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Des clefs pour compter les minutes – ( RC )


As-tu toutes les clefs pour compter les minutes,
les changer en années ?
Les heures sont de retour.
Ce sont peut-être les mêmes qui reviennent,
si, comme le pense Patti, il n’y a peut-être,
ni passé, ni futur. Juste un passage,
un éclairage, passant de l’ombre à la lumière,
ainsi le soleil, qui réapparaît
après s’être dissimulé derrière un nuage.
En chevauchant une parcelle de temps,
tu n’en perçois qu’une étincelle,
pas ce qui en est à l’origine,
ni sa courbe dans l’éternité.
Juste un soupir,
dont nous gardons un instant
le souvenir.

variation sur Mr Train ( écrit de Patti Smith )


Michel Foissier – un pressentiment rongé par la fuite du temps


photo RC – monument aux morts Lodève

avaler un sandwich un demi pression un café
laver les pieds des morts avant le petit jour
se coucher enfin parmi les débris de vaisselle sale
parmi les pétales de fleurs fanées comme si la torture n’était qu’un mauvais
à passer
un pressentiment rongé par la fuite du temps
une promenade à petits pas de laine grise
sous les ponts la richesse se consomme à la va-vite
les doigts des amourettes construisent des plaisirs de bouts de ficelle
toute blessure se limite à l’impossible
entre pompes à essence et supermarchés
chaque chose en son temps rappelle-toi
il faut agir de nuit dans les odeurs acides du sommeil
substituer l’acte à l’intention
penser la mort comme une étincelle
il est comme quelqu’un qui renoue ses lacets
il dit qu’il attend et qu’il choisit pour cela cette version obscure du monde
il dit qu’il paye la faute de vivre ainsi en équilibre
et que le refus est écrit dans la peur
et que la peur est son testament
il est armé et le geste s’accompagne du cri d’un jour nouveau
et la lune s’est usée dans le grand cercle de la nuit
et puis occupé par les menus travaux de la guerre il attend dans le fantôme du vent
et son geste est très grand
personne n’est dans le camp de personne et
seul il imite le hurlement de la nuit
comme un cheval sellé qui ne sait encore rien de la course
ni du marchandage de la main et des jambes
en ces temps on disait la révolution
et l’âme des peuples était invisible
elle se cachait dans le secret des caves et ne sortait qu’à minuit
il pense que si sa tête éclatait il serait là à ramasser les morceaux à quatre pattes sur
le goudron de la nuit
il pense à ces kilomètres de mots
à ces lignes appliquées à l’encre violette
et qui ne touchent jamais la barrière du ciel
ni le sable bleu des déserts ni le souffle
ni ces petits riens de carton-pâte
l’habitude nous fait vivre à un millimètre de nous-même
dans la posture accroupie de la femme qui lave le linge à la rivière
de l’histoire nous ne savons que la calomnie
ici les murs nous font la grâce d’une lecture
aveugles nous déchiffrons les impacts de la fusillade
et le film est projeté en plein cœur
les acteurs sont soumis au grain de la maçonnerie
marionnettes ou créatures de rêve
une cérémonie à couper au couteau
le bétail s’allonge dans la manigance des corps
les hommes dorment les femmes dorment les enfants dorment
les chiens urinent puis grattent le bois des portes avec
des ongles malpropres
elle est assise dans l’ombre
il dit donne-moi tes mains j’en ferai bon usage dans
les giclées du soleil dans
les chuchotements du sous-bois
il connaît cette peur de granit cette trahison minuscule
demi-sel un char d’assaut quelque chose comme une prison qui s’avance
un bruit de métal frappé dans la fatalité du sang


S’arracher au sol – ( RC )



photo Parc des Cevennes

La tête à l’envers,

Montée sur l’échelle,

quelque part sur la terre,

Au delà du ciel,

crevant les nuages

Après l’ascension lente,

que rien ne décourage,

Même pas les pentes,

D’abruptes avancées,

de rochers branlants

Aux horizons fermés

leurs glaciers luisants

comme des mâts de cocagne,

plantés comme un défi,

au milieu de la campagne,

– caprices de topographie…

Alors , il est bien tentant,

De s’arracher au sol

Combattre la pesanteur en la bravant

Pour prendre son envol.

