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Articles tagués “forêt

Sándor Petőfi – Nuages (extraits)


Edouard Vuillard – Nuage blanc sur la forêt –

.

J’aimerais laisser là…

J’aimerais laisser là ce monde lumineux,
Sur lequel j’aperçois tant de points ténébreux.
Je voudrais pénétrer dans la forêt sans borne,
Où jamais je ne trouverais personne, personne !
Là-bas, j’écouterais le murmure des feuillages,
Là-bas, j’écouterais le bruissement des flots
Et le chant des oiseaux,
En contemplant l’armée nomade des nuages,
En contemplant le soleil qui se lève et qui tombe…
Jusqu’à ce que moi-même enfin aussi succombe.

.

.

La vie ne me touche pas…

La vie ne me touche pas davantage
Qu’une casserole brisée,
Jetée loin des cuisines, dont un mendiant sans âge
Pourlèche les restes desséchés.

.

.

Derrière moi, la belle forêt bleue du passé…

Derrière moi, la belle forêt bleue du passé,
Devant moi, les beaux semis verts de l’avenir ;
Toujours loin, sans me distancer,
Toujours près, sans que je puisse y parvenir.
Ainsi, sur la grand-route, je vais errant,
Dans ce désert luxuriant,
Abattu et toujours errant
Au sein de l’éternel présent.

.

.

Sándor Petőfi ( 1823-1849) , héros de la Révolution de 1848 , mort en combattant ,

est l’un des plus grands poètes de la littérature hongroise.

Nuages et autres poèmes

traduit par Guillaume Métayer

Editions Sillage


Corps de Ménéham – ( RC )


photo RC Ménéham juillet 22

Corps de granit en bord de mer,
au hasard , tu verras des maisons minuscules
par rapport à ces géants de pierre.
Comme elles le peuvent, elles se dissimulent
tout en espérant
se mettre à l’abri du vent
et des embruns, derrière les roches.

Pas question pour un Petit Poucet
de s’égarer dans la forêt.
Même si l’océan est proche,
( la futaie est lointaine:
les rochers se referment
sur la terre ferme ):

Possèdes tu le sésame
qui permet d’ouvrir les demeures secrètes
du village de Ménéham ?
si tu veux je te le prête,
mais ne penses pas y trouver
un trésor caché
par les flibustiers :

on ne compte plus les heures
avec le temps qui passe
sur les légendes
parmi les herbes de la lande.
Seuls ces grands corps demeurent:
corps de granite
qui restent sur place
aux grandes formes insolites.
Ils ne confieront rien de leur âge
à ceux qui viennent visiter le village.


Troncs d’arbres fossiles – ( RC )


Forêt pétrifiée de Varna

Vieilles âmes habillées de bois,
parcourir cette forêt morte,
cette terre inondée,
branches tombées, entremêlées
corps agonisants dans la litière
épaisse des mousses,
linceul de feuilles pourrissantes…
troués par le temps
debout encore , cependant.

Les oiseaux ont déserté les cieux
pour des pays plus accueillants.
Restent les rudiments de ces arbres,
fantômes, fuseaux d’écailles
témoins immobiles d’antan,
d’où a reflué la sève,
aubier poisseux de sédiments,

petit à petit asphyxiés,
imperceptiblement
transmutés en pierre,
désastre de colonnes éparses,
marbre gris évoquant
celles de temples écroulés,
aux rites enfouis profondément
dans une gangue épaisse
gardienne de leur mémoire pétrifiée .

RC

on renverra aussi vers un article évoquant la découverte, en Essonne, de forêts calcifiées)


Hannah Arendt – Heureux celui qui n’a pas de patrie


montage R C

La tristesse est comme une lumière dans le coeur allumée,
L’obscurité est comme une lueur qui sonde notre nuit.
Nous n’avons qu’à allumer la petite lumière du deuil
Pour, traversant la longue et vaste nuit, comme des ombres nous retrouver chez nous.
La forêt est éclairée, la ville, la route et l’arbre.

Heureux celui qui n’a pas de patrie ; il la voit encore dans ses rêves.

