Apnée des attentes – (RC )

photo: Andreas Franke
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Je ne vois plus qu’un vert uniforme
Ces créatures éloignées du soleil
Suspendues, sans d’autre lumière halo,
Que celle qu’elles émettent,
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Les danseurs de l’immobile,
Ludions
Portant leurs ampoules vacillantes,
Quelque part au-dessus,
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Si aucune brillance,
Ne vient indiquer,
L’extrémité close,
Le mur de verre,
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Tout un monde flottant,
Apnée des attentes,
Caresse molle des algues,
Et peu à peu s’incrustent,
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Au bastingage métallique,
Ancre, cordage enroulés,
L’épopée coquillages
D’embuscade sédimentaire.
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Elle vient sceller le destin,
Quand se referme le piège,
– Silence liquide.
Du gîte de l’épave,
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Déposée de biais,
Sur le sable trouble,
S’échappent encore des bulles,
Qui vont suivre, verticales
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L’histoire de l’air,
Pesant de son couvercle,
> D’atmosphères,
Loin , bien loin, au-dessus.
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RC – 15 septembre 2013
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Cribas – Sur la colline du 24ème siècle
Sur la colline du 24ème siècle
Le soleil monte sur la colline encore un peu rouge
Je sais que tout à l’heure
Mon ombre y dessinera à nouveau son tombeau
J’étais parti sans partir
Je reviens sans revenir
Mais je dois rejoindre les rayons brûlants de son halo
Je dois retrouver mon chemin qui a rencontré le chaos
Je dois retourner au bord du précipice
Tout au bord de ma voie suspendue
Je reviens là où continue le vide
Où s’est arrêtée la folie
Inerte et vaincue.
On en fait des détours et des tours
Avec ou sans aide on refait le grand tour
Mais on revient toujours sur le lieu du crime
Un lac, un parking, un souvenir
L’amour en morse gueule depuis l’antenne de secours
On revient toujours, après mille lieues, mille heures du même parcours
On revient effondré
Haletant et déjà à nouveau assoiffé
On revient une fois encore
Comme toujours
Sur la ligne de départ de ses amours dopées
On revient comme un cheveu blanc, gavé du gras des années de grisailles, un écheveau sans projets sur le fil du rasoir
Avec des mots, et dans sa bouche ses propres yeux,
Et dans sa poche
Des oreilles pleines de guerres
Comme des prières secrètes qu’on ne peut plus taire
Des sourdines qui tombent comme un cheval mort sur la soupe
Avec un os rongé jusqu’à la moelle dans la gueule, et un reste de tord-boyau somnifère qui n’a pas servi
On fait mine
En posant un genou à terre dans les starting-blocks
D’être déjà prêt,
C’est reparti pour un tour, une course dans la nuit sous la lune étoilée
Avec en point de mire une vie de moins en moins murgée
Sobre et contemplant la grande ourse
Comme inerte et vaincue
Et de calme gorgée.
La colline vire au bleu
Je sais que tout à l’heure
Je l’aurai entièrement remontée
Ma petite vie en retard
Mon existence d’esthète à remontrances automatiques
Cribas 07.07.2013
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Venise déserte en sa nuit tiède ( RC )
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D’anciennes façades décrépies, sont comme tachées,
Une végétation touffue croise ses bras verts pour cacher
Une grille que nul , depuis longtemps, n’a fréquentée,
Scellée par la rouille, – et dont personne n’a la clef
La fontaine est muette, l’eau ne chante plus sous le tilleul,
La vasque est presque remplie de feuilles en deuil,
Et de papiers, qui se soulèvent avec le vent
La place, désertée par l’été et les gens
On ne comprend pas où mènent ces escaliers
Qui s’élancent, puis, s’arrêtent par paliers
Vers une tour en partie détruite
Et que plus personne n’habite
La nuit est tombée, accompagnée par la lune
L’humidité s’étale, de la proche lagune
Le satellite, se double d’un halo
Qui se mire dans les flots
Du canal, aux reflets de vagues molles
Venant lécher de noires gondoles
Echouées, là, de biais, elles ont perdu leur emphase
Embarcations envahies par la vase…
De pâles lueurs tremblotent derrière les vitraux de l’église
Dans ce quartier un peu à l’écart, de Venise,
De briques et de marbres, les palais ont les pieds fourbus
Les murs qui s’écaillent, disent un prestige déchu.
La madone sculptée, au nez rongé, est toujours dans sa niche
Une fenêtre bouchée effeuille d’anciennes affiches
Indiquant des saisons passées les fêtes du Grand canal
Paillettes, danses et masques du carnaval…
Tout est silence à part une gerbe d’étincelles….
> D’une radio lointaine, parvient une tarentelle,
Et la brise déplace doucement ses voiles,
Dans un ciel de velours piqueté d’étoiles.
Où se traînent paresseusement quelques nuages
Dont le zodiaque ne prend pas ombrage
Même pas le verseau et Ganymède
– Toujours brillants dans la nuit tiède.
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RC – 7 juillet 2012

photo Olimpo
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