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Norge – Théâtre


La-vie-de-Galilee-61

photo  Simon Gosselin pour  le  théâtre des Célestins – Lyon « La vie de Galilée »

Un seul personnage dans cette pièce :            le silence.

Il est immobile.

Soudain, un second personnage :                      le temps.

Immobile aussi.

Et pour tout dire :                                          assommant

On entendrait se moucher un voleur.

Et c’est alors qu’entre l’Ennui,         gesticulant grimaçant

comme un fantoche         pour amuser enfin les spectateurs.


Francis VILLAIN – son grand couteau de nuit


Résultat de recherche d'images pour "sculpture primitive bronze nuragique"

 

sculpture  – bronze  nuragique  ( Sardaigne ) musée de Sassari

 

Il s’est approché lentement
Avec son grand poignard en peau de nuit
Il a pris, il a pris tout son temps
Avec son grand poignard en peau d’ennui
Il a reniflé dans le vent
Avec son grand sourire de trop de nuit
Il a souri de toutes ses dents
Pour laisser t’approcher lentement
Il a pris tout, tout son temps
De son flanc a délogé une lame de fer
Avec son grand couteau en peau de fer
Il s’est mis à tuer le temps
Il avait froid dans ses grands vents
Il avait de la poule à chair
Il était nu, nu comme un ver
Avec sa lame en peau de fer
Avec son grand couteau de nuit
Il ne savait vraiment pas quoi faire
Il faisait froid,       il est parti.


Nayim Snida – Alors c’est elle qui peut consoler mon âme


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sculpture :  Gertraud Möhwald

 

Alors c’est elle qui quand l’odeur austère

Du passé affaibli par l’éphémère
Où sous le pont du temps le vent efface
Machinalement toutes les traces


Des instants d’aimer qui hélas en ombres

Se sont métamorphosés comme l’état du monde
Aux yeux de l’homme rêvant de paix de tolérance
Tandis que l’on se noie dans l’indifférence


A l’égard des victimes à l’égard des misères

A l’égard des rancunes qui puisent dans les guerres
Ses armes écrasant le repos des gens
Horrifiés par des morts enterrés tout vivants


Alors c’est elle qui peut consoler mon âme

Confusément perdue un batelier qui rame
Vers un îlot sans nom pour l’évasion du cœur
Habillé d’ennui vis-à-vis des malheurs


Un prince au froid – ( RC )


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          C’est une promenade infinie,
où l’on prend toutes précautions,
pour que l’être se conserve
en l’état :

           Il n’a pas été nécessaire,
comme le faisaient les Egyptiens,
de prévoir le voyage dans l’au-delà
par un subtil embaumement.

          Il suffit de promener ton cadavre
avec ce siège à roulettes
dans une galerie climatisée,
quelques degrés en-dessous de zéro.

          ( Tu parcours donc un circuit
– variations forcément limitées –
propice à ton ennui,
prévu pour l’éternité  ).

          Notons l’élégance
un peu raide de la mise,
mais sans les épaisses fourrures
que l’on revêt par grand froid …

         Ton regard quelque peu absent:
on pourrait le dire « glacé »,
et les pensées immobiles,
figées, comme tes membres ,

         dans une position             définitive .
D’aucuns la disent hautaine.
>     Mais une certaine raideur ,
        assortie à tes fonctions .


RC – sept 2016


Jacques Ancet – N’importe où


 

Chorus / Work / United Visual Artists:

Installation : United Visual Artists

 

 

N’importe où une salle d’attente
par exemple les chaises rangées
le froissement des pages l’ennui
sur les visages ou n’importe quand
la porte s’ouvre grince se referme
celui qui entre dit messieurs-dames
bonjour les yeux se lèvent se baissent
on pense que c’est peut-être là
tout près on ne sait pas ce que c’est

*

Là aussi devant le soir qui tombe
collines bleues brume etc
les mots peu à peu deviennent sombres
on croit deviner que c’est à cause
de ce qui s’en va du noir qui vient
pourtant c’est autre chose la lampe
fait de l’ombre les murs se resserrent
on écoute le bruit de la voix
elle s’approche on la reconnaît

 

N’importe où                           – 1998


Perfections et symétries – ( RC )


 

Tu mesures les formes parfaites,
où tous les côtés se répondent,
et obéissent aux mesures identiques .

