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variations en bleu et vert ( chez Whistler ) – ( RC )


W A Whistler – variations en bleu et de vert 1868

C’est peut-être une fin d’été. devant la mer
Quatre femmes sont les actrices
d’une peinture de Whistler: presque une esquisse
peinte à grands traits rapides.
Sous un ciel paisible et lisse,
une brise s’élève à peine :
c’est une symphonie de bleus et de verts
devant une eau claire et limpide,
où rien ne bouge…


Le personnage de gauche marche lentement.
On le dirait sorti d’une fresque romaine
ses voiles jouent avec le vent.
A côté de cette femme
se tiennent deux dames
habillées de bleu et vert, également
avec quelques notes de rouge.
L’une d’elles tient un éventail.
Le peintre n’a précisé aucun détail…
Elles entourent le personnage principal
à la position centrale,
le regard perdu dans le lointain
assise, avec un geste de la main.


On ignore ce qui les réunit ici,
s’il y a une maîtresse et des servantes ;
elles se fondent dans le calme et l’harmonie.
On s’attendrait à une fête galante,
sans fioriture inutile
au retour d’Ulysse dans sa patrie,
un vaisseau que l’on devinerait entre deux îles:
—- on ne saura rien de la suite
du tableau, le regard se perd au-delà de ses limites…


Marcel Thiry – Qui était Fête ?


Qui était Fête ? était-ce elle ? dis-tu.
Je sais seulement que fête est passée.
Pourquoi veux-tu douter qu’il y ait eu
Fête, Fête ainsi connue et pensée ?

Je sais des noms de femme ; mais le sien,
Demande au miroir ancien de Venise,
Mis très haut, sans plus de mirante admise,
Le nom de l’âge où il fut vénitien.

Je sais que depuis que ce n’est plus Fête
Se donnent toujours tant de fêtes, tant,
Sans cesse pourtant, le vent, le beau temps,
L’heure ; c’est leur nom, le Vent, le Beau Temps

Le nom de Fête, pourquoi voudrais-tu
Qu’il en ait un autre que Fête ?

Marcel THIRY        « L’Encore »(éd. De Rache, Bruxelles)


Linda Maria Baros – Droit de libre pratique



photo Sebastiao Salgado – Inde

Nous sommes montés dans les camions et avons ri,
nous avons bu et craché.
Nous roulions tous à grande vitesse ; la tête tranchée
de la ville se cognait contre le pare-brise.
Nos amis courraient toujours sur des toits huileux
et le drapeau, le drapeau flottait parmi nous
et nous cognait droit dans le visage,
nous lacérait la joue, nous fendait le front.

Mais nous avons hurlé, nous étions vingt
et sommes devenus cent,
et nous roulions à grande vitesse
par-dessous les tristesses de sel des toits.
Notre passage coupait la ville en deux,
aux fenêtres veillaient des têtes en bois
qui dépeçaient naguère dans le delta
les chevaux à la scie.
Nous avons ri et bu, nous avons craché,
nous nous sommes roulés par terre.
C’était, pour de vrai, un jour de fête !

Les tireurs nous connaissaient par cœur
et caressaient de loin notre tête,
notre front, avec des gestes mécaniques,
translucides et froids.
Et notre tête se cognait, le long de la route,
sans le savoir, contre le pare-brise,
contre l’asphalte.

Mais ils nous faisaient à nouveau monter dans les camions.
Et nous étions vingt à nouveau et nous avancions encore
à grande vitesse, dans la cadence lumineuse
des balles traçantes.
Puisque c’était, à notre insu, un jour de fête !

in  » la nageuse désossée » Le Castor Astral ( voir le pdf dispo dans poezibao )


Les beaux restes – ( RC )


publicité ( sans le texte ) de Christian Dior, modif perso

Après les lendemains de fête,
voilà que s’apprêtent
les mains qui sortent de l’ombre
tenant un petit pot de vernis
en équilibre sur deux phalanges,
car les squelettes ont toujours envie
de vernis à ongles.
parce qu’ils ont cette coutume étrange
de pousser encore,
longtemps après la mort ;
personne n’aurait l’idée
de raboter des serres aiguisées…