Die Traurigkeit ist wie ein Licht im Herzen angezündet,
Die Dunkelheit ist wie ein Schein, der unsere Nacht ergründet.
Wir brauchen nur das kleine Licht der Trauer zu entzünden,
Um durch die lange weite Nacht wie Schatten heimzufinden.
Beleuchtet ist der Wald, die Stadt, die Strasse und der Baum.

Wohl dem, der keine Heimat hat; er sieht sie noch im Traum.


Sylvie-E. Saliceti – Je sais que le soleil tourne autour de la forêt


Montage RC

Je sais que le soleil tourne autour de la forêt
que la parole est nue
Je sais que la mort
brûle
Ni croix ni étoile sur le front des abeilles
Je sais les pieds déchaussés rythmant le sol
tendu en peau de scalp
et le totem des loups
et le feu des ancêtres dans le camp
immobile
Je sens la force
primitive des parfums boisés
Je sais qu’avant le rituel quand
le souffle s’éteint
les fumées se relèvent
pour se laver les mains
Qu’il faut un pas de danse en cercle
autour de l’arbre
Je connais les us de la lumière
Je sais que Dieu n’existe pas
La cérémonie
des vivants sous la terre Le bras
enterré de l’hommage
passe à travers la croûte de
boue pour attraper quoi ?
Des cerises juteuses
comme des nuages au-dessus
du linceul de ciel
Je sais la coutume
des morts Je sais que
Dieu existe
Sous les paupières
Dans le poing du charnier
les pierres de Lissinitchi sacrent
la lune sauvage
à la frontière de la chair
Laissez les corps du chagrin
et de la grandeur
là où les cailloux
tendent leurs lèvres
sous l’eau de pluie Le rythme
des gouttes vient
peu à peu J’attends
Que le vent couronne
le brasier au-dessous des branchages
Là où tournesols dans
leurs fleurs Là
où légendes et marchands
de Lublin
là où vieille langue dans
son chemin de ronde

Dieu a dû choisir entre
la bonté et la puissance
Je crois
que le soleil tourne autour
de la forêt
Là-bas le soleil roule sur
un chariot sans bouquet
où s’entassent les peaux
en parchemins
Les roues de la carriole tracent leurs
encres sur la neige
Deux lignes aussi droites que
les flèches du chamane
Je sais le rituel de la parole
le rituel de l’étoile
le rituel de l’écorce
trois tours de ciel

à Lissinitchi

extrait de « je compte l’écorce de mes mots  » Rougerie 2013


Giuseppe Penone – Verde del bosco –


Giuseppe Penone – vert du bois – 1983

Capturer Le vert de la forêt.

 

Parcourir d’un geste le vert de la forêt.

 

Frotter le vert du bois. 

 

Superposer le vert de la forêt à la forêt.

 

Imaginer l’épaisseur du vert de la forêt.

 

Travailler avec la splendeur, la consistance du vert de la forêt.

 

Consumer le vert de la forêt contre la forêt.

 

Refaire la forêt avec les verts de la forêt.

Giuseppe Penone, 1986 (Writings 1968-2008)

                                                                           ***

voir sur l’exposition  Sève et pensée – BnF Oct 2021/Janv 2022 :

  https://blog.kermorvan.fr/2021/11/04/__trashed/

Sève et pensée – Exposition BnF Oct 2021/Janv 2022
Frottage – détail








































L’oeuvre Sève et pensée ,déployée au centre de l’Exposition ( BnF  Oct 2021/Janv 2022) , comprend un texte continu, sans ponctuation, que Giuseppe Penone a écrit en 2018 (suite de réflexions sur son art, la sculpture, la peinture, le dessin ... le cycle de la vie et de la mort). 


et

rencontre avec l’artiste

 

 

 


Norge – En forêt


Image
peinture Erich Heckel-  chemin forestier 1914. Hannover. Sprengel Museum

La fille au garçon
Parlait de façon
Si douce.

On dirait sous bois
Un petit patois
De source.

La main jeune d’elle
En celle de lui
Gîtant

Si frêle en son nid,
C’est une hirondelle-
Enfant.

Le meilleur de Dieu,
Des temps et des lieux,
C’est eux.

