Sur un chemin banal encombré de flaques déjà tourbillonnent les feuilles veinées d’automne. Sous le miroir des nuées je devine les graviers.
Le dialogue du gel étire ses filaments sous les rafales de vent. Un insecte traverse prudemment quittant les herbes folles pour un abri incertain.
Les oiseaux ont disparu du ciel pour des régions plus clémentes. Il s’est perdu parmi les branches nues ; les arbres sont dans l’attente et ne sont plus que bois.
Soudain, il fait si froid . Viendras-tu me retrouver, si loin de la maison de l’été ? Tout semble s’être immobilisé, le défilé des heures, comme le sourire du bonheur.
Tout autrement est celle du corps de marbre qui reste froid sous la pression des doigts, pourtant je n’aurai de frissons, qu’à l’aube et au matin revenu:
un jeu de nue sans satin blanc , là où la lumière se pose, c’est l’effleurement de ton épaule, qui s’offre une dentelle sur sa peau: c’est comme si la tapisserie avait pris fantaisie de rire sur son dos : simple métamorphose qui s’irise et glisse.
Faut-il profiter d’un interstice où le corps se détend pour qu’une brise tiède chante à sa manière le chœur des roses ?
Différents de ceux-là qui dans le Purgatoire s’étant reconnus s’écartèrent et s’en allèrent tête basse nous nous sommes étreints dans la bruine de l’Etang qui nous inonde jusqu’aux os du charme bruissant
Car nous venons d’une brume de froid sans pareil notre commun lignage de peine et d’ahan ces aïeux de lande et de mer de mouette et de corbeau qui trimèrent toussèrent et nulle grâce n’a ruisselé
par les hasards du mauvais temps par toutes les marées par l’errance des Guerres d’Ecosse à Romagne en poussière lumineuse ils ont déjà tressé notre destin
et de leur lointain ils nous regardent complices curieux si nous saurons nous aimer sur les abîmes salés et de leur dieu d’embruns sur la chevelure décoiffée
Je suis resté immobile avec mon vieux manteau couvert de feuilles mortes au square du jardin de ville : je suis venu chaque jour d’hiver, j’attendais ta chanson: le froid fut sévère, mais n’eut pas raison de ma passion….
Ce ne fut qu’au printemps que le gel libérant les sèves, fit que toi, ma fontaine, retrouvas tes eaux… Ta sculpture au regard fier, tes jupes de pierre retrouvant leur souplesse alors j’ai quitté mon banc et laissé mon manteau, qui, de détresse, partait en lambeaux…
Vide matelas pour ne pas dormir ni rire ni rêver le froid aux entrailles le fer dans la neige brûlant dans la gorge
qu’avez-vous fait qu’avez-vous fait des mains chaudes de tendresse avez-vous perdu le ciel dans la tête par le monde dans la pierre dans le vent l’amitié et le sourire comme les chiens à l’abandon comme des chiens
Notre premier lit sera une nuit de pluie. Ta main et la mienne larmes semblables. Je goûterai ce que font les rivières aux corps de sable. Je profiterai des vertus de l’eau pour envahir ton monde, là où la main ignore, là où le nez, la langue et les cheveux ne savent rien. Je t’engloutirai, du secret de ton sexe à la tempe sourde. Il faudra. Tu ne sauras rien de ce baptême, je serai transparente, liquide averse. Tu ne sentiras qu’un frisson, le froid délicieux qui embrasse l’être et le pousse à chercher des épousailles.
Le visage traversé Dans des jardins à jambes de verre, et de roses Quand recommence la mer tendue Des lampes, et le froid Et que l’on tient, dans les mains, le dernier monde Rêve, et à l’avant du rêve un corps l’éclaire J’ai peur de ces troupeaux dans le progrès des lampes Peur de la terre des pas Près de la porte où penche La nuit lourde de l’aile Il y a ce péril Des lampes dans la maison Ce désir Comme un taureau dans l’or Un feu de bois de rose Coupé par l’hiver
Feu qui ose Achève Ce peu de bois mouillé Par l’orage et délivre Précède-moi, qui ose, précède-moi ,espère Mars et les affections même sans souvenir Vois c’est déjà la splendeur Bleue des trèfles, des pensées Demeure Pour celle enfin dont les seuls auront tremblé les yeux Une dernière fois le dernier passager Ose Flamme soudain la sueur Debout qui saigne Et la grande odeur du froid La haute arche de neige Est-ce enfin le vrai cœur au-delà d’âme et corps L’ébauche d’un soleil beau d’hiver ascendant ?