Autant se faire une beauté,
( déjà la bague ne jette plus d’éclats ) :
il n’y a plus de soleil en bas,
ou bien c’est un astre noir
enfoui dans la terre,
qu’on ne peut pas voir :

Un léger maquillage
ne peut vous faire ombrage
on ne sait plus très bien si çà sert :
Oublié le rouge à lèvres
des noces funèbres !
nous nous contenterons d’un autre décor

je peindrais bien votre main en or – ,
mais les ongles en noir,

( je suis sûr
que ça entretient l’espoir…
Acceptez cet auguste geste
pour une vie future…
Vous avez de beaux restes,
je vous l’assure ! )…


Nathalie Lauro – Noël noir


 

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image- montage perso

Où étaient les lumières, les étoiles?
Les valses et les satins?
Les guirlandes du sapin?
Je n’ai rien vu
Ni entendu,
Des rires et des joies de la rue,
Du repas familial de fête,
Ainsi que toutes les paillettes.
Paillettes aussi dans mes cheveux,
Mais surtout sur ma robe noire,
C’était pour faire semblant d’ croire,
Pour cacher tout autour de moi,
Ma réalité calcinée.
Où étaient les lumières, les étoiles?
Les valses et les satins?
Les guirlandes du sapin?
Tout y était, rien ne manquait,
Ni ton absence,
Ni ton indifférence…
Le silence absolu,
C’est pour ça que j’ai bu.
Une potiche scintillante,
Sophistiquée comme une reine,
Juste un peu trop inanimée.
Où étaient les lumières, les étoiles?
Les valses et les satins?
Les guirlandes du sapin?


Vitrines de Noël – ( RC )


Résultat de recherche d'images pour "vitrine chocolaterie fete lumières"

>         Quelques jours avant,
un peu de neige souffreteuse,
en petits tas tristes et gris,
sur les trottoirs de la ville    .

On peut ouvrir les portes,
du calendrier de l’avent,
négliger le froid mordant,
pour se promener          pourtant

Mais rester au-dehors,
devant les vitrines,
au décor clinquant,
lumières et paillettes,

Pyramides de cadeaux,
soigneusement enveloppés,
se mirant,
sous les spots électriques,

Angora et soie,
des beaux quartiers,
habits coûteux ,
et mannequins radieux.

C’est une fête avant Noël,
celle du commerce,
où se pavanent
de riches clients .

On peut admirer,
les étals de foie gras ,
pâtisseries ouvragées,
et montagnes chocolatées…

Tu as le droit
de lécher les vitrines,
mais sans avoir rien, à se mettre
sous la dent ,        … que le vent.

RC – dec 2017


Galette des bois – ( RC )


Gravure: Odilon Redon

 

 

C’est sans doute la fête,
car chaque soir
surgit dans le noir
de la lune, la galette

On la distingue à travers les bois
qui s’envole comme un phylactère
au dessus de la terre
toute à sa joie

de monde solitaire
satellite dégarni
nouvelle épiphanie :
Reine des déserts

observatrice nyctalope
de nos mystères,
divine commère
à l’oeil de cyclope .

RC – avr 2017


Marie-Madeleine Machet – la fête du monde


peinture :   P Bruegel le jeune

 

 

Tous les printemps aujourd’hui sont éclos
Mille ans d’espoir entr’ouvrent leurs paupières

Mille ans pour le bonheur de sèves éclatées
à la fontaine où s’épuise l’hiver,

Le jour ondoie et lustre
les vivants nouveau-nés.

La fête est commencée.

Le monde-roi danse avec la lumière
s’enivre de soleil.

Les fleurs animent leurs couleurs
les vents soufflent sur la terre
les nourritures du ciel.

Hâte-toi, c’est ton tour
pour le bonheur qui passe.

La fête est commencée pour toujours
mais toi, c’est ton instant,le seul.

 

Marie-Madeleine MACHET               « Les Fêtes du monde »(éd. Seghers)


Vingt minutes d’arrêt à l’Estaque – ( RC )


 

pastel - Régine Chiesa

pastel – Régine Chiesa

Vingt minutes  d’arrêt  à l’Estaque  .
Des voyageurs, debout dans le couloir,
sont penchés aux  fenêtres,
d’autres  ont sorti de quoi boire .
Il  y a un peu de vent.
Les cigales grésillent.