Ineffable, étrange
Façon loin des cieux
D’être anges.

Ne bougez plus, même
Pour baiser leur front,
Comètes.

Ça vaut bien la peine
Que les choses rondes
S’arrêtent !

J’exagère ? Ô doux,
Ce lit de fougères,
C’est tout !

Cet heureux cénacle
Est le seul miracle
Au monde.

L’amie et l’amant,
Tout le firmament
Autour !

Grondez-le, tambours :
On ne vit que pour
L’amour !


En passant

Le temple du jardin des rois – ( RC )


montage RC

Des torches de lumière
papillonnent , légères,
poussées par les tilleuls.

Les bancs nous attendent ,
dans un havre préservé du soleil,
à l’orée de la forêt de pierre.

Vois-tu ces colonnes ?
elles ne portent qu’elles-mêmes,
ou une part d’histoire qui ne reste jamais sur place.

Des roses vivaces
cachent leurs épines, derrière leurs feuillages,
et se tournent vers le bassin, immobiles.

Courent derrière les grilles
proches du jardin du palais Royal,
pleins d’insouciance, des enfants .

Ils franchissent d’un bond
les troncs morts des colonnes,
coupées à ras.

L’ombre grignote petit à petit
l’ordonnance des bâtiments sévères :
elle s’agrandit sur la place;

On imagine qu’un temple grec attendait
émergeant à peine du sol,
bientôt envahis de sable, ce sont ses vestiges

où planent les oiseaux de proie

au-dessus de ce que fut jadis
le jardin des rois.


Ludovic Janvier – voyez le matin


photo perso – Finistère 2021


Voyez le matin comme il me prépare
et l’herbe du pré si elle m’attend
voyez l’eau du lac comme elle me pense
et le bleu du ciel s’il donne à vouloir

voyez le chemin comme il part de moi
si l’eau du ruisseau promène ma soif
voyez comme l’ombre a choisi mes mots
et si le caillou me ramène au temps

voyez l’horizon comme il me rattache
si les vols d’oiseau m’apprennent à partir
voyez la forêt comme elle m’écoute
et si le silence est fait de ma voix


Jacques Dupin – une forêt nous précède


tree-nature-forest-snow-winter-light-0-pxhere.com.jpg

source photo: pxhere

 

 

Une forêt nous précède
et nous tient lieu de corps
et modifie les figures et dresse
la grille
d’un supplice spacieux
où l’on se regarde mourir
avec des forces inépuisables
mourir revenir
à la pensée de son reflux compact
comme s’écrit l’effraction, le soleil
toujours au coeur et à l’orée
de grands arbres transparents


Comme dans tes vers – ( RC )


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Comme une grande forêt,
les arbres se cachent les uns les autres.
Je n’en vois que quelques uns,
d’autres se développent
et ont des formes étranges,
des couleurs insolites, ,
et je me perds
dans ses obscurs sentiers.

Comme dans tes vers,
une forêt de mots
où je me fraie
dans les petits espaces
que tu laisses découverts,
et je savoure un univers
en m’y glissant doucement,
et peut-être en m’y perdant.


RC- avr 2019


Julian Tuwim – Simplement


 

Ad Reinhardt - 40 Number 6 1946

Ad Reinhardt – Number 6 

 

 

 

Tout était si simple : cet instant, la forêt,

Ce matin-là, il y a déjà douze ans.

Par-dessus les buissons le monde s’ouvrait

A celui que j’étais : jeune, gai, chantant.

 

Ce qu’il faisait frais ! Après le déjeuner,

Je partis dans la forêt tremblante de pleurs

Je m’assis avec les maths sous les genêts,

Car il y avait un examen dans deux jours.

 

Comme il faisait triste et gai sous ce ciel !

Un oiseau piaillait avec paresse ;

Je pensai : oiseau… forêt… école… elle…

Sans joie et sans tristesse.

 

Je me pris à rêver — juste un instant,

Comme ça, simplement, à tout, à tout…

Et voici que passent les choses et les ans

Et je ne suis toujours pas de retour.