Il est tombé, le soir,

Sur le Mont Aigoual,

Tu vas mieux pouvoir

observer les étoiles,

Que depuis son observatoire

croiser les satellites

Dans la nuit noire,

d’un espace sans limites

Les cheveux de couleur

des aurores boréales,

feront ton bonheur,

d’un vol sans escale

En chevauchant Pégase,

ses ailes ,sur l’air,appuyées ,

ignorant les cases,

des jeux de société.

Tu iras bercer les lunes

dans tes bras blancs

survoler les dunes,

les soleils aveuglants.

et les pays lointains,

dont tu rêvais,

Seront à portée de main,

et même si près,

que la planète te semble

bien petite , ma foi,

Même si elle tremble,

encore, et aussi de froid

pour les habitants de la terre,

Il serait aussi, passé de mode,

de se faire la guerre,

jusque aux antipodes….

Fini le temps des nations,

Des bains de sang,

de la désunion,

Tu auras bien le temps

de faire un petit tour et revenir,

Accrochée à une étincelle

le temps d’un soupir,

Et d’un coup d’aile….


Au 27 lumineux – ( RC )


Iris, photo personnelle, printemps 2011

Au matin, venu d’une nuit     à gestes longs
J’ai émergé de tes bras     au sourire blond.
Bercé de l’empreinte de ta souche
Venue verser la tendresse de ta louche.

Nous avons joint nos doigts d’écriture
Pour faire des duos fabuleux en lecture
De gestes enveloppants, nuées d’étincelles
Parsemés d’épices, de crème renversée, et de sel.

La nuit aurait pu t’absorber et diluer
Ton image, la chaleur de ton corps se muer
En mirage,   cendre d’imaginaire agacé
Fugace,  illusion       sitôt vue,  sitôt effacée…

Mais  le matin descendit du ciel, comme nacelle
Ton esprit me guide en pensée et au réel,
Toi,        statue sortie des fées électriques
Vœu de Pygmalion fleuri d’authentique.

Mais le temps    (au delà de la nuit)
Peut-il        – dans tout ce bruit
permanent ,         faire que se change
En ombre,           l’empreinte de l’ange ?

 

RC –  2011,      repris  en mai 2014

 

Pygmalionne à l’ancre de tes jets

Aux quatre vents des détroits de l’ouest
J’ai pris ton bras et retourné nos vestes
Il s’agissait avant tout que je peste
Contre les dits de couloirs de nos gestes
Tu m’as tournée contre toi d’un ton leste
Ne t’arrête pas de dessiner ta fresque
Car dans les vents il y a à Lambesc
Autant de joie que de vie ou de liesse.

Carnet privé

 —
  • A Pygmalionne, je fus ta sculpture
    Détaché d »anonymat, d’une belle aventure
    Je prends sens entre tes mains créatrices
    De la terre, de la glaise que tes mains pétrissent
    Contre dits, contre toi, bruits de couloir
    Moulé de tes mains chaudes en laminoir
    Fresque volume en liesse à tes vents
    D’autan en emportent tes gestes savants
    Que je prends vie, soudain, sous tes augures
    Et perds , en passant, mon armure.


Une partie de brouillard, en eux – ( RC )


PHOTOMONTAGE JULIEN CHUNG, LA PRESSE-

Il y a cet espace

-….vain –

( enfin,                       on pourrait le deviner,

  •             Ouvert devant soi ),

    mais     sa durée est bouchée

Mais enveloppée de brouillard …

Les sons y deviennent           mats,

Et retombent au sol,

Aussitôt absorbés,        prisonniers

Contre             des mois d’immobilité.

On ne savait donc rien

De      ce qui se passait ailleurs …

Seul l’espoir d’en sortir,

Maintenait une étincelle,

Eteinte pour beaucoup,

A coups de sévices,

Simples numéros matricules,

Anonymes     en tenue rayée,

Que plus rien, presque, ne distinguait

Derrière        les barbelés du camp.

Se nourrissant d’absurdité,

Et de vermine.

A redouter d’être parmi les humains….

