Jean-Claude Xuereb – Ggantija
photo – cercle mégalithique de Loch Buie – Ecosse
Peut-être un jour la profondeur ignorée d’une caverne dégorgera-t-elle les reliefs d’animaux fabuleux égarés en lamine sur les débris rocheux d’une terre engloutie ?
Des hommes transportant leur frêle savoir dans des pots de terre échouèrent leur barque sur un rivage boisé. La subsistance une fois assurée, fut dressé en Heu de sacrifice et d’offrande un cercle de mégalithes qu’aucune force humaine en sa nudité ne saurait mouvoir. Des cultes y furent célébrés dont le sens s’est perdu. Les dieux se sont succédés, tour à tour sommés de répondre à l’obsédant questionnement.
Et voici que nous errons parmi les ruines illisibles de l’avenir, aussi désarmés devant la mort que ceux qui nous précédèrent dans l’oubli
Jean-Claude Xuereb – Nadur
photo perso – Ardèche
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extrait de la SUITE GOZITANE (fragments)
NADUR
L’étranger qui voudrait pénétrer dans l’une de ces demeures n’aurait nul besoin d’en forcer la porte. Les clés reposent à l’extérieur sur la serrure de l’entrée. Les occupants trouveraient incongru que quelqu’un, mû par un réflexe précautionneux, les leur rapportât.
Ingénuité ou fatalisme ? Sans doute entendent-ils plutôt signifier qu’il demeurent fidèles à une tradition d’hospitalité, tout en invitant le passant, libre de s’en prévaloir, à n’en point abuser
Persistance de symboles au seuil de ces maisons dont un dauphin figure le heurtoir.
Et si la peur, qui ailleurs arme les verrous, n’avait d’autre effet que d’exacerber jusqu à l’effraction la hâte de posséder et le goût de détruire…
Au cours de notre quête d’introuvables registres, une porte entrouvre la pénombre sur un couloir au glacis de silence.
L’air raréfié retient ici la respiration d’êtres dont le corps étiolé ne doit guère plus peser que l’âme.
Ils nous détaillent leurs maux à voix basse.
Sur le marbre de la cheminée, statuettes et images pieuses se pressent autour de portraits surannés.
Deux veilleuses à la flamme ivre d’huile achèvent de se consumer au pied d’une madone Nous avons hâte d’aller boire à nouveau la brûlure du soleiL
D’autres façades ne nous retiennent pas : celles qui arborent, à l’effigie du kangourou, le luxe arrogant de fortunes australiennes, dans l’étrange proportion d’un îlot à un continent.
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