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Françoise Gérard – Arpèges


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peinture – Douanier Rousseau – bohémienne endormie sous la lune – 1897 Moma ( N York )

Si peu
trois mots
deux silences
le soupir de la lune
l’eau claire d’une nuit d’été
la chanson douce des étoiles
du bout des doigts sur la corde d’une guitare
dans le jardin parfumé de jasmin
quelques notes en cascade
éclaboussent les passants
en riant

voir le site de l’auteure


Jean Sénac- les belles apparences


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Le cœur à l’étroit
mes amis sommeillent
ils ont froid et les abeilles
feront un miel amer

Mon pays sourit aux touristes
Alger la Blanche dort en paix
vont et viennent les cars de police
la lèpre au cœur est bien gardée

Qui donc ira dénoncer
la grande amertume des ruches
le corps à l’étroit
les pauvres trichent avec le froid

Belle peau de douce orange
et ces dents de matin frais
la misère donne le change
ne vous fiez pas à tant de beauté
Ici on meurt en silence
sans trace au soleil épais
mais demain le soleil amer
qui voudra le goûter

Sous les jasmins le mur chante
la mosquée est calme et blanche
ô flâneur des longs dimanches
il y a grande merci

À la surface de la nuit
tas d’ordures sac et pluie

 

In Œuvres poétiques,  Actes Sud, 1999


Rien ne sera comme avant – ( RC )


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sculpture:  tête  géante  des jardins Boboli (Toscane ) provenance  site: http://www.lumieresdelombre.com

A même la fleur,
Qu’un frisson effleure,
Les effluves se respirent,
A la façon du soupir
du jasmin rose .
Sa métamorphose
se poursuit jusqu’à l’oubli,
Au parc des jardins Boboli.

Une tête géante surveille
Les allées du sommeil,
Et s’extrait dans la douleur,
Du rêve brisé du sculpteur,
comme si le temple détruit,
retournait à sa nuit.

Les racines farouches,
issues de vielles souches
entourent, monotones,
les anciennes colonnes
évoquant la figure de plantes :
le décor de feuilles d’acanthe,
ainsi précipité au sol, roulé
… des siècles s’étant écoulés .

La jungle des fougères
envahit la pierre.
Le jardin d’abondance
sombre d’indifférence.
Nous sommes vers Florence,
un cheval ailé s’élance,

mais reste attaché au sol,
comme un symbole,
dont l’empreinte désuète,
devenue muette
d’un rêve dissous,
s’enfonce peu à peu dans la boue.

Le lieu retourné à sa solitude,
affiche sa décrépitude.
On voit même dans les bassins,
pousser des arbres assassins.
Des restes de troncs
ayant sombré dans le fond.

Les statues renversées,
étalent leurs membres blessés.
Personne ne venant à leur rescousse,
que le parcours des mousses.
On lit dans la pierre,
(en quelque sorte leur chair),
le frisson d’en finir,
avec leur passé pour avenir.

Rien ne sera comme avant,
comme nous le raconte le vent.


RC – dec 2015


Ismaël – la page de Tunis


 »

photo John Finnan

photo John Finnan

la page de Tunis « est extraite  d’une  parution de la revue sic du collectif Dixit