 

 

 

Traduit du Polonais par  Jacques Burko
Paroles en sang
Pour tous les hommes de la terre
Orphée La Différence

Claude Pélieu – Printemps rouge et noir


 

mage

  Mark Rothko

 

 

J’aime le silence de la forêt

et les paysages inachevés

(Il paraît que nous sommes assurés

de notre défaite et de notre désintégration)

nos peurs barbouillées du sang de la nuit

ruptures  brisures  transmissions

sur le mur d’écrans  les fournaises du monde

tout devient visible  et les fleurs du silence

incendient nos yeux de rumeurs

merles  rouge-gorge  mésanges  sont revenus

l’herbe du printemps imite le vol des mouettes

flammes bleues à travers les branches des érables

c’est la fin de l’hiver et par temps de pluie

les couleurs pleurent sans mémoire

 

 

 

Indigo Express

Paris – le livre à venir- 1986


Robert Piccamiglio – C’est vraiment une grande forêt


Learning to fly at home.jpg

Yves LeCoq

 

C’est vraiment
une grande forêt       pour une fois
avec dedans des ours
et des hélicoptères miniatures

Je me couche sur le dos
au milieu des sapins
ils sont hauts
je regarde les fourmis courir
comme des folles
du lever du soleil
au coucher du même soleil

C’est vraiment
une grande forêt
une autoroute la traverse
           elle part de l’Est
se faufile vers l’Ouest
les cons en voitures à pieds
la traversent aussi
s’arrêtent pour y manger
et pour y faire pisser
leurs gosses

Je me couche sur le ventre
cette fois
les hélicoptères miniatures
sont au-dessus de ma tête
silencieux et beaux
transparents et gracieux
comme des ombrelles de femme

Alors à ce moment là
de l’histoire
          les ours bruns rappliquent
pas la peine d’ouvrir tout grands
vos yeux
                 d’être étonnés
–  je vous ai déjà dit plus haut
qu’il y avait des ours
dans cette forêt

Ils viennent danser avec moi
et moi avec eux forcément
les hélicoptères miniatures
jouent serrés
           un vieux truc de John Coltrane
on va essayer pour une fois
de ne pas trop se marcher
sur les pieds
les ours bruns et moi.

 

(poème affiche    Annecy )


Une route perdue – ( RC )


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Au bord du son déjà lointain
De la cloche fêlée
J’ai cheminé sous les brumes
Au bord des étangs remplis de nuages,
Essuyant leur camouflage.

Ce qui avait été une route
Traçait sa voie au milieu des sables
Fougères et terrains instables,
Se morphondait en plaies,
Les dents de cailloux sous la surface.

Cette voie je l’ai suivie
Aussi loin que le regard porte.
Elle se déroule toute droite,
Et absente des cartes…
Censée mener quelque part,
Maintenant plongée dans la forêt :

Une échancrure fine et rectiligne,
Qui pourtant s’essouffle,
Lorsque les îlots d’asphalte
Burinés de sable noir, se font rares,
Mangés par les flaques,
Aux bouches opaques.

Elle se rétrécit encore,
Serpente et se tord,
Et puis se perd,
Bue par la densité du vert,
Comme un vieux langage,
Dont on aurait perdu l’usage.

Transformée en chemin,
Celui-ci s’éteint
Au milieu des pins,
Cédant la place à une impasse,
Un rideau clos,
Un fouillis de végétaux
a reconquis la place,
fermant peu à peu l’espace.

Habitée par les ombres,
Des arbres sans nombre ;
une cabane abandonnée,
Où le chemin m’a mené :

cette petite cabane,
dont les couleurs se fanent
perdant peu à peu ses planches,
Masquée par les branches ,
c’est vers le sol qu’elle s’incline…
le temps lui fait courber l’échine .

.

juillet 2014 – fev 2018


L’aube est pour demain – ( RC )


Paul Nash, We Are Making a New World, 1918

peinture: Paul Nash   –   We Are Making a New World,       1918

 

Dans un paysage lunaire,
il se trouve encore,
dans le jour qui s’éteint,
des troncs solitaires :

c’est ce qu’il reste d’arbres,
dont le tronc a été brisé,
les branches calcinées,
noires sur un fond gris,
au milieu
du désastre de la terre .

