D’où partaient les navires – ( RC )
Il y a un port d’où partaient des navires,
( en tout cas, on voit une jetée
qui s’avance, en briques descellées,
d’un timide assaut vers le large,
où le gris s’étale, indifférent ) .
L’endroit est déserté,
de gros anneaux sont rouillés.
Peut-être est-ce le reste d’une ville
se prolongeant au-delà,
engloutie petit à petit,
malgré son orgueilleuse suffisance,
colosse aux pieds d’argile,
dont le corps plonge aussi
dans le sommeil de ce qui a été.
Seules veillent les mouettes.
Il y a un port d’où partaient des navires,
on peut le penser.
Mais , attirés par le lointain,
derrière la ligne pâle de l’horizon ,
ils ne sont jamais revenus,
emportant les derniers habitants
de la cité délaissée,
peu à peu lézardée.
Elle finit par sombrer
comme un de ces vaisseaux
mal entretenus,
où l’eau finit par se faufiler
partout entre les rues .
Seul, un promeneur , venu de nulle part …
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RC – mai 2016
Mémoire de grandes ailes blanches – ( RC )
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A ne pas gagner l’ombre,
Et les étés enfuis,
Sur la longue plage du temps,
Je te suis,
Et te vois de loin,
Marcher toute seule, sous la pluie,
Il y a les îles,
Fouettées par les embruns,
Les perles d’eau salée sur ton visage,
Les galets luisants , glissant sous mes pas,
Et le vent qui t’accompagne,
Avec les odeurs du large.
De grands oiseaux blancs planent en tournant,
Et se rappellent des instants soleils,
Du sable épousant les courbes de ton corps,
Les coques des voiliers aux couleurs vives,
L’air vif, faisant claquer les voiles
Et empli du parfum des orangers.
Bien sûr la Normandie, au pied des falaises,
Est loin de l’Italie,
La lumière se dissimule derrière les nuages,
Comme le bonheur approché,
Mais reste à portée d’elles,
Si j’étais porté moi-même,
Par ces grandes ailes blanches.
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RC – 12 septembre 2013
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La mer, que l’on voit danser ( RC )

peinture : Georgia O’Keefe
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La mer, que l’on voit danser
Et se jeter sur les rochers, encore
Et encore, comme des chiens voraces
Sur ce qu’il reste de terre
A dissoudre et avaler, en taisant le temps
– Qui s’étire, à faire des demains,
Les ressacs violacés
De profondeurs de nacre,
Les chevelures d’algues affolées
Au milieu de l’écume.
–
Le sable fauve, participe à ce destin..
Et on ne sait, s’il appartient encore
A la terre, ou au liquide
Ou l’écume du temps, portée des courants
Et des vents, jaloux des éléments ;
Il se tisse en cordons blonds,
S’accroche en dunes, aux reliefs,
Reliant , le temps d’une marée,
Les cachant,
Au gré de ses sanglots,
Tout un monde, …. loin de la surface.
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Ce large, – si large
….. Qu’embrassent les courants
A l’écart des légèretés d’atmosphères
Où même la lumière se fait discrète,
Au sein de l’épaisseur secrète
Que parcourent rarement les hommes,
Cuirassés de combinaisons et scaphandriers
Où évoluent des bancs de poissons chatoyants
Aux détours de plages et rochers, ……… posés là
Sur le fond, – …..et les épaves aussi,
– Sentinelles inutiles d’une autre époque.
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RC 23 avril 2013
mince ( RC )
Oui, on en veut à mon aspect
Peu de ventre, peu de fesses
C’est que je ne suis pas bien épais
Même que je manquerais de graisse
Ce serait peut-être plus confortable
Mais, même pour un homme
Aux coussinets adorables
Je me vois mal être un bibendum
C’est peut-être un fantasme
Ce qu’on voudrait que je sois
Je ne déchaîne pas les sarcasmes
N’ayant toujours pas pris de poids…
Ma maîtresse qui est maligne
M’interroge, et me tance
Et voudrait que ma fine ligne
Provoque la balance
Que je sois plus costaud
Et donc aussi plus large
Du ventre et des abdos
Mais y a encore d’la marge
C’est sûr qu’à la pesée
De la balance, l’aiguille
Je ne vais pas l’exploser
Quand je me déshabille
– Tu verras à quarante ans !
( c’était une prévision)
– A cet âge, grossissent les gens !
Disait mon père ( prédiction)…
Or, en lecture d’avenir
Je peux le contester
Pas de soupirs, mais sourires
Car mince, je suis resté.
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RC 17 avril 2012
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