Je n’ai d’autre chevelure, à tresser d’azur. Que celle de la nuit. Tombant, opaque, et malléable, sur le jasmin du mur. Son image. Le miroir n’est pas un miroir. S’il consent à la forme. Et la nuit, n’est pas nuit. Si elle ne tombe, que sur sa propre image. La mort est perpétuelle. Tresser la nuit. Briser le miroir. Ce n’est que faire trembler l’invisible. Ce n’est que chatouiller l’arbre, lorsque le désir du fruit cueille la faim. Déraciner la perpétuation,
en lieu et place, laisser l’inconnu germer. Le seul travail de la terre, qui vaille la peine d’oublier l’horizon.
Je n’ai aucun devoir de mémoire, sauf celui du rêve. Sauf le devoir de verser au sommeil, à boire, à se désaltérer, du nuage. Les nuits sont faites du même rêve exactement de la même manière, que les mers sont faites de la même eau. Le rêve du jour n’est pas un rêve, c’est la négation du rêve.
Peut-être la mémoire du rêve, est-elle le sommeil de l’altérité.
Peut-être que c’est le sommeil qui se meut dans le rêve, non le contraire.
(Démonstration) le v(i)oleur ne veut plus de moi. Un corps (en dé)coule, une inclinaison. Il (dé)laisse ma personne vidée de tout bruit, sur cette pente, ailleurs.(Réponse)Je suis ailleurs
Peut-être que les inconnus que nous croisons en rêve ne sont-ils pas imaginaires, mais qu’ils se sont perdus dans notre sommeil. Ou bien peut-être que c’est nous, qui nous sommes perdus dans leur sommeil, à eux. Peut-être qu’eux aussi nous prennent pour des personnages imaginaires.
Peut-être que l’homme qui a cherché toute sa vie, la femme qu’il a aimée en rêve, savait-il, lui, qu’elle était endormie, comme lui, qu’elle s’était éveillée, aussi. Peut-être espérait-il qu’elle le chercherait, aussi. Et qu’ils finiraient, par se perdre, l’un dans l’éclat, de l’autre.
Peut-être le rêve est-il l’au-delà, du feu.
Je n’ai pas d’étoiles, à éplucher. Elle ne m’a laissé, qu’une ombre, inhabitable, dans la bouche.
Un samedi à minuit et dix minutes.


Pierre Mhanna – Amour et silence .


image  - montage  perso  2012

image – montage perso 2012 à partir de document  de serguei Ivanov

 

Amour & Silence

( 12 petits textes  comme des haÏkai de Pierre Mhanna)… consultables  dans la langue  d’origine, sur son site…

————-

Silence cristallin,
au cœur d’une goutte de rosée
la fusion dans le ciel.

~ Cadence de silence –
Un troupeau de papillons
Brûlant dans mon âme.

~ Dans ton éclat de simplicité
coule ma vie
toi fleur de jasmin.

~ Silence crépusculaire,
ma vie luisante
dans la première étoile de la soirée.

~ Vaisseau de silence,
Que les cires d’un coeur vide
soient plus étendues que le ciel.

~ Comme l’aube
Cajole la fleur
Votre souffle dans mon coeur

~ Silence résonnant,
La dernière voix du crépuscule
fusion des gouttes de vin dans le ciel.

~ Disparus bientôt
ces nuages mouvants,
crépuscule du silence.

~ Soleil du matin,
chaque goutte de rosée
une fleur.

insouciant le papillon
au milieu des fleurs blanches,
un nuage dans le ciel.

~ ton parfum
Avec la brise de l’aube
M’appelait à la maison

~ Mes yeux
– deux étoiles arrosées
dans la mer de ton feu.

– (tentative de traduction – interprétation : RC )

 

 

LOVE & SILENCE

Crystalline silence,
the heart a dewdrop
melting in the sky.

~

Cadence of silence –
A flock of butterflies
Burning through my soul.

~

In your simple glow
my life flows
you jasmine flower.

~

Twilight silence,
my life shining
in the first evening star.

~

Vessel of silence,
The empty heart waxes
Wider than the sky.

~

As the dawn
Coaxes the flower
Your breath in my heart

~

Resonant stillness,
The last voice of dusk melting
Winedrops in the sky.

~

Soon to vanish
these moving clouds,
twilight silence.

~

Morning sun,
every dewdrop
a flower.

~

Carefree butterfly
amid the white flowers,
one cloud in the sky.

~

Your scent
With the dawn breeze
Calling me home

~

My eyes –
two stars doused
in the sea of Your fire.

