Paola Pigani – Où s’est – elle en allée la jeune fille Manouche?

Où s’est – elle en allée la jeune fille Manouche?
A-t-elle emporté les bourgeons de rêves qu’ elle avait cachés
entre les planches de son baraquement?
Elle a couru, je sais
dans l’haleine des forêts,
a voulu venger le temps arrêté, bousculer des pierres,
des agneaux dans les prés,
a jeté sa robe usée,
s’est lancée dans la rivière,
s’est roulée dans l’herbe,
plus nue qu’ à peine née .
Revenue au plus haut du jour
@paolapigani
La porte étroite – ( RC )
Tu ne regarderas plus sur mon épaule :
trop de larmes ont dévalé les pentes :
mon existence a suivi une courbe lente,
trop d’eau a coulé sous le saule.
J’ai refermé sur moi la porte étroite :
il n’y a plus de place à la lumière ;
ni aux infimes grains de poussière :
je sens déjà l’usure du temps avec ses grosses pattes.
Ma respiration se voile en suspends,
léger sursis à ma lourde peine,
au souffle ténu d’une légère haleine,
avant que se glace mon sang.
–
RC – août 2020
Justo Jorge Padron – la visite de la mer

Sur l’oxydation verte des rochers
je me réserve, je le sais, une merveille.
l’eau en images va et vient.
Son écume bâtit des temples diaphanes.
Des régions de diamants
éclatent miettes dures contre le basalte noir
laissant la brise constellée
d’amandiers neigeux et tremblants.
Leurs émaux à peine tournoient
dans le miroir prodigue du soleil
et retournent à l’eau comme pluie fourvoyée.
Reviennent les chevaux en incessants suicides.
Formant une unité parfaite. Un voisinage.
Une haleine les guide, cristalline,
qui s’avance vers moi, ailée et majestueuse.
Toutes couleurs se découvrant elle me dit :
“Moi aussi je t’attendais.
Prenons le temps de nous parler,
mais d’abord rêve et vis pour moi cette journée, la tienne,
chez les hommes… ”
Denis Scheubel – le réveil
Sur ma tempe
Une haleine
Brûlante
Electrique
Il n’y a que le
Réveil pour ressembler
Autant à la fin du monde
Birago Diop – Sagesse
peinture: Bela Kadar
Sans souvenirs, sans désirs et sans haine
Je retournerai au pays,
Dans les grandes nuits, dans leur chaude haleine
Enterrer tous mes tourments vieillis.
Sans souvenirs, sans désirs et sans haine.
Je rassemblerai les lambeaux qui restent
De ce que j’appelais jadis mon cœur
Mon cœur qu’a meurtri chacun de vos gestes ;
Et si tout n’est pas mort de sa douleur
J’en rassemblerai les lambeaux qui restent.
Dans le murmure infini de l’aurore
Au gré de ses quatre Vents, alentour
Je jetterai tout ce qui me dévore,
Puis, sans rêves, je dormirai – toujours –
Dans le murmure infini de l’aurore .
Philippe Delaveau – Les monts bleus
peinture : Morgan Ralston
–
Les monts bleus et le ciel songeur.
Toi
Dont les yeux ardents sont
L’abri du ciel et des monts.
Source, frisson, tristesse, joie.
Je baiserai de ma langueur
Ta bouche.
Je vois les mots se former
Dans tes pupilles, sur tes lèvres.
Et je respire ton haleine.
Je me raccroche à la vie,
Je sais l’existence du monde
Lorsque je tiens ta main.
–
in (Le Veilleur amoureux)
Katica Kulavkova – sécrétions
–
Ne restera de nous
qu’un épanchement discret
proscrit
menu comme un haïku comme une pointe
menue parce qu’ éloignée
– comme le soleil
ce dépôt vivant
où avec le temps
nous nous sommes fondus
spasme après spasme, goutte après goutte
comme des donateurs de sang
il restera au fond
ni la sécheresse ni la soif
ne nous aideront
à goûter à la sécrétion,
à recracher, à rebours.
Se déposera aussi
ce qui s’égouttait par erreur
le long de la fissure
où une vie se continue dans l’autre.
Notre voracité et nos appétits seront apprivoisés
Et rééduqués : nous répondrons
à des noms étrangers
Comme à nos propres.
La fidélité est temporelle, ah les meurs !
Le ciel ensuite tel un spéculum gris
sera embué par notre chaude haleine :
Simple preuve qu’il fait froid,
glacial
le fond
Marie Bauthias – L’ombre des leurres (extraits)
–
de quoi vivre
ou s’enfuir
le vain soleil des mains
en haleine du corps
de quoi dire
l’ombre qu’il faut
pour autant que l’on vienne
en prendre le rayon
–
quel ciel achemine
la figure manquante des aurores
lentement lèvres à lèvres
accole l’occident aux épaules
des grands fleuves de notre mémoire
–
Derrière les masques riants d’aujourd’hui ( RC )