Ainsi le constructeur tend vers l’utopie
de la vision où la mathématique
prend le dessus de la vie .

Les rosaces des cathédrales,
tournent en mouvements figés ,
aux soleils fractionnés,

Les mosaïques aux jeux complexes,
zelliges enchevêtrés
excluent l’humain dans le décoratif.

Des palais imposants,
forçant la symétrie,
se mirent à l’identique

avec le double inversé,
du bavardage pompeux
des images de l’eau .

Se multiplie la dictature
de la géométrie des formes
répondant à leur abstraction ,

comme des planètes qui seraient 
cuirassées dans une sphère lisse
d’où rien ne dépasse.

…  Des formes si lisses,
voulues à tout prix,
qu’elles génèrent l’ennui

excluant la fantaisie
le désordre
et le bruit.

Les formes parfaites
s’ignorent entre elles
définitives, excluant la vie

comme des pièces de musée,
pierres précieuses,
diamants de l’inutile

dont finalement
la froid dessin, clos sur lui-même
finit par encombrer .

Dans le passé, on ajoutait
à un visage de femme trop régulier
un grain de beauté, une mouche,

quelque chose pour lui apporter
une différence, un cachet
sa  personnalisation, un « plus » de charme

une irrégularité, une surprise,
portant dans son accomplissement
la griffure du vivant

Elle se démarque du cercle fermé
de la beauté idéalisée par quelque chose
contredisant la perfection

Celle-ci demeure une vue de l’esprit,
bien trop lointaine
pour qu’on puisse s’en saisir.


RC – août 2016

 

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Nouveaux parcs d’attraction ( sur une peinture de Dirk Bouts ) – ( RC )


                                             Peinture:  D  Bouts:  le  chute  des damnés

Voila le choeur des réjouissances,
où tout bascule, d’une autre planète.
– Elle frôlerait celle-ci,
et c’est un échange des mondes,
celle où l’attraction aurait raison
du poids des péchés.

Les hommes attirés comme des mouches,
engluées sur leur spirale collante.
Et de petits monstres
– un rien préhistoriques –
comme nés d’entre les roches,
enfantés par
l’imaginaire débridé,
s’en donnent à coeur joie,
échangent les corps blafards,
dans une folle farandole.

C’est sans doute la ration quotidienne,
les sortant de l’ennui,
– la grande roue, que l’on aperçoit,
ne suffirait-elle pas ?  –
de quoi aiguiser l’appétit,
et quelques canines,
– mais jamais rassasiés –
leurs petits yeux stupides,
tout à leur tâche,
éternellement recommencée :
( quelles nouveautés nous sont donc données,
avec les derniers damnés ? )

C’est un parc d’attractions .
On viendrait presque, muni d’un ticket,
y réserver une place, pour se faire une frayeur,
comme en empruntant le train fantôme,
se faire balayer le visage,
avec des toiles d’araignées :
–    Il y en a bien qui réservent des places,
pour fréquenter sans risque,
les geôles communistes…
bientôt quelque camp de concentration,
pour le touriste de l’histoire ,
spécialement aménagé.

Indispensables : uniforme et matraque,
pour  » consommer  » quelques émotions fortes .
On demanderait presque,
si c’était possible : – « aux vrais « 
à ceux qui n’en sont pas revenus ,
de participer à une reconstitution,
Télé-réalité oblige :
la cote de l’angoisse et du frisson
monte avec l’audimat .


RC – mars 2016

voir aussi ce qu’a  écrit Michel Butor,  par rapport à cette peinture  de Bouts…


Rémission ( l’oeil du serpent ) – ( RC )


peinture  - Peter Paul Rubens (1577–1640) - The Head of Medusa, circa 1618, Oil on Canvas Moravská galerie v Brně Brno}}

peinture – Peter Paul Rubens (1577–1640) – Tête de Méduse  –  1618, –  h  sur  toile  -Moravská galerie v Brně Brno}}

Tu descends dans un tourbillon sable mouvant de sable,


De mes mains , je brasse l’air

à grands coups de couleurs fauves ;

Elles marquent le passage des minutes vers une agitation solaire.

Avant que tu ne t’enfonces,

dans une étendue                        morne comme l’ennui.

