Ivan Blatny – Quatrième
Nouvelle parution en hommage à cet auteur tchèque, dont l’ambiance est celle de la fin de 2è guerre mondiale…
Quatrième
à Frantiek Halas
Un abandon sans borne, épaisse poussière,
Reposait sur les poutres et sur les pierres,
Un abandon sans borne, le jour baissait.
Un abandon sans borne, épaisse poussière,
Reposait sur les poutres et sur les pierres,
Un abandon sans borne, le jour baissait.
De rares flocons d’une neige maussade
Cinglaient les visages serrés dans les tramways,
En ville à nouveau grondait la canonnade.
Un abandon sans borne, poussière, friable,
Reposait sur les livres et sur la table,
Un abandon sans borne, le jour baissait.
Un abandon sans borne, poussière, friable,
Reposait sur les livres et sur la table,
Un abandon sans borne, le jour baissait.
La porte d’un immeuble, comme si souvent,
Livrait passage à un promeneur nocturne, lent,
– Et la neige lui cinglait le dos, en capilotade.
Page ouverte où écrivaient la fatigue, la peur et la
guerre,
Se tapissant dans les poutres et dans les pierres,
Un abandon sans borne, le jour baissait.
Page ouverte où écrivaient la fatigue, la peur et la
guerre,
Se tapissant dans les poutres et dans les pierres,
Un abandon sans borne, le jour baissait.
Et les visages serrés vie contre vie
N’y faisaient plus qu’un, point infime,
Tandis qu’en ville grondait la canonnade.
11 mars 1945
(traduction Erika Abrams, Éditions Orphée La Différence)
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voir mon article sur « les lieux »,
Ivan Blatny – les lieux
Ivan Blatny ( auteur tchèque )
fait partie de mes voyages- découverte…
lorsque je feuillette au hasard chez le libraire, l’univers de totaux inconnus… qui par la suite le deviennent moins… – et c’est souvent une autre approche de l’écriture et du texte, poétique ou moins, qui capte mon attention.
c’est en tout cas un poète peu connu, publié aux éditions de la Différence, collection Orphée 1992
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Les lieux que nous avons quittés continuent à vivre. Le cheval file, l’enfant crie, la mère ouvre la porte : « Ce n’est pas là, ce n’est pas là, alors je ne sais pas ce que c’est devenu. »
Ils cherchent. Ils cherchent quelque chose, s’agitent à travers le logis. Ils cherchent les lieux que nous avons quittés, les lieux où nous étions autrefois. Ils courent à la gare et pensent : la maison. La maison est restée. Où s’en vont-ils ?
A l’enterrement de la sœur. Pour toujours.
Chez le fils. La grand-mère reste. La grand-mère, ils ne l’emmènent pas. Ils laissent chez eux siffler Mélusine. L’horloge, ils ne l’emmènent pas. L’horloge sonne dans une pièce vide.