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Norge – En forêt


Image
peinture Erich Heckel-  chemin forestier 1914. Hannover. Sprengel Museum

La fille au garçon
Parlait de façon
Si douce.

On dirait sous bois
Un petit patois
De source.

La main jeune d’elle
En celle de lui
Gîtant

Si frêle en son nid,
C’est une hirondelle-
Enfant.

Le meilleur de Dieu,
Des temps et des lieux,
C’est eux.

Ineffable, étrange
Façon loin des cieux
D’être anges.

Ne bougez plus, même
Pour baiser leur front,
Comètes.

Ça vaut bien la peine
Que les choses rondes
S’arrêtent !

J’exagère ? Ô doux,
Ce lit de fougères,
C’est tout !

Cet heureux cénacle
Est le seul miracle
Au monde.

L’amie et l’amant,
Tout le firmament
Autour !

Grondez-le, tambours :
On ne vit que pour
L’amour !


Eugenio de Andrade – Jeune est la main


 statue  de Gudea ,art sumérien - 2000 av JC

statue de Gudea ,art sumérien – 2000 av JC

 

 

Jeune est la main sur le papier
ou sur la terre !
Jeune et patiente : quand elle écrit
et quand au soleil
elle se transforme en caresse.


Jean Sénac – Nicolas de Staël


peinture;               Nicolas de Staêl:                    paysage marine     1955

 

 

NICOLAS DE STAËL

Vous êtes mort, je ne sais rien de la mort des hommes,
rien de la goutte d’eau qui renverse la figure et la dilue en Dieu.

Dieu lui-même qu’est-il, le néant ou la roche ?
la structure de l’ombre, le suprême reproche,
et peut-être à peine notre interrogation ?

Dieu n’est-ce pas la voix de ma mère qui tremble
quand le dernier arbre rassemble
ses fruits,
quand la misère souterraine
délie le dernier bout de laine
et tout de go nous sommes nus ?

Tout de go il fait nuit
et sur nos cœurs les gens dans la détresse
abandonnent leurs graffiti.

Vous êtes mort, Nicolas de Staël,
et je ne connais rien de la mort des hommes !

Sur la toile le rouge et le noir répercutent
l’armature des ténèbres
un lit où l’appétit funèbre
du jour
tourne, tourne à nous rompre les vertèbres !

Le soleil sur la peau des gisants se retire…
Nicolas de Staël, vous aimiez tant que cela la vie ?
tant que cela pour la briser
sans même un cri ?

Ceux qui se tuent se tuent dans le silence
comme un petit enfant qui fronce les paupières
et s’en va.

Les uns sont des oiseaux de roche,
les autres, oh nul ne les approche
dans le grand espace alarmés !

Nicolas de Staël, le jaune vous avait-il lâché ?

Un rien suffit, un rien quand la couleur s’insurge,
on dit «adieu, adieu Panurge »
et l’on remonte au premier signe écrit.

Mais dans le cœur, dans le cœur, qui connaît les dimensions de la Merci ?

JEAN SENAC