Ces troncs sont des témoins,
brisés mais restant debout,
à la façon de temples dévastés ,
aux colonnes solitaires ,
ne portant rien qu’elles-mêmes ,
absurdement dressées vers le ciel.

C’est une forêt après la tempête,
empêtrée dans l’hiver.
Mais celui-ci répond
au cycle des saisons,

et on peut distinguer,
si on s’en donne la peine ,
quelques silhouettes d’animaux ,
qui dénichent déjà
des jeunes pousses
qui prendront bientôt leur essor :

l’aube est pour demain .


RC – dec 2017


Greffées contre le mur de la nuit – ( RC )



Tu pénètres  dans une  forêt  particulière,
où les arbres  sont des mains
fichées  dans le sol,
remuant dans le crépuscule  du quotidien.

Et le fil tendu des lignes blanches,
des tracés  des avions,
que les doigts ne peuvent pas  attraper .

Ils saignent  d’une  sève incolore,
ne pouvant se refermer que sur l’air,
dont  l’atmosphère trompe sur son épaisseur,
habitée  des ombres  du soir.

Il reste le vol noir des oiseaux
qui ne renonce pas, à leur échappée,
et se joue du mouvement maladroit des mains .

Elles  se referment  de lassitude,
comme  ces fleurs lorsque la lumière  s’éteint ;
Plantes  étranges rétrécies d’un coup par la terre ,
Le corps dissimulé.

Peut-être incarné dans  un sol,
parcouru de longs filaments sanguins,
racines bien fragiles, prolongements d’un coeur lointain .

Il faut s’attendre  à ne trouver demain,
que des manches , au tissu raidi par le froid,
et des gants vidés de substance,
mous et inertes ,

Comme si la greffe
n’avait pas  réussi
à franchir le mur de la nuit.

RC  – juill  2015


Tomas Tranströmer – Novembre aux reflets de nobles fourrures


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C’est parce que le ciel est gris
que la terre s’est mise à briller :
les prairies et leur verdure timide,
le sol labouré et noir comme du sang caillé.

Il y a là les murs rouges d’une grange.
Et des terres submergées
comme les rizières lustrées d’une certaine Asie —
où les mouettes s’arrêtent et se souviennent.

Des creux de brume au milieu de la forêt
qui doucement s’entrechoquent.
L’inspiration qui vit cachée
et s’enfuit dans les bois comme Nils Dacke.

 

 

 

Tomas Tranströmer, Baltiques. Œuvres complètes 1954-2004. Poésie/Gallimard


Autochtone – ( RC )


rechab 2e.jpgImage :: création perso   2005

 


On peut s’égarer dans la forêt,
Si tu ne connais pas bien le chemin,
et tourner jusqu’au lendemain,
– On n’en connait pas bien les secrets  .

Tu peux te guider aux petits bruits
Les déplacements subtils
des yeux de la nuit
Le glissement des reptiles

qui te surveillent,
l’ombre taciturne,
éloignée du soleil,
les oiseaux nocturnes

cachés dans les frondaisons
mènent leur vie tranquille
comme sur une île
séparée de l’horizon.

Imagine-toi en Afrique
où les singes se répondent,
alors que tu vagabondes
dans un lieu typique

qui t’éloigne quelque peu
des sentiers balisés :
pas de Champs Elysées,
mais un autre milieu :

une jungle épaisse
qui s’auto-multiplie
et où jamais elle ne te laisse
faire un safari .

Tu vas tenter de te guider
avec ces bruits furtifs :
Voila ce que c’est de se balader
dans ce parcours évolutif.

Tu vas contourner de larges flaques d’eau,
des rochers de latérite
– des obstacles dans ta visite –
et toi, toujours sac à dos

Quand tout à coup, un bruit t’immobilise
et qui va grandissant :
C’est la démarche imprécise
d’un ce ces habitants :

On les nomme autochtones,
comparés à toi,          l’étranger :
ce ne sont pas des hommes
qui portent le danger ,

mais de ces animaux
qui parcourent avec aisance
de grandes distances
par monts et par vaux :

En voila un            à présent
qui écrase de grands végétaux
comme de vulgaires poireaux
en s’avançant nonchalament.

