Giorgio Manganelli- Centurie 31
Giorgio Manganelli écrivit Centurie « 100 petits romans fleuves » voila le début du 31 sur haut et fort vous pouvez lire le 39
TRENTE ET UN
Pour dire les choses franchement, cet homme ne fiche absolument rien.
Il paresse. Il reste allongé sur son lit, s’étire, change de position.
Il va d’une pièce à l’autre. Il se fait un café. Non, il ne se fait pas de café. Non, il ne va pas d’une pièce à l’autre. Il pense aux choses merveilleuses qu’il pourrait faire, et il en éprouve un léger malaise qu’il serait toutefois exagéré de qualifier de remords.
Simplement, l’inactivité est un genre d’activité auquel il n’est pas habitué. Si j’étais militaire, médite-t-il, un de ces militaires qui ne se sentent hommes que lorsque tonne le canon et que se présente une raisonnable possibilité d’être tué ou de rester mutilé,
et de toute façon de se voir métamorphosé en monument, je devrais dire que je me comporte non seulement comme si le canon ne tonnait pas, mais quasiment comme si la paix universelle venait d’être déclarée, parallèlement à la destruction des monuments.
Comment se sentirait-il, pareil militaire ?