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Double portrait de Clive Barker – ( RC )


peinture – deux portraits de Clive Barker par Francis Bacon

Si un jour, tu croises dans la rue
l’artiste dont tout le monde parle
tu n’oseras pas lui dire
que ton regard s’est égaré dans les recoins,
pour chercher des symboles
effacés d’un coup de chiffon.

Ses toiles sont les plus chères du monde,
mais tu ne te verrais pas
associé aux portraits de Clive Barker,
que tu ne connais que de nom,
– et puis il lui manque un coin de la tête,
et ses yeux restent flous
derrière d’épaisses lunettes -.

Sans doute vaut-il mieux le connaître,
à travers ses « livres de sang »,
mais il faudrait affronter les démons
ou les serpents d’eau
du maître des illusions.

Au royaume des devins
l’avenir est la loi.
Le visage de l’écrivain
dépose sa trace sur la toile,
comme si c’était le Saint Suaire.

S’apprêterait il à parler,
un coup de brosse
du peintre l’en empêche.

Il restera mutique en prenant petit à petit
les couleurs froides
d’un jambon avarié
auquel on ne demande jamais
de s’exprimer sur son passé.


Comme chez Francis Bacon – ( RC )


Si c’est la chair abandonnée,
de peine, de joies, de rages,
l’éclairage cru, d’otage,
le sang égoutté
lentement dans la nuit,
cette grande baignoire
où la vie s’enfuit
d’un coup de rasoir.

Difficile ainsi de se représenter
en auto-portrait….

  • plutôt se filmer là,
    devant la caméra :
    machine sans émotion
    oeil indifférent
    où s’installe l’espion
    de nos derniers instants

( Pour ceux qui aurait du mal à le croire
en léger différé – vous pourrez revoir
la vidéo prise ce soir là ) :
une fleur pourpre s’étend
lentement sur le drap ,

  • un bras pend
  • et la lumière s’éteint

Bacon aurait pu peindre
cet évènement sur la toile:
une pièce presque vide

  • un fond bleu pâle
  • une sorte de suicide
    sous un éclairage livide
    cru dans son contour électrique
    une ampoule laissée nue
    ( on dira que cela contribue
    au geste artistique ).

Un corps semblant inachevé
aux membres désordonnés
exhibés comme dans une arène
livré au regard obscène
alors que , pour tout décor
l’air brassé par un vieux ventilateur
tourne lentement encore
dans d’épaisses moiteurs

La peinture a de ces teintes sourdes
comme enfermée dans une cage
On n’y rencontre aucun visage
c’est une atmosphère lourde
de senteurs délétères,
dont elle demeure prisonnière.


Même exposée dans le musée,
elle sent le renfermé …

voir au sujet de F Bacon, cette étude….


Fête au goût de sang et de poussière – ( RC )


peinture:        Francis Bacon: triptyque  » miroir de la tauromachie « 


Passés les habits  de lumière,
Les virevoltes et les faux  semblants,
La cape rouge , et sa découpe,
Contre le sol d’ocre.

Les fanfares criardes,
Les éclairs du soleil ardent,
Sur la muleta,
La valse des banderilles…

La fête est finie,
Elle  a le goût du sang,
Et de poussière …

Le taureau gît
Affaissé dans une  flaque rouge,
Les spectateurs ont déserté  l’arène .

RC     – mars 2015


Lucien Suel – Sombre Ducasse 7 ( suivi de ma « réponse » ) – ( RC )


montage  perso  de deux photos perso:  nature morte aux  sables

montage perso       de deux photos perso:                      nature morte aux sables de la Bléone

Sombre Ducasse (version justifiée) 7

si le point de départ vient à changer

aura-t-on le même point au final ceux

qui utilisent des bandes coulissantes

sur trois magnétophones n’anéantiront

plus le complexe comateux bande bande

bande blue stardust jack off moi j’ai

tout fait j’étouffais alors quel sera

le numéro silence silence silence ces

dispositions hétéroclites ces séances

particulières datent sans doute de 23

ans avant la dernière guerre nous les

détruirons les erreurs surtout celles

qui consistent à croire que les moins

grands sont les plus jeunes ou que le

plus grand est le plus vieux détruire

toute la hiérarchie serait saugrenu à

moins de placer les petits les moyens

les grands contre un mur de manière à

déclencher le feu des fusils à canons

sciés le sens de l’écriture a orienté

tout pour tous de manière ignoble les

maladresses ont été nombreuses il y a

eu trop de ça tout au long des années

des siècles à venir ceci n’allait pas

tout seul il faudra placer des garde-

fous plus rigides sur les limites des

manières de vivre aujourd’hui séparer

mettre à l’écart les cas gênants nous

avons trop peu de renseignements tous

nos souvenirs brillants de la seconde

guerre mondiale s’estompent déjà dans

les vents froids et foireux les vieux

partis au diable vos vers sont séchés

soumis à la question trop souvent ils

ne sont plus que d’anciens modèles de

voitures reproduits sur carte postale

 —-

Le texte  de Lucien Suel,  extrait de « silos »,  est visible directement  sur  cette page…, l’auteur, en m’autorisant à republier  son texte, me  renvoit  aussi à sa version 2, ici