J’ai sorti le cahier aux lignes fines,
quelques pastels, qui racontent le ciel
d’encre liquide,
l’alignement  des wagons d’un train de marchandises,

les pins qui s’inclinent, comme des flammes, à l’air marin.
Je les  rends  rose,
comme s’ils étaient  en barbe-à-papa .
Il y a quelque part un air de fête .

Je me livre, à ma  « petite sensation »
Des oiseaux  se disputent des miettes.
Les rails sont des traits lumineux
sous la pression du soleil.

Je n’ai pas le temps de trouver le temps long,
ni de pousser plus avant le dessin.
Le paysage  s’ébranle,  la gare est loin déjà ,
Je serai bientôt à Marseille .

RC  –  oct 2015


Fête au goût de sang et de poussière – ( RC )


peinture:        Francis Bacon: triptyque  » miroir de la tauromachie « 


Passés les habits  de lumière,
Les virevoltes et les faux  semblants,
La cape rouge , et sa découpe,
Contre le sol d’ocre.

Les fanfares criardes,
Les éclairs du soleil ardent,
Sur la muleta,
La valse des banderilles…

La fête est finie,
Elle  a le goût du sang,
Et de poussière …

Le taureau gît
Affaissé dans une  flaque rouge,
Les spectateurs ont déserté  l’arène .

RC     – mars 2015


Jean Genêt – le Funambule ( petit extrait )


                         mise en scène de la « Cerisaie » d’ A Tchekov, par Alain Françon

—-

Comme le théâtre, le cirque a lieu le soir, à l’approche de la nuit, mais il peut aussi bien se donner en plein jour. Si nous allons au théâtre c’est pour pénétrer dans le vestibule, dans l’antichambre de cette mort précaire que sera le sommeil.

Car c’est une Fête qui aura lieu à la tombée du jour, la plus grave, la dernière, quelque chose de très proche de nos funérailles.

Quand le rideau se lève, nous entrons dans un lieu où se préparent les simulacres infernaux.

C’est le soir afin qu’elle soit pure (cette fête) qu’elle puisse se dérouler sans risquer l’être interrompue par une pensée, par une exigence pratique qui pourrait la détériorer…


Des particules, s’éparpillent dans la fête – (RC )


 

C’est juste une portée  du hasard,
Quand  se perd  le regard…
Il s’essaie  au noir,

En reliant les  étoiles,
Pour en faire des figures,
Celles que l’on trouve en peinture

Les constellations se bousculent,
Dans une longue suite,
Celle des années-lumière,     en fuite.

Quels miracles lient les morceaux d’azur ?
Depuis longtemps basculés dans le sombre…
Je n’en connais même pas le nombre.

Des mondes entiers, des particules,
S’éparpillent  dans la fête,
Etoiles filantes ,        et comètes.

Il ne reste  de leur  passage,
Qu’une  légère trace.
….          L’instant suivant les efface     .

Peut-être fourbues…
Dans l’espace inter-sidéral ;
Je me sens un peu perdu

A l’intérieur ,  même, de cette carte postale.

RC- sept  2014


Pierre Reverdy – chemin tournant


photographe non identifié - rencontres  d'Arles

photographe non identifié – rencontres d’Arles

Il y a un terrible gris de poussière dans le temps
Un vent du sud avec de fortes ailes
Les échos sourds de l’eau dans le soir chavirant
Et dans la nuit mouillée qui jaillit du tournant
des voix rugueuses qui se plaignent
Un goût de cendre sur la langue
Un bruit d’orgue dans les sentiers
Le navire du coeur qui tangue
Tous les désastres du métier