La devanture de l’aube ruisselante , est témoin du rire des trompettes.

Tu es un serpent, trempé de frissons nocturnes,

dont le regard me traque, tout au long de mes nuits.

Des chapelets de pierres suspendues, bris de planètes,

Sont                      les ossements des anges déchus,

dont rien n’entrave la chute.

Le sang se fige dans la fièvre des rêves,

On en ignore la part du réel … :

Si tu as injecté le venin,        si le réveil en est l’antidote.

Car lorsque le jour tend son arc, telle une couverture que l’on retire,

Les délires finissent                 par faire pâle figure,

Et tu disparais,                        avalé par le sable.

On dirait              qu’il ne s’est rien passé.

Le mal est rentré               en lui-même,

Peut-être      pour ressurgir plus loin,

Brève rémission d’une contagion à venir .

Je le saurai quand mes yeux resteront fixés

à jamais ,                     sur les tiens.

RC –  mai 2015


Nadia Tueni – Ecoute


 gravure Heinrich Campendonk, musée de  La Haye, NL


     gravure :                     Heinrich Campendonk,            musée de La Haye,   NL

Ecoute,
toi dont la voix fait de grands gestes
et dont les bras sont chant d’oiseau, écoute:
la ville blanche est un tombeau.
Ne crains ni le soir ni l’ennui,
tous deux ouvrent sur un jardin.
Ne crains ni l’amour ni la nuit,
la mort est un chariot faisant route vers l’est,
la vie n’est que la vie, simple abri du regard.
Ecoute.
Il y a sur ton ombre des chemins de quiétude.
Absolue.

 

.

NADIA  TUENI


Camillo Sbarbaro – Tais-toi, âme lasse d’être heureuse


montage perso

      montage perso,       août 2013

 

Tais-toi, âme lasse d’être heureuse
et de souffrir –vers l’un et vers l’autre tu vas résignée-
J’écoute et m’arrive une voix tienne.
Pas celle des regrets pour la misérable
jeunesse, pas celle de colère ou de révolte
Pas même celle de l’ennui

Muette

Tu gis, le corps dans indifférence
Désespérée.

Nous ne serions pas surpris,
N’est-ce pas, mon âme, si maintenant
Le cœur s’arrêtait, si notre souffle
était coupé.

Au contraire nous marchons.
Et les arbres sont des arbres, les maisons
sont des maisons, et les femmes
qui passent sont des femmes, et tout est
ce qu’il est.

L’alternance de joie et de douleur
Ne nous touche pas. Elle a perdu la voix
La sirène du monde, et le monde est un grand
désert.

Dans le désert
avec des yeux secs je me regarde.

Camillo Sbarbaro


Richard Brautigan – moins de temps


Art installation:  Andy Goldsworthy

Art installation: Andy Goldsworthy

Moins de Temps

Moins de temps qu’il n’en faut pour le dire,
moins de larmes qu’il n’en faut pour mourir;
j’ai pris toutes les choses en compte, et voilà.

J’ai fait un recensement des pierres,
elles sont aussi nombreuses que mes doigts et quelques autres;
j’ai distribué quelques pamphlets aux plantes,
mais toutes n’étaient pas désireuses de les accepter.

J’ai gardé de la compagnie avec la musique pendant une seule seconde,
et maintenant je ne sais plus quoi penser du suicide,
car si jamais je voulais me séparer de moi même,
la porte est de ce côté, et,  ajouté-je malicieusement,
l’entrée,  la ré-entrée, est de l’autre.
Tu vois ce qu’il te reste à faire.

Des heures, du chagrin,
je ne garde pas un compte raisonnable;
je suis seul, je regarde à la fenêtre,
il n’y a pas de passant,
ou plutôt personne ne passe (souligne « passe »).

Vous ne connaissez pas cet homme ?
C’est Monsieur Lemême.
Puis-je vous présenter Madame Madame ?
Et leurs enfants.
Alors je retourne sur mes pas,
mes pas retournent aussi,
mais je ne sais pas exactement sur quoi ils se retournent.

Je consulte un horaire;
les noms des villes ont été remplacés par les noms des gens
qui avaient été proches de moi.