Il faut en reprendre l’habitude l’hiver a couché sa saison sur le Léman ; les bateaux ne sont plus que des coques givrées. Il fait un froid terrible.
Dans la petite pièce du quai de Miremont, tu guettes le passage des enfants au retour de l’école alors que le courrier est en cheminement.
D’ici ne te parviennent que des images de télévision, des coups de feu d’une ville en émeute. Un désordre sans inventaire possible, un temps de chien.
Ici l’on dit qu’un temps de chien est aussi un sale temps pour les hommes. Ces hommes comme des vagues qui viennent se briser indéfiniment et meurent dans l’écume de l’habitude.
A Genève tu feuillettes ce qu’il reste de moi dans les tiroirs ; ce qu’il reste de regards sur les photos diseuses de bonne aventure. Le vide est là, au bord de tes paupières de tulle blanc.
Déjà j’ai ordonné au téléphoniste de ne plus rien passer. Mourir est un silence à impulsions discrètes, une falaise d’illusions, alors que rien ne prouve l’inexistence d’une suite.
Sur Genève il fait froid, tu me disais encore dormir dans le brouillard retrouver les traces de mes doigts sur ton ventre ; là où toutes choses naissent, là où toutes les douleurs s’enferment.
Un passage d’avions dans le ciel quelques impacts étoilent la façade d’en face et je suis en instance de silence. De l’autre côté les mêmes voiliers inquiéteront le vent, traverseront le soleil et diront que le monde n’est pas universel.
Quand un immeuble s’écroule à Beyrouth, la mer tire la couverture et les enfants continuent à courir, sur les plages minées.
sculpture – bronze nuragique ( Sardaigne ) musée de Sassari
Il s’est approché lentement Avec son grand poignard en peau de nuit Il a pris, il a pris tout son temps Avec son grand poignard en peau d’ennui Il a reniflé dans le vent Avec son grand sourire de trop de nuit Il a souri de toutes ses dents Pour laisser t’approcher lentement Il a pris tout, tout son temps De son flanc a délogé une lame de fer Avec son grand couteau en peau de fer Il s’est mis à tuer le temps Il avait froid dans ses grands vents Il avait de la poule à chair Il était nu, nu comme un ver Avec sa lame en peau de fer Avec son grand couteau de nuit Il ne savait vraiment pas quoi faire Il faisait froid, il est parti.
presque bleu, c’était le vent
presque bleue il y avait l’eau
presque bleu le ciel encore
– celui qui se reflète
avant qu’il ne se brume,
dans l’oeil du cerf abattu .
Comme s’il regardait au-delà :
sans regard pourtant ,
le presque bleu des choses promises .
Le corps est encore fumant,
chaude aussi est la terre,
avant qu’elle ne se brume de neige
presque bleue dans le froid
qui la saisit.
tes veines, vivantes et bleues dansent une sarabande effrénée
sur le dessus de ta main. La terre tremble, dis-tu.
à bousculer les nuages à chercher la chaleur
nous avons oublié l’heure celle de l’au revoir
– non, pas adieu et voilà, c’est ici,
c’est maintenant couvre-toi,
ne prends pas froid tu ne reviendras pas,
c’est là c’est maintenant qu’il faut partir
les nuages se disséminent un froid soleil pâle se lève,
une portière de voiture claque
c’est un adieu, nous le savons tous deux
des pas résonnent sur le pavé rien n’a changé,
rien ne change jamais des portes se ferment,
d’autres s’ouvrent s’en va,
s’en vient l’amour – la ville dort
Il y a une étendue plate, – Elle se perd dans l’infini – . > Elle appelle un désert, un océan, ou un simple terrain inhospitalier.
Et rester immobile tout ce temps, debout, on compte les heures en suspens – ou plutôt on ne les compte plus ;
c’est une attente, le regard dans le vague. Le ciel est trop haut, Il écrase de son poids tout ce qui s’échappe de l’horizontale.
Mais tu espères sans t’en rendre compte, au-delà de la solitude, La rupture des écluses, que les lèvres du temps s’entr’ouvent.
Et la crainte, en même temps, Que les yeux ne sachent pas voir, Ce que dissimule la surface unie – Un guetteur du désert des tartares – « Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? »
Et si le vide était une illusion, et que continue dessous, l’échappée des heures, …Une simple dilution.
La vie est souterraine . Elle fait un grand détour, vers toi pour contourner le froid.