Quand les feux du désert s’éteignent un à un
Quand les yeux sont mouillés comme des
brins d’herbe
Quand la rosée descend les pieds nus sur les feuilles
Le matin à peine levé
Il y a quelqu’un qui cherche
Une adresse perdue dans le chemin caché
Les astres dérouillés et les fleurs dégringolent
A travers les branches cassées
Et le ruisseau obscur essuie ses lèvres molles à peine décollées
Quand le pas du marcheur sur le cadran qui compte
règle le mouvement et pousse l’horizon
Tous les cris sont passés tous les temps se rencontrent
Et moi je marche au ciel les yeux dans les rayons
Il y a du bruit pour rien et des noms dans ma tête
Des visages vivants
Tout ce qui s’est passé au monde
Et cette fête
Où j’ai perdu mon temps

 

Pierre Reverdy, Sources du vent, Poésie/Gallimard


Départ vers une fête dans un monde de roche et de lumière (RC)


 

Site ruiniforme des causses ( cirque de Mourèze) 34

Quinze ans  que le train se rue …..
et le vent racle
et les perles brillantes des autos se croisent sur les routes.
Il fallait que je m’en défasse,  ——-   il m’en reste quelques autres d’ailleurs.
Pourquoi avoir  gardé  çà tout ce temps.
C’est devenu une fête potentielle,

j’en conserve les confetti et rubans colorés –

peut être aussi quelques cotillons.
Il va falloir tout emporter.
Sur l’île des elfes ?  -sur l’île déserte ?

Mais dans cette île des elfes vers laquelle je me dirige.
Qui aurait pu être une fête dans un monde de roche et de lumière,    -qui le sera peut-être,

Il y aura en moins  le racloir du mistral et la vitesse y sera dominée par les serments géologiques.        Silhouettes sentinelles de vieilles villes ruinées,

 

RC      Juillet – 2003

 


Edith de Cornulier – Les soeurs douloureuses


Chez Almasoror

photo Gary Isaac

photo Gary Isaac

Les sœurs douloureuses

Minuit dans le hangar ! et nos sœurs douloureuses
S’avançaient à genoux, fuyant la paille en feu.
La nuit de la Saint-Jean s’achevait malheureuse.
Qu’avions-nous fait, Seigneur ? de terrible à tes yeux.

Amis, Ô survivants ! Il fallait fuir. La lune,
Masquée de brume grise éclairait nos adieux.
Moi, je me retournai depuis la haute dune,
Pour un dernier regard aux frères malchanceux.

Ils étaient morts déjà. Seules les sœurs en lutte
Rampaient hors de la grange et leurs cris silencieux
Sonnaient comme un remords qui titille et percute
Comme je cheminais à rebours sous les cieux

De fonte. Savaient-elles au milieu de leur mort,
Qu’elles mouraient ? Bien sûr ! Et ces anges précieux
S’étonnaient en douleur de la frontière hardcore
Qui séparait nos vies de leur départ affreux.

Fêtes de la jeunesse, à ceux qui vous survivent,
Vous ressemblez parfois à de douces chansons.
Mais les anges qui sombrent et se noient sur vos rives
Sont le tribut payé par la génération.

Nous étions trente gars, trente filles en fleurs
A la dernière fête estivale de l’an.
Nous étions quinze gars, quinze filles en pleurs
Au village le jour du grand enterrement.

Edith de CL,            juillet-août 2010

 


Le temps a du sursis – ( RC )


photo perso: nénufars  du lac Tendrela - Burkina Faso, région de banfora

photo perso:                nénufars du lac Tengrela –             Burkina Faso, région de Banfora

Le temps a du sursis
C’est lui qui m’a surpris.
Je suis venu te lire
Avant que les pages ne se déchirent.

A me glisser sous l’écharpe
De tes lignes, j’attrape,
Un morceau de coeur en mots
Dont je me fais proche écho.

En redoublant d’efforts
… Autres horizons, autres décors
Pour Bd’ s et phylactères
Partager semblables repères

Aux parfums de fête
Qui t’ont tourné la tête
Que dire de l’intime ?
D’une vie qui s’anime…

J’entrecroise mes lignes
Aux tiennes,   nouvelles rimes.
Réconciliées aux lendemains
J’entrecroise les doigts des mains.

Et partage le reflet
mouvant des fées
Dans un lac au repos
Ondulant, sans crapauds

Au silence limpide
D’étendue liquide
Parfums, phrases d’amour
De tous tes mots autour.

RC  –   janvier 2012,     modifié  15 janvier 2013