 

Après la longue,        longue nuit,

Un matin pâle,     s’est levé      enfin ,

Ils seraient bien peu,

A quitter ces plaines mornes,

Pour un retour au pays

Dont ils étaient arrivés        à douter

Même ,     encore,     de l’existence,

Emportés si loin,

Au-delà du descriptible,       avec

Une partie de brouillard,     en eux.

 RC – janvier  2014


Luis Cernuda – Je dirai la naissance


photo:  montage perso   avril 2012

photo: montage perso avril 2012

Je dirai la naissance

Je dirai la naissance des plaisirs interdits,

Comme un désir qui naît sur des tours d’épouvante,

Barreaux menaçants, fiel décoloré,

Nuit pétrifiée sous la force des poings,

Devant vous tous, même le plus rebelle,

Qui ne s’épanouir que dans la vie sans murs.

Cuirasse impénétrable, lances ou poignards,

Tout peut servir à déformer un corps ;

Ton désir est de boire à ces feuilles lascives,

Ou dormir dans cette eau caressante.

Qu’importe;

On l’a proclamé : ton esprit est impur.

La pureté, qu’importe, les dons que le destin a portés jusqu’au ciel, de ses mains immortelles ;

Qu’importe la Jeunesse, un rêve plutôt qu’un homme,

Au sourire aussi noble, plage de soie dans le déchaînement

Ces plaisirs interdits, ces planètes terrestres ,

Membres de marbre à la saveur d’été,

Suc des éponges abandonnées par la mer,

Fleurs de métal,    sonores comme la poitrine d’un homme.

Solitudes hautaines,    couronnes renversées,

Libertés mémorables manteau de jeunesses;

Qui insulte ces fruits, ténèbres sur la langue.

Est aussi vil qu’un roi, ou qu’une ombre de roi

Qui se traînerait aux pieds de la terre

Pour ne quémander qu’un lambeau de vie.

Il ignorait les limites dictées.

Limites de métal ou de papier,

Car le hasard lui fit ouvrir les yeux sous un jour si intense

Que n’atteignent pas des réalités vides,

D’immondes lois, des codes, des rues de paysages en ruines,

et si l’on tend alors la main,

On se heurte à des montagnes d’interdits.

Des bois impénétrables qui disent non,

Une mer qui dévore des adolescents rebelles.

Mais si l’opprobre et la mort , la colère et l’outrage ,

Ces dents avides qui attendent leur proie,

Menacent de déchaîner leurs torrents,

Vous autres, en revanche, mes plaisirs interdits,

Orgueil d’airain, ou blasphème qui ne renverse rien,

Vous offrez dans vos mains le mystère.

Un goût qui n’est souillé par nulle amertume,

Un ciel, un ciel chargé d’éclairs dévastateurs.

A bas. statues anonymes,

Ombre de l’ombre, misère, préceptes de brume

Une étincelle de ces plaisirs

Brille en cette heure vengeresse.

Son éclat peut détruire votre monde.

——

extrait de   » Plaisirs interdits »


Daydreamdaisies ( ML ) – Love for life


peinture: Pierre Tal Coat

peinture:           Pierre   Tal Coat

Un texte  dans la langue originale,  de M L  ( du blog  de Daydreamdaisies),

suivi de ma traduction…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

I cradle the silence

I bow my head as life’s candle is lit

I can see the flame trembling

In the meandering trail of birds

Rejoicing in the cry of a newborn

My gaze, it answers to the infinity

My fingers run smooth

In morning’s blinding curtain

With gratitude

With freedom of breath

In laughter and in vehemence

They run and my hands

They lift me up

When I throw myself in between

The blades of thunder and light

I am the spark

Flaring, blazing

I am the warmth born

Where those two blades meet

I am life

Where swords of contrasts

Sometimes dash to fall

In love

Daydreamdaisies (  M L )

Je supporte le silence

Je m’incline quand la bougie de vie est allumée

Je peux voir la flamme tremblante

Dans le sentier sinueux des oiseaux

Me réjouissant dans le cri d’un nouveau-né

Mon regard, répond à l’infini

Mes doigts se passent en douceur

Dans le rideau aveuglant du matin

avec gratitude

Avec la liberté du souffle

Dans le rire et dans la véhémence.