C’est un peu bizarre
cette rencontre inopinée ,
mais choisissant de se baigner
dans la première mare :

C’est une sorte de colosse gris
qui paraît               immense
et tranquillement s’avance
sans forfanterie

Tu peux voir de trois-quart
l’animal        et son curieux épiderme
maintenant au milieu des nénufars :
c’est un pachyderme

Un de ces géants
pas très discrets
mais qui connait bien la forêt :
tu pourras suivre en son temps

les traces qu’a laissées
négligeamment
le grand éléphant
dans son pas cadencé

pour retrouver en effet
avec les arbres aplatis,
rapidement la sortie
à la façon du petit Poucet

A la place des cailloux,
tu peux remercier ton baigneur
qui fut aussi ton sauveur
et tu rapportes une photo de lui, ( floue ).

RC – oct 2016


Gisela Hemau – Représentation


image: Terry LongAfficher l'image d'origine

 
REPRESENTATION

L’acrobate monte dans un coffret
Tout d’abord il faut être si petit
Qu’on y trouve de la place dit-elle et nous offre sa fourrure
Puis entre les bestioles du corps de la mort et des adieux
elle montre l’ascension de son propre bras
Nous sommes là pour la vue
Mais nous n’atteignons pas la montagne

Comme nous rétrécissons constamment la fourrure
où nous nous égarons est à la fin
une forêt impénétrable .

 

 

 

-Gisela Hemau traduction Rüdiger Fische

VORSTELLUNG

Die Akrobatin begibt sich
in ein schwarzes Kâstchen
Erst einmal muss man so klein sein
dass man hineinpasst
sagt sie und offeriert uns ihren Pelz
Dann zwischen Leib-
Tod- und Abschiedstierchen
zeigt sie
die Bergbesteigung
des eigenen Arms
Wir sind da weeen der Aussicht
Aber wir erreicnen den Berg nicht
Weil wir immerfort schrumpfen
ist der Pelz in dem wir verirrt sind
bis zum Ende
ein unpassierbarer Wald

 
Gisela Hemau Aufter Rufweite,
Kônigshausen & Neumann, Würzburg 2oo3


Caroline Dufour – L’écho d’un privilège


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 ——– photo perso  – Marseille   2016

 

ma ville est une forêt
ma vie aussi
j’y marche
dans l’une comme dans l’autre
une manière de promenade
dans les rues de mon âme
amoureuse que je suis
de l’errance
et de l’insondable cadence
du temps et des choses
chaque jour sans prière autre
que celle que j’entends
dans le souffle du vent.

 

 

visible  sur  le  blog  de Caroline D


Jean-Joseph Rabearivelo – Ton oeuvre


                                                                peinture : G Braque   : l’atelier
 » Tu n’as fait qu’écouter des chants tu n’as fait toi-même que chanter ; tu n’as pas écouté parler les hommes, et tu n’as pas parlé toi-même. « 
Quels livres as-tu lus, en dehors de ceux qui conservent la voix des femmes et des choses irréelles ?
 
 » Tu as chanté, mais tu n’as pas parlé, tu n’as pas interrogé le sens des choses et tu ne peux pas les connaître  » disent les orateurs et les scribes qui rient de te voir magnifier le miracle quotidien de la mer et de l’azur.
 
Mais tu chantes toujours et t’étonnes en pensant à l’étrave qui cherche une route intracée sur l’eau étale et va vers des golfes inconnus.
 
Tu t’étonnes en suivant des yeux cet oiseau qui ne s’égare pas dans le désert du ciel et retrouve dans le vent les sentiers qui mènent à la forêt natale. Et les livres que tu écris bruiront de choses irréelles — irréelles à force de trop être, comme les songes.
Jean-Joseph RABEARIVELO

Marina Poydenot – chemin de lumières


Chemin de lumières

 

Chaque journée, plus brève une poignée de lumière dans la forêt sombre. « Cette brièveté est infinie » te murmure ta vie passée directement de l’adolescence au vieillissement. As-tu grandi en petitesse ? Bientôt il n’y aura plus qu’un rayon sur ton pas et tu verras que la forêt était un champ d’étoiles. Tu découvriras enfin le visage de celui qui tenait la lampe de poche.