peinture: Henri Rousseau ( le douanier): la guerre
Lorsque l’effervescence s’empare des esprits,
Que la lumière bondit d’arbre en arbre,
Si, encore, la vie crie à perdre haleine,
Comment oublier, il y a quelques jours encore,
Les fureurs, et les bruits destructeurs,
Les tronçons d’arbre et les murs,
Marqués par la guerre et les incendies ?
Chacun peut chercher en soi sa voix,
Et aussi essayer de saisir un univers
Qui échappe à sa propre logique,
Mais l’élan qui revient, le retour du printemps,
Canalisé de murs de béton,et de ruisseaux d’acier,
Porte encore en lui, une noirceur d’à-venir
Derrière les masques riants d’aujourd’hui.
–
RC – 12 juin 2013
–
– en relation avec le texte de Claudio Pozzani; » Cherche en toi la voix que tu n’entends pas »
–
L’interrogation du soleil ( RC )

photo rgbstock
En lissant, du dos de la main,
Un sable blond, – l’interrogation du soleil
Qui s’étale, en grains
Par millions, ni semblables, ni pareils
Et si ceux ci, recouvrent
L’haleine de mon corps
Qui fait racine, puis s’ouvre
En profondeur, de toutes ses pores
C’est un flux de la mémoire
En fouillant dans son ombre
A chercher dans le noir
Qu’aucune lumière n’encombre
Quand tu te penches, elle ressurgit soudain
Aux rayons de tes cheveux dénoués
Et qu’ au dessus de moi, planent tes mains
Porteuses du soleil, d’un désir avoué.
C’est ton regard, que le ciel achemine
Qui réchauffe le mien
Je n’en sais pas l’origine
Mais j’en connais les liens.
Vivre est une aventure,
On s’écarte des chemins tracés
Vers des sentiers peu sûrs
Mais où tu me fais me lancer
Et c’est encore un peu ivre
Encore en titubant
Que je vais te suivre
Emporté vers l’avant
Mes lèvres ont le goût des tiennes
J »ai laissé derrière, l’hiver des pensées
Un nouveau jour m’entraîne
………….. Et je n’ai plus de passé.
–
RC -21 octobre 2012
–
photo Jose Chiyah
Sylvie Fabre G – Corps subtil
Qui jugera du chemin ? Ton corps respire, une haleine l’entoure, l’autre est ce passant venu des lointains, retournant aux lointains.
Tu dois consentir, fraction du monde, multiplication des années et des êtres.
Quelle luminosité as-tu un jour connue pour ombrer la rencontre ? Tu te retournes, les traces sont là, derrière, devant, elles te précèdent toujours. Tu sens le sceau de lassitude, tes jambes tremblent quand la peur pose son caillou dans le ventre – étalon or. Sur son autel, une main presse l’attente. La parole reflue quand, jeté en pâture, solitaire, le corps s’étiole, les lèvres se pincent, il n’y a plus de pulpe autour des mots.
Qui jugera du chemin ? Les voies de l’incarnation ont mille possibles, nous empruntons toujours l’unique, impossible.
–
Sylvie Fabre G., corps subtil – Editions L’Escampette, février 2009
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( Un texte que je dédie particulièrement à Arthemisia )
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Le repos des sirènes ( RC )

Art roman: chapiteau aux sirènes – Eglise Ste Eutrope Saintes ( Charentes Maritimes)
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C’est le repos des sirènes sur les rochers
Leur longue quête les mène sur les îles
Et point de traces, au jour, juste des fossiles
Repérés par les bateliers s’en revenant pêcher
Ces femmes-poissons, – c’est une blague
Dit-on, …. ce qu’il faut d’imaginaire
Au fantasme des hommes de la mer
Ayant fait un détour par Copenhague
Ou bien, entourant un bateau en détresse
Se portant au secours des naufragés
Elles se sont, sous eux, allongées
Tout en délicatesse
Et leur ont fait jurer secret,
Sous serment, de ne rien dire,
Une langue étrange qu’on ne peut traduire…
Sur ces sujets il faut rester discret
Ce sont, peut-être des anges de l’eau
– Au profil aérodynamique
Accompagnant par le fond, le Titanic
Et bien d’autres paquebots…
Et même si tu vas à confesse,
Avec l’envie de tout dire, c’est pas la peine
D’essayer de convaincre une sirène
Ou sur la terre, alerter la presse…
Tu as scellé ta promesse,
Mieux qu’une lettre aux sept cachets
L’eau profonde, garde ses secrets cachés
Comme celui du monstre du Loch Ness.
Les sirènes auraient plusieurs vies
Et surtout, les plus beaux chants
Pour nous, bien sûr, aguichants
Une fois entendus, toujours poursuivis.
Dans l’eau salée, les sons se propagent,
Ceux des dauphins,les chants des baleines
Et tu voyages, à en perdre haleine
Au berceau de la mer, en héros ou bien otage…
–
RC – 21 janvier 2013
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photo: JM Boutaud – petite Sirène de Copenhague – qu’on peut retrouver sur le site « jolie lumière » de JM B
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Florian Vesper – Sans titre