Ils courent et mes mains

me relèvent

Quand je me jette entre

Les pales du tonnerre et de la lumière

Je suis l’étincelle

La torche, flamboyante

Je suis la chaleur née

Lorsque ces deux lames se réunissent

Je suis la vie

Où des épées de contrastes

Parfois se précipitent , à tomber amoureuse.

  1. RC


Francis Combes – lettre à de jeunes poètes


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Lettre à de jeunes poètes

1 – Adolescents, nombreux sont ceux qui éprouvent le besoin d’écrire des poèmes. Par la suite, la vie se charge de vous émonder, de vous faire renoncer à cette activité ni raisonnable ni rentable. Le poète est celui qui n’a pas renoncé à ses erreurs de jeunesse. Mais pour cela, il faut lire, travailler, se corriger sans cesse. Car la poésie est aussi un art. Etudiez les poètes qui vous ont précédés. Une fois que vous avez trouvé la poésie, continuez à la chercher. Apprenez les règles. Ne les respectez pas.

2 – Le plus important est de se former une conscience et une sensibilité d’être humain vivant pleinement son temps. Il ne s’agit pas d’être dans l’air du temps ; il s’agit d’être à la pointe de son temps. Emporter dans ses bagages ce qu’il faudrait garder du passé pour voyager dans le futur. Car la poésie n’est pas qu’un art. Ou c’est un art d’habiter le monde. La poésie n’est pas faite que de mots. Elle est une forme de conscience hypersensible. (Ou de sensibilité hyper‑consciente).

3 – Le rôle des poètes a toujours été de connaître le nom des plantes, des pierres, des oiseaux.

Enumérer le monde pour l’apprivoiser. La ville moderne et nos inventions font aussi partie du monde. Il nous faut les acclimater. Imaginer le monde. Manœuvrer dans la fiction à haut régime. Le domaine du poème, c’est le réel et c’est aussi l’impossible, le merveilleux. Il n’y a pas de poésie sans utopie. Le vrai domaine du poème, c’est le rêve éveillé. Entraînez-vous à marcher avec les pieds sur la Terre et ne dédaignez pas, de temps en temps, d’effectuer des sauts périlleux dans l’espace.

4 – Quand on est jeune et qu’on a la vie devant soi, on aime souvent les poèmes sombres et désespérés, le spleen, le noir et le gothique… Plus tard, on apprend à apprécier chaque instant de la vie. Il y a des poètes tristes et des poètes gais, des nostalgiques et des poètes qui espèrent. Parfois, ce sont les mêmes. Tous ont droit de cité dans la cité si, à l’égal du boulanger, ils font un pain bon, odorant, croquant, tendre et réjouissant ; s’ils apportent un peu de vérité, de force, de joie.

5 – Comme la vie est courte, il faut essayer de la vivre pleinement. Ne pas pactiser avec la mort. Dans une société où la plupart des gens perdent leur vie à essayer de la gagner, le poète s’arrête pour regarder, comprendre, sentir. Intéressez-vous aux autres, prenez le temps de les aimer. Le continent le plus étrange et le plus neuf à explorer pour le poème, c’est notre vie commune. Je est aussi tous les autres. Nous ne sommes pas si différents que ça les uns des autres. C’est ce qui fonde la possibilité du poème. Et du partage. Le poème élargit l’enveloppe de l’individu à l’humanité.

6 – Le poème est l’étincelle qui peut jaillir du frottement de deux regards. Sentir que nous existons vraiment parce que nous avons besoin des autres et que nous comptons pour eux. Essayer chaque jour de faire quelque chose qui soit utile et beau. Etre heureux est un travail. Le vrai bonheur est productif. Communicatif. Le poème est un cadeau que l’on se fait et que l’on fait aux autres.

7 – Les poètes ne sont pas les inventeurs de la langue. La langue vient du peuple. C’est en lui qu’elle vit et bouge. Même s’il est souvent dépossédé de ses propres mots… Le poète est l’Indien qui applique son oreille sur la poitrine du peuple pour entendre venir de loin le galop assourdi des mots… Et tente de leur restituer le sens de la chevauchée. Faites l’amour avec les mots. Faites qu’ils fassent l’amour entre eux. Parler est utile. Même pour aimer.