 

Je ne suis pas là, je ne pourrai pas t’accompagner

dans la course, et découper le temps avec des

ciseaux,ainsi la musique se déroule, et les chevilles se coulent,

sans hiérarchie, sur la piste, il y a le parquet qui brille, les passages le frottement de la lumière,

et la musique de Coltrane, my favourite things, qui me rappelle, mais j’ai vérifié, c’était autre chose,

le film de Pierre Etaix,Yoyo… j’ai encore dans les yeux la fumée des usines qui rentre dans les cheminées, plutôt que d’en sortir, tu vois, j’ai sans doute égaré bien des souvenirs, en route, en semant trop de cailloux blancs – pour écouter le silence

je me suis un peu perdu, sur des chemins qui s’égarent.

Oui, j’aurais eu besoin de garde-fous, enfin, si on veut, si on parle de fous,

car justement, ce sont des voix d’hiver ( diverses), qui permettent de trouver la sienne,

les chemins de traverse, comment se repérer faire que sa voie soit la sienne et sa voix personnelle…

J’ai traversé des tableaux sépia , croisé Francis Bacon à Paris,

pianoté un peu, et caressé la lumière qui se posait sur mes toiles.

Les vers séchés ( comme les lombrics égarés après une forte pluie), composent mes poèmes,

que je triture volontiers, en sautillant à cloche pied, varier les appuis, les cases de la marelle

pour aboutir à la case « ciel », j’écoute les voix diverses, je m’enrichis de ta voix…

et finalement j’ai laissé tourner les bandes magnétiques, laissé les ciseaux à d’autres,

mon univers est de la couleur et de l’argenté.

Passent  d’anciens modèles  de voiture reproduits sur les magazines….

RC  14 décembre 2012


Jean Daive – ce que voient les yeux tout autour de l’ampoule


 

photo:              portrait de Francis Bacon

 

 

 

 

 

L’ampoule
………..au-dessous du plafond

si je suis l’enfant qui la regarde

plutôt qu’au-dessus de la table

comment
………….ne pas obliger la mémoire

à la remplacer par un horizon
plus inaugural ?

.

L’ampoule allumée
éclaire aussi faiblement qu’un pain
posé dans la pièce.

Le réel des yeux est là
dans une pénombre qui se dissout

pleine de gaz et pleine de perles
éblouies d’éclats très chauds.

les choses apparaissent
négligemment
comme de la respiration assistée.

Une chaise près de la table, une femme
avec un homme
et un homme très seul, une enfant
dans le lit
.

Parce que les lèvres bleuies, glacées sont une contagion

ce que voient les yeux
tout autour de l’ampoule

presque
contre le ciel éclairé
l’air inégalement occupe des volumes de peur
entre les meubles
les ombres et les étoiles

comment soudain
la même ampoule les remplit-elle de camphre

remplit-elle

………….une seringue

de son horizon
plus inaugural ?
.

Une survie est comptée
pulse
le dernier monde terrestre
dans les veines

jusqu’au cœur
.

Jean Daive, « Les Pavés inégaux », Onde Générale, Flammarion, 2011


Jean Baptiste. Tati-Loutard – la révolte gronde –


peinture: Francis Bacon – Portrait of George Dyer Crouching, 1966

 

Jean  Baptiste. Tati-Loutard, que l’on peut  retrouver  dans un post récent  sur  terre de femmes, est un poète congolais, décédé  en 2009, une page de discussion,( de francopolis )  d’où est extrait le présent poème, est visible  ici

LA REVOLTE GRONDE

 

Nous avons rompu avec le soleil :
Au point du jour seuls les oiseaux s’en vont
Vers les collines accueillir ses rayons.
Que se passe-t-il ? Quelles voix étranges
Craquellent le silence aux quatre coins de la ville ?
Quelle race oubliée dans les décombres du siècle
Surgit des masures où la misère traîne
L’herbe comme un chien jusqu’aux pas des portes ?
A-t-on vu jamais (hors saison) le ciel
Se joindre à la terre ?
Voici que les nuages descendent du Mont-Soleil
Pour fleurir une foule qui hisse au bout des lèvres
Des cris aigus comme des couteaux de jet.
La ville regarde à travers un masque blème
La marche des Cavernicoles. La peur gagne :
Même le temps s’effarouche dans le clocher ;
On l’entend s’enfuir, sonnant aux pieds
Ses anneaux de bronze.
La révolte monte la Révolte gronde.

 

 

J.-Baptiste . Tati-Loutard   –  voir  aussi la publication de juin 2012