Ismaël – la page de Tunis
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la page de Tunis « est extraite d’une parution de la revue sic du collectif Dixit
Je n’ai d’autre chevelure, à tresser d’azur. Que celle de la nuit. Tombant, opaque, et malléable, sur le jasmin du mur. Son image. Le miroir n’est pas un miroir. S’il consent à la forme. Et la nuit, n’est pas nuit. Si elle ne tombe, que sur sa propre image. La mort est perpétuelle. Tresser la nuit. Briser le miroir. Ce n’est que faire trembler l’invisible. Ce n’est que chatouiller l’arbre, lorsque le désir du fruit cueille la faim. Déraciner la perpétuation,
en lieu et place, laisser l’inconnu germer. Le seul travail de la terre, qui vaille la peine d’oublier l’horizon.
Je n’ai aucun devoir de mémoire, sauf celui du rêve. Sauf le devoir de verser au sommeil, à boire, à se désaltérer, du nuage. Les nuits sont faites du même rêve exactement de la même manière, que les mers sont faites de la même eau. Le rêve du jour n’est pas un rêve, c’est la négation du rêve.
Peut-être la mémoire du rêve, est-elle le sommeil de l’altérité.
Peut-être que c’est le sommeil qui se meut dans le rêve, non le contraire.
(Démonstration) le v(i)oleur ne veut plus de moi. Un corps (en dé)coule, une inclinaison. Il (dé)laisse ma personne vidée de tout bruit, sur cette pente, ailleurs.(Réponse)Je suis ailleurs
Peut-être que les inconnus que nous croisons en rêve ne sont-ils pas imaginaires, mais qu’ils se sont perdus dans notre sommeil. Ou bien peut-être que c’est nous, qui nous sommes perdus dans leur sommeil, à eux. Peut-être qu’eux aussi nous prennent pour des personnages imaginaires.
Peut-être que l’homme qui a cherché toute sa vie, la femme qu’il a aimée en rêve, savait-il, lui, qu’elle était endormie, comme lui, qu’elle s’était éveillée, aussi. Peut-être espérait-il qu’elle le chercherait, aussi. Et qu’ils finiraient, par se perdre, l’un dans l’éclat, de l’autre.
Peut-être le rêve est-il l’au-delà, du feu.
Je n’ai pas d’étoiles, à éplucher. Elle ne m’a laissé, qu’une ombre, inhabitable, dans la bouche.
Un samedi à minuit et dix minutes.
Eric Dubois – entrelacs

peinture: Larry Rivers the last civil war veteran
ENTRELACS
Tu as fait Des bains de mémoire Dans les souvenirs
Tu t’es noyé Imperceptiblement Dans les non-dits
Tu as perdu Des amis Tu as glissé Dans les entrelacs
Désormais le présent S’octroie une pause & le passé
Temporise tes excès Dans les non-dits Tu pars à leur recherche
tu partages tes repas avec des absents tu bois à la santé d’inconnus
tu parles à des doubles qui n’en sont pas Tu as glissé
Dans les entrelacs Désormais le présent S’octroie une pause & le passé
Temporise tes excès qui n’en sont pas
Des bains de mémoire Tu en as les séquelles Des souvenirs
Tu n’en gardes que La quintessence
Sur les non-dits Tu gardes les distances Des souvenirs
Des amis Désespérément Tu pars à leur recherche
Tu as glissé Dans les entrelacs
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Extraits de «Estuaires» éditions Hélices collection Poètes ensemble
© Hélices éditions http://helices.fr
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