Deux volumes et deux bouteilles ( presque un Morandi )- ( RC )
photographe non identifié
C’est comme un aria,
un brin suspendu ,
avant l’extrémité du parcours de l’archet…. ,
La lumière chatoie,
comme vibre encore la corde :
l’eau reste attentive dans la carafe,
L’épaisseur du verre soupire,
hésite à donner de l’ombre sur le mur,
– ou alors si légère –
une pâte qui entoure le creux,
immobilisée, – fusion de la silice –
participe au léger grain du fond :
ainsi le ferait le bourdon,
soutenant l’envol des voix…
posées comme les deux objets
aux rayures noires, régulières ,
– légèrement ironiques – .
De taille semblable,
ils sont insolemment lisses,
ronds, mais sans rouler,
contrepoint musical
On pourrait imaginer les voir
quitter le sol,
se mettre en mouvement
perturber le liquide ,
sautiller en désordre
dans cet accord trop parfait
auquel seuls croient
les gris cristallins
de la photographie .
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RC avr 2017
Robert Piccamiglio – Midlands – 06 – Plus tard ( 02 )
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L’argile du cœur broyé par l’indifférence. La peur. La haine.
Aux pieds des frénésies du pouvoir toujours en marche.
Ce pouvoir je l’ai senti
sur les scènes du monde entier.
Je n’étais alors ni le troupeau
ni l’infime sillon. ni le berger anonyme.
J’étais comme cette terre riche de feu. Fusion éternelle. Longue course vers l’infini.
J’étais le ciel heurtant les saisons. L’amant.
La maîtresse habillée de gestes vifs. Insoumise.
J’étais ce fils
que je n’ai pas connu.
Ce Cavalier maintenant égaré.
J’étais cette tille que je n’ai pas eu. Cette Reine oubliée. Cette Fée d’éternité.
Le pouvoir je l’ai senti comme la rivière charriant le sang.
Puis le fleuve emportant les cadavres d’où venait le sang.
Je restais immobile.
Triomphant.
A l’image de ces volatiles
qui Jamais ne se posent.
Qu’importe la saison. .
L’odeur de l’herbe ou de la pluie.
Jamais ils ne suspendent leur vol.
Même les blés accueillant. Ou l’arbre tendant ses bras aux douceurs zénithales ne leur font refermer leurs ailes.
–
Midlands est publié aux éditions Jacques Bremond, qui utilisent très souvent du papier recyclé « artisanal »….
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Sensation – d’elle (RC)
En réinterprétant une partie du post 1606 D’Arthémisia: « Ce rose s’appelait Pimprenelle. Elle sourit. Se sourit.
La vitre reflétait parfaitement son image. Elle se fit une bouche fleur. »
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La vitre reflétant parfaitement son visage
Transmit , du quai de la station, son image
Ce reflet, qui saisit , de bonheur,l’amateur ,
La mateur attend. , et tente un signe.
Lorsque le dessin des lèvres paraît, insigne
Sur la vitre embuée, la bouche fleur
Le reste du visage fuyant, très doux
Evoqué, et comme aspiré par le flou
Juste un baiser rosi, frôlement froissé, d’ailes
Couleur carmin, sensation – d’elle (Pimprenelle)
Déposé sur la glace du métropolitain
Qui s’ébranle – en parcours souterrain
Emportant au loin l’image en fusion
Du jour à venir, et ses tentations.
RC
Marina Tsvetaeva – dispersés
J’étais à l’écoute cet été, sur une émission de radio, des créations de Marina Tsvetaeva…
Cette poétesse russe nous transmet par delà les années son vécu et ses expériences tragiques liées à l’exil…
à Boris Pasternak
Dis-tance : des verstes, des milliers
On nous a dis-persés, dé-liés,
Pour qu’on se tienne bien : trans-plantés
Sur la terre à deux extrémités
Dis-tance : des verstes, des espaces... On nous a dessoudés, déplacés, Disjoint les bras - deux crucifixions, Ne sachant que c'était la fusion De talents et de tendons noués... Non désaccordés : déshonorés, Désordonnés... Mur et trou de glaise. Écartés on nous a, tels deux aigles - Conjurés : des verstes, des espaces... Non décomposés : dépaysés. Aux gîtes perdus de la planète Déposés - deux orphelins qu'on jette ! Quel mois de mars, non mais quelle date?! Nous a défaits, tel un jeu de cartes ! 24 mars 1925
Trad. E.Malleret Peinture: Kees van Dongen Maggi 1888