Maurice Henry – la doublure de la nuit
Peinture: P Bonnard – le cabinet de toilette
Tes yeux ce ne sont pas tes yeux mais la doublure de la nuit
tes mains ce ne sont pas tes mains mais une virgule à collerette
tes cuisses ce sont des hélices pour chasser le mal de dents
et tes dents justement c’est un arbre dont les racines tiennent dans leurs mains mes oreilles
Ta chevelure pleut sur mes paupières quand il fait beau
tes pieds de suie fraîche descendent des cintres lorsque j’appelle un taxi
Sur tes ongles poussent se développent et se multiplient des plantes qui sont mes joues
Avec tes rubans tu lies nos étreintes et avec tes genoux c’est mon nez que tu nourris
Tes lèvres ce ne sont pas tes lèvres mais un troupeau de bœufs sur les pâturages de mon sang
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Pierre Louys – Les yeux
Larges yeux de Mnasidika, combien vous me rendez heureuse quand l’amour noircit vos paupières
et vous anime et vous noie sous les larmes.
Mais combien folle, quand vous vous détournez ailleurs, distraits par une femme qui passe
ou par un souvenir qui n’est pas le mien.
Alors mes joues se creusent, mes mains tremblent et je souffre…
Il me semble que, de toutes parts, et devant vous, ma vie s’en va.
Larges yeux de Mnasidika, ne cessez pas de me regarder !
ou je vous trouerai avec mon aiguille et vous ne verrez plus que la nuit terrible.
Pierre LOUYS « Les Chansons de Bilitis » (Arthème Fayard)
Arthemisia – le néant blanc
Pierre La Paix – Sublime retour
Les déserts des bonheurs oubliés,
Si larges, si veufs… si neufs !
J’ai cherché dans la nuit de l’oubli,
Des sourires tiens
Que l’absence avait emportés.
Le silence imprudent de ton départ
A balafré sur les atomes des jours
Les regrets fanés,
Les secrets profanés
Que le temps effaçait mal…
Mais à l’espoir tenace de te revoir,
Mon cœur a cru.
Et au clair des lunes sans toi,
J’ai souvent chanté le refrain
Unique qui finissait nos serments.
Fou, j’ai rédigé
«Dans le murmure de toi »
Le psaume accompli
Qui confirmait l’adieu douloureux.
Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts
Dis-tu ?
Mais celle de mes yeux réclame encore
Le frou-frou de tes joues câlines
A l’insu des muets matins,
L’aube toute affolée de toi
T’a ramenée revivre
Le printemps heureux
Qui nous manquait tous deux.
Tremblants sous l’effet du retour,
Refusant d’accepter l’impossible
Nous avons redessiné Cupidon
Avec les doigts d’Aphrodite
Et sa flèche sans douleur nous a piqués.
Reste avec moi cette nuit…
Reste avec moi cette vie…
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Pierre La Paix
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Profondes clameurs 2011
* vous pouvez retrouver « sublime regain » à ce lien
http://www.facebook.com/note.php?note_id=255307977835321
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Ombre et contrevents – Je te peindrai des ciels
Du blog et de l’écriture d’Adeline chez « Ombre et contrevents »
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Je te peindrai des ciels
rien que des ciels
avec parfois
un arbre nu
ou quelques mâts
pour dessiner des lignes
des lettres floues
tu y liras ce que je crois
entendre
sans doute
un écho déjà lointain
le vent rougira mes joues et mes pensées
un nuage d’anthracite sera lourd de regrets
ou d’inquiétude
Mais si tu viens
pour un seul de tes sourires ébauchés
je reprendrai la palette pour ajouter un soleil
A éblouir la mer
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