8 – Pas de poème sans jeu avec les mots. Mais la poésie n’est pas qu’un jeu. La vraie matière première de la poésie, ce ne sont pas les mots, ce sont les émotions, les sens, les sentiments. Il n’est pas non plus interdit de penser.

9 – Ne vous payez pas de mots. Ne faites pas trop confiance aux mots. Entendez leur musique ; sachez y céder… et ne pas y céder. Evitez les phrases creuses, les images et les idées qui sonnent creux. Restez concrets. Pensez en images. N’ayez pas peur de la folie. Dans la folie, restez lucide. Préférez le mot juste. Ajustez les mots. Il y a une vérité du poème. Cherchez la vérité ; dites-la.

10 – Il y a encore des révolutions à imaginer. Faites à votre idée…
À vous de jouer…

 

Francis Combes, président du jury du prix de poésie des lycéens et des étudiants « Poésie en liberté ».2008
.

 


Beatrice Douvre – Jusqu’à l’immense Où vivre prend mesure


 

 

 

 

Habiter la halte brève
La rive avant la traversée
La distance fascinée qui saigne
Et la pierre verte à l’anse des ponts

Dans la nuit sans fin du splendide amour
Porter sur l’ombre et la détruire
Nos voix de lave soudain belliqueuses
L’amont tremblé de nos tenailles
Il y a loin au ruisseau
Un seuil gelé qui brille
Un nid de pierre sur les tables
Et le pain rouge du marteau
La terre
Après la terre honora nos fureurs
Ô ses éclats de lampes brèves

Midis
Martelés de nos hâtes
Tant d’éphémères mains, tant de vent
Ce soir
Tarde la magique lueur
Et ton nom est incertain
Parmi de pauvres roses
Ton nom défait les fleuves où la lumière nage
J’ai patienté pour accueillir
Longue ta voix le long des longues herbes
Mais tu es seul parmi la pierre des étoiles
Ta voix prolonge la source des vivants
J’attends pour te reprendre de n’être qu’un langage

L’aube étincelle dans l’herbe des vigueurs
Souffle mûr mêlé du sang des hommes
Tu marchais réinventant le pas du sol comme une soif
Dans le vent neuf
Je te regarde tu courais
Geste habité du voeu de naître
Auprès des croix
Qui font parfois les pierres profondes

Le visage traversé
Dans des jardins à jambes de verre, et de roses
Quand recommence la mer tendue
Des lampes, et le froid
Et que l’on tient, dans les mains, le dernier monde
Rêve, et à l’avant du rêve un corps l’éclaire
J’ai peur de ces troupeaux dans le progrès des lampes
Peur de la terre des pas
Près de la porte où penche
La nuit lourde de l’aile
Il y a ce péril
Des lampes dans la maison
Ce désir
Comme un taureau dans l’or
Un feu de bois de rose
Coupé par l’hiver

La voix changée m’emmenait dans ses tours
Je dérivais au son des campagnes
Dont l’été meurt
Marcher maintenait une lampe
Des lacets d’oiseaux noirs de songes
Cherchant farouchement le ciel
D’un bord à l’autre
Comme une voix changée qui chante
Qui refuse
Marcher maintenant m’éclairait

Des mains brunes ce soir ont recueilli
Longuement l’eau patiente du soir
Du vent passait
Dans le vent des doigts
Amers des fileuses
Et au-devant
Les troupeaux sont la pierre même
Etrangement
Debout dans la paille limpide
Venue
Des mains fidèles des fileuses
Aux fronts de vent.

Regarde-moi courir, m’éloigner dans l’apparence
Vers les rires bleus de l’air
Immense
La soif divisée
J’ai l’appétit fermé par le malheur
Comme ces bêtes au front silencieux
Ont mille morts mille hontes légères
Un vent du sol entier
Parcourt mes membres, leur perfection
De sable froid
Soulève encore une piste de pas
Et d’autres pas se perdent sur la mer
D’autres mains, doucement infinies
J’ai l’âge travesti des forêts, mais je danse.