Murièle Modely – Caresse


rue--13-

caresse

la dernière fois que les enfants ont vu grand-père
il ressemblait à un vieil arbre
allongé dans le lit
c’était une vision étrange
et l’on devinait sous le drap les torsions de ses branches
son odeur de terre humide et le bruit des oiseaux
ça faisait de tout petits piou piou quand il ouvrait la bouche
les enfants intrigués par les battements d’ailes
collaient leur corps de lait contre mon corps de mots
nous savions tous les trois qu’il nous faudrait bientôt traverser la forêt
et ils n’avaient pas peur
et ils ne tremblaient pas
ils attendaient seulement
le bon moment
pour poser leurs lèvres sur l’écorce.
Un texte  de M Modély,  visible ,sur  son blog  » l’oeil bande »

Garous Abdolmalekian – Chaque mot


peintures: Adolf  Gottlieb

peintures:    Adolf Gottlieb

 

Chaque mot 
n’est qu’un piéton qui passe

Peu importe lequel
Nous écrivons seulement sur les vitres embuées
Pour faire apparaître
La forêt par-delà la fenêtre.

 



Nos poings sous la table,   (ed  B Doucet )

 

each word
is just a pedestrian passing

No matter which .
We write only on steamy windows
To bring up
The forest beyond the window   .


Candice Nguyen – Forêt, Femme, Folie, un écho


Forêt, Femme, Folie, un écho

Forêt, Femme, Folie, un écho

The Sugar Plum Fairy Pr – Blind

 

J’habite un pays au-dessus des toits à hauteur de cheminées, sous mes yeux le creux qui s’étend. D’où je viens les eaux sont profondes, les cieux peu cléments, les lendemains incertains. Le grain des voix est cassé par la solitude des départs, de ceux qui durent trop longtemps, pour des destinations lointaines et se répètent souvent. D’où je viens les enfants partent en masse vers les tours de verre et reviennent rarement. D’où je viens les attentes sont plus grandes que par-delà les plaines, rêves à l’automne moins pâle, le crépitement du bois dans les foyers nombreux contre l’hiver intransigeant.

J’habite un pays au-dessus des toits à hauteur de cheminées, sous mes yeux leur absence qui s’étend. D’où je viens les forêts sont pour s’y perdre, les jeunes femmes y partent seules, de nuit, et reviennent quelques matins plus tard le regard fuyant, le ventre vide. Les ruisseaux sont gelés, le poisson prisonnier, des tâches sombres, rouges, se remarquent encore entre les feuillages au pied des arbres. D’où je viens les hameaux s’arrêtent en lisière des forêts, denses, sauvages, redoutées, et l’imaginaire magnifient les femmes et les portent hors de la maisonnée, l’extérieur apprivoisé, le tigre dompté. D’où je viens les hommes sont extérieurs à tout, n’ont rien en propre, pas de tâche assignée, fumer jouer chasser : se faire chasser. Ni des forêts ni des lignées, ils rentrent nus.

Et puis il vint des étrangers comme il en vient à chaque époque, en chaque lieu. On commença alors à faire tomber les arbres aux abords des sentiers et peu à peu nos peurs de la forêt sacralisée furent bientôt remplacées par la peur de sa propre disparition. On nous prédit l’expropriation, l’avènement d’un nouveau dieu, on mit à jour la futilité de nos croyances, à sac nos rites et nos terres. D’aussi loin que je me souvienne, peu ont résisté, il n’est de cycles qui se renouvellent sans le refus de s’enfermer.


Anna Niarakis – De nuit, peut-être


Digital-Art-103

De nuit peut être

Lutine de la forêt urbaine
l’errance ressemble
quand elle est voyant par périscope.
À la profondeur, rideaux de gaz d’échappement
assombrissent la perspective.
Comme si le poids est partagé inégalement
sur les escaliers roulants et sur les caves.

Taches dépareillées reconstituent
Hologrammes la, où tu respirais.
Lignes que lévitent non-dessinées
et une pluie faible, incapable
pour lisser les frictions, stagne à côté de
ta pensée…