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Li-Young Lee – Oreiller


 

art: détail de peinture de  Peter Vanderlyn  1730

art:     détail de peinture  de           Peter Vanderlyn       1730

 

 

 

Oreiller

Rien
que je ne puisse trouver là-dessous.
Des voix dans les arbres.
Les pages manquantes de la mer.
Tout
sauf le sommeil.

Et la nuit est une rivière
reliant les rivages du dire
à ceux de l’écoute.
Une forteresse
inviolée,
indéfendue.

Rien
qui ne puisse y être contenu :
fontaines obstruées
de boue et de feuilles,
habitacles de l’enfance.

Et la nuit commence
avec les doigts de ma mère
délaissant les fils noués
et dénoués
pour effleurer les motifs de notre histoire
à vif.

La nuit est l’ombre allongée
des mains de mon père
réglant l’horloge
pour la ressusciter.
Ou alors celle
de la pendule disloquée,
et des chiffres qui s’envolent.

Rien qui n’y ait trouvé sa place :
plumes élimées,
chaussures orphelines,
un alphabet en miettes.
Tout
sauf le sommeil.

Et la nuit commence
avec la première décapitation
du jasmin.
Son parfum captif débarrassé enfin
de la parure du deuil.


Pillow

There’s nothing I can’t find under there.
Voices in the trees.
The missing pages of the sea.
Everything but sleep.

And night is a river
bridging the speaking
and the listening banks.
A fortress,
undefended and
inviolate.

There’s nothing that
won’t fit under it :
fountains clogged with
mud and leaves.
The houses of my chilhood.

And night begins when
my mother’s fingers
let go of the thread
they have been tying and
untying
to touch toward our
fraying story’s hem.

Night is the shadow of
my father’s hands
setting the clock for
resurrection.
Or is it the clock
unraveled, the numbers
flown ?


Adonis – Damas


photo: Claire Brugnon – Damas

 

Damas, tu m’as fait signe

Je suis venu à toi, voix orpheline
Se nourrissant
Tissant sa parole crépusculaire

d’une langue maudite
Qui tapisse l’univers
Arrache la porte
de sa sagesse ancienne.

Je suis venu, porteur d’une étoile
d’un feu éloquent
Etoile, rends-moi les rois mages
Et toi, feu, dévaste cet univers
de feuilles et de vent.

Damas

Nombril de jasmin gravide
Qui déploie son arôme comme un toit
Et attend son nouveau-né.

Adonis  – ( Ali Ahmed Saïd Esber )

 


Nuit d’eden ( RC)


dessin – Edward Münch: baiser

Empire de la nuit
Des thés parfumés au jasmin
Ne comptent plus, les heures dans tes mains,
Celles qui ont fui

Et de quels mondes enchantés
Le rêve planétaire
En oubliant la terre
Et les moissons à planter…

Les arbres et leurs gousses,
Le contenu du tiède
Un grand  intermède
Celui de  la nuit douce,

Je m’appuie  sur ton sourire,
Une collision exquise,
Appuyée  d’indécise
Ce qu’il faut pour  ouvrir

Les ciels  emmêlés,
A cueillir les fruits
Aux portes de la nuit
–    Et les baisers scellés.

RC  – 14 février 2013

dessin: Aline Mori couple


Ismaël – la page de Tunis


peinture- graphisme: Bachès

 

 

 

 

 

 

la page de tunis                par ismaël

Je n’ai d’autre chevelure, à tresser d’azur. Que celle de la nuit. Tombant,
opaque, et malléable, sur le jasmin du mur. Son image. Le miroir n’est
pas un miroir. S’il consent à la forme. Et la nuit, n’est pas nuit. Si elle
ne tombe, que sur sa propre image. La mort est perpétuelle. Tresser la
nuit. Briser le miroir. Ce n’est que faire trembler l’invisible. Ce n’est que
chatouiller l’arbre, lorsque le désir du fruit cueille la faim. Déraciner la perpétuation,
en lieu et place, laisser l’inconnu germer. Le seul travail de la terre,
qui vaille la peine d’oublier l’horizon.