La part du jour froissée d’oiseaux
Jusqu’aux fatigues
Nos pas
Relancés en lueurs
Déjà
L’air élargi
Là sous le volet lourd
Ô d’heures encore chaudes
Jusqu’à l’ouvert où vaincre
L’inanité
De nos demeures

Femmes pleines de nuit, aux voiles vierges et noirs, vous saignez dans les ports et vos barques sont sèches.
Le silex de vos mains taille des regards de diamant aux enfants qui vous pendent.
Il vous faudra perdre le vent de vos cheveux et revenir aux Villes. Mendiantes au ventre
lourd, vous dressez des drapeaux avec vos âcres jupes odorantes.
L’acier de vos paupières ressemble aux grands radeaux qu’on voit sur les tableaux de mer.
Rires, et l’évidence de vos pas nus sur le marbre des pelouses ; indifférentes aux grandes croix
qui trouent le ciel bas et mauve.
Je bénis vos épaules que creuse un sein maudit, et vos bras matinaux, blancs de draps,
comme un lait de montagne.

BEATRICE DOUVRE


Miguel Veyrat – Somnambule


dessin duo graphique         avec J Hemery  -2001

 

 

 

Une toute  nouvelle  publication de Miguel…

 

dont  j’ai  « osé la traduction »  ( approuvée par l’auteur )…

 

Je me suis déshabillé
pour vous retrouver
en apprenant
la combustion silencieuse

(Peut-être un sanglot caché,
nomade et muet
comme une étincelle
au coin du feu.)

épuisé d’attendre
accroupi et assoiffé
à l’arrivée de l’aube,
le silex chute
sur les entrailles dures
de la Parole.

 

-(—   et dans la langue  d’origine:

 

« Sonnambula »

Me desnudaba
para hallarte
y callaba quemando
lo aprendido.

(Acaso un oculto
sollozo, nómada y mudo
como una chispa
junto al fuego.)

Exhausto aguardaba
agazapado y sediento
el centelleo de la aurora,
pedernales cayendo
sobre las duras entrañas
del Verbo
(MV. In « Conocimiento de la llama »


Edith de Cornulier – Atone


Almasoror ( l’âme  soeur)  si j’ai bien lu... est un site que je qualifierai de « multi-disciplinaire »,  …  il y a une  foule  de liens,  et d’articles ,  et en patience il va me falloir, du temps  pour  en avoir une petite idée…

mais je me suis  dirigé  de suite vers la section « poésie », où des photographies  sont  « accompagnées », ici de textes  de Edith de Cornulier-Lucinère,  – voir  son blog perso –

qu’elle abrège  sous  E CL…

j’ai navigué  sur quelques uns  et tout ce que j’ai lu a capté mon attention,  voici  d’un d’entre eux:

ATONE

 

photo perso -... le personnage dans la bouteille de grappa... Ardèche 2001

 

 

 

Ma voix coule dans le soir
Mais mon cœur demeure aphone
Je respire dans ce bar
Des vapeurs d’alcool atone

Nous traversons les saisons
Main dans la main bien trop sages
Je n’observe à l’horizon
Aucun feu, aucun mirage

La vie et ses expériences,
Je les traverse en apnée
Puisque aucune délivrance
Ne nous est jamais donnée

Mais ce soir, dans la lumière
Du bar où flotte un suspense,
Ce soir je veux le salaire
Des années d’obéissance.

Que les lois et la morale
S’effacent de mon karma ;
De se courber sous leur pâle
Mensonge, mon crâne est las.

Dans ce corps où tout s’éteint
Pour jamais n’être fécond,
Que la passion prenne enfin,
S’il reste des braises au fond.

Que le désir se rallume,
Qu’il fasse briller mes yeux,
Pour qu’ils se désaccoutument
De leur rideau vertueux.

J’en appelle aux dieux païens
Ceux qui boivent et ceux qui chantent,
Qu’ils déchargent mon destin
De la ration, de l’attente.

J’en appelle même au stupre,
Si lui seul peut délivrer
Du convenable sans sucre
Un cadavre articulé.

Et toi, frère et faux-amour,
Co-victime et co-coupable,
Vas-tu taire pour toujours
L’hypocrisie impalpable ?

