolte.
Je me dis qu’une page est tracée diaphane chaque jour au soupir de notre disparition.
Je voudrais lui rendre son invention de chair, de verbe et d’insurrection sacrée.
(extrait de L’Homme imprononçable, La rumeur libre éditions, 2007)
André Velter – La poésie ne peut être coupée ni du sacré
Elle n’est pas un réservoir de mots d’ordre.
Elle a du souffle et pas de frontières.
Sa langue lui appartient, mais elle appartient à la rumeur des langues.
Opaque à tout populisme, elle n’a pas à craindre d’être populaire.
Si elle est vécue, elle change la vie.
D’Reality – Ma si belle imperfection
D R, , auteure, dans son blog, ( du miel et des chicons ), de ce beau texte, m’a autorisé à le publier…
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in Du Velours et du Satin | Tags: amour, littérature, poésie, réflexion
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Quelques minutes d’énergie pure, d’harmonie passionnelle où je ne cède plus à la raison, où je suis entièrement moi… nue, vierge de tout apparat, où mes sens et mon instinct reprennent le dessus des conventions. Je suis le feu, le pur noyau brut. Sensuelle, extrême. Quelques minutes où je me donne sans compter, sans réfléchir. Où le corps reprend ses droits, où la tête attendra…
Tu es ma parenthèse dans ce monde de belles phrases. Tu es mon secret dans ce monde sans mystère. Tu es la ride sur mon visage lisse, celle qui reflète ma nature profonde. Tu es ma si belle imperfection. Le sillon qui me révèle. La ligne d’un nouvel horizon où je n’ai plus peur…
retraits d’hier en hivers (RC)
Le manteau gelé de la falaise d’eau
mur de pâte bleutée, – un rideau
aux griffes du temps, la chape appesantie
immobilise la source, – déjà ralentie
La lave de froid, suspend les instants
de vie ruisselante, jusqu’aux printemps
la congèle, – directe assassine
en coulures blanches, jusqu’aux racines
Que même l’astre – de passage – épanoui
ne parvient pas à les rendre à la vie
se heurte et rebondit sur les cristaux
tranchants comme des couteaux
Il faudrait changer d’hémisphère
ou refaire un tour de la terre
d’un coup de baguette – magie
et libérer tout à coup – l’énergie
Laisser de côté le manteau de glace
Faire que semaines – se passent
que d’airs nouveaux, la vie se dope
qu’entre feuilles mortes,les herbes développent
Un timide tapis , duvet de bonheur
étoilé de fleurs – , mouvements,couleurs
et que reprenne les insectes, la course
des bourgeons et des sources
– C’est bientôt chose faite
l’hiver, en rétréci, détale sa défaite
accompagné d’accords musicaux
du refrain des chants des oiseaux
inspiré de « sous le manteau d’hiver » (JoBougon)