peinture: Jaw: ss titre 2009 Paris 200x300cm
Tahar Ben Jelloun – Quel oiseau ivre naîtra de ton absence ? — l’interrogation du soleil ( RC )
Quel oiseau ivre naîtra de ton absence
toi la main du couchant mêlée à mon rire
et la larme devenue diamant
monte sur la paupière du jour
c’est ton front que je dessine
dans le vol de la lumière
et ton regard
s’en va
sur la vague retournée
sur un soir de sable
mon corps n’est plus ce miroir qui danse
alors je me souviens
tu te rappelles
toi l’enfant née d’une gazelle
le rêve balbutiait en nous
son chant éphémère
le vent et l’automne dans une petite solitude
je te disais
laisse tes pieds nus sur la terre mouillée
une rue blanche
et un arbre
seront ma mémoire
donne tes yeux à l’horizon qui chante
ma main
suspend la chevelure de la mer
et frôle ta nuque
mais tu trembles dans le miroir de mon corps
nuage
ma voix
te porte vers le jardin d’arbres argentés
c’était un printemps ouvert sur le ciel
il m’a donné une enfant
une enfant qui pleure
une étoile scindée
et mon désir se sépare du jour
je le ramasse dans une feuille de papier
et m’en vais cacher la folie
dans un roc de solitude
–
.
Tahar BEN JELLOUN
–
Auquel j’ajoute mon « interrogation du soleil » – qui a été composée sans que je connaisse le texte ci-dessus,
En lissant, du dos de la main,
Un sable blond, – l’interrogation du soleil
Qui s’étale, en grains
Par millions, ni semblables, ni pareils
Et si ceux ci, recouvrent
L’haleine de mon corps
Qui fait racine, puis s’ouvre
En profondeur, de toutes ses pores
C’est un flux de la mémoire
En fouillant dans son ombre
A chercher dans le noir
Qu’aucune lumière n’encombre
Quand tu te penches, elle ressurgit soudain
Aux rayons de tes cheveux dénoués
Et qu’ au dessus de moi, planent tes mains
Porteuses du soleil, d’un désir avoué.
C’est ton regard, que le ciel achemine
Qui réchauffe le mien
Je n’en sais pas l’origine
Mais j’en connais les liens.
Vivre est une aventure,
On s’écarte des chemins tracés
Vers des sentiers peu sûrs
Mais où tu me fais me lancer
Et c’est encore un peu ivre
Encore en titubant
Que je vais te suivre
Emporté vers l’avant
Mes lèvres ont le goût des tiennes
J »ai laissé derrière, l’hiver des pensées
Un nouveau jour m’entraîne
………….. Et je n’ai plus de passé.
–
RC -21 octobre 2012
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Joël Bastard – La rivière aliquote

peinture : J Singer Sargent: le torrent aux truites du Tyrol
La rivière aliquote passera par les ouïes de la
truite sévère. Son eau peignée de branchies
comme pour le vent dans les genévriers.
Tout respire et défile. La rivière bue des roches.
L’haleine . Le souffle des bêtes à travers le jour
construit de pierres sèches.
extrait de CASALUNA, dont on peut trouver un autre extrait chez « terre de femmes »
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Michel Garneau – Scantate à Beckett
Michel Garneau, poète canadien, nous offre sa scantate à Beckett
Scantate à Beckett
Everything sopping wet under a black sky. Only bright spot a blackbird. Samuel Beckett Ussy-sur-Marne ( lettre à son oncle Jim et sa femme Peggy - 1968 ) ------------ tout est trempe sous un ciel noir éclairé par un seul merle j’ai laissé la ville derrière trop bruyante et même trop fière moi je me cherche du vide enfin ce qui lui ressemble je suis du bord du silence mais c’est pas la mort que j’aime j’ai laissé la ville derrière trop bruyante et même trop fière j’aime la vie en son haleine en son souffle et son battement je suis du bord du silence mais c’est pas la mort que j’aime -