Nous traversons les saisons
Main dans la main bien trop sages
Et rien dans notre prison
Ne présage un grand orage.

Mais ma voix coule ce soir,
Et mon cœur te téléphone,
Je respire dans le bar
Des instances qui frissonnent.

Et si tu ne réponds pas,
Si rien en toi ne s’éveille,
Parce que mon cœur est las
Des jours aux autres pareils,

Tu prendras tout seul le train,
Et dans la nuit qui appelle,
Coupable de ton chagrin,
Je chercherai l’étincelle.

 

 

 


Walk on the wild side ( RC)


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Marchant sur la suite des pavés,   en jour de glace

Sous le dôme clair, balayé par le vent

Le sac de légumes à la main,         regard devant

Pour ne pas glisser,      – pieds bien en place –

Aux échos des marchands,      parlant de l’hiver

Celui,                        de la semaine commerciale

Hauts-parleurs,  accrochés aux façades glaciales

La voix de Lou Reed,   le long des murs de pierre

Walk on the wild side…  c’est un conseil avisé

Le côté sauvage,        est toujours  ailleurs

Pourtant difficile à dessiner  comme meilleur

L’appel des filles  en couleurs,      bien tamisé

Comme les lumières  –              du dehors de l’ailleurs

Sugar- Candy sur ses grandes jambes ,   la séductrice

M’appelle  de mon ptit nom,                  voix tentatrice

C’est le décor ouaté                   dla boîte du ferrailleur

Se voyant Miss James Dean, pour une journée

Soudain en quête de nourriture  spirituelle

Porte des boîtes de Coca  ( avec une ficelle )

Pour en donner à chacun, … c’est donc  sa tournée…

Candy ,- sucre glace –  débarqua  un jour de son île

Quitta soudainement          les rêves  de Brooklyn

N’essayant plus d’se prendre            pour Marylin

En image un peu passée,              des murs de ville

La banlieue crade ,           les trains en retard

Affiches lacérées         sur les murs de briques

Lambeaux d’une histoire    un peu pathétique

La place  du marché,      déserte et sans pétards…

L’hiver a eu raison , des lumières de Noël

La fête s’est éteinte dans le blizzard

A  aller s’abriter         dans les halls  de gare

Et cacher sous un carton les étincelles

Les  sans-abri                               au visage livide

Ont dans la tête Sugar-Candy,      en bas résille

Et les hauts-parleurs de la place,   qui grésillent

“Walk on the wild side”,         ( mister  Lou Reed )

Comme dit Lou:  » le ptit Joe ne fait pas  d’cadeaux »

Dans la grande salle                  – aux dalles sales

Pas de bal ici, pour la vie,                         glaciale

Remisant en poussière,          les  rêves  d’ados.

Juste  quelques  seringues            qui traînent

A  oublier,               le temps  d’un voyage

Le côté sauvage,      cet autre paysage

Où la musique  de ce temps          t’emmène.

 

——–

RC –  4 février 2012

——–

Ce texte  mêle des impressions personnelles,  avec la traduction de la chanson de Lou Reed, à ma façon…


Au 27 lumineux (RC)


Au matin,  venu d’une nuit à gestes longs

J’ai émergé de tes bras au sourire blond.

Bercé de l’empreinte de ta souche

Venue verser la tendresse de ta louche

Nous avons joint nos doigts d’écriture

Pour faire des duos fabuleux en lecture

De gestes enveloppants,   nuées  d’étincelles

Parsemés d’épices, de crème renversée, et de sel.

 

La nuit aurait  pu t’absorber et diluer

Ton image, la chaleur  de ton corps se muer

En mirage, cendre d’imaginaire agacé

Fugace, illusion sitôt vue, sitôt effacée…

Mais le matin descendit du ciel, comme nacelle

Ton esprit me guide en pensée et au réel,

Tu es une statue sortie des fées électroniques

Le vœu de Pygmalion concrétisé d’authentique.

ris, photo personnelle, printemps 2011

 

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Mais le temps (au delà de la nuit)

Peut-il – dans tout le bruit

Environnant, faire que change

L’empreinte de l’ange ?

 

(complété de 6 décembre 2011)

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