Je n’ai aucun devoir de mémoire, sauf celui du rêve. Sauf le devoir de verser
au sommeil, à boire, à se désaltérer, du nuage. Les nuits sont faites du même
rêve exactement de la même manière, que les mers sont faites de la même eau.
Le rêve du jour n’est pas un rêve, c’est la négation du rêve.
Peut-être la mémoire du rêve, est-elle le sommeil de l’altérité.
Peut-être que c’est le sommeil qui se meut dans le rêve, non le contraire.

Peut-être que les inconnus que nous croisons en rêve ne sont-ils pas
imaginaires, mais qu’ils se sont perdus dans notre sommeil. Ou bien
peut-être que c’est nous, qui nous sommes perdus dans leur sommeil, à
eux. Peut-être qu’eux aussi nous prennent pour des personnages imaginaires.

Peut-être que l’homme qui a cherché toute sa vie, la femme qu’il a aimée en
rêve, savait-il, lui, qu’elle était endormie, comme lui, qu’elle s’était éveillée,
aussi. Peut-être espérait-il qu’elle le chercherait, aussi. Et qu’ils finiraient, par
se perdre, l’un dans l’éclat, de l’autre.
Peut-être le rêve est-il l’au-delà, du feu.
Je n’ai pas d’étoiles, à éplucher. Elle ne m’a laissé, qu’une ombre, inhabitable, dans la bouche.

 

 

parution collectifdixit

 


Pierre Lieutaghi – la lumière close


peinture perso:       volcanologie 1984

Vous savez, la confiance est incroyablement tenace, elle s’effondre, et puis un jour, sans qu’on s’en rende compte, elle s’applique à faire l’inventaire des biens qui ont échappé à la tornade, ceux dont la banalité nous assure dans la traversée du monde. On se rend compte alors que les possessions de la paix sont bien plus vastes qu’on ne l’imaginait, qu’elles s’étendent jusque sous nos pas les plus ivres.
Peut-être bien que tout cela est inventé. Mais alors, que dire de l’amour ? Quand on le vit, on ne sait pas qu’on invente, on est dans l’illusion d’un jour à nous seul, pour nous seul, et l’on veut que l’autre, dont on attend la même illusion, y reconnaisse le sien.
Encore faut-il savoir éviter la rencontre avec un cœur de pierre, ça ne peut faire qu’une histoire aveuglante en dehors de toute métaphore, les pierres ne font pas la différence, surtout quand on leur a préparé depuis toujours cet ignoble creux où la pureté sans rire ni salive ni morsures ni cris imprime le canevas de toutes les pétrifications. Je me suis trompé sur la nature de la pureté, voilà tout.

Mais c’est fini, c’est fini, je suis seulement surexposé, les images véritables sont intactes, le ciel tellement sombre de midi, le jasmin, les bouvreuils qui sont comme des rêves de coquelicots, votre visage. Peut-être qu’un de ces matins, je me réveillerai et je verrai la nuit.
Peut-être aussi que cette tête finira par s’ouvrir entre des mains sans inquiétude et que l’excès de lumière s’en ira pour de bon, et alors il n’y aura plus de confusion entre la pierre et le cœur.
Au revoir.
Une dernière chose, quand on a ouvert ma valise, on a trouvé un morceau de géode emballé dans du papier journal, Paolo avait dû le glisser entre les vêtements à mon départ. J’ai senti des cristaux trapus, à six faces, à peu près sûrement du quartz.
J’ai demandé la couleur à Mathilde, elle m’a dit c’est noir, on dirait du jais. Même devant la lumière ? oui, même devant la lumière, il n’y a aucune transparence, en profondeur aussi c’est complètement noir.

Pierre Lieutaghi     la lumière close   –  un extrait  d’un texte publié  dans  « carnets de campagne »