Des mains sur le fauteuil – ( RC )
sculpture: Urs Fischer – 2015
Sur un fauteuil style Louis XVI
sorti de chez l’antiquaire
il y a les mains de ma mère
( qui auraient pu préférer les chaises ) ….
Pour être plus précis dans le décor,
celui-ci n’a rien de spécial,
mais quand même, c’est pas normal…
il y a juste les mains, pas le corps .
Il existe peut-être,
mais dans l’au-delà :
– en tout cas on ne le voit pas – :
ça a l’allure d’un spectre
qui voudrait se faire inviter
pour partager le dessert
avec mon frère
à l’heure du thé :
C’est une sorte d’ambassadrice ,
qui ne s’encombre pas d’apparence
et joue sur la transparence ,
( sauf pour ses mains lisses )
Elles n’ont rien de squelettiques ,
pleines de jeunesse,
elles sont d’une tendresse
bien énigmatique….
Ces mains , d’une autre époque
se posent doucement ,
plutôt affecteusement ,
quand c’est le « five o’clock » ;
– toujours avec exactitude – ,
avant bientôt, de s’évanouir
comme un tendre souvenir
( un rendez-vous quotidien, dont j’ai pris l’habitude ).
–
RC – juill 2017
Carlos Martinez Rivas – Portrait de dame avec jeune dormeur

peinture: Fernando Botero » le déjeûner sur l’herbe »
PORTRAIT DE DAME AVEC JEUNE DONNEUR
La jeunesse n’a pas où appuyer la tête
Sa poitrine est pareille à la mer.
Comme la mer qui ne dort ni de jour ni de nuit.
Elle est en formation
et non pas groupée comme la maturité.
Comme la mer qui dans la nuit
et alors que la terre dort comme une souche
se retourne dans son lit.
Seul.
Retiré dans ma toux.
De mon lit qui grogne j’entends couler l’eau.
Toute l’eau qu’on entend passer la nuit sous les lits.
Sous les ponts.
Les oiseaux du ciel ont leurs nids.
Nids étrangissimes
Les renards et les renardes ont de joyeuses tanières
où faire ce que bon leur semble.
En la laissant pour demain sa vie passe.
Et à la Pinacothèque de Munich,
sous le grand champignon, à l’ombre affable des Vieux Maîtres,
ou dans la marmite du plaisir,
renversant sur le sol son futur
Il dit à sa jeunesse, à son divin trésor il dit :
– J’attends seulement que tu passes pour me servir de toi.
Et apprendre à m’asseoir.
Commencer à prendre figure.
Voilà ce que fit Mister Carlyle, le dyseptique.
Ce que firent Don Pio Baroja et son béret.
Ou Emerson (« … une physionomie bien achevée est la véritable et unique fin de la Culture »).
Et tous les autres Octogénaires, ceux qui escamotèrent leur destin :
le propre, ce qui de l’homme fait une rosse
et finit en lunettes, museau, moustache individuelle et entêtée.
Voilà ceux qui parvinrent à ‘la fin et réglèrent l’affaire et méritèrent
un portrait dans leur vieux fauteuil rose
déjà chauve et beau à leur semblance.
–
extrait de recueil de poésie sud-américaine
–
La soirée western – ( RC )
–
Derrière l’écran, ce sont des âmes agitées
Qui combattent, pour l’honneur, âme habitée
C’est une histoire de voleurs, de western
d’enlèvement, de drapeaux en berne
Une course à travers l’étendue poussiéreuse
De grandes étendues, j’aperçois les Rocheuses
Il y a des squaws, les cailloux qui dévalent
Et qui giclent, sous les sabots du cheval
Le héros toujours solitaire, un peu justicier
Au regard farouche, n’est pas policier
Combat les méchants qui sont tout autour
Et je m’accroche, au fauteuil d’ velours
Y a l’ptit gars du coin, Qui f’rait une bévue
S’il racontait qu’ il a tout vu.
Y a l’ivrogne au bar, oui, c’est çui qui louche
Et l’gardien du square, qu’est sourd comme une souche
Pendant que tout ce monde s’agite
On atteint, au drame, la limite
Pour le dénouement heureux
( il s’en fallait de peu )…
Les bandits s’enfuient, c’est la débandade
On entend encore, toute cette cavalcade
Avec le mot “fin” la musique magique
Qu’accompagne, si bien, le beau générique
Le nom des acteurs, qui s’inscrit en blanc
Monte lentement, du fond de l’écran
Et aux spectateurs, fini, le rêve
La lumière revient, et chacun se lève
Une fois encore, t’en prends plein les yeux
Mais il faut quitter la salle, et ses fauteuils bleus
Gardant bouts d’aventure, qu’on emporte en soi
Souvenirs émus, c’est un peu de joie
Pour dire à d’autres, – hier au cinéma,
J’ai vu le film, … ” Sûr que t’ aimeras “
Inspiré d’une autre lecture, et aussi ( je me régale), de la chanson d’Arthur H ” est-ce que tu aimes ?” ( avec M, justement…)