Devrais-je aller vers A,
retourner à B, changer à X ?
Oui, bien sûr je changerai à X.

Sous réserve que je ne rate pas la correspondance avec l’ennui !
Nous y voilà : l’ennui, les belles parallèles,  ah !

Que les parallèles sont belles sous la perpendiculaire de Dieu

dessin: Louis Pons;  exposition musée Fenaille  Rodez

dessin: Louis Pons;         exposition musée Fenaille          Rodez

Less Time

Less time than it takes to say it,
less tears than it takes to die;
I’ve taken account of everything, there you have it.

I’ve made a census of the stones,
they are as numerous as my fingers and some others;
I’ve distributed some pamphelts to the plants,
but not all were willing to accept them.

I’ve kept company with music for a second only
and now I no longer know what to think of suicide,
for if I ever want to part from myself, the exit is on this side and, I add mischievously,
the entrance, the re-entrance is on the other. You
see what you still have to do.

Hours, grief,
I don’t keep a reasonable account of them;
I’m alone, I look out of the window;
there is no passerby,
or rather no one passes (underline passes).

You don’t know this man?
It’s Mr. Same.
May I introduce Madam Madam?
And their children.
Then I turn back on my steps,
my steps turn back too,
but I don’t know exactly what they turn back on.

I consult a schedule;
the names of the towns have been replaced by the names of people
who have been quite close to me.

Shall I go to A, return to B, change at X?
Yes, of course I’ll change at X.

Provided I don’t miss the connection with boredom!
There we are: boredom, beautiful parallels, ah!

how beautiful the parallels are under God’s perpendicular.


Luis Cernuda – Portrait de poète


peinture: Ramon Gaya –       l’enfant de Vallecas,  ( d’après Velasquez)  — huile sur toile,   1987        Musée de Murcie

Portrait de poète
À Ramón Gaya

Te voilà toi aussi, mon frère, mon ami,
Mon maître, dans ces limbes ? Comme moi
Qui t’y a conduit ? La folie des nôtres
Qui est la nôtre ? L’appât du gain de ceux qui
Vendant le patrimoine hérité et non gagné, ne savent
L’aimer ? Tu ne peux me parler, et moi je peux
Parler à peine. Mais tes yeux me fixent
Comme s’ils m’invitaient à voir une pensée.

Et je pense. Tu regardes au loin. Tu contemples
Ce temps-là arrêté, ce qui alors
Existait, quand le peintre s’interrompt
Et te laisse paisible à regarder ton monde
A la fenêtre : ce paysage brutal
De rocs et de chênes, tout entier vert et brun,
Avec, dans le lointain, le contraste du bleu,
D’un contour si précis qu’il en paraît plus triste.

C’est cette terre que tu regardes, cette cité,
Ces gens d’alors. Tu regardes le tourbillon
Brillant de velours, de soie, de métaux
Et d’émaux, de plumages, de dentelles,
Leur désordre dans l’air, comme à midi
L’aile affolée. Voilà pourquoi tes yeux
Ont ce regard, nostalgique, indulgent.

L’instinct te dit que cette vie d’orgueil
Élève la parole. La parole y est plus pleine,
Plus riche, et brûle pareille à d’autres joyaux,
D’autres épées, croisant leurs éclats et leurs lames
Sur les champs imprégnés de couchant et de sang,
Dans la nuit enflammée, au rythme de la fête,
De la prière dans la nef. Cette parole dont tu connais,
Par le vers et le dialogue, le pouvoir et le sortilège.

Cette parole aimée de toi, en subjuguant
La multitude altière, lui rappelle
Que notre foi est tournée vers les choses
Non plus perçues au dehors par les yeux
Quoique si claires au dedans pour nos âmes ;
Les choses mêmes qui portent ta vie,
Comme cette terre, ses chênes, ses rochers,
Que tu es là, à regarder paisiblement.

Je ne les vois plus, et c’est à peine si à présent
J’écoute grâce à toi leur écho assoupi
Qui une fois de plus veut resurgir
En quête d’air. Dans les nids d’autrefois
Il n’y a pas d’oiseaux, mon ami. Pardonne et comprends ;
Nous sommes si accablés que la foi même nous manque.
Tu me fixes, et tes lèvres, en leur pause méditative,
Dévorent silencieuses les paroles amères.

Dis-moi. Dis-moi. Non ces choses amères, mais subtiles
Profondes, tendres, celles que jamais n’entend
Mon oreille. Comme une conque vide
Mon oreille garde longtemps la nostalgie
De son monde englouti. Me voilà seul,
Plus même que tu ne l’es, mon frère et mon maître,
Mon absence dans la tienne cherche un accord,
Comme la vague dans la vague. Dis-moi, mon ami.

Te souviens-tu ? Dans quelles peurs avez-vous laissé
L’harmonieux accent ? T’en souviens-tu ?
Cet oiseau qui était le tien souffrait
De la même passion qui me conduit ici
Face à toi. Et bien que je sois rivé
À une prison moins sainte que la sienne,
Le vent me sollicite encore, un vent,
Le nôtre, qui fit vivre nos paroles.

Mon ami, mon ami, tu ne me parles pas.
Assis, paisible, en ton élégant abandon,
Ta main délicate marquant du doigt
Le passage d’un livre, droit, comme à l’écoute
Du dialogue un moment interrompu,
Tu fixes ton monde et tu vis dans ton monde.
L’absence ne t’atteint pas, tu ne la sens pas ;
Mais l’éprouvant pour toi et moi, je la déplore.

Le nord nous dévore, captifs de ce pays,
Forteresse de l’ennui affairé,
Où ne circulent que des ombres d’hommes,
Et parmi elles mon ombre, oisive pourtant,
Et en son oisiveté, dérision amère
De notre sort. Tu as vécu ton temps,
Avec cette autre vie que t’insuffle le peintre,
Tu existes aujourd’hui. Et moi, je vis le mien ?

Moi ? Le léger et vivant instrument,
L’écho ici de toutes nos tristesses.

Louis Cernuda


J. P. Salabreuil – Je suis là


Volume: Leo Copers - flamme éternelle

Volume: Leo Copers – flamme éternelle

 

 

Je suis là

Vous me croyez vivant
Je laisse mes yeux ouverts
Je regarde la nuit
Et je sais pour vous plaire
Y poster deux hiboux
Je les poudre d’étoiles
Et les chemins sont fleuves
Entre berges de boue
Je suis là je murmure
Et ces mots vous comprennent
Comme comprend le vent
Ce mélèze où nous sommes
Inondés de fraîcheur
Mais moi je suis ailleurs
Je ne suis pas vivant
Je suis mort et transi
Je ne suis pas ici
Simplement je vous parle
Et vous écoutez sans savoir
Combien ces choses sont lointaines
Combien me font ces feuillages d’ennui
Qui nous dépassent dans la nuit
Et demain seront les traces
De mes pas dans l’autre nuit.

J. P. Salabreuil


Patricia Grange – Ennui en estampe chinoise


peinture chinoise            atelier churchill

Ennui en estampe chinoise

C’est une goutte
De peinture grise
Qui coule le long
D’une feuille de vie
Au bord du même
Pinceau
Sans jamais
S’arrêter
Sans rien dessiner.
C’est une larme
De froid
Qui roule
Eternellement.
C’est un vide
Palpable.
C’est le café noir
De l’obscurité
Que l’on coupe
Au couteau.
C’est l’absence
De couleurs
D’odeurs
De sons
Où tous les sens
S’éteignent
Comme des étoiles
Jetées dans l’eau
Avec un frisson de râle.

(Patricia Grange)

– Patricia Grange est à l’origine  de son site poétique   » les jardins de Mariposa »


L’horloge du soleil, n’a pas d’aiguille (RC)


photo perso: Champerboux ( Lozère)... soleil au soir sur le causse de Sauveterre d'autres idées de la région ? - c'est sur photo-loz

Si l’ombre , avec le soleil, joue  à cache-cache

Les nuages  au-dessus des vallons, font  » tache »

Poussés par le vent, ils balaient l’ennui

Et dessinent, en contraste, des morceaux de nuit

 

C’est comme d’une  grande  toile,  le dessin

Et  au fond, apparaît des maisons de village, l’essaim

Alors, brille  soudain d’une  fenêtre, le reflet

Un éclat, qui clignote un instant,    – en effet

 

En réponse aux nuages, un instant distraits

Laissant s’évader, de la lumière, un trait

Un trait de pinceau qui repousse l’ombre

Couleurs, retrouvées, que les nuées encombrent

 

L’horloge du soleil, n’a pas  d’aiguille…

Elle  désigne, de surprise, un endroit qui vacille

Se dérobe soudain, pour naître encore au regard

Au jeu des statues  d’ombres, fruit du hasard

 

—-

 

Si l’horloge se figeait – et qu’elle  s’immobilise

Un arrêt sur l’image – le temps n’a pas de prise

Le passager, dédaignant les passages furtifs

Fixe, en dehors des jours et heures, le définitif

 

Tel endroit, empêtré dans l’ombre, jamais ne se réveille

Et tel autre se dessèche, toujours sous le soleil

Voilà  qui sur terre,              ferait du bruit

A vouloir échanger   des morceaux de nuit

 

Contre, des îles  de soleil, la caresse

Toutefois, sous l’ère de la sécheresse

On inventerait  un jeu de miroirs

Pour prélever du clair, sur le noir

 

On ferait appel aux  sorciers, et leurs  grimoires

Pour trafiquer, les cours de l’espoir

Ce serait,            – vous m’avez compris

Encore un mirage,                   de l’esprit

 

—-

 

Mais rassurez vous,  ce n’est qu’une illusion

La terre  a repris, lentement,  sa rotation

Et en levant les  yeux,         –    au dessus de votre rue

Car le soir a placé ses pions,  et la lune,             –   apparue…

RC – 16 avril 2012

voir  précisément à ce sujet  les  photos  de lumières  de juin, ici

photo perso - Causse de Sauveterre - 2008


Christophe Bousquet – Le dit et le non-dit


peinture: Richard Diebenkorn

Le dit et le non-dit

Le dit et le non-dit

Je pousse des soupirs le long des longues nuits
Dans lesquelles j’erre comme un damné depuis
L’explosion totale d’une joie éphémère.

Elle s’est évadée, me laissant mon désert :

Un grand marasme plat où l’ennui s’éternise
Sur des sables mouvants dans lesquels je m’enlise.
Pas d’oasis en vue. Depuis longtemps déjà

Le vent désespérant a effacé ses pas !

La soif implacable m’empêche de bouger
– Et ne pouvant boire, ça va pas s’arranger ! –

Je rêve désormais par hallucinations
– Tout est délirant, même l’imagination –

Malgré ce que j’en dis, j’encaisse mal le coup :
La ligne d’horizon est devenue bien floue.

ce  que  nous  « dit »  Christophe Bousquet.. 

est varié et interessant, mais  sur  son blog  la pose  de commentaires  semble faire problème…

 

 


James Sacré – solitude printemps mécanique


-peinture: Arshyle Gorky – Apple orchad   – 1946

 

 

Rien pas de silence et pas de solitude la maison
dans le printemps quotidien la pelouse
une herbe pas cultivée ce que je veux dire
c’est pas grand chose un peu l’ennui à cause
d’un travail à faire et pour aller où pourquoi?
ça finit dans un poème pas trop construit
comme un peu d’herbe dure
dans le bruit qui s’en va poignée de foin sec
le vent l’emporte ou pas ça peut rester là
tout le reste aussi la maison pas même
dans la solitude printemps mécanique pelouse
faut la tailler demain c’est toujours pas du silence qui vient.
·
Est-ce que c’est tous ces poèmes comme de la répétition?
je sais pas au moment qu’en voilà un encore
avec pourtant comme du vert
dans soudain les buissons en mars un désordre
avec des feuilles pourries dans
à cause du vent avec le vert maintenant
·a fait une drôle de saison neuve et vieille
est-ce que c’était pareil l’année dernière? j’en ai rien dit
pourtant j’en ai écrit des poèmes ça a servi à
je me demande bien quoi ça a disparu
des mots qu’on a dit j’ai mal entendu

 

et du blog  de Roland Dauxois,  je  complète  avec ce texte, de Nicolas Vasse,  visible ici

 

 

pardon les bleuets voix et champs jaunes

pardon les rires bruits des roseaux

pardon le vent soudain de la bouche

et les cris joie dans la lumière

pardon pour l’enfance dévorée

presque il ne sera pas ce cadavre

NicolasVasse